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Décisions

Cass. com., 17 décembre 2013, n° 12-27.213

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

Me Haas, SCP Thouin-Palat et Boucard

Versailles, du 27 sept. 2012

27 septembre 2012

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 27 septembre 2012), rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 6 décembre 2011, pourvoi n° 10-20. 262), que, dans l'instance d'appel opposant les sociétés Nexity et Neximmo 14 (les sociétés) à M. X... sur la fixation de sa rémunération pour l'exercice de ses fonctions de président de la société par actions simplifiée Neximmo 14, les sociétés ont déposé des conclusions aux fins de révocation de l'ordonnance de clôture ; que, par ordonnance du 6 mai 2010, le conseiller de la mise en état a refusé d'accueillir cette demande et, par arrêt 17 juin 2010, la cour d'appel a condamné la société Neximmo 14 à payer à M. X... une indemnité de 200 000 euros au titre de son mandat ; qu'après l'annulation de cet arrêt par voie de conséquence de la cassation de l'ordonnance du 6 mai 2010, M. X... a, devant la cour de renvoi, demandé, notamment, la condamnation solidaire des sociétés à lui payer la somme de 250 000 euros à titre d'indemnité de rémunération ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable le moyen nouveau soulevé par les sociétés, dit que la décision de l'associé unique du 1er février 2010 avait valablement fixé à 10 000 euros la rémunération de M. X... pour ses fonctions de président de la société Neximmo 14 et de l'avoir débouté des demandes formées à titre d'indemnité de rémunération et de dommages-intérêts pour le travail accompli, ainsi que pour procédure abusive, alors, selon le moyen :

1°/ que le jugement qui tranche une partie du principal a l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; qu'en se bornant, pour refuser de considérer que l'arrêt du 22 octobre 2009 avait autorité de la chose jugée, à relever que les parties avaient la possibilité de soulever des moyens nouveaux après un arrêt avant-dire droit, après avoir constaté que cet arrêt avait jugé, dans son dispositif, que la société Neximmo 14 était redevable envers M. X... d'une indemnité au titre de son mandat de président de cette société, ce dont il résultait que l'arrêt contenait une disposition définitive ayant autorité de la chose jugée, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 du code civil ;

2°/ que si l'autorité de la chose jugée est attachée au seul dispositif d'une décision de justice, le juge, appelé à se prononcer sur les suites d'une décision, peut s'appuyer sur les motifs de celle-ci pour en éclairer la portée de son dispositif ; qu'en s'abstenant d'apprécier, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée par les conclusions d'appel de M. X..., le dispositif de l'arrêt du 22 octobre 2009 à l'aune de ses motifs, ce afin de déterminer si le principe d'une fixation judiciaire de la rémunération de M. X..., en cas d'échec de la médiation, était ou non compris dans le dispositif de la décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 du code civil ;

3°/ que, dans ses conclusions d'appel signifiées le 7 juin 2012, M. X... soutenait que les sociétés Neximmo 14 et Nexity avaient, dans le cadre de la procédure ayant abouti à l'arrêt avant-dire droit du 22 octobre 2009, reconnu aux juges du fond le pouvoir de déterminer la rémunération de M. X... ; qu'en considérant que la rémunération de M. X... pouvait être valablement fixée par une décision unilatérale de la société Nexity, intervenue le 1er février 2010, sans répondre au moyen déterminant tiré de ce que cette dernière s'était contredite en ayant, dans la procédure avant-dire droit, reconnu qu'une telle rémunération devait être fixée par le juge, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que si le juge ne peut se substituer à l'organe légalement ou statutairement compétent pour fixer la rémunération du dirigeant, il en va autrement lorsque cet organe a été invité à se prononcer sur ce point et qu'il a refusé d'allouer une quelconque rémunération au dirigeant ; que, dans pareille hypothèse, le dirigeant peut valablement solliciter du juge qu'il détermine sa rémunération et cette saisine du juge emporte dessaisissement de l'organe statutairement compétent ; qu'en jugeant qu'elle ne pouvait se substituer à l'associé unique qui avait, par une décision du 1er février 2010, fixé la rémunération de M. X..., après avoir pourtant constaté que cet associé avait, par une décision du 30 juin 2005 antérieure à la saisine des juges du fond, expressément refusé toute rémunération à l'intéressé au titre de son mandat social, ce dont il résultait qu'il avait été dessaisie de son pouvoir de fixation, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;


Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel n'a pas remis en cause le droit de M. X... de percevoir une rémunération au titre de la présidence de la société Neximmo 14 que lui a irrévocablement reconnu l'arrêt du 22 octobre 2009 et qu'en énonçant que cet arrêt était avant dire droit, elle n'a nécessairement visé que la partie de son dispositif ayant ordonné une médiation ;

Attendu, de deuxième part, que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; que c'est donc à bon droit que, pour considérer comme valable la décision prise le 1er février 2010 par l'associé unique de la société Neximmo 14 de fixer à 10 000 euros la rémunération de M. X... pour ses fonctions de président de cette société, la cour d'appel ne s'est pas référée aux motifs de l'arrêt du 22 octobre 2009 ;

Attendu, de troisième part, qu'ayant énoncé qu'après un arrêt avant dire droit les parties ont la possibilité de soulever des moyens nouveaux dès lors que, comme en l'espèce, ils ne se heurtent pas à une ordonnance de clôture et retenu que le moyen fondé sur la décision de l'associé unique en date du 1er février 2010, soulevé par les sociétés, était recevable, la cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument omises ;

Attendu, enfin, que la décision des organes sociaux légalement ou statutairement compétents de refuser, contrairement aux statuts, tout droit à rémunération au président d'une société par actions simplifiée n'a pas pour effet de les dessaisir au profit du juge, qui ne peut se substituer à eux pour fixer cette rémunération ; qu'après avoir retenu que la décision du 1er février 2010 était régulière et ne comportait aucun abus, la cour d'appel a exactement déduit qu'elle ne pouvait la modifier en se substituant à la société Nexity, associée unique et statutairement compétente ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.