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Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. soc., 8 juillet 2022, n° 21/00315

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacour

Conseillers :

M. Calbo, M. Police

Avocats :

Me Alquier, Me Sandrin

CA Saint-Denis de la Réunion n° 21/0031…

7 juillet 2022

Exposé du litige

LA COUR :

Exposé du litige :

Par requête enregistrée le 16 avril 2020, M. [E] a saisi le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion en contestation d'une décision implicite de rejet de la commission de recours amiable de la Caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) relative à la validation d'une mise en demeure en date du 10 octobre 2019, portant sur la somme de 13 123 euros. Par jugement du 19 janvier 2021, le tribunal a notamment validé la mise en demeure et condamné M. [E] au paiement de la somme de 13 123 euros, outre 800 euros à titre d'amende civile et 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. M. [E] a été placé sous sauvegarde de justice par jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis-de-la-Réunion rendu le 9 décembre 2020, la Selarl [W] [G] étant désignée en qualité de mandataire judiciaire

Appel du jugement du tribunal judiciaire a été interjeté par M. [E] le 19 février 2021.

Moyens

Vu les conclusions notifiées les 25 novembre 2021 et 5 avril 2022 par M. [E], oralement soutenues à l'audience ;

Vu les conclusions notifiées le 26 avril 2022 par la caisse, oralement soutenues à l'audience ;

Citée à sa personne pour avoir apposé son timbre sur l'avis de réception de la convocation adressée par le greffe, la Selarl [W] [G] n'a pas constitué avocat.

Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées ainsi qu'aux développements infra.

Motivation

Sur ce :

En la forme :

Vu l'article 474 du code de procédure civile ;

La Selarl [W] [G] ayant été citée à sa personne, il sera statué par arrêt réputé contradictoire.

Le jugement rendu le 9 décembre 2020 par le tribunal mixte de commerce qui a placé M. [E] sous sauvegarde de justice n'a emporté aucun dessaisissement. L'appel interjeté par M. [E] seul, formé dans le délai utile, est par conséquent recevable.

Sur la saisine préjudicielle de la Cour de justice de l'Union européenne :

Selon l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le juge national saisi, s'il estime qu'une décision sur l'interprétation d'un traité ou des actes pris par les institutions de l'Union est nécessaire pour rendre son jugement, peut demander à la Cour de statuer sur cette question. Si le renvoi préjudiciel devant la CJUE est obligatoire lorsque la question est soulevée devant une juridiction dont la décision n'est pas susceptible d'un recours juridictionnel en droit interne, tel n'est pas le cas en l'espèce, le présent arrêt étant susceptible de pourvoi.

En outre, il sera relevé, d'une part, que selon l'article 2, d) de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 2006/2004 du Parlement et du Conseil, on entend, aux fins de la directive, par « pratiques commerciales des entreprises vis-à-vis des consommateurs », « toute action, omission, conduite démarche ou communication commerciale, y compris la publicité et le marketing, de la part d'un professionnel, en relation avec la promotion, la vente ou la fourniture d'un produit aux consommateurs » ; d'autre part, que le recouvrement selon les règles d'ordre public du code de la sécurité sociale des cotisations et contributions dues par une personne assujettie à titre obligatoire au régime social des travailleurs indépendants ne revêt pas le caractère d'une pratique commerciale au sens des dispositions sus-rappelées et n'entre pas, dès lors dans le champ d'application de la directive.

En conséquence la demande sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la régularité de la mise en demeure :

L'omission des mentions prescrites par Les articles L. 100-1 et suivants du code des relations entre le public et les administrations n'affectant pas la validité de la mise en demeure prévue par l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale, dès lors que celle-ci mentionne la dénomination de l'organisme qui l'a émise, ce qui est le cas en l'espèce, la mise en demeure litigieuse portant indication de ce qu'elle a été délivrée par la caisse, dont l'adresse est précisée, le moyen de l'appelant excipant de l'absence des mentions prévues par la loi est inopérant.

La mise en demeure adressée par un organisme de sécurité sociale, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit lui permettre d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de ses obligations, en application des dispositions de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale.

Tel est le cas en l'espèce, la mise en demeure délivrée le 10 octobre 2019 précisant la cause des sommes réclamées à M. [E], au titre des cotisations invalidité-retraite, retraite de base, retraite complémentaire, allocations familiales, CSG, CRDS, maladie, formation professionnelle du troisième trimestre de l'année 2019, leurs montants respectifs, ainsi que les majorations de retard, générant une créance de 13 123 euros au titre des cotisations provisionnelles, en ce compris des majorations de retard à concurrence de 648 euros. M. [E], qui ne justifie pas avoir procédé à la déclaration de ses revenus professionnels auprès de la caisse, n'est pas fondé à critiquer le caractère provisionnel des cotisations ainsi appelées.

Les mentions de la mise en demeure litigieuse permettaient donc à M. [E] de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation. En conséquence, le moyen de nullité tiré de l'absence d'information du cotisant sur la nature, la cause et l'étendue de l'obligation est inopérant. La mise en demeure sera dès lors validée pour la somme de 13 123 euros et le jugement confirmé en ce qu'il a condamné M. [E] au paiement de ses causes.

Sur les dommages-intérêts :

M. [E], qui soutient que la caisse est fautive, sans toutefois le démontrer, sera en conséquence débouté de ce chef.

La caisse reproche à M. [E] l'utilisation des voies de recours à des fins dilatoires et dans l'intention de se soustraire à son obligation de s'acquitter de ses cotisations lui causant un préjudice.

Or, le retard mis au paiement des cotisations est compensé par leur majoration. En outre, la caisse ne démontre pas que l'usage d'une voie de recours par M. [E] aurait dégénéré en abus du droit d'ester. La caisse sera déboutée de sa demande

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Déclare l'appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 19 janvier 2021 par le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, sauf en ce qu'il a condamné M. [E] au paiement d'une amende civile de 800 euros ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une amende civile ;

Y ajoutant,

Rejette les demandes de M. [E] ;

Rejette la demande de dommages-intérêts de la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion ;

Condamne M. [E] à payer à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.