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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 24 mai 2022, n° 21/07444

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

KBC Bank N.V (SA), KBC Commercial Finance NV (Sté)

Défendeur :

Rogeau (ès qual.), KBC Bank NV (SA), MsDental (SAS), KBC Commercial Finance NV (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Valay-Briere

Conseiller :

Mme Bonnet

Avocats :

Me Dupuis, Me Laurent, Me Ferrandin, Me Thomas, Me Lafon, Me Lenotre

T. com. Versailles, du 7 déc. 2021, n° 2…

7 décembre 2021

La SAS Msdental qui est spécialisée dans le développement, la commercialisation et la distribution de produits et services à destination des professionnels de santé du secteur dentaire, a conclu le 29 avril 2018 un contrat d'affacturage avec la société KBC commercial finance NV, filiale d'affacturage de la société KBC bank NV, sociétés de droit belge ; elle a à la même période ouvert un compte dans une filiale française de la société KBC bank.

La société KBC bank a accepté de mettre en place un crédit temporaire par découvert en compte de 500 000 euros du 23 mai 2019 jusqu'à son annulation stipulée au 30 juin 2020.

Sur requête de la société Msdental déposée le 19 juin 2020, le président du tribunal de commerce de Versailles a ouvert le 1er juillet 2020 une conciliation, la Selarl Ascagne AJ étant désignée en qualité de conciliateur.

Par jugement en date du 8 septembre 2020, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Msdental, désigné la Selarl Ascagne AJ, prise en la personne de maître Lavoir, en qualité d'administrateur judiciaire et la Selarl ML conseils, prise en la personne de maître Cosme Rogeau en qualité de mandataire judiciaire, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er juin 2020. Le 3 mars 2021, la procédure a été convertie en liquidation judiciaire.

La Selarl ML conseils, ès qualités, qui, par assignation en date du 23 décembre 2020, a notamment engagé une action pour solliciter, sur le fondement de l'article L.632-2 du code de commerce, l'annulation des remboursements de la ligne de découvert au profit de la société KBC bank entre le 29 juin 2020 et le 7 juillet 2020 et obtenir la condamnation de cette dernière en paiement, a demandé au ministère public, par courrier du 16 juillet 2021, de saisir le tribunal aux fins d'obtenir la levée de la confidentialité des opérations de conciliation.

Par requête datée du 19 août 2021, le ministère public a demandé au tribunal de commerce de Versailles, sur le fondement des articles L. 621-1 et L. 641-1 du code de commerce, d'ordonner la levée de la confidentialité attachée aux opérations de conciliation intervenues avant le jugement de redressement judiciaire et la communication par le conciliateur des rapports, échanges et documents en sa possession, considérant qu'ils avaient perdu leur caractère confidentiel.

Par jugement contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 7 décembre 2021, le tribunal de commerce de Versailles a :

- dit que les moyens soulevés par les sociétés KBC bank et KBC commercial finance ne sont pas retenus ;

- ordonné au conciliateur de lui communiquer les pièces et actes relatifs à la procédure de conciliation et ce, avant le 18 janvier 2022 ;

- s'est réservé la faculté, le cas échéant, de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 131-1 du code de procédure civile ;

- renvoyé l'affaire au 1er février 2022 à 14 heures afin qu'il soit statué sur les suites à donner à cette communication.

Par déclarations des 16 et 17 décembre 2021, qui ont été jointes, les sociétés KBC bank NV et KBC commercial finance NV ont interjeté appel de ce jugement. Les déclarations d'appel ont été signifiées le 14 janvier 2022 par acte d'huissier remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile à la société Msdental, qui n'a pas constitué avocat.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 3 mars 2022 et signifiées le 8 mars 2022 à la société Msdental par acte d'huissier remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, la société KBC bank demande à la cour de:

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

y faisant droit

- annuler ou, en tout état de cause, infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

et statuant à nouveau,

à titre principal,

- déclarer irrecevable la demande d'application de l'article L. 621-1 alinéa 6 en ce qu'elle est portée désormais par le seul liquidateur judiciaire, suite à l'avis du parquet Z… ;

à titre subsidiaire,

- rejeter la requête déposée par le procureur en date du 19 août 2021 ;

Plus subsidiairement, pour le cas où il serait fait droit à la demande d'application de l'article L.621-1 alinéa 6,

- préciser que les pièces et actes relatifs à la conciliation ne seront communiqués qu'au tribunal et au ministère public, à l'exclusion de tout autre dont le mandataire liquidateur, et que leur production dans une quelconque instance demeurera irrecevable ;

- condamner la société ML conseils, ès qualités, à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La société KBC commercial finance, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 7 février 2022 puis signifiées le 8 mars 2022 à la société Msdental par acte d'huissier remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, demande à la cour de :

à titre principal,

- annuler et/ou réformer le jugement en toutes ses dispositions ;

- rejeter toute application de l'article L. 621-1, alinéa 6 ;

à titre subsidiaire, si la juridiction venait à faire application de cette disposition,

- préciser qu'en application de ce texte, seul le tribunal, et non le liquidateur, recevra communication des pièces, actes et échanges de la conciliation, lesquels demeureront confidentiels et irrecevables comme élément de preuve à l'encontre des participants à la procédure de conciliation.

La Selarl ML Conseils, ès qualités, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 17 mars 2022, les précédentes ayant été signifiées le 10 mars 2022 à la société Msdental par acte d'huissier remis selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, demande à la cour de :

- débouter la société KBC bank de sa demande d'irrecevabilité et de l'ensemble de ses demandes;

- débouter la société KBC commercial finance de l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer la décision en ce qu'elle a ordonné au conciliateur de communiquer au tribunal les pièces relatives à la procédure de conciliation ;

y ajoutant,

- juger que le tribunal décidera de l'opportunité de communiquer tout ou partie de ces pièces afin qu'elles soient librement discutées dans le respect du contradictoire et dans le souci de la tenue d'un procès équitable, dans le cadre des deux procédures opposant les parties et pendantes devant le tribunal de commerce de Versailles ;

- condamner solidairement les sociétés KBC bank et KBC commercial finance au paiement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les sociétés KBC bank et KBC commercial finance aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans son avis notifié par RPVA le 15 février 2022, le ministère public demande à la cour d'infirmer le jugement.

Il a oralement présenté des observations à l'audience sur la fin de non-recevoir soulevée par la société KBC bank, les parties ayant eu la possibilité d'y répondre.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 mars 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Il sera relevé en préalable que les appelantes ne développent aucun moyen dans les motifs de leurs conclusions à l'appui de leur demande d'annulation du jugement, leurs moyens étant uniquement présentés aux fins d'infirmation ou de réformation du jugement.

Aucun moyen n'étant soulevé ou susceptible d'être relevé d'office, il convient de déclarer l'appel des sociétés KBC bank et KBC commercial finance recevable.

Sur la fin de non-recevoir invoquée par la société KBC bank :

A titre principal, la société KBC bank, au visa des dispositions de l'article 561 du code de procédure civile, fait valoir qu'il appartient à la cour, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer à nouveau en fait et en droit sur la demande d'application de l'article L. 621-1 alinéa 6, la cour devant notamment apprécier la recevabilité de cette demande. Rappelant qu'en dehors de l'hypothèse où le tribunal en fait application d'office, seul le ministère public peut demander l'application de cette mesure sans que le liquidateur judiciaire puisse par lui-même la solliciter, la société KBC bank soutient que contrairement à ce qui était le cas en première instance, le ministère public, à hauteur d'appel, ne demande plus l'application de ces dispositions et que le liquidateur demeure seul à la solliciter de sorte que la cour ne pourra que déclarer irrecevable cette demande.

La société ML conseils, ès qualités, demande à la cour de débouter la société KBC bank de sa demande d'irrecevabilité dans la mesure où l'avis du ministère public 'reste un avis'. Elle ajoute que quel que soit cet avis, le jugement a été prononcé à la suite d'une requête du parquet de Versailles, peu important que le parquet Z… soit manifestement en désaccord avec ce dernier dès lors qu'il ne lui est aucunement demandé de 'porter à nouveau' cette requête mais de donner uniquement son avis sur l'appel interjeté, observant que dans celui-ci le ministère public sollicite l'infirmation du jugement mais pas l'irrecevabilité de la requête initialement déposée.

A l'audience, le ministère public, qui a maintenu son avis écrit, a observé qu'il ne s'est pas désisté car il n'est pas appelant du jugement qui s'est fondé sur une requête et dont la cour a à juger, ajoutant que son avis ne lie pas la cour * Il ajoute que la société ML conseils, ès qualités, est recevable.

Conformément à l'article 561 du code de procédure civile, l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; selon l'article 562, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Dans ce cadre la cour, qui en l'espèce est saisie d'une demande d'annulation, infirmation ou réformation du jugement, notamment en ce que les premiers juges ont ordonné au conciliateur de communiquer au tribunal les pièces et actes relatifs à la procédure de conciliation, doit apprécier le bien-fondé de cette demande de communication, étant observé que le tribunal a été saisi par le ministère public en application des dispositions de l'article L. 621-1 alinéa 6 du code de commerce qui dispose que 'dans ce cas, le tribunal peut, d'office ou à la demande du ministère public, obtenir communication des pièces et actes relatifs au mandat ad hoc ou à la conciliation nonobstant les dispositions de l'article L. 611-15'.

La recevabilité de la saisine du tribunal par le ministère public qui n'a pas été discutée en première instance n'est pas contestable, étant observé que si le ministère public considère que le tribunal n'avait pas à accueillir cette demande de communication de pièces, il n'a formulé aucune observation sur la recevabilité de cette prétention.

La cour déboute par conséquent la société KBC bank de sa fin de non-recevoir.

Sur l'application de l'article L. 621-1 alinéa 6 :

La société KBC bank reproche au liquidateur judiciaire d'avoir demandé de donner une application 'totalement contre nature' aux dispositions de l'article L. 621-1 alinéa 6 du code de commerce en premier lieu en s'adressant au ministère public afin qu'il sollicite pour son compte l'application de cette disposition alors que le code de commerce limite de manière très stricte les personnes pouvant la solliciter, critiquant la démarche procédurale 'particulièrement déloyale' du liquidateur au regard de la présentation erronée du droit applicable qu'il a faite au ministère public.

En deuxième lieu, elle fait valoir que le liquidateur, au regard des motifs développés pour solliciter la levée de la confidentialité, a minoré la portée qui lui est conférée en jurisprudence alors que la Cour de cassation juge que ce principe de confidentialité protège notamment les créanciers qui acceptent d'y participer et impose d'écarter toute preuve couverte par la confidentialité et utilisée contre l'un de ses créanciers dans une action ultérieure (Com. 22 septembre 2015, 14-17377), ce que les cours d'appel de Versailles et de Paris ont également considéré, soulignant que la présente cour n'est pas tenue par la jurisprudence des cours d'appel de Riom et Grenoble citée par le liquidateur. Elle ajoute que l'exercice du droit de la société débitrice, la société Msdental représentée par son liquidateur en l'occurrence, de lever elle-même la confidentialité de la procédure de conciliation, ne peut se faire au détriment du droit à la confidentialité reconnu aux autres participants à la procédure, soulignant aussi qu'au regard des travaux parlementaires de la loi de sauvegarde, les dispositions de l'article L. 621-1 alinéa 6 ont uniquement pour objet d'éclairer le tribunal et le ministère public sur le comportement du seul débiteur comme précisé au cours.

En troisième lieu, elle invoque le détournement de la mesure quant à sa temporalité en observant que le texte qui permet la levée de la confidentialité peut uniquement recevoir application au seul stade de l'ouverture de la procédure, l'article de doctrine joint par le liquidateur à son projet de requête rappelant également ce point de sorte que la demande de levée de confidentialité est trop tardive.

Enfin, elle fait état du détournement de la mesure quant à ses effets, le liquidateur, qui entend communiquer les pièces dans une autre instance, attendant ainsi du tribunal un réel excès de pouvoir dès lors que les dispositions précitées ne prévoient en aucun cas une levée générale de la confidentialité et une communication large des éléments relatifs à la conciliation mais uniquement la seule communication au tribunal de ces éléments.

La société KBC commercial finance reprend pour l'essentiel et sous une autre formulation les moyens de la société KBC bank et invoque la même jurisprudence dont elle souligne qu'elle a affirmé un champ très large non seulement des personnes protégées par la confidentialité qui bénéficie tant au débiteur qu'à tous les autres participants à la procédure de conciliation mais aussi des éléments visés par la confidentialité.

La société ML conseils, après avoir expliqué les motifs de sa demande au ministère public au regard du caractère flagrant du fonctionnement anormal du compte bancaire de la société Msdental dans les livres de la société KBC bank et rappelé que les dispositions de l'article L. 621-1 alinéa 5 du code de commerce prévoient une dérogation au principe de la confidentialité posé par l'article L. 611-15 du code de commerce, expose d'abord que c'est sur le fondement de ce texte qu'elle s'est rapprochée du ministère public et que la requête a été régularisée par ce dernier, soulignant avoir toute latitude pour informer le ministère public de toutes problématiques concernant les entreprises faisant l'objet d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire, informations auxquelles ce dernier peut librement donner suite ou non.

S'agissant ensuite de l'objet de la levée de la confidentialité, la société ML conseils qui relève que l'arrêt de la Cour de cassation cité par les appelantes concerne une hypothèse très différente de la présente espèce, estime que le caractère confidentiel des échanges intervenus en conciliation vise avant tout à protéger l'entreprise qui bénéficie de cette conciliation, soutenant que de nombreuses juridictions, dont les cours d'appel de Riom et Grenoble dans deux décisions récentes, rappellent que cette obligation de confidentialité, instituée dans un but de protection au profit de l'entreprise qui bénéficie d'une procédure de conciliation, n'est pas absolue, notamment lorsque le bénéficiaire y renonce ; elle ajoute qu'il a été parfois jugé que la protection du débiteur n'avait plus de raison d'être lorsque celui-ci était placé en liquidation judiciaire et qu'en tout état de cause, son souhait, par le biais de cette levée de la confidentialité, n'est pas de stigmatiser les dires, propositions ou refus de la banque mais de 's'attarder sur les informations et éventuellement mises en garde reçues par cette dernière' pour vérifier si, en tout état de cause ou non, elle s'est arrogée le droit de bénéficier de paiements privilégiés.

Quant au processus de levée de la confidentialité, elle indique que la Cour de cassation n'a jamais tranché la problématique de la temporalité de la demande de levée de la confidentialité, considérant 'qu'il y a tout lieu de penser qu'elle peut être évoquée postérieurement au jugement d'ouverture' ; elle ajoute qu'il lui est apparu préférable, dans le souci du respect, sinon de la lettre mais de l'esprit du texte, de solliciter du tribunal, en amont, la levée de la confidentialité plutôt que de verser aux débats des pièces supposées confidentielles.

Le ministère public expose que l'article L. 621-1 alinéa 6 du code de commerce, qui est le premier du chapitre relatif à 'l'ouverture de la procédure' et qui permet au tribunal d'obtenir la communication des pièces nonobstant les dispositions de l'article L. 611-15, ne mentionne pas expressément que cette communication peut être demandée à tout moment. Il ajoute que l'exception au principe de la confidentialité est d'interprétation stricte.

Aux termes de l'article L. 611-15 du code de commerce toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité.

L'article L. 621-1 du même code, premier article du chapitre consacré à l'ouverture de la procédure de sauvegarde et applicable aux procédures de redressement et de liquidation judiciaires par renvoi des articles L. 631-7 et L. 641-1, dispose en ses alinéa 5 et 6 que :

' L'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard d'un débiteur qui bénéficie ou a bénéficié d'un mandat ad hoc ou d'une procédure de conciliation dans les dix-huit mois qui précèdent doit être examinée en présence du ministère public, à moins qu'il ne s'agisse de patrimoines distincts d'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée.

Dans ce cas, le tribunal peut, d'office ou à la demande du ministère public, obtenir communication des pièces et actes relatifs au mandat ad hoc ou à la conciliation, nonobstant les dispositions de l'article L. 611-15. '

Le ministère public a saisi le tribunal de la demande de levée de la confidentialité des pièces relatives à la procédure de conciliation dont la société Msdental a été l'objet après avoir été informé par le liquidateur judiciaire des difficultés qu'il rencontrait s'agissant de l'administration de la preuve dans le cadre de l'action en nullité d'actes intervenus en période suspecte, diligentée à l'encontre de la société KBC bank.

Aucune déloyauté ne peut être utilement invoquée à l'encontre du liquidateur judiciaire qui, comme le tribunal l'a relevé, peut communiquer au ministère public les difficultés rencontrées dans le cadre des procédures collectives concernant les sociétés pour lesquelles un mandat lui a été confié ; le ministère public, à réception de ces informations et du projet de requête joint par le liquidateur judiciaire, en a apprécié la portée avant de présenter sa requête fondée sur le dernier alinéa de l'article L. 621-1.

Le principe de confidentialité édicté par l'article L. 611-5 précité n'est pas absolu dans la mesure où l'article L. 621-1 du code de commerce prévoit la possibilité d'obtenir la communication des actes et pièces relatifs à la conciliation. Cependant, cette faculté n'est offerte que sous certaines conditions et sur l'initiative du tribunal, d'office, ou à la demande du ministère public.

S'agissant d'une exception à un principe, les conditions d'application doivent en être interprétées strictement d'autant que le principe de la confidentialité des pièces et actes accomplis dans le cadre de la procédure de conciliation en est un élément essentiel pour convaincre toutes les parties d'y participer et pour sa bonne fin, l'objectif étant de ne pas aggraver la situation du débiteur par la divulgation de ses difficultés aux tiers et de permettre des négociations d'accords amiables en toute discrétion et en toute transparence entre les parties appelées à se concilier ; l'intérêt de ce principe, s'il a notamment pour but de protéger le débiteur, ne cesse cependant pas du seul fait de l'ouverture d'une procédure collective en suite de la procédure de conciliation, sauf à dissuader les parties à la conciliation, dont les créanciers, d'y prendre part s'ils savent que leurs propositions, les négociations, et tout ce qu'ils ont pu révéler dans ce cadre pourront être utilisés contre eux si la procédure échoue.

Au regard de cette interprétation stricte des conditions dans lesquelles la levée de la confidentialité peut être sollicitée, le dernier alinéa de l'article L. 621-1 ne peut être lu comme l'ont fait les premiers juges qui ont considéré que l'ouverture de la procédure permettait au tribunal, à tout moment de celle-ci, d'obtenir la communication des pièces alors que cette demande ne peut s'inscrire que dans le cas de l'ouverture la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; en outre le rapport au sénat de X… à l'occasion des travaux parlementaires relatifs à la loi de sauvegarde indique à propos de ce nouvel alinéa 6 que ces dispositions devraient être de nature à donner au juge la possibilité, lors de l'examen d'une demande d'ouverture de la procédure, d'examiner l'attitude antérieure du débiteur.

Dans ces conditions, dès lors que la demande de levée de la confidentialité est intervenue près d'un an après l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, elle ne pouvait être accueillie.

Il convient, infirmant le jugement, de rejeter la requête du ministère public aux fins d'ordonner la levée la confidentialité et la communication des rapports, échanges et documents en possession du conciliateur.

Au regard de la situation respective des parties et de la procédure de liquidation judiciaire de la société Msdental, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; les demandes à ce titre seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt par défaut,

Déclare l'appel des sociétés KBC bank et KBC commercial finance recevable ;

Déboute la société KBC bank de sa fin de non-recevoir ;

Infirme le jugement du 7 décembre 2021 ;

Statuant à nouveau,

Rejette la requête du 19 août 2021 aux fins de communication au tribunal des pièces et actes relatifs à la procédure de conciliation de la société Msdental ;

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société ML conseils, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Msdental, aux dépens de première instance et d'appel.