Cass. com., 8 janvier 2008, n° 06-15.999
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
M. Potocki
Avocat général :
Mme Bonhomme
Avocats :
SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur contredit, que la société Pioneer Europe NV a confié à la société New Wave logistics Belgium NV le déplacement de Belgique vers la France de deux chargements de matériels de haute-fidélité vendus par elle à la société Pioneer France ; que pour effectuer ce transport, la société New Wave logistics Belgium NV s'est substituée la société Valkeniers natie qui a émis deux lettres de voiture CMR ; qu'une partie des marchandises ayant été volée en Belgique, la société Nipponkoa insurance Co Ltd et la société Nipponkoa insurance Co of Europe Ltd (les assureurs) ont indemnisé la société Pioneer Europe NV, puis ont assigné en responsabilité devant le tribunal de commerce de Pontoise la société Valkeniers natie qui a soulevé l'incompétence de cette juridiction au profit du tribunal de première instance d'Anvers ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 31-1 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ;
Attendu que pour déclarer la cour d'appel de Versailles territorialement incompétente au profit du tribunal de première instance d'Anvers, l'arrêt relève que s'il est constant que la marchandise devait être livrée en France, en revanche, à défaut d'indication plus précise sur les lettres de voiture, les assureurs ne peuvent valablement soutenir que l'adresse de livraison est celle qui correspond à l'adresse du destinataire et que la prise en charge des marchandises ayant eu lieu en Belgique et le transporteur ayant au surplus son siège principal en Belgique, à Anvers, le tribunal de première instance de l'arrondissement judiciaire d'Anvers doit être déclaré compétent pour connaître du litige ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'aux termes de l'article susvisé, le demandeur peut saisir les juridictions du pays sur le territoire duquel le lieu prévu pour la livraison est situé et que cette disposition doit s'interpréter comme permettant la saisine de l'ordre juridictionnel national du lieu de cette livraison, sans que l'application subséquente des règles de compétence territoriale interne à cet ordre puisse avoir pour effet d'écarter la compétence générale expressément voulue par le Traité international, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 31-1 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore que s'il est constant que la marchandise devait être livrée en France, en revanche à défaut d'indication plus précise sur les lettres de voiture, les assureurs ne peuvent valablement soutenir que l'adresse de livraison est celle qui correspond à l'adresse du destinataire, que si l'article 6 de la CMR fait obligation de mentionner sur la lettre de voiture à la fois le lieu prévu pour la livraison et le nom et l'adresse du destinataire, c'est parce que la livraison peut être effectuée dans un lieu distinct de l'adresse du destinataire et que les premiers juges ne pouvaient donc retenir que le tribunal de commerce de Pontoise, tribunal dans le ressort duquel est simplement situé la société Pioneer France, avait un lien suffisant avec le litige ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans expliquer pourquoi l'implantation du siège social de la société Pioneer France, destinataire de la livraison des marchandises, ne constituait pas un lien suffisant avec le litige soumis à cette juridiction et sans rechercher s'il existait un critère de rattachement pertinent avec une autre juridiction française, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.