Cass. com., 10 juillet 2007, n° 06-13.520
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Caen, 2 février 2006, n° RG 05/01939), que M. Henri X..., associé avec son frère, M. Pierre X... au sein de la société à responsabilité limitée Etablissements X... (la société) et de la société Saveurs océanes, a assigné la société et son frère aux fins d'obtenir la révocation de celui-ci de ses fonctions de gérant de la société pour cause légitime, et la nomination d'un administrateur provisoire, alléguant à son encontre divers détournements sur les comptes d'associés et au détriment de la société ; que par jugement du 20 mai 2005, le tribunal de commerce a rejeté les demandes ;
Attendu que M. Henri X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement alors, selon le moyen :
1 / que le gérant d'une société à responsabilité limitée est révocable judiciairement pour cause légitime ; que la cause légitime de révocation s'entend de fautes du gérant ou d'agissements même non fautifs contraires à l'intérêt social ; que, à cet égard, l'existence d'une telle cause suffit en soi à justifier la révocation du gérant sans qu'il soit question, pour apprécier le bien fondé de cette mesure, de prendre en considération les conséquences éventuelles de la révocation du gérant sur le fonctionnement de la société ; que, au cas présent, la cour d'appel, qui s'est fondée, pour rejeter la demande de révocation du gérant, sur l'impact d'une telle mesure sur le fonctionnement de la société et son image et les problèmes posés par la nomination d'un administrateur judiciaire, procédant ainsi à une appréciation en opportunité de la mesure, a violé l'article L. 223-25 du code de commerce ;
2 / que le fait de consentir un découvert en compte courant constitue une faute du gérant contraire à l'intérêt social ; qu'en jugeant que les opérations sur les comptes courants, parce qu'elles avaient été régularisées et ne mettaient pas en cause le fonctionnement de la société, n'étaient pas de nature à justifier la mesure de révocation, cependant qu'il était établi que le compte courant de M. Henri X... dans la société Etablissements X... avait été illégalement débiteur de 20.170, 38 euros, la cour d'appel a violé les articles L. 223-21 et L. 223-25 du code de commerce ;
3 / qu'en se fondant en outre sur une attestation du 8 novembre 2005 du commissaire aux comptes de la société Saveurs océanes, indiquant avoir validé les comptes courants associés, pour écarter à ce propos un motif de révocation, cependant que ce dernier, n'ayant réalisé sa mission qu'au sein de la société Saveurs océanes, n'avait pu valider les opérations irrégulières dénoncées également sur le compte courant de M. Henri X... dans la société Etablissements X..., la cour d'appel, en se déterminant ainsi, a méconnu de plus fort les dispositions de l'article L. 223-25 du code de commerce ;
4 / qu'en se bornant à faire état des allégations de M. Pierre X... et de la société Etablissements X..., contestant les faits fautifs et les nombreuses irrégularités imputés au gérant, sans procéder elle-même à une appréciation de chacun des faits invoqués au soutien de la demande de révocation pour en caractériser la cause légitime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-25 du code de commerce ;
5 / que les juges ne pouvant accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions, la cour d'appel, en jugeant au cas d'espèce péremptoirement que les allégations de M. Henri X... portaient sur des faits qui n'étaient pas établis sans analyser, de façon même sommaire, les différents éléments de preuve, autres que les attestations des anciens salariés, que produisait M. Henri X... au soutien de ses prétentions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les opérations sur les comptes courants concernent plus les rapports entre les deux frères que la gestion des sociétés et l'intérêt social, qu'ils n'ont jamais affecté de manière significative la situation des sociétés concernées et ne peuvent donc fonder la mesure de révocation sollicitée; qu'en l'état de ces appréciations souveraines, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches, a pu statuer comme elle a fait ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant, par motifs adoptés, procédé, sur chacune des allégations de M. Henri X..., à l'analyse des éléments de preuves soumis par les parties pour en déduire, dans l'exercice de son pouvoir souverain, à l'absence de cause légitime de révocation du gérant, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants visés à la première branche, a légalement justifié sa décision et a satisfait aux exigences du texte cité à la cinquième branche ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses première, deuxième et troisième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.