CA Riom, ch. com., 6 juillet 2022, n° 20/01833
RIOM
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Academie Européenne Des Médecines Naturelles (SAS)
Défendeur :
Vecteur Energy (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Chalbos
Conseillers :
Mme Theuil-Dif, M. Kheitmi
Avocats :
Selarl Lexavoue, Selarl Diez
ARRET :
Prononcé publiquement le 6 juillet 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et par Mme Melody AUNIER, Directrice des services de greffe judiciaire, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société Vecteur Energy, dont M. [S] [C] était le responsable légal à l'époque des faits et le fondateur, est un laboratoire de produits naturels qui fabrique et commercialise des compléments alimentaires naturels.
La société Académie européenne des médecines naturelles (AEMN), dont M. [Z] [B] est le dirigeant, est un organisme dispensant de la formation continue et proposant un cursus à de futurs conseillers en nutrition bien-être, naturopathes conseillers et praticiens.
M. [Z] [B] était également associé de la société Vecteur Energy.
En 1999, M. [Z] [B] a créé des gammes de compléments alimentaires certifiés « bio », une gamme de mycothérapie et une gamme d'élixirs de fleurs sans alcool, puis a commencé à faire fabriquer ses gammes de produits par le laboratoire Vecteur Energy.
Le 14 novembre 2010, par contrat d'exploitation, M. [Z] [B] a délégué la logistique de distribution et de facturation à la société Vecteur Energy.
Les relations entre les partenaires commerciaux se sont dégradées.
M. [Z] [B] s'est plaint en fin d'année 2015 de ce que la société Vecteur Energy consentait des remises de 20 à 30% sur ses produits auprès des particuliers via son site internet 'Phytoplant.com', créant ainsi une concurrence vis-à-vis de ses clients en magasin et de sa propre activité de distribution auprès des particuliers et de ce qu'elle utilisait son nom, ses livres et ses marques sans autorisation.
M. [Z] [B] a repris alors le contrôle intégral et exclusif de la distribution de ses produits à partir du 1er janvier 2016, tout en continuant à faire fabriquer ses produits par la société Vecteur Energy.
Le 6 février 2016, M. [B] adressait un mail au gérant du Laboratoire Mint-e à [Localité 5] (13), dénonçant les agissements et la malhonnêteté de M. [C], le mettant en garde sur le manque de fiabilité de ce dernier et lui proposant soit de monter un laboratoire avec lui soit d'imposer le rachat du laboratoire de M. [C] au seul prix du matériel et des stocks.
En mars 2016, M. [Z] [B] faisait analyser deux lots d'argent colloïdal fabriqués par le laboratoire Vecteur Energy. Les résultats faisaient apparaître que la concentration réelle du produit ne correspondait pas à la concentration affichée sur les étiquettes.
M. [B] décidait de changer de fabriquant pour les produits de ses gammes et à compter du 1er septembre 2016, il confiait la fabrication de ses produits à un autre laboratoire.
Le 1er octobre 2016, M. [Z] [B] envoyait un mail aux représentants commerciaux de la société Vecteur Energy, aux termes duquel il énonçait tous ses griefs contre M. [S] [C] qu'il accusait de concurrence déloyale et vol de propriété intellectuelle, d'utilisation frauduleuse du titre de pharmacien, de fraude et malfaçons dans la fabrication des produits. Il évoquait les termes d'un accord à intervenir avec M. [C] pour le règlement du litige les opposant et la réparation de son préjudice.
Le 14 octobre 2016, un accord transactionnel était conclu, prévoyant la cession par M. [B] des parts qu'il détenait dans la société Vecteur Energy, la restitution par cette dernière à la société AEMN des élixirs floraux, l'engagement de la société Vecteur Energy de ne plus utiliser le nom d'AEMN ainsi que tous produits, documents, marques, supports appartenant à cette société, la renonciation de la société AEMN à toute action judiciaire contre Vecteur Energy et réciproquement concernant les opérations et faits nés avant la signature de l'accord, l'engagement réciproque de ne pas chercher à porter atteinte à l'image ou à la notoriété de l'autre partie.
Le protocole comportait une clause de confidentialité.
En octobre 2017, M. [Z] [B] se plaignait d'anomalies affectant la qualité des derniers produits livrés par le laboratoire Vecteur Energy en juin et juillet 2016, et notamment des moisissures dans des flacons de gemmothérapie d'orme et de hêtre, dont la date limite d'utilisation optimale (DLUO) était avril 2019 et mai 2019. Le 7 février 2018, il dénonçait ces faits auprès des services de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP).
Le 25 juillet 2018, M. [Z] [B] reprochait à M. [S] [C] de faire pression auprès de la « Fondation ASCA pour la reconnaissance et le développement des thérapies alternatives et complémentaires », afin qu'elle n'accepte plus les élèves de M. [Z] [B] en cursus complémentaire de naturopathie MCO (médecine complémentaire occidentale).
Le 31 juillet 2018, M. [Z] [B] déposait plainte contre la société Vecteur Energy pour atteinte à son image, pour concurrence déloyale, pour avoir fourni des produits non conformes, pour abus de confiance et pour vol de propriété intellectuelle.
Le 27 juin 2019, M. [Z] [B] envoyait un courriel diffusé en mailing aux différents intervenants du marché « santé bien-être » et notamment aux clients et prospects de la société Vecteur Energy avec comme objet « infos judiciaires concernant mon ancien fabricant » pour informer les destinataires de ce que M. [C] était renvoyé devant le tribunal correctionnel du Puy-en-Velay le 1er octobre suivant pour fraude commerciale, fraude sur des produits, pratiques commerciales déloyales, usurpation du titre de pharmacien.
M. [S] [C] et la SAS Vecteur Energy ont déposé une requête auprès du président du tribunal de commerce du Puy-en-Velay le 5 septembre 2019 afin d'être autorisés à assigner à jour fixe M. [Z] [B] et la société AENM.
Par ordonnance du 18 septembre 2019, le président du tribunal de commerce du Puy-en-Velay autorisait la société Vecteur Energy et [S] [C] à assigner à jour fixe M. [Z] [B] et la société AEMN pour l'audience du 4 octobre 2019.
La société Vecteur Energy et M. [C] ont en conséquence fait assigner M. [Z] [B] et la société AEMN aux fins d'entendre :
- condamner solidairement M. [B] en son nom personnel et ès qualités de président de l'Académie au paiement des sommes de :
- 20 000 euros de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice causé par le non-respect de la clause de confidentialité du protocole du 14 octobre 2016,
- 25 000 euros de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice causé par la violation de la présomption d'innocence et le caractère diffamatoire du dernier mail diffusé par M. [B], en vertu des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil,
- 35 000 euros de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice causé par l'action de dénigrement intentionnel,
- 45 000 euros de dommages et intérêts pour indemnisation des actes de concurrence déloyale,
- ordonner la communication du listage d'envoi du mail litigieux sous astreinte,
- ordonner la publication d'encarts judiciaires aux frais des requis.
Le 16 avril 2020, en cours de procédure, un nouveau mailing a été diffusé par M. [B] sous l'intitulé 'Le laboratoire Vecteur Energy de [S] [C] perquisitionné pour avoir vendu du gel hydroalcoolique dangereux'.
Par jugement contradictoire en date du 2 octobre 2020, le tribunal de commerce du Puy-en-Velay :
- a rejeté l'exception de nullité de l'acte introductif d'instance,
- s'est déclaré incompétent pour juger de la cause concernant l'atteinte à la présomption d'innocence et a invité la société Vecteur Energy et M. [S] [C] à mieux se pourvoir,
- s'est déclaré incompétent pour juger de la cause concernant la diffamation contenue dans les messages électroniques et a invité la société Vecteur Energy et M. [S] [C] à mieux se pourvoir,
- s'est déclaré compétent pour connaître des demandes concernant le non-respect de l'accord transactionnel du 14 octobre 2016,
- s'est déclaré compétent pour connaître des demandes concernant le grief de dénigrement,
- dit qu'il n'y a pas lieu à sursis à statuer,
- débouté M. [S] [C] et la société Vecteur Energy de leur demande d'indemnisation au titre de la rupture du contrat du 14 octobre 2016,
-déclaré M. [S] [C] et la société Vecteur Energy recevables en leurs demandes au titre de la concurrence déloyale,
- dit que M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles ont commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Vecteur Energy,
- dit que M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles ont commis des actes de dénigrement à l'encontre de M. [S] [C] et de la société Vecteur Energy,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles à verser à M. [S] [C] la somme de quarante mille euros (40 000 euros) à titre de dommages et intérêts,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles à verser à la société Vecteur Energy la somme de quarante mille euros (40 000 euros) à titre de dommages et intérêts,
- rejeté les autres demandes de M. [S] [C] et de la société Vecteur Energy,
- rejeté toutes les demandes de M. [Z] [B],
- rejeté toutes les demandes de la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles à payer à M. [S] [C] la somme de trois mille deux cent cinquante euros (3250 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles à payer à la société Vecteur Energy la somme de trois mille deux cent cinquante euros (3250 euros) par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la société par actions simplifiée à associé unique Académie européenne des médecines naturelles aux entiers dépens de la présente instance,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- dit que les fonds seront déposés pour y être consignés, auprès de la SARL Auralaw huissiers de justice associés, office ministériel d'[Localité 6], [Adresse 1], qui ouvrira un compte séquestre jusqu'au jugement définitif, et dit qu'il appartiendra à la partie la plus diligente d'en informer la SARL Auralaw.
M. [Z] [B] et la SAS Académie européenne des médecines naturelles ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 11 décembre 2020.
Par conclusions déposées et notifiées le 31 août 2021, M. [Z] [B] et l'Académie Européenne des Médecine Naturelles demandent à la cour de :
- infirmer le jugement du tribunal de commerce du Puy-en-Velay du 2 octobre 2020 en ce qu'il a :
- rejeté la nullité de l'acte introductif d'instance,
- rejeté le sursis à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction pénale à intervenir,
Exposé du litige
- fait droit aux demandes de M. [C] et Vecteur Energy fondées sur la concurrence déloyale et le dénigrement,
En conséquence,
- faire droit aux demandes formulées en appel par M. [B] et la société AEMN quant au préjudice qu'ils ont subi du fait de cette procédure,
- leur allouer une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- débouter M. [C] et la société Vecteur Energy de l'intégralité de leurs demandes formées dans le cadre de leur appel incident,
En conséquence,
- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a débouté M. [C] et la société Vecteur Energy de leur demande d'indemnisation au titre de la rupture du contrat du 14 octobre 2016,
- débouter M. [C] et la société Vecteur Energy de leur demande indemnitaire au titre d'un nouvel acte de dénigrement et de concurrence déloyale dans la rédaction et l'envoi du mail du 16 avril 2020,
En tout état de cause,
- allouer à M. [B] et AEMN une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [C] et la société Vecteur Energy aux entiers dépens, dont distraction au bénéfice de Me Buffard André, avocat sur son affirmation de droit, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Moyens
Par conclusions déposées et notifiées le 1er juin 2021, M. [S] [C] et la SAS Vecteur Energy demandent à la cour de :
- débouter M. [B] et l'AEMN de leur appel et le dire infondé,
- débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celle concernant le débouté de M. [C] et de la société Vecteur Energy sur la violation de la clause de confidentialité contenue dans le protocole transactionnel liant les parties,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action des concluants en leur demande au titre de la concurrence déloyale et a condamné les appelants à payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré recevable l'action des concluants en leur demande au titre des actes de dénigrement commis par les appelants et les a condamnés à payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêt,
- recevant les concluants en leur appel incident, dire et juger que les appelants ont violé la clause de confidentialité contenue dans le protocole transactionnel signé entre les parties et les condamner au paiement de légitimes dommages et intérêts d'un montant de 20 000 euros en réparation de leur préjudice moral,
- faisant état de son pouvoir d'évocation, dire et juger que les appelants ont commis un nouvel acte de dénigrement et de concurrence déloyale dans la rédaction et l'envoi du mail du 16 avril 2020 et les condamner à de légitimes dommages et intérêts d'un montant de 30 000 euros,
- condamner solidairement les appelants au paiement d'une somme de 6 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner les appelants aux entiers dépens de l'instance.
La clôture de la procédure initialement fixée le 24 mars 2022 a été reportée au 4 mai 2022 avant l'ouverture des débats. Motivation
MOTIFS :
Sur la régularité de la saisine du tribunal de commerce :
M. [B] et l'AEMN soutiennent que la requête aux fins d'autorisation d'assigner à jour fixe déposée le 5 septembre 2019 par M. [S] [C] et la SAS Vecteur Energy n'est pas conforme aux dispositions de l'article 788 du code de procédure civile en ce qu'elle ne précise pas les motifs de l'urgence. Ils en déduisent que l'acte introductif de la procédure est vicié dès son origine.
L'article 788 du code de procédure civile dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 11 décembre 2019 dispose en son alinéa 2 que la requête doit exposer les motifs de l'urgence, contenir les conclusions du demandeur et viser les pièces justificatives.
Ces formalités ne sont cependant pas exigées à peine de nullité de la requête, et encore moins de l'assignation, leur non-respect n'exposant le requérant qu'au rejet de la requête par le président.
M. [B] et l'AEMN n'invoquent aucune cause de nullité propre à l'assignation délivrée conformément aux termes de l'ordonnance rendue par le président du tribunal le 18 septembre 2019 et aux dispositions de l'article 789 ancien du code de procédure civile.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation.
Sur la compétence du tribunal de commerce :
Aucune des parties ne sollicite, dans le dispositif de ses conclusions, l'infirmation des dispositions du jugement dont appel relatives à la compétence. Il n'y a pas lieu en conséquence de statuer sur ce point.
Sur la demande de sursis à statuer :
M. [B] et l'AEMN demandaient qu'il soit sursis à statuer jusqu'à la décision devant être rendue par le tribunal correctionnel du Puy-en-Velay sur les poursuites pénales engagées contre M. [C] et la société Vecteur Energy pour pratiques commerciales trompeuses, tromperie, exercice illégale de la pharmacie.
Cette demande est devenue sans objet puisque les appelants ont produit en cours de procédure le jugement rendu par le tribunal correctionnel du Puy-en-Velay le 3 mars 2021.
Sur le fond :
- sur les actes de dénigrement et de concurrence déloyale :
M. [C] et la société Vecteur Energy reprochent à M. [B], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de l'AEMN, des actes de dénigrement et de concurrence déloyale, constitués par l'envoi de mails largement diffusés.
Postérieurement au protocole d'accord signé le 14 octobre 2016 aux termes duquel les parties renonçaient à toute action judiciaire concernant les opérations et faits nés avant la signature de l'accord, M. [B] a diffusé le 27 juin 2019 depuis une boîte mail au nom de AEMN un mail intitulé 'Infos judiciaires concernant mon ancien fabriquant' et rédigé en ces termes :
« Suite à un courrier reçu par mon avocat, je vous informe que [S] [C], mon ancien fabriquant, responsable du laboratoire VECTEUR ENERGY est renvoyé en correctionnel au 1er octobre prochain au tribunal correctionnel du Puy en Velay, pour fraude commercial, fraudes sur les produits, pratiques commerciales déloyales et pour usurpation de titre de pharmacien.
Il est évident que mes produits sont fabriqués par un autre labo et que depuis plus de trois ans, mes produits n'ont plus rien à voir avec [S] [C] ; Mes produits sont fabriqués, je vous le rappelle par le laboratoire COSMETOSOURCE, depuis 3 ans. »
Un nouveau mailing a été diffusé par M. [B] depuis la même boîte mail le 16 avril 2020 dans les termes suivants :
« Bonjour à toutes et à tous, on m'a donné une nouvelle qui fait le tour des journaux locaux et des journaux sur le net paru sur RTL.fr, le Figaro.fr etc...
VECTEUR ENERGY représenté par [C] vendu des gels hydroalcooliques non conformes et jugés dangereux car jugés non capables de désinfecter suffisamment avec une teneur en alcool bien inférieure à la normale pour ce type de produit. Je vous laisse lire cet article en lien.
Je pense que cet individu ne devrait plus pouvoir faire de pub dans bio contact, voici un lien vers un exemple d'article paru dans 20 minutes https... [C] avait été mon ancien fabriquant et j'avais décidé de travailler avec lui car j'avais constaté des pratiques douteuses qui commencent à être rendues publiques et vous aller voir que concernant cet individu, ce n'est fini.
Je vous avais informé de ma décision de change de laboratoire fabriquant concernant mes gammes de produits mais certains magasins n'ont pas voulu m'écouter et ont voulu continuer à travailler avec les produits de VECTEUR ENERGY.
Je conseille aux magasins Bio qui vendent ses produits de se méfier de son labo. Je ne propose pas mes produits à la place même si mes gammes sont de très bonne qualité avec de bonne pratiques de fabrication car je ne voudrais pas qu'on pense que je cherche à profiter de la situation mais aux vues du fait que ce personnage a vendu des produits dans mon dos en faisant de grosses réductions entre 2011 et 2016 et que cela m'a pénalisé ainsi que cela a pénalisé les magasins qui vendaient les TRIPLEX et autres produits de mon catalogue, je pense que cela serait un juste retour des choses sis ces magasins redistribuent à nouveau mes produits.
En attendant, j'ai déjà fait circuler l'info aux maximums et vous, de votre côté n'hésitez pas à envoyer cette info dans tous vos réseaux car il faut que les clients soient au courant avant de se faire avoir par VECTEUR ENERGY. »
Les termes de ces courriels révèlent la volonté de M. [B] de diffuser le plus largement possible, avant toute condamnation pénale des intimés, des informations présentées de manière à jeter le discrédit sur M. [C], sur Vecteur Energy et sa production et à dissuader fortement les acteurs du marché dans lequel évoluent les parties de collaborer avec M. [C] et Vecteur Energy, tout en mettant en valeur la qualité des gammes produites par M. [B] et les bonnes pratiques de leur fabrication et en incitant les magasins à distribuer à nouveau ses produits.
La circonstance que certaines des informations contenues dans ces mailings sont exactes n'autorisait pas M. [B] et sa société à en faire un usage fautif et déloyal par les conditions de leur diffusion et de leur présentation, révélatrices d'une volonté de nuire et d'inciter la clientèle à se détourner de M. [C] et de Vecteur Energy.
Les actes de concurrence déloyale reprochés à M. [B] et la société AEMN sont ainsi caractérisés, étant toutefois relevé que le dénigrement constitue en l'espèce une composante de la concurrence déloyale et ne saurait donner lieu à une indemnisation distincte.
Si le seul usage de procédé déloyaux pour capter la clientèle d'autrui occasionne nécessairement un trouble commercial dont la victime est fondée à obtenir réparation, la carence des intimés à produire des justificatifs permettant de quantifier la perte de chiffre d'affaires et la désorganisation économique qu'ils allèguent conduit à limiter le quantum de l'indemnisation à la somme 15 000 euros pour chacun des intimés, au paiement de laquelle les appelants seront condamnés in solidum.
- sur la violation de la clause de confidentialité :
Le protocole d'accord transactionnel signé le 14 octobre 2016 entre les parties comporte un article 5 intitulé confidentialité et rédigé comme suit :
« D'un commun accord et dans le respect des dispositions légales et réglementaires les parties conviennent de conserver une totale discrétion sur le présent accord transactionnel et à ne pas le reproduire ni le divulguer à des tiers, ni à en révéler l'existence et/ou les modalités qu'il comporte, en tout ou en partie, sauf à toute autorité ayant légalement compétence à en connaître le contenu ou à être communiqué en justice, dans le cas où il y aurait difficulté portant sur son exécution ou son interprétation. »
Il sera relevé que l'engagement de discrétion ne porte que sur l'existence du protocole et sur son contenu, et non pas sur des faits, même antérieurs, existant indépendamment du protocole.
Les intimés reprochent à M. [B] d'avoir violé cette clause de confidentialité dans le mail diffusé le 27 juin 2019 intitulé 'Infos judiciaires concernant mon ancien fabriquant' et dans une plainte adressée au procureur de la République du Puy-en-Velay le 31 juillet 2018.
La cour constate que le mail du 27 juin 2019 ne comporte aucune référence au protocole du 14 octobre 2016.
La plainte adressée par courrier du 31 juillet 2018 comporte un historique des relations entre son auteur et le laboratoire Vecteur Energy représenté par M. [C] et cet historique mentionne l'accord signé le 14 octobre 2016 ainsi qu'une partie de son contenu :
'Le 14 octobre 2016, nous concluons un accord transactionnel, comprenant la restitution de mes élixirs floraux de Bach, la cession de parts que j'avais dans ce laboratoire, et un accord impliquant que je m'engageais à ne pas poursuivre le laboratoire Vecteur Energy, engagement conditionné par le respect de l'image et de mon travail à compter de la date de signature de cet accord. Je précise que les parts que j'avais détenues avaient été revendues à M. [R] [H], associé de M. [C] et lui aussi parfaitement au courant des éléments du litige qui m'oppose à ce laboratoire.'
Néanmoins la plainte ne porte que sur des faits révélés postérieurement à cet accord, et les intimés ne précisent pas en quoi consiste le préjudice dont ils sollicitent réparation au titre de la violation de la clause de confidentialité.
Il apparaît en particulier à la lecture du jugement rendu le 31 mars 2021 par le tribunal correctionnel du Puy-en-Velay que les poursuites pénales engagées contre M. [C] et Vecteur Energy sont dépourvues de tout lien avec la révélation, par M. [B], de l'existence de l'accord du 14 octobre 2016 et de son contenu.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] et la société Vecteur Energy de leur demande d'indemnisation à ce titre.
Sur les demandes accessoires :
L'action intentée par M. [C] et la société Vecteur Energy se révélant partiellement fondée, les appelants seront déboutés de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement étant confirmé sur ce point.
Chacune des parties, succombant partiellement sur ses prétentions en cause d'appel, supportera la charge des dépens par elle exposés, sans qu'il y ait lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dispositif PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions déférées à la cour, sauf en ce qu'il a :
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la Société par Actions Simplifiée à associé unique Académie Européenne des Médecines Naturelles à verser à M. [S] [C] la somme de quarante mille euros (40 000 euros) à titre de dommages et intérêts,
- condamné solidairement M. [Z] [B] et la Société par Actions Simplifiée à associé unique Académie Européenne des Médecines Naturelles à verser à la société Vecteur Energy la somme de quarante mille euros (40 000 euros) à titre de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau sur ce point,
Condamne in solidum M. [Z] [B] et la société Académie européenne des médecines naturelles à payer, à titre de dommages et intérêts, à M. [S] [C] la somme de 15 000 euros et à la société Vecteur Energy la somme de 15 000 euros,
Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés en appel.