Cass. 1re civ., 3 avril 2007, n° 06-13.342
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
Mme Marais
Avocats :
Me Copper-Royer, SCP Ghestin
Attendu que M. X..., auteur de l'ouvrage "Chateaux forts-image de pierre des guerres médiévales", coédité par l'association Rempart et la société les éditions Desclée de Brouwer de 1987 à 1999, a assigné M. Y... et la société - Ouest France, en contrefaçon, leur reprochant d'avoir écrit et édité, sous le titre "Architecture du château fort", un ouvrage reproduisant à l'identique des passages entiers de son oeuvre ou s'en inspirant fortement, et d'avoir ainsi porté atteinte tant à ses droits patrimoniaux d'auteur qu'à son droit moral ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déclaré irrecevable à agir sur le fondement du droit patrimonial d'auteur alors, selon le moyen, que l'auteur qui a cédé ses droits aux termes d'un contrat d'édition prévoyant une rémunération proportionnelle au prix de vente de son ouvrage au public conserve un droit patrimonial à percevoir une rémunération et justifie à ce titre de sa qualité à agir à l'encontre de celui qui s'est rendu coupable de contrefaçon afin d'obtenir l'indemnisation des conséquences préjudiciable de ces agissements sur les produits lui revenant de l'exploitation de son oeuvre ; que l'arrêt attaqué, qui constate que le contrat d'édition conclu par M. X... stipulait une rémunération de 10 % de recettes brutes d'édition, ne pouvait, sans violer les articles L. 122-1, L. 132-1, L. 133-1 et L. 133-2 du code de la propriété intellectuelle et de l'article 1382 du code civil ensemble de l'article 31 du nouveau code de procédure civile, affirmer qu'il était irrecevable à agir pour la défense de ses intérêts patrimoniaux ;
Mais attendu qu'ayant constaté que, selon contrat du 1er juillet 1983, M. X... avait cédé à l'association Rempart la totalité de ses droits patrimoniaux d'auteur, sans se réserver la possibilité de poursuivre les tiers contrefacteurs en raison des atteintes qui y seraient éventuellement portées, la cour d'appel l'a déclaré à bon droit irrecevable à agir en contrefaçon sur le fondement de ces droits, peu important que ceux-ci aient été cédés en contrepartie d'une rémunération proportionnelle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier, pris en sa seconde branche, telle qu'elle figure dans le mémoire en demande :
Attendu que la garantie due à l'éditeur de l'exercice paisible et exclusif des droits cédés n'offre pas à l'auteur la possibilité d'agir en contrefaçon pour la réparation du préjudice patrimonial qui lui est personnel ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 132-8 du code de la propriété intellectuelle n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 121-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que l'auteur jouit du droit au respect de son nom de sa qualité et de son oeuvre ;
Attendu que pour rejeter la demande formée au titre du droit moral, l'arrêt relève que M. X... ne démontrait pas avoir subi une atteinte différente de celle résultant des faits de contrefaçon reprochés à la société Edilarge, telle une utilisation anormale de son nom ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le fait de reproduire totalement ou partiellement l'oeuvre d'autrui en s'en appropriant la paternité, dénoncé par l'auteur comme constituant une contrefaçon, portait nécessairement atteinte à son droit moral, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans avoir à statuer sur la première branche du second moyen :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes fondées sur l'atteinte au droit moral d'auteur, l'arrêt rendu le 14 février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée.