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Décisions

Cass. com., 2 mars 2022, n° 20-21.029

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Rapporteur :

Mme Barbot

Avocat :

SCP Thouin-Palat et Boucard

Colmar, du 4 déc. 2019

4 décembre 2019

Examen du moyen

Enoncé du moyen

1. La société [H] et associés (la société [H]) et la société [R] et associés (la société [R]), agissant chacune en qualité de liquidateur de la société anonyme par actions simplifiées MSE SAS (la société MSE), font grief au jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 11 décembre 2018 d'ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société MSE, au jugement du tribunal de grande instance de Colmar du 18 décembre 2018 d'ouvrir la liquidation judiciaire de la société MSE et de désigner la société [H] en qualité de liquidateur, au jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 5 février 2019 de convertir le redressement judiciaire de la société MSE en liquidation judiciaire et de désigner la société [R] en qualité de liquidateur, et à l'arrêt de la cour d'appel de Colmar du 4 décembre 2019 de déclarer irrecevable l'appel interjeté contre le jugement précité du 18 décembre 2018, alors « que lorsque des décisions, même non rendues en dernier ressort et dont aucune n'est susceptible d'un recours ordinaire, sont inconciliables, elles peuvent être frappées d'un pourvoi unique, la Cour de cassation, si la contrariété est constatée, annulant l'une des décisions ou, s'il y a lieu, l'ensemble des décisions ; qu'en l'espèce, par un jugement en date du 18 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Colmar, chambre commerciale, statuant sur la requête de la SASU MSE SAS, a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la SASU MSE SAS et désigné la SELAS [H] & associés, prise en la personne de M. [H] et Mme [G], en qualité de mandataire liquidateur ; que, par jugement du 11 décembre 2018, le tribunal de commerce d'Epinal a ouvert une procédure de redressement judiciaire, transformée en liquidation judiciaire par décision de la même juridiction, le 5 février 2019, la SELARL [R] et associés, prise en la personne de M. [R], étant désignée en qualité de mandataire liquidateur ; que la cour d'appel de Colmar a déclaré l'appel formé contre le jugement du 18 décembre irrecevable par un arrêt du 4 décembre 2019 ; que du rapprochement de ces décisions, il résulte que la société MSE fait l'objet de deux procédures collectives parallèles ; que ces décisions étant ainsi inconciliables, il y a lieu d'en prononcer l'annulation sur le fondement de l'article 618 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 618 du code de procédure civile :

2. Il résulte de ce texte que lorsque deux décisions non susceptibles d'un recours ordinaire, même non rendues en dernier ressort, sont inconciliables, elles peuvent être frappées d'un pourvoi unique. Si la contrariété est constatée, la Cour de cassation annule l'une des décisions ou, s'il y a lieu, les deux.

3. Par un premier jugement du 11 décembre 2018, le tribunal de commerce d'Epinal a mis la société MSE en redressement judiciaire, la société [R] étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.

4. Par un deuxième jugement du 18 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Colmar, a mis la société MSE en liquidation judiciaire, la société [H] étant nommée liquidateur.

5. Par un troisième jugement du 5 février 2019, le tribunal de commerce d'Epinal a converti le redressement judiciaire de la société MSE en liquidation judiciaire.

6. Par un arrêt du 4 décembre 2019, la cour d'appel de Colmar a déclaré irrecevable l'appel formé contre le jugement du 18 décembre 2018 précité.

7. Ces décisions, dont aucune n'est susceptible d'un recours ordinaire, sont inconciliables au regard du principe de l'unicité des procédures collectives.

8. En conséquence, il y a lieu d'annuler le jugement du 18 décembre 2018.

Portée et conséquences de la cassation

9. En premier lieu, en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, l'annulation du jugement du 18 décembre 2018 entraîne, par voie de conséquence, celle de l'arrêt du 4 décembre 2019, qui en est la suite.

10. En second lieu, après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

11. L'annulation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 décembre 2018 (n° RG 18/00709), entre les parties, par la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Colmar ;

CONSTATE l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt rendu le 4 décembre 2019 (n° RG 19/01464), entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.