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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 30 octobre 2013, n° 11/21339

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

SARL SAVE FERRIS PRODUCTION

Défendeur :

T. KANE dite Tishou, C. KITSAIS dit Ken, J. BOITO dit Jey Jey, P. POUILLARD dit PAPOU, SAS UNIVERSAL MUSIC France

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur Benjamin RAJBAUT

Conseillers :

Madame Brigitte CHOKRON, Madame Anne-Marie GABER

Avocats :

SCP FISSELIER, Me Farrah BOUGUERRA, SCP A.SCHMIDT L.GOLDGRAB, Me Christine AUBERT MAGUERO, Me François TEYTAUD, Me Nicolas BOESPFLUG

Paris, du 14 Oct. 2011

14 octobre 2011

ARRÊT :

-par défaut

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président, et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Vu le jugement réputé contradictoire du 14 octobre 2011 rendu par le tribunal de grande instance de Paris,

Vu l'appel interjeté le 29 novembre 2011 par la SARL SAVE FERRIS PRODUCTION (ci-après dite SAVE FERRIS),

Vu les dernières conclusions du 22 avril 2013 de la société appelante,

Vu l'assignation (déposée en l'étude de l'huissier instrumentaire) du 25 avril 2012 de Patrice POUILLARD dit PAPOU, intimé non comparant,

Vu les dernières conclusions du 10 juillet 2012 de la société UNIVERSAL MUSIC France (ci-après dite UNIVERSAL MUSIC), intimée et incidemment appelante,

Vu les dernières conclusions du 29 mai 2013 de Tishou KANE dite TISHOU, de Cain KITSAIS dit KEN et de Jérôme BOÏTO dit JEY JEY, intimés et incidemment appelants,

Vu l'ordonnance de clôture du 18 juin 2013,

SUR CE, LA COUR,

Considérant que TISHOU et KEN se prévalent de la création, ainsi que de l'interprétation avec JEY JEY, d'une chorégraphie à partir d'une oeuvre musicale 'Alive', qui a fait l'objet du tournage d'une vidéo musique (ou clip) par la société UNIVERSAL MUSIC, laquelle l'aurait commercialisée, sans leur autorisation, dans un DVD intitulé 'GENERATION MONDOTEK' comportant en outre des reportages les montrant, et diffusée sur internet ;

Qu'ils ont, dans ces conditions, fait assigner cette société le 11 décembre 2008 en contrefaçon de droits d'auteur ou d'artistes interprètes, subsidiairement parasitisme, violation du droit à l'image et réparation de leur préjudice moral ;

Que la société UNIVERSAL MUSIC a fait assigner en garantie le 19 janvier 2009 la société SAVE FERRIS chargée, selon contrats des 25 septembre et 3 octobre 2007, de la production, respectivement du clip réalisé par PAPOU (ou Paapoo) et des reportages en cause, et les deux instances ont été jointes le 20 février 2009 ;

Que, suivant jugement dont appel, les premiers juges ont, entre autres dispositions :

-dit que la chorégraphie dont TISHOU et KEN sont les auteurs bénéficie de la protection instaurée par le livre I du Code de la propriété intellectuelle et qu'en commercialisant le DVD reproduisant en particulier, sans leur autorisation, cette chorégraphie la société UNIVERSAL MUSIC a porté atteinte aux droits des auteurs, et aux droits d'artiste interprète de TISHOU, KEN et JEY JEY,

-rejeté leur demande de publication mais prononcé à l'encontre de la société UNIVERSAL MUSIC une mesure d'interdiction sous astreinte, la condamnant à payer en réparation 25.000 euros à TISHOU, 25.000 euros à KEN et 5.000 euros à JEY JEY, outre les frais et dépens, la société SAVE FERRIS étant condamnée à garantir cette société de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre ;

Sur les droits d'auteur et d'artistes interprètes

Considérant que pour combattre le grief de contrefaçon la société SAVE FERRIS, à laquelle s'associe la société UNIVERSAL MUSIC, maintient que TISHOU, KEN et JEY JEY auraient été rémunérés pour toutes leurs prestations, que l'existence de la création d'une chorégraphie ne serait pas établie, que l'originalité de cette chorégraphie ne serait pas plus démontrée, qu'en tout état de cause les droits sur ladite chorégraphie auraient été cédés, que les intéressés n'auraient pas la qualité d'artistes interprètes au sens de l'article L 212-3 du Code de la propriété intellectuelle et, subsidiairement, qu'ils auraient cédé leurs droits voisins ;

Considérant que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous qui comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial et ce droit est conféré à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination ; qu'il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d'une oeuvre, sans formalité, du seul fait de la création d'une forme originale ;

Considérant que certes il incombe, à celui qui entend se prévaloir de droits d'auteur de rapporter la preuve d'une création déterminée à une date certaine et de caractériser l'originalité de cette création, l'action en contrefaçon étant subordonnée à la condition que la création, objet de cette action, soit une oeuvre de l'esprit protégeable au sens de la loi, c'est à dire originale ;

Mais considérant que les premiers juges ont exactement rappelé que la qualité d'auteur appartient sauf preuve contraire à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée et qu'il résulte en l'espèce, en particulier de la jaquette du DVD litigieux, que ce dernier est diffusé et commercialisé par la société UNIVERSAL MUSIC en créditant KEN et TISHOU (ou TICHOU) de la chorégraphie du clip en cause ;

Qu'il sera ajouté que le générique du DVD lui-même les crédite clairement de cette chorégraphie, ce qui n'est au demeurant pas contesté, et leur qualité de chorégraphes qui n'est combattue par aucun élément s'avère confortée par des articles de presse comme relevé par le tribunal ;

Considérant que la société SAVE FERRIS, et la société UNIVERSAL MUSIC qui fait siens les moyens de cette dernière, se prévaudraient vainement du fait qu'elles ne seraient pas des professionnels de la danse, la bonne foi étant indifférente en la matière ; qu'elles ne sauraient pas plus valablement prétendre que l'existence de prestations réalisées en 2007 ne serait pas démontrée, faute de fixation antérieure, alors que le DVD fait mention d'un copyright de 2007 et que la société SAVE FERRIS a engagé les intéressés en tant qu'artistes chorégraphes en 2007 ainsi qu'il résulte des bulletins de paye et documents qu'elle verse aux débats (pièces 3, 4 et 11) ; qu'au surplus ces sociétés ont conclu (pièce 2) le 25 septembre 2007 un contrat relatif à la réalisation du 'concept clip Alive' par 'PAPOO', lequel évoquait dès le 19 octobre 2007 le tournage de la chorégraphie dans un mail adressé à TISHOU ;

Que ces actes d'exploitation font présumer que KEN et TISHOU sont bien les auteurs de la chorégraphie revendiquée et la décision entreprise sera confirmée à cet égard ;

Considérant que pour conclure à l'originalité de cette chorégraphie, dont les constats d'huissier de justice des 20 octobre et 31 décembre 2008 démontrent qu'elle était par ailleurs diffusée sur internet, KEN et TISHOU soutiennent, sans prétendre s'approprier le style induit par le mouvement dit 'tecktonik', qu'elle procède de la combinaison notamment de sa structuration (organisation de l'espace et gestuelle), de sa composition (chorégraphie organisée de façon collective et synchronisée) et de la diversité des mouvements par eux créés (décrits en pages 11 à 12 de leurs écritures) ; qu'ils précisent avoir en outre choisi la musique, les danseurs ou groupes mis en évidence, le thème et l'ambiance dans une mise en forme personnelle faisant suite à des répétitions pour lesquelles ils avaient loué une salle en octobre 2007, et dont des extraits figurent dans le DVD incriminé avec mentions de leur nom en qualité de chorégraphes ainsi que rappelé par le jugement dont appel ;

Que la société SAVE FERRIS à laquelle s'associe la société UNIVERSAL MUSIC, réitère ses contestations de première instance quant à l'originalité prétendue de la chorégraphie revendiquée, faisant en particulier valoir que des danseurs seraient déjà connus, tout comme les affrontements et mouvements invoqués ;

Mais considérant que s'il ressort des éléments qu'elle produit (pièces 18 à 20) que la danse dite tecktonik est née dans une discothèque de banlieue parisienne (ou dans des boites de nuit franciliennes), s'est diffusée par l'intermédiaire d'internet puis des médias de masse, que le danseur Jey Jey en est un pionner et que 'La danse se fait connaître du grand public en apparaissant dans des clips, notamment Alive de Mondotek', il apparaît également que 'Cette danse se caractérise principalement par la liberté de créer ses propre pas de danse' (pièce 8 de la société SAVE FERRIS) ;

Que force est de constater, au terme de l'examen des documents opposés, que si certains des éléments qui composent la chorégraphie en cause sont effectivement connus (tels le style de danse ou l'ambiance des 'battles' ou concours de danse organisés en public) et que, pris séparément, ils appartiennent au fonds commun de l'univers de la danse notamment de la danse 'électro', en revanche, leur combinaison telle que revendiquée, dès lors que l'appréciation de la Cour doit s'effectuer de manière globale, en fonction de l'aspect d'ensemble produit par l'agencement des différents éléments et non par l'examen de chacun d'eux pris individuellement, confère à cette chorégraphie une physionomie propre qui la distingue des autres interprétations ou 'numéros' de danse du même genre (ou du même 'mouvement tecktonik') en solo ou en groupe, et qui traduit un parti-pris esthétique empreint de la personnalité de leur auteur ; que, par voie de conséquence, que la chorégraphie de TISHOU et KEN est digne d'accéder à la protection instituée au titre du droit d'auteur et la décision entreprise doit également être approuvée sur ce point ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que KEN, TISHOU et JEY JEY ont exécuté la chorégraphie en cause, et le tribunal a justement retenu que s'agissant d'une oeuvre protégeable ils peuvent revendiquer des droits d'artistes interprètes ;

Sur la cession des droits

Considérant que la société SAVE FERRIS, et donc également la société UNIVERSAL MUSIC, prétendent cependant que les intéressés auraient cédé leurs droits patrimoniaux, que la Convention Collective Nationale de la production audio visuelle du 13 décembre 2006 qui renvoie à celle des artistes interprètes engagés pour une émission de télévision pourrait être légitimement invoquée et qu'elle serait de nature à suppléer le défaut de mention dans le contrat d'une rémunération en contrepartie d'un ou plusieurs modes d'exploitation ;

Qu'à cet égard la société SAVE FERRIS précise en cause d'appel que le verso d'un document signé par KEN, TISHOU et JEY JEY mentionnerait que l'exécution du contrat est régie par la convention collective des producteurs de films ;

Considérant qu'il sera observé que seul un document daté du 10 octobre 2007 (produit en pièce 3) concernant la prestation d'artiste chorégraphique de TISHOU, des 10 et 11 octobre 2007, pour le projet de clip permet de visualiser un verso imprimé, par ailleurs non signé ni paraphé, les autres documents du même genre produits en pièces 3, 4 et 5 par la société SAVE FERRIS ne présentant que le recto, sur lequel la signature de chacun des intéressés est effectivement apposée sous l'indication que 'le collaborateur reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales figurant tau verso' ;

Que ces documents qualifiés de contrats, établis et signés par la société SAVE FERRIS ne concernent en tout état de cause pas une cession de droits d'auteur ; qu'ils ne peuvent s'analyser qu'en des engagements de paiement de prestations initiales d'artiste chorégraphique ou de danseur ; qu'ils fixent en effet le salaire journalier brut dû pour les prestations des artistes dont s'agit, avec le nombre de jours concernés, et les bulletins de paie produits avec ces documents reprennent le montant des cachets ainsi fixés pour les projets 'Clip alive', 'Documentaire mondotek', 'Bonus dvd mondotek', hit ou émissions 'Mondotek' ; que les conditions générales invoquées (telles que reproduites uniquement que le document précité) renvoient en réalité aux conditions d'exécution du travail, sans avoir manifestement vocation à fixer une rémunération distincte de celle des prestations concernées ; que ces documents ne sauraient, en conséquence, valoir cession des droits voisins au sens de l'article L 212-4 du Code de la propriété intellectuelle, d'interprétation stricte ;

Sur la contrefaçon

Considérant que les premiers juges ont par des motifs exacts, que la cour adopte, retenu avec pertinence que la commercialisation du DVD, qui reprend le clip sur lequel figure la chorégraphie en cause, sans le consentement de leurs auteurs KEN et TISHOU, caractérise, faute de contrat, à la charge de la société UNIVERSAL MUSIC des actes de contrefaçon de droits d'auteur et que la société SAVE FERRIS est contractuellement tenue, à l'égard de cette dernière, d'en garantir les conséquences ;

Que, de même, le jugement doit être approuvé en ce qu'il a retenu que faute de cession des droits l'atteinte aux droits voisins de KEN, TISHOU et JEY JEY était constituée à la charge de la société UNIVERSAL MUSIC, la société SAVE FERRIS étant tenue à garantir celle-ci, en exécution des contrats de production de la vidéo musique et des reportages respectivement conclus les 25 septembre 2007 et 3 octobre 2007 ;

Que le tribunal en a justement déduit que la demande sur le parasitisme formée à titre subsidiaire, et réitérée comme telle en cause d'appel, devenait sans objet ;

Sur le droit à l'image

Considérant que KEN, TISHOU et JEY JEY, qui déclarent avoir accepté d'être filmés dans les reportages 'Tout pour le style', 'Tout pour la danse', 'On the Hair' et 'Génération Electro' et reconnaissent s'être produits sur scène ou sur des plateaux de télévision pour exécuter leur chorégraphie et promouvoir le single 'Alive' soutiennent qu'ils n'ont pas pour autant autorisé la reproduction de leur image dans un DVD ni la commercialisation de celui-ci ;

Mais considérant qu'en l'état de leur participation active aux interviews en cause, justement décrite par les premiers juges, les intéressés ne pouvaient sérieusement ignorer que ces interventions tendaient à commenter ou illustrer un phénomène de société, savoir la danse électro, en vue d'une diffusion au public et avaient ainsi un objet commercial ;qu'il n'est pas justifié d'une atteinte distincte des actes de contrefaçon, étant observé que l'insertion des images tirées de ces interviews dans le DVD tend à retracer un contexte qui est précisément l'objet des interviews accordées par les intéressés, permettant de retenir l'existence d'un accord tacite à la diffusion de ces images ; que le jugement entrepris mérite en conséquence confirmation en ce qu'il a estimé que KEN, TISHOU et JEY JEY avaient exprimé leur consentement à l'utilisation de leur image telle qu'incriminée et rejeté les demandes de ce chef ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que l'article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits et le préjudice moral causé au titulaire de ces droits du fait de l'atteinte », ces dispositions n'imposant pas au juge de détailler, pour chacun de ces éléments, la fraction du préjudice total qu'il représente et n'interdisant pas une évaluation globale ;

Considérant que les premiers juges ont relevé que le DVD auquel est associé un CD a généré un chiffre d'affaires total de 1.110.520,55 euros ; que les auteurs ou interprètes estiment que le chiffres d'affaires arrêté au 15 juin 2012 toutes exploitations confondues (3 CD/DVD, 1 DVD et 1 vidéoclip digital ainsi que précisé en page 33 de leurs écritures) s'établirait au vu des pièces produites par la société UNIVERSAL MUSIC à 1.218.412,30 euros, ce qui n'est contesté par cette dernière qu'à concurrence de 107.792,90 euros ; que la société UNIVERSAL MUSIC soutient en effet que pour la commercialisation d'un CD/DVD (n° 5121172), dont la vidéo musique ne représenterait que 5%, seules devraient être prises en compte la somme de 988,76 euros montant des redevances qu'elle aurait perçues ;

Considérant que les auteurs ou interprètes prétendent que le CD ne représenterait que 30% de l'attrait du coffret CD/DVD, ce qui établirait le chiffre d'affaires total de ventes du DVD à 872.819 euros et les bénéfices nets de ce chef à 598.974,40 euros ; que la société UNIVERSAL MUSIC soutient en revanche que la vidéo musique de la chanson 'Alive', à l'origine des atteintes retenues, ne représenterait que 1,94% du coffret et 3,66% du DVD et qu'ainsi le chiffre d'affaires réalisé au titre de la vidéo musique ne s'élèverait qu'à 51.821,23 euros ; qu'elle estime, compte tenu de la rémunération des autres acteurs concernés qui serait de 8,125% de ce chiffre d'affaires, que la rémunération de chacun des chorégraphes ne saurait excéder 2.000 euros et celle des interprètes de cette chorégraphie 500 euros ; qu'elle ajoute avoir cessé la commercialisation litigieuse ensuite du jugement, précisant qu'en l'absence de mesure judiciaire de retrait du marché il ne saurait lui être imputé à faute le fait d'avoir laissé à ses clients distributeurs les produits déjà vendus ;

Que la société SAVE FERRIS, qui retient le seul chiffre d'affaires global de 814.050,51 euros, correspondant en fait à la commercialisation d'un coffret CD/DVD n°8823724, prétend que la valorisation du DVD correspondrait au tiers de cette somme, soit 271.350 euros, et après déduction des frais de commercialisation et de commission à 189.945 euros, la vidéo musique ne comptant que pour 2,50%, ce qui représenterait une rémunération de 190 euros par interprète, précisant qu'elle aurait personnellement perçu 3.382 euros HT ;

Considérant que même dans l'association CD/DVD il ne saurait être admis que le CD est l'élément principal alors que la jaquette vante le contenu du DVD et notamment l'exclusivité du clip de mondotek, qu'il est précisé que le CD inclus ce tube de MONDOTEK et que, manifestement, le DVD a pour objet principal de valoriser ce clip 'Alive', seuls étant cités les noms des chorégraphes TISHOU et KEN et de trois danseurs dont celui de JEY JEY qui est mis en avant ; qu'à cet égard, il convient de relever que ce dernier bénéficiait d'une certaine notoriété et est d'ailleurs présenté dans le DVD comme une 'star du net' et la vedette du clip ;

Que s'il n'a pas été admis que les extraits d'interviews compris dans les reportages inclus dans le DVD portent atteintes au droit à l'image des intéressés, le clip demeure central, les autres chapitres (concernant les reportages) ne tendant qu'à valoriser sa présentation, savoir l'oeuvre chorégraphique de KEN et TISHOU et l'interprétation, en particulier de JEY JEY manifestement connu comme danseur 'ELECTRO-TEK' ;

Considérant qu'il ne saurait être dénié que les intéressés ont subi, outre une atteinte à leurs droits patrimoniaux d'auteurs ou d'artistes interprètes, non négligeable eu égard aux éléments chiffrés d'exploitation fournis par la société UNIVERSAL MUSIC, un réel préjudice moral à raison de la commercialisation de leur oeuvre ou interprétation et à sa diffusion sur internet faite à leur insu par un professionnel de la production, et ce, même si leur noms et qualité ont été mentionnés et s'il n'apparaît pas que ces agissements ont réellement perduré de son fait ensuite de la reconnaissance judiciaire de leurs droits ;

Considérant que compte tenu de l'ensemble de ces éléments d'appréciation la cour estime que les sommes allouées à TISHOU et KEN indemnisent le préjudice, tant patrimonial que moral, par eux subis du fait des atteintes à leurs droits d'auteur et d'artistes interprètes, qu'en revanche une somme globale de 10.000 euros indemnisera plus justement le préjudice, patrimonial et moral, subi par JEY JEY en sa qualité d'artiste interprète ;

Que la mesure d'interdiction ordonnée par les premiers juges, justifiée dans son principe et pertinente dans ses modalités au regard de la nécessité de faire cesser les actes illicites et de prévenir leur renouvellement, sera purement et simplement confirmée ;

Qu'il convient d'y ajouter une mesure de publication, dans les limites et conditions prévues au présent dispositif, de nature à compléter de manière proportionnée la réparation des atteintes subies ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a limité à 5.000 euros la réparation de l'atteinte au droit d'artiste interprète de Jérôme BOÏTO et rejeté la demande de publication judiciaire ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Condamne la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE à payer à Jérôme BOÏTO la somme de 10.000 euros en réparation de l'atteinte à son droit d'artiste interprète ;

Autorise la publication, par extraits, du dispositif du jugement dont appel avec mention du présent arrêt dans trois revues ou journaux au choix de Tishou KANE dite TISHOU, de Cain KITSAIS dit KEN et de Jérôme BOÏTO dit JEY JEY, dont les frais, dans la limite de 3.000 euros HT par publication, devront leur être remboursés par la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE sur simple présentation d'une facture acquittée ;

Rappelle que la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE est condamnée à garantir la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE de l'intégralité des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière et dit que celles-ci incluent, en ce compris les frais et dépens, celles prononcées en cause d'appel ;

Rejette toutes autres demandes des parties contraires à la motivation ;

Condamne la société UNIVERSAL MUSIC FRANCE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, et à verser à Tishou KANE, Cain KITSAIS et Jérôme BOÏTO une somme complémentaire globale de 6.000 euros en application de l'article 700 du dit Code, au titre des frais irrépétibles d'appel.