CA Besançon, 1ere ch. civ., 3 octobre 2007, n° 06/00374
BESANÇON
Arrêt
Par jugement en date du 24 janvier 2006, auquel la Cour se réfère expressément pour l'exposé des faits et de la procédure, le tribunal de grande instance de Besançon a :
- prononcé la résolution du contrat d'entreprise souscrit par les époux B. avec Paul M., aux torts exclusifs de celui-ci ;
- ordonné la restitution par Paul M. aux époux B. de la somme de 17 825 € ;
- condamné Paul M. à payer aux époux B., à titre de dommages-intérêts, la somme de 7 243, 69 € , en réparation de leur préjudice matériel, et celle de 10 000 € , en réparation de leur préjudice de jouissance ;
- dit que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- débouté Paul M. de sa demande de garantie dirigée contre la société GROUPAMA ;
- condamné Paul M. à payer aux époux B. la somme de
1 000 € , sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision à concurrence de la moitié des sommes allouées ;
- condamné Paul M. aux dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire.
Paul M. a régulièrement interjeté appel de cette décision, le 24 février 2006, en dirigeant son recours contre Chantal B., le 14 mars 2006, en dirigeant son recours contre Philippe B..
Par ordonnance en date du 30 mars 2006, les deux affaires ont été jointes.
Paul M. demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré ; de débouter les époux Philippe B. de l'ensemble de leurs demandes ; subsidiairement, de dire qu'il n'y a pas lieu à réparation au titre du préjudice matériel allégué ; de réduire à de justes proportions les sommes réclamées au titre du remboursement de l'installation de chauffage et au titre du préjudice de jouissance ; et de condamner les époux Philippe B. à lui payer la somme de 1 500 € , au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Il fait valoir qu'à la date du règlement du solde de sa facture, fin juillet 2003, l'installation fonctionnait correctement ; qu'il s'est impliqué personnellement pour remédier au problème posé par les époux B. ; que ces derniers lui ont interdit d'intervenir.
Il ajoute que le rapport d'expertise TOUZALIN manque clairement d'objectivité ; que la solution préconisée par celui-ci est totalement exorbitante et va à l'encontre des choix des époux B. ; que la compagnie GROUPAMA lui devra sa garantie.
Les époux Philippe B. demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré, en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat d'entreprise souscrit par eux avec Paul M., aux torts exclusifs de ce dernier ; de le confirmer sur la restitution de la somme de 17 825 € , sauf à réactualiser ; de le réformer pour le surplus ; de condamner Paul M. à leur payer la somme de 12 835 € , en réparation du préjudice matériel, et la somme de 20 000 € , en réparation de la perte de jouissance et du préjudice moral ; et de condamner Paul M. à leur verser une indemnité de 1 500 € , sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils font valoir que l'installation de géothermie n'a jamais fonctionné, la conception même du projet étant en cause ; qu'ils ont réglé la somme de 15 500 € , sur l'appel de quatre factures ; que la réalisation du tableau électrique et le passage en 380 V triphasé étaient exclusivement justifiés par les caractéristiques de la pompe à chaleur ; que les frais de désinstallation du chauffage doivent être pris en charge par Paul M..
Ils ajoutent que les conséquences dommageables de l'utilisation des poêles doivent être mises à la charge de celui-ci ; que leur préjudice de jouissance est très important.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 août 2007.
MOTIFS DE LA DÉCISION
* Sur la résolution du contrat d'entreprise
Attendu que, par des motifs pertinents que la Cour adopte, le premier juge a prononcé la
résolution du contrat d'entreprise conclu entre Paul M. et les époux Philippe B., aux torts exclusifs du premier ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;
* Sur la restitution des sommes versées par les maîtres de l'ouvrage
Attendu que lorsqu'un contrat synallagmatique est résolu, pour inexécution par l'une des parties de ses obligations, les choses doivent être remises au même état que si les obligations nées du contrat n'avaient jamais existé ;
Attendu que le prix que l'entrepreneur est tenu de restituer après résolution du contrat d'entreprise ne peut s'entendre que de la somme qu'il a reçue, éventuellement augmentée des intérêts, et sauf au juge à accorder en outre des dommages-intérêts ;
Attendu qu'il est constant que les intimés ont réglé à l'appelant la somme globale de 15 500 € , au titre du contrat d'entreprise résolu ; que si cette somme intègre le paiement d'une facture d'électricité, d'un montant de 810, 71 € TTC, celle-ci concerne la réalisation d'un tableau électrique nécessité par les caractéristiques de la pompe à chaleur devant être obligatoirement alimentée avec une tension secteur de 400 V (soit 380 V triphasé), selon l'expert judiciaire ;
Attendu, en revanche, que la somme de 15 500 € n'avait pas à être actualisée, ce qui ne rentrait pas d'ailleurs dans la mission de l'expert ;
Attendu, en conséquence, que le jugement déféré doit être réformé sur ce point ; que Paul M. doit être condamné à la restitution de la somme de 15 500 € , outre intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2006, date du prononcé de la résolution judiciaire du contrat ;
* Sur les dommages-intérêts
Sur le préjudice matériel
Attendu que le contrat d'entreprise étant résolu, Paul M. doit supporter le coût des travaux de remise en état des lieux, au titre des travaux de maçonnerie et des travaux de modification des branchements électriques ;
Attendu qu'en ce qui concerne les premiers, le premier juge a retenu la somme de 4 886,46 € ; que celle-ci intègre la somme de 2 066,14 € , correspondant à la fourniture de volets, la dépose et l'évacuation de l'ancien parquet et la fourniture d'un nouveau parquet ;
Attendu que ce poste de préjudice est étranger à la résolution du contrat ; que la somme de 2 820,32 € doit ainsi être retenue au titre des travaux de maçonnerie ;
Attendu que la somme de 273,41 € doit être retenue au titre des travaux de modification du branchement EDF en triphasé ;
Attendu, pour le surplus, que les époux Philippe B. étaient, en tout état de cause, dans l'obligation d'assurer leur chauffage ; que les factures correspondant à l'achat de poêles et de combustibles doivent être rejetées ;
Attendu que les choix, qu'ils ont faits, quant à l'achat de ces poêles et les conséquences de celui-ci leur incombent ; qu'ils ne sont pas fondés à voir imputer les travaux de réfection de leur habitation à l'entrepreneur ;
Attendu, en conséquence, que le jugement déféré doit être réformé ; que la somme de 3
093,73 € (2 820,32 € + 273,41 € ) doit être allouée aux intimés, en réparation de leur préjudice matériel, outre intérêts au taux légal à compter de la date du jugement déféré ;
Sur le préjudice de jouissance
Attendu que, par des motifs pertinents que la Cour adopte, le premier juge a alloué aux époux Philippe B. la somme de 10 000 € , à ce titre, outre intérêts au taux légal à compter du jugement, que ce dernier doit être confirmé sur ce point, l'existence d'un éventuel préjudice moral n'étant, au surplus, pas démontrée ;
Sur la demande en garantie dirigée contre la compagnie GROUPAMA
Attendu que cette dernière n'a pas été attraite dans la cause ;
Attendu que le jugement déféré doit être réformé sur ce point ; que la demande correspondante présentée par Paul M. doit être déclarée irrecevable ;
Sur les demandes annexes
Attendu que chacune des parties succombe en ses prétentions ; qu'il convient de les débouter de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; et de laisser à chacune d'elles la charge de ses propres dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique, contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré ;
DÉCLARE les appels recevables en la forme ;
DIT l'appel principal partiellement fondé, l'appel incident non fondé ;
CONFIRME le jugement rendu, le 24 janvier 2006, par le tribunal de grande instance de Besançon, en ce qu'il a :
- prononcé la résolution du contrat d'entreprise souscrit par les époux Philippe B. avec Paul M., aux torts exclusifs de ce dernier ;
- condamné Paul M. à payer aux époux B. la somme de 10 000 € , en réparation de leur préjudice de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
- condamné Paul M. à payer aux époux B. la somme de 1 000 € , sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
- condamné Paul M. aux dépens, comprenant les frais d'expertise judiciaire ;
RÉFORME le jugement en toutes ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau,
ORDONNE la restitution par Paul M. aux époux Philippe B. de la somme de 15 500 € (QUINZE MILLE CINQ CENTS EUROS), outre intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2006 ;
C. Paul M. à payer aux époux Philippe B. la somme de 3 093,73 € (TROIS MILLE QUATRE-VINGT-TREIZE EUROS ET SOIXANTE-TREIZE CENTIMES), en réparation de leur préjudice matériel, avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2006 ;
D. Paul M. irrecevable en sa demande de garantie par la société GROUPAMA ;
Ajoutant au jugement ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel ;
LAISSE à chacune des parties la charge de ses propres dépens d'appel.
LEDIT ARRÊT a été prononcé en audience publique et signé par Monsieur B. GAUTHIER, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre, Magistrat ayant participé au délibéré, et Madame M. DEVILLARD, Greffier.