CJUE, 4e ch., 15 septembre 2022, n° C-416/21
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Landkreis Aichach-Friedberg
Défendeur :
J. Sch. Omnibusunternehmen, K. Reisen GmbH, E. GmbH & Co. KG
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
C. Lycourgos (rapporteur)
Juges :
S. Rodin, J.-C. Bonichot, L. S. Rossi, O. Spineanu-Matei
Avocat général :
M. Campos Sánchez-Bordona
Avocats :
R. Wiemann, J. R. Eydner , A. Kafedžić, S. Janka, U.-D. Pape
LA COUR (quatrième chambre),
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 18, paragraphe 1, et de l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE (JO 2014, L 94, p. 65), telle que modifiée par le règlement délégué (UE) 2017/2365 de la Commission, du 18 décembre 2017 (JO 2017, L 337, p. 19) (ci-après la « directive 2014/24 »).
2 Cette demande est présentée dans le cadre d’un litige opposant le Landkreis Aichach-Friedberg (district d’Aichach-Friedberg, Allemagne) à J. Sch. Omnibusunternehmen (ci-après « J ») et à K. Reisen GmbH au sujet de l’attribution, par ce district, d’un marché public portant sur des services de transports publics par autobus.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La directive 93/37/CEE
3 L’article 24, premier alinéa, de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (JO 1993, L 199, p. 54), comportait la liste des motifs d’exclusion facultatifs de la participation à une procédure de passation de marché de tout entrepreneur.
La directive 2014/24
4 Le considérant 101, premier alinéa, de la directive 2014/24 se lit comme suit :
« Les pouvoirs adjudicateurs devraient en outre pouvoir exclure des opérateurs économiques qui se seraient avérés non fiables, par exemple pour manquement à des obligations environnementales ou sociales, y compris aux règles d’accessibilité pour les personnes handicapées, ou pour d’autres fautes professionnelles graves telles que la violation de règles de concurrence ou de droits de propriété intellectuelle. [...] »
5 Conformément à l’article 2, paragraphe 1, point 10, de cette directive, aux fins de celle-ci, on entend par « opérateur économique », toute personne physique ou morale ou entité publique, ou tout groupement de ces personnes et/ou entités, y compris toute association temporaire d’entreprises, qui offre la réalisation de travaux et/ou d’ouvrages, la fourniture de produits ou la prestation de services sur le marché.
6 Selon l’article 4, sous c), de ladite directive, celle-ci s’applique aux marchés dont la valeur estimée hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est égale ou supérieure à 221 000 euros, notamment, pour les marchés publics de fournitures et de services passés par des pouvoirs adjudicateurs sous-centraux et pour les concours organisés par ceux-ci.
7 L’article 18 de la même directive, intitulé « Principes de la passation de marchés », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Les pouvoirs adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité et sans discrimination et agissent d’une manière transparente et proportionnée.
Un marché ne peut être conçu dans l’intention de le soustraire au champ d’application de la présente directive ou de limiter artificiellement la concurrence. La concurrence est considérée comme artificiellement limitée lorsqu’un marché est conçu dans l’intention de favoriser ou de défavoriser indûment certains opérateurs économiques. »
8 L’article 57 de la directive 2014/24, intitulé « Motifs d’exclusion », dispose :
« [...]
4. Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exclure ou être obligés par les États membres à exclure tout opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché dans l’un des cas suivants :
[...]
c) le pouvoir adjudicateur peut démontrer par tout moyen approprié que l’opérateur économique a commis une faute professionnelle grave qui remet en cause son intégrité ;
d) le pouvoir adjudicateur dispose d’éléments suffisamment plausibles pour conclure que l’opérateur économique a conclu des accords avec d’autres opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence ;
e) il ne peut être remédié à un conflit d’intérêts au sens de l’article 24 par d’autres mesures moins intrusives ;
f) il ne peut être remédié à une distorsion de la concurrence résultant de la participation préalable des opérateurs économiques à la préparation de la procédure de passation de marché, visée à l’article 41, par d’autres mesures moins intrusives ;
[...]
6. Tout opérateur économique qui se trouve dans l’une des situations visées aux paragraphes 1 et 4 peut fournir des preuves afin d’attester que les mesures qu’il a prises suffisent à démontrer sa fiabilité malgré l’existence d’un motif d’exclusion pertinent. Si ces preuves sont jugées suffisantes, l’opérateur économique concerné n’est pas exclu de la procédure de passation de marché.
[...]
7. Par disposition législative, réglementaire ou administrative et dans le respect du droit de l’Union, les États membres arrêtent les conditions d’application du présent article. [...] »
La directive 2014/25/UE
9 L’article 11 de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE (JO 2014, L 94, p. 243), telle que modifiée par le règlement délégué (UE) 2017/2364 de la Commission, du 18 décembre 2017 (JO 2017, L 337, p. 17) (ci-après la « directive 2014/25 »), prévoit :
« La présente directive s’applique aux activités visant la mise à disposition ou l’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par chemin de fer, systèmes automatiques, tramway, trolleybus, autobus ou câble.
En ce qui concerne les services de transport, il est considéré qu’un réseau existe lorsque le service est fourni dans les conditions déterminées par une autorité compétente d’un État membre, telles que les conditions relatives aux itinéraires à suivre, à la capacité de transport disponible ou à la fréquence du service. »
10 L’article 15, sous a), de la directive 2014/25 dispose :
« À moins qu’ils ne soient exclus en vertu des exclusions prévues aux articles 18 à 23 ou conformément à l’article 34 concernant la poursuite de l’activité en question, la présente directive s’applique aux marchés dont la valeur estimée hors [TVA] est égale ou supérieure aux seuils suivants :
a) 443 000 EUR pour les marchés de fournitures et de services et pour les concours ».
11 L’article 36, paragraphe 1, de cette directive est libellé comme suit :
« Les entités adjudicatrices traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité et sans discrimination et agissent d’une manière transparente et proportionnée.
[...] »
12 Sous le titre « Utilisation des motifs d’exclusion et des critères de sélection prévus par la directive [2014/24] », l’article 80 de la directive 2014/25 énonce, à son paragraphe 1 :
« Les règles et les critères objectifs d’exclusion et de sélection des opérateurs économiques qui demandent à être qualifiés dans le cadre d’un système de qualification et les règles et les critères objectifs d’exclusion et de sélection des candidats et des soumissionnaires dans des procédures ouvertes, restreintes ou négociées, dans des dialogues compétitifs ou dans des partenariats d’innovation peuvent inclure les motifs d’exclusion énumérés à l’article 57 de la directive [2014/24], dans les conditions qui y sont exposées.
[...]
Si les États membres le demandent, ces critères et règles incluent en outre les critères d’exclusion énumérés à l’article 57, paragraphe 4, de la directive [2014/24], dans les conditions qui y sont exposées. »
Le droit allemand
13 L’article 1er du Gesetz gegen Wettbewerbsbeschränkungen (loi contre les restrictions de concurrence), du 26 juin 2013 (BGBl. 2013 I, p. 1750), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après le « GWB »), prévoit :
« Sont interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées dont le but ou l’effet est d’entraver, de restreindre ou de fausser la concurrence. »
14 L’article 124, paragraphe 1, du GWB, qui transpose en droit allemand l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, dispose, à son point 4 :
« Les pouvoirs adjudicateurs peuvent, en respectant le principe de proportionnalité, exclure une entreprise de la participation à une procédure de passation de marché à tout moment de cette procédure, lorsque :
[...]
4. le pouvoir adjudicateur dispose d’éléments suffisamment plausibles pour conclure que l’entreprise a conclu des accords ou s’est concerté sur des pratiques avec d’autres entreprises dont le but ou l’effet est d’entraver, de restreindre ou de fausser la concurrence ;
[...] »
Le litige au principal et les questions préjudicielles
15 Le 19 décembre 2019, le district d’Aichach-Friedberg a publié un avis de marché en vue de l’attribution, par voie de procédure ouverte, d’un marché public concernant des services de transports publics par autobus, dont la valeur estimée excède le seuil prévu à l’article 4, sous c), de la directive 2014/24.
16 J est un commerçant agissant en nom propre et K. Reisen est une société à responsabilité limitée de transport par autobus dont J est le gérant et unique associé.
17 Le 27 février 2020, tant J que K. Reisen ont soumis des offres concernant l’avis de marché par l’intermédiaire de la même personne, à savoir J. Le patrimoine de J a fait l’objet d’une procédure d’insolvabilité le 1er novembre 2019 et, par décision du 1er décembre 2019, l’administrateur judiciaire a sorti du champ de cette procédure l’activité indépendante de J. Dans son offre, J a déclaré qu’aucune procédure d’insolvabilité n’avait été demandée ni ouverte contre son entreprise.
18 Le 2 avril 2020, J et K. Reisen ont été informés, d’une part, que leurs offres avaient été exclues pour violation des règles de la concurrence, dans la mesure où elles avaient été établies par la même personne, et, d’autre part, que le marché en cause serait attribué à E. Gmbh & Co. KG.
19 Après avoir déposé une réclamation qui a été rejetée, J et K. Reisen ont introduit un recours auprès de la Vergabekammer Südbayern (chambre des marchés publics de Bavière du sud, Allemagne). Par une décision du 12 janvier 2021, celle-ci a fait droit à ce recours en enjoignant au district d’Aichach-Friedberg de réintégrer les offres de ces soumissionnaires dans la procédure de passation du marché en cause. En particulier, selon cette chambre, eu égard à l’arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas (C 531/16, EU:C:2018:324), le comportement de ceux-ci ne relève pas de l’article 101 TFUE dans la mesure où ils forment une unité économique.
20 Le district d’Aichach-Friedberg a interjeté appel de cette décision devant le Bayerisches Oberstes Landesgericht (tribunal régional supérieur de Bavière, Allemagne). Selon ce district, permettre à deux soumissionnaires formant une unité économique de participer à la procédure de passation d’un marché est incompatible avec les intérêts des autres soumissionnaires et porte atteinte au principe d’égalité de traitement ainsi qu’aux règles de la concurrence, notamment en ce que ces soumissionnaires sont en mesure de concerter leurs offres respectives.
21 J et K. Reisen considèrent que, eu égard à l’arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas (C 531/16, EU:C:2018:324), l’exclusion d’un soumissionnaire au motif de la violation des règles de la concurrence n’est possible que dans l’hypothèse où la situation concernée relève de l’article 101 TFUE. En outre, le caractère exhaustif des motifs d’exclusion prévus par la directive 2014/24 s’opposerait au recours au principe d’égalité de traitement des soumissionnaires.
22 À cet égard, la juridiction de renvoi indique que J et K. Reisen forment une unité économique au sens de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 101 TFUE. Cette juridiction s’interroge sur le point de savoir si l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 doit être compris comme exigeant, pour l’application du motif facultatif d’exclusion qui y est prévu, que le pouvoir adjudicateur dispose d’indices suffisamment plausibles d’une violation de l’article 101 TFUE. Elle estime qu’il conviendrait de répondre par l’affirmative à cette question, dès lors qu’une exclusion au titre de cette disposition de la directive 2014/24 suppose une infraction à une règle du droit des ententes. Or, une telle infraction ne saurait être envisagée dans le cas où les entreprises concernées forment une unité économique et peuvent donc se prévaloir du « privilège de groupe ».
23 Par ailleurs, la juridiction de renvoi se demande si l’énumération des motifs facultatifs d’exclusion figurant à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24 empêche que puisse être invoqué le principe d’égalité de traitement pour justifier la non prise en compte d’offres présentées par deux soumissionnaires formant une unité économique.
24 Concrètement, il conviendrait de préciser si la jurisprudence issue de l’arrêt du 16 décembre 2008, Michaniki (C 213/07, EU:C:2008:731, points 44 et suivants), est transposable à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24. À cet égard, la juridiction de renvoi considère que, malgré les différences entre la liste des motifs facultatifs d’exclusion prévue à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24 et celles qui figuraient dans les directives antérieures relatives à la passation de marchés publics, le principe d’égalité de traitement continue à s’opposer à une prise en compte d’offres non autonomes ni indépendantes présentées par des entreprises liées.
25 Enfin, il y aurait lieu de déterminer l’applicabilité de la jurisprudence de la Cour relative aux offres qui ne sont ni autonomes ni indépendantes de la part de soumissionnaires liés (arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas, C 531/16, EU:C:2018:324), aux offres présentées par des soumissionnaires constituant une unité économique. La juridiction de renvoi estime que, eu égard à cet arrêt, le principe d’égalité de traitement s’oppose a fortiori à ce qu’un marché puisse être attribué à des soumissionnaires formant une unité économique et n’étant pas en mesure de présenter des offres autonomes ou indépendantes.
26 Dans ces conditions, le Bayerisches Oberstes Landesgericht (tribunal régional supérieur de Bavière) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Faut-il comprendre l’article 57, paragraphe 4, [premier alinéa,] sous d), de la directive 2014/24 comme impliquant que le pouvoir adjudicateur doit disposer d’indices suffisamment plausibles pour conclure que les opérateurs ont enfreint l’article 101 TFUE ?
[En cas de réponse affirmative :]
2) Faut-il comprendre l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, en tant que disposition régissant de manière exhaustive les motifs d’exclusion facultatifs, en ce sens que le principe d’égalité de traitement (article 18, paragraphe 1, de cette directive) – lorsque les offres présentées ne sont ni autonomes ni indépendantes – ne peut pas faire obstacle à l’attribution du marché ?
3) Faut-il comprendre l’article 18, paragraphe 1, de la directive 2014/24 comme s’opposant à ce qu’un marché soit attribué à des entreprises qui forment une unité économique et ont chacune présenté une offre ? »
Sur les questions préjudicielles
Observations liminaires
27 Par ses questions, la juridiction de renvoi vise l’interprétation de l’article 18, paragraphe 1, et de l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 dans le cadre d’une procédure d’attribution d’un marché public portant sur des services de transports publics par autobus.
28 Il importe de rappeler, à cet égard, que, selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la procédure de coopération entre les juridictions nationales et la Cour instituée à l’article 267 TFUE, il appartient à celle-ci de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises. En outre, la Cour peut être amenée à prendre en considération des normes du droit de l’Union auxquelles le juge national n’a pas fait référence dans l’énoncé de sa question (voir, en ce sens, arrêt du 14 mai 2020, T-Systems Magyarország, C 263/19, EU:C:2020:373, point 45 et jurisprudence citée).
29 En l’occurrence, il y a lieu de constater que la mise à disposition ou l’exploitation de réseaux destinés à fournir un service au public dans le domaine du transport par autobus est explicitement citée, à l’article 11 de la directive 2014/25, parmi les domaines auxquels cette dernière s’applique. Ainsi, pour autant que, par le marché en cause au principal, l’entité adjudicatrice vise une telle mise à disposition ou une telle exploitation de réseaux et que ce marché dépasse le seuil indiqué à l’article 15, sous a), de cette directive, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier, il convient de considérer que, eu égard à son objet, ledit marché entre dans le champ d’application de ladite directive.
30 À cet égard, compte tenu des dispositions citées par la juridiction de renvoi dans sa demande de décision préjudicielle, il importe de relever, premièrement, qu’il convient d’interpréter l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25, selon lequel les entités adjudicatrices traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité et sans discrimination et agissent d’une manière transparente et proportionnée, et qui correspond, en substance, aux dispositions de l’article 18, paragraphe 1, de la directive 2014/24.
31 Deuxièmement, en ce qui concerne les motifs d’exclusion facultatifs, la directive 2014/25 ne comporte pas de disposition autonome, mais renvoie à cet égard à la directive 2014/24.
32 En particulier, l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25 dispose que, si les États membres le demandent, les règles et les critères objectifs d’exclusion et de sélection des candidats et des soumissionnaires, notamment dans des procédures ouvertes, restreintes ou négociées, incluent les critères d’exclusion énumérés à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, « dans les conditions qui y sont exposées ».
33 Il y a lieu de relever que les termes « dans les conditions qui y sont exposées » renvoient aux conditions mentionnées à cet article 57, paragraphe 4 (voir, par analogie, arrêt du 13 décembre 2012, Forposta et ABC Direct Contact, C 465/11, EU:C:2012:801, point 33).
34 Par conséquent, si, à la suite des vérifications effectuées par la juridiction de renvoi, il apparaît que la directive 2014/25 s’applique à la procédure de passation de marché en cause au principal, il importe que, aux fins de donner une réponse utile aux questions posées, la Cour interprète l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, et, en particulier, le premier alinéa, sous d), de cette disposition, qui est spécifiquement visé par la demande de décision préjudicielle, l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25 permettant aux États membres de rendre ladite disposition de la directive 2014/24 applicable dans de telles procédures.
Sur la première question
35 Dans ces conditions, il convient de considérer que, par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, doit être interprété en ce sens que le motif d’exclusion facultatif prévu à cet article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), vise uniquement les cas où il existe des indices suffisamment plausibles pour conclure que des opérateurs économiques ont enfreint l’article 101 TFUE.
36 Il ressort de la demande de décision préjudicielle que les interrogations de cette juridiction quant à la portée du motif d’exclusion facultatif prévu audit article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), sont fondées sur le fait que l’article 124, paragraphe 1, point 4, du GWB, qui transpose en droit allemand le même article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), reprend la formulation de l’interdiction des accords restreignant la concurrence figurant à l’article 1er du GWB, qui, en substance, reproduit, en droit allemand, l’article 101 TFUE. Or, elle rappelle qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour (arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas, C 531/16, EU:C:2018:324, point 28 et jurisprudence citée), que ce dernier article n’est pas applicable dans l’hypothèse où les accords qu’il interdit sont mis en œuvre par des entreprises, qui, comme en l’espèce, forment une unité économique.
37 Il y a lieu, tout d’abord, de rappeler que, conformément à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24, les pouvoirs adjudicateurs peuvent exclure ou être obligés par les États membres d’exclure tout opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché lorsque le pouvoir adjudicateur dispose d’éléments suffisamment plausibles pour conclure que l’opérateur économique a conclu des accords avec d’autres opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence.
38 Force est de constater que cette disposition vise, de manière générale, « des accords [conclus] avec d’autres opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence ». Son libellé ne mentionne pas l’article 101 TFUE et, en particulier, contrairement à ce dernier, ne comporte pas l’exigence que ces accords soient conclus « entre entreprises », au sens de cette disposition, et soient « susceptibles d’affecter le commerce entre États membres ».
39 Il s’ensuit que l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 renvoie à des cas où des opérateurs économiques concluent un accord anticoncurrentiel, quel qu’il soit, et ne saurait être limité aux seuls accords entre entreprises visés à l’article 101 TFUE.
40 Ensuite, l’objectif sous-tendant l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 confirme cette interprétation.
41 La Cour a jugé que la faculté, voire l’obligation, pour le pouvoir adjudicateur d’exclure un opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché est tout particulièrement destinée à lui permettre d’apprécier l’intégrité et la fiabilité de chacun des opérateurs économiques. Notamment, le motif d’exclusion facultatif mentionné à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24, lu en combinaison avec le considérant 101 de cette directive, se fonde sur un élément essentiel de la relation entre l’adjudicataire du marché en cause et le pouvoir adjudicateur, à savoir la fiabilité du premier, sur laquelle repose la confiance que le second lui accorde (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Tim, C 395/18, EU:C:2020:58, point 41).
42 Ainsi, l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 vise à permettre aux pouvoirs adjudicateurs d’apprécier et de prendre en compte l’intégrité et la fiabilité de chacun des opérateurs économiques, afin de pouvoir exclure des procédures de marché les soumissionnaires non fiables avec lesquels ils ne pourraient pas entretenir une relation de confiance pour mener à bien la fourniture des services concernés lors de l’exécution du marché en cause.
43 Or, un tel objectif apparaît différent de celui visé à l’article 101 TFUE. En effet, ce dernier vise à réprimer les comportements anticoncurrentiels des entreprises et à dissuader celles-ci de se livrer à de tels comportements (arrêt du 6 octobre 2021, Sumal, C 882/19, EU:C:2021:800, point 37).
44 L’objectif de l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 conduit donc à une interprétation large de cette disposition selon laquelle, notamment, des accords entre opérateurs économiques qui n’affectent pas le commerce entre États membres soient pris en compte par les pouvoirs adjudicateurs dans le cadre du motif d’exclusion facultatif qui y est prévu.
45 Enfin, quant au contexte de ladite disposition, il y a lieu de relever que, dans le cadre du motif d’exclusion facultatif prévu à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous c), de la directive 2014/24, la notion de « faute professionnelle », qui couvre tout comportement fautif ayant une incidence sur la crédibilité, l’intégrité ou la fiabilité professionnelle de l’opérateur économique en cause, doit faire l’objet d’une interprétation large (voir, en ce sens, ordonnance du 4 juin 2019, Consorzio Nazionale Servizi, C 425/18, EU:C:2019:476, points 29 et 30).
46 Dans ces conditions, dès lors que, ainsi qu’il ressort du considérant 101 de la directive 2014/24, la violation des règles de la concurrence peut, au regard de l’objectif de l’article 57, paragraphe 4, de cette directive exposé au point 39 du présent arrêt, être considérée comme un type de faute professionnelle grave, il serait incohérent de donner à la notion d’« accords », prévue au premier alinéa, sous d), de cette disposition, une interprétation étroite, qui serait limitée aux seuls accords entre entreprises visés à l’article 101 TFUE.
47 Cela d’autant plus que la notion d’« opérateur économique », définie à l’article 2, paragraphe 1, point 10, de la directive 2014/24, ne se réfère pas à la notion d’« entreprise », au sens de l’article 101 TFUE.
48 Par conséquent, il y a lieu de conclure que, si l’existence d’un accord au sens de l’article 101 TFUE doit être considérée comme relevant du motif d’exclusion facultatif figurant à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24, il n’en demeure pas moins que cette dernière disposition a une portée plus large, qui vise également la conclusion, par des opérateurs économiques, d’accords anticoncurrentiels qui ne relèvent pas de l’article 101 TFUE. Dès lors, le seul fait qu’un tel accord entre deux opérateurs économiques ne relève pas de cet article n’empêche pas qu’il puisse être couvert par ce motif d’exclusion facultatif.
49 Toutefois, afin de donner une réponse utile à la juridiction de renvoi, il convient de souligner que cette disposition de la directive 2014/24 vise le cas où il existe suffisamment d’éléments permettant au pouvoir adjudicateur de considérer qu’un accord a été conclu entre deux ou plusieurs opérateurs économiques en vue de fausser la concurrence, ce qui suppose nécessairement qu’il y ait une convergence de volontés d’au moins deux opérateurs économiques différents.
50 En l’occurrence, il convient de relever, ainsi que l’indique la Commission européenne, que dans un cas tel que celui en cause au principal, il ne saurait être considéré que deux opérateurs économiques qui, pour l’essentiel, passent par la même personne physique pour prendre leurs décisions, peuvent conclure des « accords » entre eux, dans la mesure où il ne semble pas exister deux volontés distinctes qui soient susceptibles de converger. Il revient, cependant, à la juridiction de renvoi de vérifier si, eu égard au lien existant entre J et K. Reisen, il est possible qu’ils puissent conclure de tels accords en vue de fausser la concurrence. Si tel n’est pas le cas, le motif d’exclusion facultatif prévu à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24 ne saurait s’appliquer à leur situation.
51 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, doit être interprété en ce sens que le motif d’exclusion facultatif prévu à cet article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), vise les cas où il existe des indices suffisamment plausibles pour conclure que des opérateurs économiques ont conclu un accord proscrit par l’article 101 TFUE, mais n’est pas limité aux seuls accords prévus à ce dernier article.
Sur les deuxième et troisième questions
52 Par ses deuxième et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, doit être interprété en ce sens que cet article 57, paragraphe 4, régit de manière exhaustive les motifs d’exclusion facultatifs, ce qui empêche que le principe d’égalité de traitement, prévu à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25, puisse faire obstacle à l’attribution du marché en cause à des opérateurs économiques qui forment une unité économique et dont les offres, bien que soumises séparément, ne sont ni autonomes ni indépendantes.
53 Dans le contexte analogue de la directive 93/37, la Cour a jugé que l’article 24, premier alinéa, de cette directive, qui, à l’instar de l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, comportait la liste des motifs d’exclusion facultatifs, doit être lu comme énumérant de manière exhaustive les causes susceptibles de justifier l’exclusion d’un entrepreneur de la participation à une procédure de passation de marché pour des raisons fondées sur des éléments objectifs tenant à ses qualités professionnelles. Il fait, par conséquent, obstacle à ce que les États membres ou les pouvoirs adjudicateurs complètent la liste qu’il contient par d’autres causes d’exclusion fondées sur des critères relatifs à la qualité professionnelle (arrêt du 16 décembre 2008, Michaniki, C 213/07, EU:C:2008:731, point 43).
54 De la même façon, l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24 énumère de manière exhaustive les motifs d’exclusion facultatifs susceptibles de justifier l’exclusion d’un opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché pour des raisons fondées sur des éléments objectifs relatifs à ses qualités professionnelles ainsi qu’à un conflit d’intérêts ou à une distorsion de la concurrence qui naîtrait de sa participation à la préparation de cette procédure.
55 À cet égard, la circonstance, soulevée par la juridiction de renvoi, que cette disposition inclue désormais un plus grand nombre de motifs d’exclusion facultatifs que les directives précédentes de l’Union en matière de passation des marchés publics ne sauraient avoir une quelconque incidence sur le caractère exhaustif de la liste prévue à ladite disposition.
56 En effet, eu égard à la nature des motifs d’exclusion figurant à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, il convient de considérer que le législateur de l’Union a retenu la même approche en ce qui concerne les différents motifs d’exclusion figurant dans les directives successives de l’Union en matière de passation des marchés publics et qui consiste, ainsi que la Cour l’a jugé au point 42 de l’arrêt du 16 décembre 2008, Michaniki (C 213/07, EU:C:2008:731), à ne retenir que des motifs d’exclusion fondés sur la constatation objective de faits ou de comportements propres à l’opérateur économique concerné, de nature soit à jeter le discrédit sur son honorabilité professionnelle ou sur son aptitude économique ou financière à mener à bien les travaux couverts par le marché public auquel il soumissionne, soit, pour ce qui concerne les marchés relevant de la directive 2014/24, à créer une situation qui, dans le cadre de la procédure de passation de marché en cause, relève du conflit d’intérêts ou de la distorsion de la concurrence, cas de figure visés, respectivement, à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous e), et à l’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous f), de cette directive.
57 Toutefois, le fait que les motifs d’exclusion facultatifs figurant à l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, auquel se réfère l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, soient énumérés de manière exhaustive n’empêche pas que le principe d’égalité de traitement, prévu à l’article 36, paragraphe 1, de cette dernière directive, puisse faire obstacle à l’attribution du marché en cause à des opérateurs économiques qui forment une unité économique et dont les offres, bien que soumises séparément, ne sont ni autonomes ni indépendantes.
58 En effet, une telle énumération exhaustive n’exclut pas la faculté des États membres de maintenir ou d’édicter des règles matérielles destinées, notamment, à garantir, en matière de marchés publics, le respect du principe d’égalité de traitement ainsi que du principe de transparence que ce dernier implique, lesquels s’imposent aux entités adjudicatrices dans toute procédure de passation d’un tel marché et qui constituent la base des directives de l’Union relatives aux procédures de passation des marchés publics, à la condition que le principe de proportionnalité soit observé (voir, par analogie, arrêts du 19 mai 2009, Assitur, C 538/07, EU:C:2009:317, point 21, et du 8 février 2018, Lloyd’s of London, C 144/17, EU:C:2018:78, point 30).
59 En particulier, dans le cas de soumissionnaires liés, le principe d’égalité de traitement prévu à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25 serait violé s’il était admis que ces soumissionnaires puissent présenter des offres coordonnées ou concertées, à savoir non autonomes ni indépendantes, qui seraient susceptibles de leur procurer ainsi des avantages injustifiés au regard des autres soumissionnaires (voir, par analogie, arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas, C 531/16, EU:C:2018:324, point 29).
60 Dans ce cadre, le respect du principe de proportionnalité exige que l’entité adjudicatrice soit tenue d’examiner et d’apprécier les faits, afin de déterminer si le rapport existant entre deux entités a exercé une influence concrète sur le contenu respectif des offres déposées dans le cadre d’une même procédure d’adjudication publique, la constatation d’une telle influence, sous quelque forme que ce soit, étant suffisante pour que lesdites entités puissent être exclues de la procédure (voir, en ce sens, arrêts du 19 mai 2009, Assitur, C 538/07, EU:C:2009:317, point 32, et du 8 février 2018, Lloyd’s of London, C 144/17, EU:C:2018:78, point 38).
61 En effet, la constatation que les liens entre les soumissionnaires ont eu une influence sur le contenu de leurs offres présentées dans le cadre d’une même procédure suffit pour que ces offres ne puissent pas être prises en compte par l’entité adjudicatrice, celles-ci devant être présentées en toute autonomie et indépendance lorsqu’elles émanent de soumissionnaires liés (voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2018, Specializuotas transportas, C 531/16, EU:C:2018:324, point 38).
62 Ces considérations s’appliquent a fortiori à la situation de soumissionnaires qui ne sont pas simplement liés, mais qui forment une unité économique.
63 Ainsi, dans l’hypothèse où la juridiction de renvoi parviendrait, à l’issue des vérifications et des appréciations nécessaires, à la conclusion que les offres en cause au principal n’ont pas été présentées de manière autonome et indépendante, l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25 s’oppose à l’attribution du marché en cause aux soumissionnaires ayant soumis de telles offres.
64 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre aux deuxième et troisième questions que l’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, doit être interprété en ce sens que cet article 57, paragraphe 4, régit de manière exhaustive les motifs d’exclusion facultatifs susceptibles de justifier l’exclusion d’un opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché pour des raisons fondées sur des éléments objectifs relatifs à sa qualité professionnelle ainsi qu’à un conflit d’intérêts ou à une distorsion de la concurrence qui naîtrait de sa participation à cette procédure. Toutefois, ledit article 57, paragraphe 4, n’empêche pas que le principe d’égalité de traitement, prévu à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25, puisse faire obstacle à l’attribution du marché en cause à des opérateurs économiques qui forment une unité économique et dont les offres, bien que soumises séparément, ne sont ni autonomes ni indépendantes.
Sur les dépens
65 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :
1) L’article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE, telle que modifiée par le règlement délégué (UE) 2017/2365 de la Commission, du 18 décembre 2017, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE, telle que modifiée par le règlement délégué (UE) 2017/2364 de la Commission, du 18 décembre 2017,
doit être interprété en ce sens que :
le motif d’exclusion facultatif prévu à cet article 57, paragraphe 4, premier alinéa, sous d), vise les cas où il existe des indices suffisamment plausibles pour conclure que des opérateurs économiques ont conclu un accord proscrit par l’article 101 TFUE, mais n’est pas limité aux seuls accords prévus à ce dernier article.
2) L’article 57, paragraphe 4, de la directive 2014/24, telle que modifiée par le règlement délégué 2017/2365, lu conjointement avec l’article 80, paragraphe 1, troisième alinéa, de la directive 2014/25, telle que modifiée par le règlement délégué 2017/2364,
doit être interprété en ce sens que :
cet article 57, paragraphe 4, régit de manière exhaustive les motifs d’exclusion facultatifs susceptibles de justifier l’exclusion d’un opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché pour des raisons fondées sur des éléments objectifs relatifs à sa qualité professionnelle ainsi qu’à un conflit d’intérêts ou à une distorsion de la concurrence qui naîtrait de sa participation à cette procédure. Toutefois, ledit article 57, paragraphe 4, n’empêche pas que le principe d’égalité de traitement, prévu à l’article 36, paragraphe 1, de la directive 2014/25, telle que modifiée par le règlement délégué 2017/2364, puisse faire obstacle à l’attribution du marché en cause à des opérateurs économiques qui forment une unité économique et dont les offres, bien que soumises séparément, ne sont ni autonomes ni indépendantes.