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Décisions

Cass. com., 21 juin 2005, n° 03-21.163

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Pinot

Avocat général :

M. Main

Avocats :

SCP Gatineau, Me Bertrand

Paris, du 10 oct. 2003

10 octobre 2003

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 10 octobre 2003), que, sur assignation de l'URSSAF, la société Sun express transport (la société) a été mise en redressement judiciaire le 21 mars 1999, la date de cessation des paiements étant fixée au 2 septembre 1998, puis en liquidation judiciaire ; que M. X..., nommé liquidateur, a demandé l'annulation des paiements reçus au cours de la période suspecte par l'URSSAF et la restitution d'une certaine somme ; que celle-ci s'est opposé à cette demande au motif que les paiements en cause correspondaient à la part ouvrière des cotisations salariales ;

Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt de sa condamnation à paiement, alors, selon le moyen :

1 / que les paiements pour dettes échues effectués pendant la période suspecte peuvent être annulés à condition que le paiement ait été fait par le débiteur sur son patrimoine et que le créancier ait eu connaissance de la date de cessation des paiements ; que le paiement du précompte à l'URSSAF, préalable nécessaire à toute demande de sursis à poursuite, ne peut être annulé dans la mesure où c'est un paiement fait par l'employeur pour le compte des salariés sur leurs gains ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que les sommes versées à l'URSSAF ne pouvaient être considérées comme correspondant à la part salariale des cotisations dues, après avoir affirmé que les négociations avaient échoué "précisément parce que la part ouvrière ne pouvait être entièrement payée" ; qu'il résultait de ce constat que les versements effectués portaient bien sur la part salariale des cotisations que la société débitrice avait vainement tenté d'apurer pour pouvoir bénéficier de délais de paiement ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande d'annulation de ces paiements, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 621-108 du Code de commerce et R. 243-21 du Code de la sécurité sociale ;

2 / que les juges sont tenus d'examiner tous les éléments de preuve soumis à leur appréciation ; que pour apporter la preuve que les versements effectués par la société Sun express transport portaient bien sur la part salariale des cotisations, l'URSSAF produisait un compte-rendu de visite en date du 13 mars 2000, dont il ressortait que le solde de la part ouvrière, initialement de 64 950 francs, ne s'élevait plus qu'à 1 315 francs ; qu'il en résultait donc que les sommes qui lui avaient été versées avaient bien été imputées sur la part ouvrière des cotisations dues ; qu'en considérant néanmoins qu'aucune pièce ne démontrait l'imputation des sommes perçues, sans examiner ce compte-rendu de visite du 13 mars 2000, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que les juges ne peuvent sous couvert d'interprétation dénaturer les écrits soumis à leur appréciation ; qu'en l'espèce, l'URSSAF a fait valoir que les sommes versées par la société Sun express transport ne pouvaient donner lieu à annulation dans la mesure où ces versements correspondaient au paiement de la part salariale des cotisations dues, mais n'a jamais affirmé qu'elle savait au moment où ces paiements ont été effectués que la société se trouvait en état de cessation des paiements ; qu'en affirmant néanmoins que la société "admet également qu'elle n'ignorait pas que la société se trouvait alors en état de cessation des paiements", la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'URSSAF et violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que les paiements effectués par le débiteur après la date de cessation des paiements au titre des cotisations sociales incluant celles précomptées sur les salaires peuvent être annulés ou rapportés, dès lors qu'il est établi que le créancier avait connaissance de l'état de cessation des paiements ;

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres, que les trois paiements litigieux avaient été effectués par la société postérieurement à la date de cessation des paiements et, par motifs adoptés, que l'URSSAF reconnaissait avoir eu connaissance de cet état, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués à la deuxième branche, a, sans dénaturation, légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.