Cass. com., 7 septembre 2022, n° 21-14.495
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
OLPP Communication, LMPS-Pub, Nicom
Défendeur :
Chorus
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Darbois
Rapporteur :
Mme Bellino
Avocat général :
M. Debacq
Avocats :
SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, Me Soltner
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er mars 2021), la société Chorus, spécialisée dans la signalétique, la communication visuelle et la réalisation d'enseignes, a signé entre fin 2008 et début 2009 des contrats de concession de licence des marques « Pano » et « Pano boutique » avec les sociétés OLPP communication (la société OLPP), LMPS-Pub (la société LMPS) et Nicom, et avec M. [X], pour une durée de sept ans, renouvelable par période d'un an par tacite reconduction, sauf dénonciation avec préavis de six mois.
2. Après des discussions entre les parties, en l'absence d'accord sur de nouvelles conditions tarifaires, les concessionnaires ont notifié au concédant le non-renouvellement des contrats.
3. La société Chorus a assigné les sociétés OLPP, LMPS, Nicom et M. [X] aux fins de paiement des redevances dues jusqu'à l'échéance des contrats et de dommages-intérêts pour rupture illicite du contrat, utilisation illicite des signes du réseau et concurrence déloyale et parasitaire.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
5. Les sociétés LMPS, Nicom, OLPP et M. [X] font grief à l'arrêt de les condamner à payer, chacun, à la société Chorus, la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale, alors :
« 1°/ que l'enseigne et le nom commercial ne peuvent faire l'objet d'un droit privatif juridiquement protégé lorsqu'ils sont l'indication pure et simple de la nature de l'entreprise ou de son activité ; qu'en l'espèce, les sociétés LMPS, Nicom, OLPP et M. [X] faisaient valoir que le sigle PAO qu'ils utilisaient était indicatif des prestations qu'ils proposaient et de la nature de leur activité qui était celle de "Publicité Assistée par Ordinateur" ; que la poursuite de leur activité sous ce nom, générique et dépourvu de toute distinctivité, ne pouvait autoriser la société Chorus à leur en interdire l'usage et à les poursuivre en concurrence déloyale au prétexte qu'il aurait faire naître un risque de confusion avec la marque Pano qu'ils utilisaient lorsqu'ils appartenaient à son réseau ; que la cour d'appel, qui décide qu'en raison du risque de confusion entre l'enseigne "Pano Sign'services" et le sigle "P.A.O." utilisé par les sociétés LMPS, Nicom, OLPP et M. [X], ceux-ci se sont rendus coupables de concurrence déloyale et de parasitisme, et qui tient pour indifférente la circonstance que l'activité de PAO était celle de leur entreprise, a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil, ensemble le principe de la liberté du commerce et de l'industrie constitutionnellement garanti ;
2°/ qu'un commerçant poursuivi pour des agissements parasitaires allégués peut faire valoir devant le tribunal de commerce que le nom, l'enseigne ou la marque qu'il utilise sont génériques ou dans le domaine public et insusceptibles d'appropriation, ce qui ne revient pas à conduire cette juridiction à trancher une question relevant du droit des marques ; en sorte que la cour d'appel qui énonce que "le débat n'est pas ici de savoir si l'utilisation du sigle PAO est licite ou si le sigle constitue ou non une marque déposable, mais de déterminer si les intimés, par leur utilisation de ce sigle après avoir perdu l'usage de la marque "PANO", ont tenté de se placer dans le sillage de la société Chorus en utilisant une enseigne d'une grande proximité avec la marque précédente", quand il lui appartenait, au contraire, de s'assurer que les anciens franchisés ne soient pas privés du droit d'exercer une activité sous le nom générique qui l'identifiait auprès du public, peu important le prétendu risque de confusion dénoncé par la société Chorus, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil, ensemble le principe de la liberté du commerce et de l'industrie constitutionnellement garanti. »
Réponse de la Cour
6. L'arrêt retient d'abord qu'il résulte du constat du 10 octobre 2017 que les sociétés OLPP et Nicom ont utilisé, après l'expiration de leur contrat de concession de licence de marque, le mot « PANO » comme mot-clef dans la page d'accueil de leur site web, ce qui a eu pour conséquence de diriger sur leur site les utilisateurs faisant une recherche comportant le mot « PANO ». Il relève ensuite que les anciens concessionnaires reconnaissent dans leurs conclusions qu'ils utilisent l'enseigne « P.A.O Publicité », mais affirment que cette enseigne ne porte pas atteinte aux signes distinctifs de la société Chorus et font valoir que le sigle PAO, usuellement utilisé comme abréviation de « publication assistée par ordinateur », désignerait la « production de documents publicitaires à l'aide d'un ordinateur ». L'arrêt retient que, pour autant, ces trois lettres sont extrêmement proches de la marque« PANO », que le débat n'est pas de savoir si l'utilisation du sigle PAO est licite ou si le sigle constitue ou non une marque déposable, mais de déterminer si les anciens concessionnaires, par l'utilisation de ce sigle, après avoir perdu l'usage de la marque « PANO », ont tenté de se placer dans le sillage de la société Chorus en utilisant une enseigne d'une grande proximité avec la marque précédente. Il retient que l'usage du sigle « PAO », qui est de nature à entraîner la confusion dans l'esprit de la clientèle avec la marque « PANO » qu'ils venaient d'abandonner, outre, pour deux des anciens concessionnaires, le référencement abusif du mot « PANO » dans la page d'accueil de leur site web, constituent des actes de parasitisme pour tirer profit sans effort de la notoriété de la marque appartenant à la société Chorus. Il retient également que l'imitation des éléments distinctifs de la marque était de nature à créer la confusion dans l'esprit de la clientèle et que la concurrence déloyale est donc établie.
7. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche invoquée par la seconde branche, tirée du caractère générique du signe utilisé, mais souverainement estimé, d'une part, que l'usage du sigle PAO était de nature à créer une confusion dans l'esprit du public et, d'autre part, que cet usage était destiné à tirer profit, sans rien dépenser, de la notoriété de la marque de la société Chorus, a pu retenir que les sociétés LMPS, Nicom, OLPP et M. [X] avaient commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés LMPS-Pub, Nicom, OLPP communication et M. [X] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés LMPS- Pub, Nicom, OLPP communication et M. [X] et les condamne à payer à la société Chorus la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille vingt-deux.