Cass. crim., 26 janvier 2011, n° 10-84.081
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
M. Rognon
Avocat :
Me Luc-Thaler
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 324-1 du code pénal, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, 6 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de blanchiment et s'est prononcé sur la peine et sur l'action civile ;
"aux motifs que M. X... a été renvoyé pour avoir sur le territoire national, courant 2005 et en tous les cas en temps non couvert par la prescription, apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect de crimes ou de délits, en l'espèce en servant d'intermédiaire pour la vente d'engins de chantier volés ; que le fait pour M. X..., professionnel de la vente d'engins de chantier, d'être intervenu à, au moins, six reprises sur des transactions portant sur des matériels volés sans s'assurer de leur origine, alors même qu'il savait que M. Y..., qui avait recours à lui pour les vendre, ne disposait d'aucune activité commerciale déclarée en France où il n'avait même pas de compte bancaire, est caractéristique d'un comportement répréhensible ; qu'il ne peut être ignoré que son attention avait été attirée par sa concubine sur les activités de M. Y..., qui lui semblaient douteuses eu égard au fait qu'elle avait vu plusieurs machines de grande valeur entreposées dans la cour d'une ferme de la région parisienne ; qu'iI ne peut être davantage ignoré que, dès l'été 2005, il avait appris que l'engin en cours de vente à la société Red Bull était volé, ce qui ne l'avait cependant pas empêché de poursuivre ses activités avec M. Y... en continuant à servir d'intermédiaire pour la vente à la société Smitma, (qui avait l'habitude de lui faire parvenir des commissions en espèces), de la chargeuse Komatsu volée à la mi-septembre 2005 au préjudice de la société Toffolutti, ainsi que pour la vente de la chargeuse Caterpillar 966 F Il supportant plusieurs inscriptions au nom de la société Recipon, ce qui était révélateur de la propriété de cette société sur cet engin dont l'exportation pour laquelle M. X... était intervenu n'avait échoué que grâce à l'intervention des gendarmes ; que M. X... a eu un rôle déterminant dans la revente des matériels volés pour laquelle il s'impliquait de façon majeure à tel point que, pour ne pas manquer la vente de la chargeuse Caterpillar volée le 7 juin 2005 au préjudice de l'entreprise Toffolutti à la société anglaise Red Bull et dissiper les doutes de M. Z... sur l'origine de cette machine destinée à l'exportation vers les Etats-Unis d'Amérique, M. X... n'hésitait pas à établir une facture au nom de la société Fédimpex qu'il avait créée au Pays-Basque espagnol ; que de plus, pour permettre le règlement à un tiers de plusieurs de ces matériels volés, M. X... n'a pas hésité à établir de faux certificats de vente et de fausses factures, indiquant même au juge d'instruction qu'il savait que c'était pour le paiement d'un avion ; qu'or, il résulte de la procédure et notamment des déclarations de M. Y... et des documents appréhendés pendant l'enquête, que deux avions, en l'occurrence un Yak et un Albatros L 39, ont été financés, au moins partiellement, grâce à l'argent provenant de la vente d'engins de chantier volés pour lesquels M. X... est intervenu comme intermédiaire ; que, dès lors, l'infraction de blanchiment pour laquelle il est poursuivi est caractérisée à son encontre et, comme l'a indiqué le tribunal, peu importe qu'il ait bénéficié d'un non-lieu du chef de recel de vol, puisque l'infraction de blanchiment est distincte et ne nécessite pas qu'il ait endossé le rôle de receleur, la connaissance de l'origine frauduleuse des engins étant suffisante ;
"1°)alors que, selon l'article 6 § 3 a de la Convention européenne des droits de l'homme, tout accusé ale droit d'être informé d'une manière détaillée de la nature et de la cause de la prévention dont il est l'objet ; qu'en l'espèce, en se bornant à indiquer que M. X... avait « servi d'intermédiaire pour la vente d'engins de chantier volés », sans se référer dans le détail aux faits poursuivis, la citation qui lui a été délivrée ne lui a pas permis de préparer utilement sa défense ; qu'en décidant autrement, la cour d'appel a violé les textes et les principes susvisés ;
"2°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, il résulte de l'ordonnance de renvoi du 19 mars 2008 qu'il est reproché à M. X... d'avoir servi d'intermédiaire pour la vente d'engins de chantier volés ; que, dès lors, en recherchant la responsabilité pénale de M. X... pour avoir financé l'achat de deux avions grâce à l'argent provenant de la vente d'engins de chantier volés, la cour d'appel, qui retient, à la charge du demandeur, des faits non visés à la prévention et pour lesquels il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que le prévenu ait acceptée d'être jugée, a violé l'article 388 du code de procédure pénale" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 324-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de blanchiment et s'est prononcé sur la peine et sur l'action civile ;
"aux motifs que M. X... a été renvoyé pour avoir sur le territoire national, courant 2005 et en tous les cas en temps non couvert par la prescription, apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect de crimes ou de délits, en l'espèce en servant d'intermédiaire pour la vente d'engins de chantier volés ; que le fait pour M. X..., professionnel de la vente d'engins de chantier, d'être intervenu à, au moins, six reprises sur des transactions portant sur des matériels volés sans s'assurer de leur origine, alors même qu'il savait que M. Y..., qui avait recours à lui pour les vendre, ne disposait d'aucune activité commerciale déclarée en France où il n'avait même pas de compte bancaire, est caractéristique d'un comportement répréhensible ; qu'il ne peut être ignoré que son attention avait été attirée par sa concubine sur les activités de M. Y..., qui lui semblaient douteuses eu égard au fait qu'elle avait vu plusieurs machines de grande valeur entreposées dans la cour d'une ferme de la région parisienne ; qu'il ne peut être davantage ignoré que, dès l'été 2005, il avait appris que l'engin en cours de vente à la société Red Bull était volé, ce qui ne l'avait cependant pas empêché de poursuivre ses activités avec M. Y... en continuant à servir d'intermédiaire pour la vente à la société Smitma, (qui avait l'habitude de lui faire parvenir des commissions en espèces), de la chargeuse Komatsu volée à la mi-septembre 2005 au préjudice de la société Toffolutti, ainsi que pour la vente de la chargeuse Caterpillar 966 F Il supportant plusieurs inscriptions au nom de la société Recipon, ce qui était révélateur de la propriété de cette société sur cet engin dont l'exportation pour laquelle M. X... était intervenu n'avait échoué que grâce à l'intervention des gendarmes ; que M. X... a eu un rôle déterminant dans la revente des matériels volés pour laquelle il s'impliquait de façon majeure à tel point que, pour ne pas manquer la vente de la chargeuse Caterpillar volée le 7 juin 2005 au préjudice de l'entreprise Toffolutti à la société anglaise Red Bull et dissiper les doutes de M. Z... sur l'origine de cette machine destinée à l'exportation vers les Etats-Unis d'Amérique, M. X... n'hésitait pas à établir une facture au nom de la société Fedimpex qu'il avait créée au Pays-Basque espagnol ; que de plus, pour permettre le règlement à un tiers de plusieurs de ces matériels volés, M. X... n'a pas hésité à établir de faux certificats de vente et de fausses factures, indiquant même au juge l'instruction qu'il savait que c'était pour le paiement d'un avion ; qu'or, il résulte de la procédure et notamment des déclarations de M. Y... et des documents appréhendés pendant l'enquête, que deux avions, en l'occurrence un Yak et un Albatros L 39, ont été financés, au moins partiellement, grâce à l'argent provenant de la vente d'engins de chantier volés pour lesquels M. X... est intervenu comme intermédiaire ; que, dès lors, l'infraction de blanchiment pour laquelle il est poursuivi est caractérisée à son encontre et, comme l'a indiqué le tribunal, peu importe qu'il ait bénéficié d'un non-lieu du chef de recel de vol, puisque l'infraction de blanchiment est distincte et ne nécessite pas qu'il ait endossé le rôle de receleur, la connaissance de l'origine frauduleuse des engins étant suffisante ;
"1°) alors que la contradiction de motifs équivaut à son absence ; que l'élément intentionnel du délit de blanchiment est caractérisé par la connaissance de l'origine délictueuse des fonds ; que la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire, constater que M. X... ne s'assurait pas de l'origine des engins de chantier qu'il vendait et le déclarer coupable du chef de blanchiment indiquant que « la seule connaissance de l'origine frauduleuse des engins » suffisait à constituer l'éléments intentionnel de l'infraction ;
"2°) alors que le délit de blanchiment n'est constitué que s'il est apporté un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d'un crime ou d'un délit ; qu'en se bornant à affirmer que M. X... a vendu des engins volés, sans préciser en quoi ces agissements relevaient de la participation à l'une des trois opérations susvisées, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"3°) alors que le délit de blanchiment nécessite que soient relevés précisément les éléments constitutifs d'un crime d'un délit principal ayant procuré à son auteur un profit direct ou indirect ; que la cour d'appel ne pouvait, dès lors, déclarer M. X... coupable du délit de blanchiment en se bornant à affirmer qu'il était établi que celui-ci a vendu des engins de chantier volés, sans relever précisément les éléments constitutifs de l'infraction principale de vol" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a servi d'intermédiaire dans la revente d'engins de travaux publics, qui provenaient de vols, en fabriquant de faux certificats de vente, des attestations mensongères et des factures fictives, les fonds étant utilisés pour l'acquisition d'aéronefs par M. Serge A..., destinataire des documents mensongers ; que, sur le renvoi ordonné par un juge d'instruction, M. X... est poursuivi du chef de blanchiment pour "avoir apporté son concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect de crimes ou de délits, en l'espèce en servant d'intermédiaire pour la vente d'engins de chantier volés" ;
Attendu que, pour le déclarer coupable de cette infraction, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui n'a pas excédé sa saisine, résultant de l'ordonnance de renvoi rappelant en termes clairs et précis le détail des faits reprochés à M. X..., a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
Qu'ainsi, les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.