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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. D, 18 mars 2009, n° 08/05287

MONTPELLIER

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MCM (Sté)

Défendeur :

J-L. PEDAILLE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mathieu MAURI

Conseillers :

Georges TORREGROSA, Luce BERNARD

Avoués :

SCP ARGELLIES - WATREMET, SCP SALVIGNOL - GUILHEM

Avocats :

SCP BECQUE-MONESTIER-DAHAN, SCP DEL POSO - DONNEVE

CA Montpellier n° 08/05287

17 mars 2009

Par acte sous seing privé du 6 juin 1996, Mr Jean-Luc Pédaillé a donné à la société Marine Service Catalan, mandat exclusif de vendre son bateau, de type pêche promenade, pour le prix de 45 000 F soit 6 860, 21€.

Par acte du 7 Novembre 2006, il a fait assigner la société Marine Service Catalan devant le tribunal d'instance de Perpignan , pour obtenir la résolution du contrat de mandat ,à ses torts exclusifs , la remise du bateau, et le paiement de 8 500 € à titre de dommages et intérêts ;

Antérieurement, la société Marine service catalan avait saisi le juge de proximité de Toulouse, qui avait enjoint à Mr Pédaillé, par ordonnance du 13 juin 2005 ,de lui payer la somme de 1 650,52 €,à titre de frais de gardiennage, et, sur opposition de Mr Pedaillé,le juge de proximité , par jugement du 15 novembre 2007 , a renvoyé le dossier devant le tribunal d'instance de Perpignan ;

Les instances ont été jointes ;

La société Marine Service Catalan a conclu au débouté de Mr Pédaillé, et elle a formé une demande reconventionnelle, pour obtenir le paiement des frais de gardiennage du navire ;

Le tribunal d'instance, par jugement du 6 Juin 2008, a déclaré recevable l'opposition de Jean-Luc Pédaillé à l'ordonnance du juge de proximité et l'a mise à néant ; il a prononcé la résolution du contrat de mandat ,ordonné à la société Marine Service Catalan de procéder à la remise du bateau, et l'a condamnée à payer à Mr Pédaillé la somme de 6500 € à titre de dommages et intérêts ; il a débouté la société Marine Service Catalan de sa demande en paiement de frais de gardiennage et de dommages et intérêts pour procédure abusive et l'a condamnée au paiement, à Mr Pédaillé, de 550 € sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

La société Marine Service Catalan a régulièrement relevé appel de cette décision , dont elle demande l'infirmation ; elle demande de débouter Mr Pédaillé , de lui donner un acte qu'elle ne s'oppose pas à une résolution amiable du mandat , et par voie reconventionnelle ,de condamner Mr Pédaillé au paiement de 1921,75 € ,outre le 3000 € pour procédure abusive et 1 000 € en application de l'article 700 du C PC ;

Elle fait valoir que :

-les parties sont liées par un contrat de dépôt-vente,

-elles ont clairement convenu que le mandataire devait assurer la garde du bateau en cours de mandat, ce qui démontre, en outre, l'existence d'un contrat de gardiennage.

Mr Pédaillé demande de confirmer le jugement , sauf sur le montant des dommages et intérêts qui lui ont été alloués ,qu'il demande augmenter à 8 500 € ,outre 2000 € pour appel abusif et injustifié, et la même somme au titre de l'article 700 du CPC ;

Il fait valoir que :

- le contrat est un mandat, et un dépôt vente, et non un contrat de gardiennage,

- Marine Service catalan , qui n'a pas respecté ses obligations de mandataire, est responsable de la perte de valeur du bateau.

La clôture de la procédure a été prononcée le 13 février 2009.

SUR QUOI :

Les parties sont liées par un contrat de mandat exclusif de vente , signé le 6 juin 1996, pour une durée indéterminée , mais aussi par un contrat de dépôt- vente, ainsi qu'il ressort de l'attestation délivrée par Marine Service Catalan à Mr Pédaillé, le 25 novembre 1995 , de sorte qu'elles se trouvent soumises aux obligations résultant du contrat de mandat , et à celles résultant du contrat de dépôt ;

Le mandat de vente, même exclusif, ne confère pas au mandataire une obligation de résultat, et il ne répond que de l'inexécution du mandat ou des fautes qu'il commet dans sa gestion ;

Le dépôt est, selon les articles 1917 et suivants du Code civil, un contrat essentiellement gratuit , qui oblige le dépositaire à apporter dans la garde de la chose les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent, il n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution, et il ne répond pas des détériorations qui ne sont pas survenues par son fait ;

Concernant le contrat de mandat, Mr Pédaillé ne rapporte pas la preuve d'un manquement par Marine Service catalan, à ses obligations de mandataire ;

En effet ,il n'est pas contesté que dès la signature du contrat de mandat, Marine Service Catalan a entreposé le bateau , avec l' accord de Mr Pédaillé, en tout cas sans qu'il ait manifesté son opposition- ce qu'il pouvait faire à l'occasion des visites sur place qu'il déclare avoir effectuées-, sur une aire réservée au stockage des navires en vue de leur vente, située à l'extérieur de ses locaux, qu'elle a apposé sur le bateau, une pancarte annonçant la vente, les caractéristiques du navire, et le prix demandé , et que , s'il était prévu, dans le mandat , qu'elle s'engageait à supporter les frais des publicités qu'elle pourrait faire, elle n'avait pas l'obligation expresse de procéder à des publicités ;

Par ailleurs, le mandat n'interdisait pas au mandant de trouver un acquéreur, mais l'obligeait seulement à ne conclure la vente que par l'intermédiaire du mandataire ;

Enfin, le mandat ayant pour objet la vente du bateau, le mandataire ne devrait rendre des comptes qu'à l'occasion d'une vente, laquelle n'a pas été réalisée , et il sera relevé que pendant 10 ans, le mandant ne s'est pas manifesté auprès du mandataire, et n'a pas demandé les raisons pour lesquelles la vente n'avait pas été réalisée,et que c'est seulement lorsqu'il a reçu une injonction de payer des frais de gardiennage , en 2005, qu'il a reproché son inaction à Marine Service Catalan, alors que, ne s'étant pas lui-même manifesté pendant de très nombreuses années, il ne pouvait raisonnablement faire ce reproche à son cocontractant ;

Mr Pédaillé ne rapporte pas davantage la preuve d'un manquement, par Marine Service Catalan, à ses obligations de dépositaire : en effet,celui-ci a satisfait à son obligation concernant la garde de la chose déposée, en entreposant le navire sur son aire de service ;

Par ailleurs, le bateau est resté entreposé sur l'aire de service, située à l'extérieur des locaux de Marine Service Catalan pendant 10 ans, sans que le déposant ne manifeste son désaccord, et il ne rapporte pas la preuve que les détériorations constatées par huissier en Août 2005 :bois des caissons en mauvais état, peinture de la coque ayant sauté en partie basse côté moteur, soient la conséquence, non pas d'une usure normale du bateau, compte tenu des conditions dans lesquelles il était entreposé, mais du fait du dépositaire ;

Enfin, l'intention des parties de conclure un contrat de gardiennage, venant s'ajouter au mandat et au dépôt-vente, ne peut se déduire de la mention, rayée dans le contrat de mandat, selon laquelle : ' le mandataire n'assure en aucun cas la garde du bateau au cours du mandat ' , et, a l'inverse, il apparaît que cette mention a été rayée en raison de l'existence du contrat de dépôt vente convenu entre les parties, qui impose au dépositaire la garde, gratuite, de la chose.

En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé, mais seulement en ce qu'il a mis à néant l'ordonnance rendue par le juge de proximité ; il doit être infirmé pour le surplus ;

Les deux parties demandant la résolution du contrat de mandat, celle-ci doit être prononcée, et, par voie de conséquence, la résolution du contrat de dépôt-vente demandée par Marine Service Catalan doit être également prononcée ;

Mr Pédaillé sera débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts, qui n'est pas justifiée, et la société Marine Service Catalan sera déboutée de ses demandes en paiement de frais de gardiennage ;

L'appel de la société Marine Service Catalan qui a abouti ,en partie, à une réformation du jugement ne revêt pas de caractère abusif, et Mr Pédaillé ne peut donc prétendre au paiement de dommages et intérêts ; de son côté, Marine service catalan, qui succombe pour partie en ses prétentions, ne peut davantage prétendre au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive ; ces demandes seront donc rejetées.

Il sera fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par chacune des parties, et il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du CPC.

PAR CES MOTIFS :

la cour, Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement déféré, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'opposition à l'encontre de l'ordonnance du 13 juin 2005, et a mis à néant ladite ordonnance,

Et, infirmant pour le surplus ,et statuant à nouveau :

Prononce la résolution du contrat de mandat , et du contrat de dépôt-vente conclus entre les parties,

Déboute Mr Pédaillé de ses demandes en paiement de dommages et intérêts

Déboute la société Marine Service Catalan de ses demandes en paiement de frais de gardiennage, et de dommages et intérêts

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du CPC

Fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par chacune des parties et autorise les SCP Argelliès -Watremet et Salvignol-Guilhem, avoués, à recouvrer le montant de ceux d'appel ,aux forme et condition de l'article 699 du code de procédure civile