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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 27 septembre 2006, n° 04/20185

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MARIE CLAIRE ALBUM (S.A.)

Défendeur :

MARIE CLAIRE (SA), PRODUCCIONES ANA SANDRA (S.A.R.L.), ALMACENES MARIOLA (Sté)

Paris, du 09 Juill. 2004

9 juillet 2004

ARRET : REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, Président

- signé par Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, président et par Madame Jacqueline VIGNAL, greffier présent lors du prononcé.

Vu l'appel interjeté le 30 septembre 2004, par la société MARIE CLAIRE ALBUM d'un jugement rendu le 9 juillet 2004 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

* prononcé la déchéance partielle de la marque MARIE CLAIRE n°1712365 à compter du 29 décembre 1986, en ce que cette marque désigne des vêtements,

* dit que la décision, une fois définitive, sera transmise à l'Institut National de la Propriété Industrielle pour inscription au registre national des marques à la diligence du greffier saisi par la partie la plus diligente,

* débouté la société MARIE CLAIRE ALBUM de ses demandes fondées sur la contrefaçon de ses marques MARIE CLAIRE n° 1712365 et 92446554,

* débouté la société MARIE CLAIRE ALBUM de ses demandes fondées sur l'atteinte à la notoriété de sa marque et sur les atteintes à sa dénomination sociale et à son nom commercial,

* condamné la société MARIE CLAIRE ALBUM à payer à chacune des sociétés MARIE CLAIRE SA et PRODUCCIONES ANA SANDRA la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Vu les dernières écritures en date du 23 juin 2006, par lesquelles la société MARIE CLAIRE ALBUM, poursuivant l'infirmation de la décision entreprise, demande à la Cour de :

* dire que l'usage de la dénomination MARIE CLAIRE sur le site Internet de la société espagnole MARIE CLAIRE SA et de la société ALMACENES MARIOLA et sur les produits commercialisés en France tant par la société PRODUCCIONES ANA SANDRA que la société ALMACENES MARIOLA portent atteinte à la notoriété de la marque et à la notoriété du titre du magazine MARIE CLAIRE,

* dire qu'en offrant en vente et en vendant des produits revêtus de la marque MARIE CLAIRE, la société espagnole MARIE CLAIRE SA et les sociétés PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA ont commis des actes de contrefaçon des marques MARIE CLAIRE,

* dire que par les mêmes agissements, la société espagnole MARIE CLAIRE SA, les sociétés PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA ont porté atteinte à ses droits sur la dénomination sociale et le nom commercial MARIE CLAIRE,

* interdire aux sociétés MARIE CLAIRE SA, venant aux droits de la société AZNAR, ALMACENES MARIOLA et PRODUCCIONES ANA SANDRA d'utiliser la dénomination MARIE CLAIRE à titre de marque en France, sous astreinte définitive de 800 euros par jour de retard et par acte constaté à compter de la date à laquelle la décision à intervenir deviendra exécutoire,

* faire injonction à la société MARIE CLAIRE SA d'indiquer sur le site Internet '[...]' que les produits ne peuvent être offerts à la vente en France sous la marque MARIE CLAIRE, sous astreinte de 800 euros par jour de retard à compter de la date à laquelle la décision à intervenir deviendra exécutoire,

* condamner la société MARIE CLAIRE SA, venant aux droits de la société AZNAR, en réparation des préjudices subis au paiement d'une somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* condamner la société ALMACENES MARIOLA en réparation des préjudices subis au paiement de la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* condamner la société PRODUCCIONES ANA SANDRA en réparation des préjudices subis au paiement de la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* ordonner la publication du jugement à intervenir dans dix journaux de son choix, sans que le coût de chacune de ces publications n'excède la somme de 2.000 euros,

* ordonner la publication du jugement à intervenir pour une durée de six mois à compter de la signification du jugement à intervenir sur la première page du serveur de la société MARIE CLAIRE SA, venant aux droits de la société AZNAR, accessible par l'adresse '[...]' et sur la première page du serveur de la société ALMACENES MARIOLA accessible par l'adresse '[...]' sous astreinte de 800 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir,

* condamner solidairement les sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles,

* ordonner, en raison de l'urgence, l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant tout recours et sans constitution de garantie ;

Vu les dernières écritures en date du 26 juin 2006, aux termes desquelles la société MARIE CLAIRE SA et la société PRODUCCIONES ANA SANDRA prient la Cour de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et y ajoutant, de condamner la société MARIE CLAIRE ALBUM au paiement, à chacune d'elles de la somme de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Vu l'assignation délivrée par la société MARIE CLAIRE ALBUM le 28 septembre 2005 à la société ALMACENES MARIOLA et l'acte de transmission en application du règlement (CE) n°1348/2000 du 29 mai 2000;

SUR CE, LA COUR,

Sur la procédure :

Considérant que l'acte d'assignation a été remis à l'entité espagnole requise, ainsi qu'il résulte de l'avis de réception signé le 3 octobre 2005 ; qu'en revanche, il n'est pas

justifié que cet acte ait été délivré à la société ALMACENES MARIOLA, de sorte que le présent arrêt sera rendu par défaut ;

Sur le fond :

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :

* la société MARIE CLAIRE ALBUM a pour objet l'édition de revues,

* elle édite notamment le magazine MARIE CLAIRE distribué en France depuis 1937 et dans de nombreux pays dont l'Espagne depuis 1965,

* elle est titulaire des marques semi-figuratives MARIE CLAIRE :

- la première déposée le 9 juin 1988, renouvelée en dernier lieu le 16 août 2001, enregistrée sous le n° 1712365 pour désigner les produits et services des classes 3,5,9,16,18,25,29,30,31,32,35 et 41 dont notamment les vêtements, bottes, souliers et pantoufles,

- la seconde déposée le 17 décembre 1992, enregistrée sous le n° 92446554 pour désigner les produits des classes 8,11,14,20,21 et 24,

* la société MARIE CLAIRE SA de droit espagnol, venant aux droits de la société AZNAR SA, créé en 1907 a pour activité la fabrication et la commercialisation de bas, chaussettes et articles de lingerie,

* elle a déposé en Espagne depuis 1960 plusieurs marques comportant la dénomination MARIE CLAIRE pour désigner les vêtements en classe 25,

* reprochant à la société MARIE CLAIRE SA d'utiliser le signe MARIE CLAIRE, pour promouvoir ses activités sur un site Internet '[...]', la société MARIE CLAIRE ALBUM a fait procéder le 26 septembre 2001, à un procès-verbal de constat d'huissier,

* les 12 et 13 juillet 2001, la société MARIE CLAIRE ALBUM a fait constater par un agent de l'Agence de la protection des programmes la commercialisation sur le site Internet '[...]'de modèles de sous-vêtements de la collection MARIE CLAIRE KLER par la société de droit espagnol ALMACENES MARIOLA,

* un article commandé par cet agent a été livré le 23 juillet 2001, en provenance d'Espagne par la société ALMACENES MARIOLA, emballé dans une boîte sur laquelle figurent les mentions MARIE CLAIRE LINEA INTIMA et AZNAR, reprises sur l'étiquette du produit,

* la société MARIE CLAIRE ALBUM, dûment autorisée par ordonnance présidentielle, a également fait procéder le 6 mars 2003 à une saisie contrefaçon dans les locaux de la société PRODUCCIONES ANA SANDRA, exerçant sous l'enseigne AGATHA RUIZ ANA SANDRA, révélant l'offre à la vente de paires de chaussettes, portant une étiquette revêtue de la mention MARIE CLAIRE, acquises auprès de la société AZNAR SA,

* dans ces circonstances, la société MARIE CLAIRE ALBUM a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris les sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA en contrefaçon de marque, concurrence déloyale et parasitaire, atteintes à son nom commercial et à sa dénomination sociale ;

Sur la recevabilité des demandes de la société MARIE CLAIRE ALBUM au titre de la reproduction de la dénomination MARIE CLAIRE sur le site Internet '[...]' :

Considérant que la société MARIE CLAIRE SA et la société PRODUCCIONES ANA SANDRA soulèvent à bon droit l'irrecevabilité à agir de la société MARIE CLAIRE ALBUM en ce qui concerne le site Internet '[...]' puisqu'il ressort des opérations de constat que ce site a été enregistré par une société de droit britannique AZNAR UK Limited, étrangère à la présente procédure ;

Sur la déchéance des droits de la société MARIE CLAIRE ALBUM sur la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 :

Considérant que pour s'opposer au grief de contrefaçon les sociétés MARIE CLAIRE SA et PRODUCCIONES ANA SANDRA soulèvent la déchéance partielle des droits de la société MARIE CLAIRE ALBUM sur la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 en ce qu'elle désigne en classe 25 les vêtements ;

Considérant en droit qu'aux termes de l'article L 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux pour les produits et services visés dans l'enregistrement pendant une période ininterrompue de cinq ans ;

Considérant en l'espèce, que la société MARIE CLAIRE ALBUM verse aux débats :

* des bons de commande pour des peignoirs MARIE CLAIRE 'nid d'abeille' de couleur écru, vendus par correspondance au prix de 170 francs, publiés dans les magazines MARIE CLAIRE des mois de février, mars et juillet 2000,

* deux attestations de René COATHALEM, gérant de la société BELLA, aux termes desquelles cette société commercialise en France les peignoirs et serviettes éponges MARIE CLAIRE,

* des factures datées de l'année 2000 et 2001 relatives à l'achat de peignoirs fournis par la société BELLA à la société MARIE CLAIRE ALBUM et à des revendeurs indépendants,

* un tableau correspondant aux ventes réalisées par la société BELLA à compter du mois d'août 2001 jusqu'au mois de mai 2003, certifié par le commissaire aux comptes, établissant la commercialisation de 12.274 peignoirs revêtus de la marque MARIE CLAIRE,

* un catalogue de la société BELLA offrant à la vente des peignoirs MARIE CLAIRE,

* un catalogue de linge de toilette portant la date 2001/2002, proposant des peignoirs MARIE CLAIRE ;

Considérant que ces documents démontrent un usage réel et sérieux de la marque MARIE CLAIRE pour désigner des vêtements et suffisent à écarter toute déchéance partielle des droits de la société MARIE CLAIRE ALBUM, de sorte que la décision entreprise sera réformée sur ce point ;

Sur la contrefaçon de la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 :

- sur l'usage de cette dénomination sur le site Internet '[...]':

Considérant que la société MARIE CLAIRE ALBUM reproche à la société MARIE CLAIRE SA d'avoir reproduit la dénomination MARIE CLAIRE sur son site Internet '[...]' ;

Mais considérant que, force est de constater qu'il ressort du procès-verbal de constat d'huissier en date du 26 septembre 2001, que le site '[...]' exploité par la société MARIE CLAIRE SA est rédigé en langue espagnole, que la monnaie de transaction est exclusivement la peseta; qu'il n'est nullement démontré que ce site offre à la vente des produits aux consommateurs français ;

Que par voie de conséquence, les produits revêtus de la marque litigieuse n'étant pas disponibles en France, sa seule mention sur le site Internet, bien qu'accessible par les internautes depuis ce pays, ne saurait être considérée comme visant le public de France et constituer un acte d'exploitation sur le territoire français ;

Qu'il s'ensuit qu'aucun acte de contrefaçon de marque ne peut être reproché à la société MARIE CLAIRE SA ;

- sur l'usage de cette dénomination sur le site Internet '[...]' :

Considérant que la société MARIE CLAIRE ALBUM établit, par la production aux débats du procès-verbal de constat établi par l'Agence de protection des programmes les 12, 13 et 23 juillet 2001, la vente sur le territoire français par la société ALMACENES MARIOLA, par le biais du site Internet '[...]', d'un article de lingerie livré en France, comportant tant sur son emballage que sur une étiquette la dénomination MARIE CLAIRE ;

Que cet acte de commercialisation en France constitue un acte de contrefaçon de la marque MARIE CLAIRE dont est titulaire la société MARIE CLAIRE ALBUM ;

Considérant en revanche qu'il ne peut être reproché aucun fait de contrefaçon à l'égard de la société MARIE CLAIRE SA dont la relation commerciale avec la société ALMACENES MARIOLA n'est ni démontrée, ni alléguée ;

Qu'il résulte au contraire, du procès-verbal de constat précité que la société ALMACENES MARIOLA s'est approvisionnée auprès d'une société LACOTEX ayant acquis des produits régulièrement mis sur le marché espagnol ;

- sur la commercialisation des chaussettes saisies lors des opérations de saisie contrefaçon du 6 mars 2003 :

Considérant que ces opérations de saisie contrefaçon ont révélé l'offre à la vente par la société PRODUCCIONES ANA SANDRA de paires de chaussettes, acquises auprès de la société MARIE CLAIRE SA, pourvues d' une étiquette comportant d'une part, en haut et à droite, les termes AGATHA RUIZ DE LA PRADA et d'autre part en bas, la mention MARIE CLAIRE ;

Considérant que le signe critiqué n'étant pas identique à la marque 'MARIE CLAIRE' opposée faute de reproduire sans modification ni ajout tous les éléments la constituant, il convient de rechercher s'il existe entre les deux dénominations un risque de confusion au terme d'une appréciation globale fondée sur l'impression d'ensemble produite, en tenant compte de leurs éléments distinctifs ;

Considérant que si la calligraphie des termes MARIE CLAIRE diffère de celle de la marque semi-figurative MARIE CLAIRE, il n'en demeure pas moins, que par leurs ressemblances phonétiques et intellectuelles, il existe pour le consommateur d'attention moyenne, un risque de confusion sur l'origine du produit que n'affecte pas l'adjonction des termes AGATHA RUIZ DE LA PRADA, l'attention du public étant immédiatement attirée par la mention MARIE CLAIRE qui s'impose d'évidence en raison de son fort pouvoir distinctif et de sa notoriété certaine ;

Que de sorte, les faits de contrefaçon sont caractérisés ;

Sur la contrefaçon de la marque MARIE CLAIRE n° 92446554 :

Considérant que la marque n° 92446554 vise les montres, colliers, bracelets, boucles d'oreilles, broches, chaînes, pendentif en métal précieux ou en plaqué, pierres précieuses ou artificielles, trousses en tissus, sacs en tissus, tissus, linge de table, linge de lit, linge de maison ;

Considérant qu'au visa des dispositions de l'article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle, la société MARIE CLAIRE ALBUM fait valoir que les produits visés au dépôt de la marque sont similaires aux articles de lingerie tels que des sous-vêtements, chaussettes, collants ou bas ;

Mais considérant, ainsi que l'a retenu le tribunal, que ces produits ne peuvent être regardés comme similaires en ce qu'ils n'empruntent pas ordinairement les mêmes circuits de distribution et n'ont pas la même destination, de sorte que les faits de contrefaçon ne sont pas caractérisés ;

Sur l'atteinte à la notoriété de la marque MARIE CLAIRE n° 92446554 :

Considérant que la notoriété de la marque MARIE CLAIRE pour désigner un magazine féminin de mode n'est pas contestée et est établie par la preuve d'une longue exploitation tant en France qu'à l'étranger et les enquêtes de marché ;

Considérant en droit, qu'aux termes des dispositions de l'article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle l'emploi d'une marque jouissant d'une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière ;

Considérant en l'espèce, d'une part, que l'emploi par la société MARIE CLAIRE SA sur son site Internet '[...]' n'est pas de nature à porter préjudice à la société MARIE CLAIRE ALBUM dès lors que ce site espagnol n'offre aux consommateurs français aucun produit à la vente ;

Que d'autre part, cet emploi est justifiée par l'exercice légitime des droits de la société MARIE CLAIRE SA sur les marques MARIE CLAIRE qu'elle a déposées en Espagne pour désigner des vêtements, des chaussettes, des chaussons et des articles de lingerie ;

Considérant en revanche, que l'offre à la vente d'articles de lingerie, sous la dénomination MARIE CLAIRE, par la société ALMACENES MARIOLA sur son site Internet '[...]' permettant, ainsi qu'il a été constaté, leur acquisition sur le territoire français, est une exploitation injustifiée de la notoriété de la marque MARIE CLAIRE n°92446554 dont est titulaire en France la société MARIE CLAIRE ALBUM, dès lors que les lectrices habituelles de cette revue seront amenées à l'associer aux articles commercialisés par la société ALMACENES MARIOLA ;

Qu'il en est de même de la vente par la société PRODUCCIONES ANA SANDRA et l'importation en France par la société MARIE CLAIRE SA de chaussettes commercialisées sous la dénomination MARIE CLAIRE ;

Considérant ainsi que les sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA ont engagé leur responsabilité civile au sens de l'article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

Sur les agissements parasitaires :

Considérant que la société MARIE CLAIRE ALBUM reproche aux sociétés intimées d'avoir cherché tirer à profit de la notoriété du titre du magazine MARIE CLAIRE ;

Mais considérant que l'atteinte à ce titre et aux marques MARIE CLAIRE se confond, de sorte qu'il n'existe pas de fait distinct des actes illicites précités ;

Sur l'atteinte au nom commercial et à la dénomination sociale :

Considérant que la société MARIE CLAIRE ALBUM soutient que l'usage fait par la société MARIE CLAIRE SA du terme MARIE CLAIRE, comme dénomination sociale, sur le site '[...]' ou le site '[...]' porte atteinte à sa dénomination sociale et à son nom commercial ;

Mais considérant, étant rappelé premièrement, que la société MARIE CLAIRE ALBUM n'est pas recevable en ses demandes fondées sur l'exploitation du site Internet '[...]', secondement, que la mention MARIE CLAIRE SA, dénomination sociale de la société espagnole du même nom constituée en 1998, sur le site espagnol '[...]' qui ne s'adresse pas à un public français, n'entraîne aucune confusion avec la dénomination sociale ou le nom commercial de la société MARIE CLAIRE ALBUM, de sorte que celle-ci sera déboutée de ses prétentions à ce titre ;

Sur les mesures réparatrices :

Considérant que pour mettre un terme aux agissements illicites il sera fait droit aux mesures d'interdiction sous astreinte précisées au dispositif du présent arrêt ;

Considérant que le site '[...]' de la société ALMACENES MARIOLA proposant à la vente des articles de lingerie sous la dénomination MARIE CLAIRE n'est plus accessible sur Internet ;

Que le préjudice de la société MARIE CLAIRE ALBUM résultant des actes litigieux sera réparé par l'allocation de la somme de 10.000 euros ;

Considérant que les opérations de saisie contrefaçon ont révélé qu'environ deux cents paires de chaussettes comportant une étiquette revêtue de la dénomination MARIE CLAIRE, acquises auprès de la société MARIE CLAIRE SA, étaient offertes à la vente par la société PRODUCCIONES ANA SANDRA ;

Que ces deux sociétés seront ainsi condamnées in solidum à verser à la société MARIE CLAIRE ALBUM la somme de 30.000 euros ;

Considérant que les mesures de publication sollicitées n'apparaissent pas nécessaires ;

Sur les autres demandes :

Considérant qu'un arrêt n'est pas susceptible d'exécution provisoire ;

Considérant que les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile doivent bénéficier à la société MARIE CLAIRE ALBUM ; qu'il lui sera alloué à ce titre la somme de 10.000 euros; que les sociétés MARIE CLAIRE SA et PRODUCCIONES ANA SANDRA qui succombent en leurs prétentions doivent être déboutées de leur demande formée sur ce même fondement ;

PAR CES MOTIFS

Réforme le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la déchéance partielle des droits de la société MARIE CLAIRE ALBUM sur la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 en ce qu'elle désigne des vêtements, débouté la société MARIE CLAIRE ALBUM de ses demandes fondées sur la contrefaçon de sa marque MARIE CLAIRE n° 1712365, débouté la société MARIE CLAIRE ALBUM de ses demandes fondées sur l'atteinte à la notoriété de sa marque MARIE CLAIRE n° 92446554, condamné la société MARIE CLAIRE ALBUM au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

Statuant à nouveau sur les points réformés :

Déboute les sociétés MARIE CLAIRE SA et PRODUCCIONES ANA SANDRA de leur demande en déchéance partielle de la marque MARIE CLAIRE n° 1712365,

Dit que l'offre à la vente et la vente de produits revêtus de la dénomination MARIE CLAIRE par la société ALMACENES MARIOLA sur le site Internet '[...]' constituent la contrefaçon de la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 dont est titulaire la société MARIE CLAIRE ALBUM,

Dit que l'importation par la société MARIE CLAIRE SA et la commercialisation en France par la société PRODUCCIONES ANA SANDRA de produits revêtus de la dénomination MARIE CLAIRE constitue la contrefaçon de la marque MARIE CLAIRE n° 1712365 dont est titulaire la société MARIE CLAIRE ALBUM,

Dit qu'en offrant à la vente, en important et en commercialisant des produits revêtus de la dénomination MARIE CLAIRE, les sociétés ALMACENES MARIOLA, MARIE CLAIRE SA et PRODUCCIONES ANA SANDRA ont respectivement porté atteinte à la notoriété de la marque MARIE CLAIRE n° 92446554 et ont engagé leur responsabilité civile,

Condamne la société ALMACENES MARIOLA à payer à la société MARIE CLAIRE ALBUM la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice lié aux actes de contrefaçon et à l'atteinte portée à la notoriété de sa marque,

Condamne in solidum la société MARIE CLAIRE SA et la société PRODUCCIONES ANA SANDRA à payer à la société MARIE CLAIRE ALBUM la somme de 30.000 euros en réparation de son préjudice lié aux actes de contrefaçon et à l'atteinte portée à la notoriété de sa marque,

Interdit aux sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA de faire usage en France de la dénomination MARIE CLAIRE sous astreinte de 500 euros par infraction constatée passé un délai de un mois suivant la signification du présent arrêt,

Le confirme pour le surplus,

Y ajoutant :

Déclare la société MARIE CLAIRE ALBUM irrecevable en ses demandes au titre de la reproduction de la dénomination MARIE CLAIRE sur le site '[...]',

Condamne in solidum les sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA à payer à la société MARIE CLAIRE ALBUM la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne in solidum les sociétés MARIE CLAIRE SA, PRODUCCIONES ANA SANDRA et ALMACENES MARIOLA aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.