Cass. 1re civ., 30 mars 1971, n° 67-13.873
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
M. Thirion
Avocat général :
M. Blondeau
Avocat :
M. Ryziger
SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QUE SELON LES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND, LA CAISSE CENTRALE DE REASSURANCE DES MUTUELLES AGRICOLES A ETE CONSTITUEE EN 1907 CONFORMEMENT A LA LOI DU 4 JUILLET 1904 ET SON SIEGE SOCIAL FIXE STATUTAIREMENT A ALGER;
QUE PAR DIVERSARRETES DES 17 OCTOBRE 1963, 13 NOVEMBRE 1963 ET 28 JANVIER 1964 - LESQUELS ONT ETE ANNULES POUR EXCES DE POUVOIR PAR ARRET DU 20 JANVIER 1967 DES CHAMBRES ADMINISTRATIVES ET DE DROIT PRIVE REUNIES DE LA COUR SUPREME D'ALGERIE - LE MINISTRE ALGERIEN DE L'AGRICULTURE ET DE LA REFORME AGRAIRE A PRONONCE LA DISSOLUTION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION DE LA CAISSE, NOMME TROIS ADMINISTRATEURS PROVISOIRES ALGERIENS ET INVESTI UN NOUVEAU CONSEIL D'ADMINISTRATION DESIGNE PAR UNE ASSEMBLEE GENERALE REUNIE EN ALGERIE LE 20 JANVIER 1964;
QUE DES LE 12 NOVEMBRE 1963, LE CONSEIL D'ADMINISTRATION DISSOUS PAR L'AUTORITE ALGERIENNE S'ETAIT REUNI A PARIS ET APRES DELIBERATION SUR LES RESOLUTIONS A PRENDRE A LA SUITE DES MESURES ARRETEES PAR LE GOUVERNEMENT ALGERIEN, A DECIDE POUR CONSERVER SA LIBERTE D'ACTION GRAVEMENT ATTEINTE ET POURSUIVRE SON UNIQUE OBJET QUI EST LA SAUVEGARDE DES MUTUALISTES AGRICOLES DES DIFFERENTS PAYS OU S'EXERCE SON ACTIVITE DE TRANSFERER LE SIEGE SOCIAL A PARIS;
QUE LA DIRECTION DES ASSURANCES AU MINISTERE FRANCAIS DES FINANCES A PRIS ACTE DE CE TRANSFERT QUI FUT APPROUVE ET EN TANT QUE DE BESOIN DECIDE PAR UNE ASSEMBLEE GENERALE TENUE A PARIS LE 9 JUIN 1964;
QUE CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS D'UN DECRET FRANCAIS DU 23 MAI 1964, LA CAISSE SE TRANSFORMA EN SOCIETE D'ASSURANCE A FORME MUTUELLE A COTISATIONS FIXES SOUS LA NOUVELLE DENOMINATION DE MUTUELLE CENTRALE D'ASSURANCE ET DE REASSURANCE DES MUTUELLES AGRICOLES;
QU'UN LITIGE S'ETANT ELEVE ENTRE L'ETABLISSEMENT PUBLIC ALGERIEN AYANT CONSERVE LA DENOMINATION DE CAISSE CENTRALE DE REASSURANCE DES MUTUELLES AGRICOLES ET SON SIEGE A ALGER ET LA MUTUELLE CENTRALE AYANT SON SIEGE A PARIS AU SUJET DE LA PROPRIETE DES VALEURS MOBILIERES DETENUES PAR LA SOCIETE GENERALE DE PARIS SOUS LE DOSSIER DE SON AGENCE D'ALGER, L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE, DECLARE COMMUN A L'ORGANISME ALGERIEN ASSIGNE EN INTERVENTION FORCEE, A CONDAMNE CET ETABLISSEMENT BANCAIRE A TRANSFERER AU COMPTE OUVERT AU NOM DE LA MUTUELLE CENTRALE A LA BANQUE DE FRANCE LES VALEURS PAR LUI DETENUES POUR LE COMPTE DE LA CAISSE CENTRALE AYANT EU SON SIEGE A ALGER;
QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE, ALORS, D'UNE PART, QUE LA REGLE DE CONFLIT DE LOI FRANCAISE QUI AURAIT VALEUR LEGISLATIVE RATTACHE LES SOCIETES ET LES PERSONNES MORALES EN GENERAL A L'ETAT DANS LEQUEL ELLES ONT LEUR SIEGE SOCIAL;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'ACCESSION DE L'ALGERIE A L'INDEPENDANCE AURAIT EU POUR EFFET DE RATTACHER A LA LOI ALGERIENNE LES SOCIETES QUI AVAIENT, AVANT L'INDEPENDANCE, LEUR SIEGE SOCIAL SUR LE TERRITOIRE ALGERIEN ET QUE L'ARTICLE 17 DE LA DECLARATION DE PRINCIPE DES ACCORDS D'EVIAN RELATIVE A LA COOPERATION ECONOMIQUE ET FINANCIERE AURAIT SEULEMENT ETABLI UNE DIFFERENCE ENTRE LES SOCIETES FRANCAISES AYANT SUR LE TERRITOIRE ALGERIEN UN ETABLISSEMENT OU UNE SUCCURSALE ET LES SOCIETES DEVENUES ALGERIENNES ET DONT LE CAPITAL EST EN MAJORITE DETENU PAR DES PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES FRANCAISES, TOUT EN GARANTISSANT AUX DEUX TYPES DE SOCIETES L'EXERCICE NORMAL DE LEUR ACTIVITE DANS DES CONDITIONS EXCLUANT TOUTE DISCRIMINATION A LEUR PREJUDICE;
ALORS ENFIN, QUE LE DECRET ALGERIEN DU 1ER OCTOBRE 1963, QUI DECLARE BIENS DE L'ETAT LES EXPLOITATIONS AGRICOLES APPARTENANT AUX PERSONNES PHYSIQUES OU MORALES QUI A LADITE DATE NE JOUISSAIENT PAS DE LA NATIONALITE ALGERIENNE OU NE JUSTIFIAIENT PAS AVOIR ACCOMPLI LES FORMALITES LEGALES EN VUE DE L'ACQUISITION DE CETTE NATIONALITE, N'AURAIT NULLEMENT ENTENDU PAR CETTE FORMULE, DECIDER QUE LES PERSONNES MORALES ETAIENT SOUMISES A D'AUTRES FORMALITES QUE CELLES D'AVOIR LEUR SIEGE SOCIAL EN ALGERIE POUR JOUIR DE LA NATIONALITE ALGERIENNE;
MAIS ATTENDU QUE SI EN PRINCIPE, LA NATIONALITE D'UNE SOCIETE SE DETERMINE PAR LA SITUATION DE SON SIEGE SOCIAL, PAREIL CRITERE CESSE D'AVOIR APPLICATION LORSQUE LE TERRITOIRE SUR LEQUEL EST ETABLI CE SIEGE SOCIAL, ETANT PASSE SOUS UNE SOUVERAINETE ETRANGERE, LES PERSONNES QUI ONT LE CONTROLE DE LA SOCIETE ET LES ORGANES SOCIAUX INVESTIS CONFORMEMENT AU PACTE SOCIAL ONT DECIDE DE TRANSFERER DANS L PAYS AUQUEL ELLE SE RATTACHAIT LE SIEGE DE LA SOCIETE AFIN QU'ELLE CONSERVE SA NATIONALITE ET CONTINUE D'ETRE SOUMISE A LA LOI QUI LA REGISSAIT;
ATTENDU QU'EN L'ESPECE, L'ARRET ATTAQUE RETIENT QUE LES FRANCAIS QUI ONT FONDE LA CAISSE CENTRALE DE REASSURANCES DES MUTUELLES AGRICOLES ONT ENTENDU PLACER CET ORGANISME SOUS LE REGIME DE LA LOI FRANCAISE QUI A ETE SUIVIE POUR SA CONSTITUTION ET SON FONCTIONNEMENT ET LUI DONNER POUR SIEGE SOCIAL UNE VILLE DU TERRITOIRE FRANCAIS;
QUE LORS DE L'ACCESSION DE L'ALGERIE A L'INDEPENDANCE, CE SONT DES FRANCAIS QUI EXERCAIENT UN POUVOIR PREPONDERANT DANS LA DIRECTION ET LA GESTION DE LA CAISSE CENTRALE, LAQUELLE N'A CESSE D'ETRE SOUMISE AU CONTROLE DU GOUVERNEMENT FRANCAIS ET QUE CEUX-CI AYANT DECIDE, AVEC L'AGREMENT DE L'AUTORITE FRANCAISE DE TUTELLE, DE TRANSFERER LE SIEGE SOCIAL DE CELLE-CI DANS SES BUREAUX ADMINISTRATIFS DE PARIS, UNE RESOLUTION DE L'ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE A APPROUVE CETTE DECISION ET EN TANT QUE DE BESOIN DECIDE CE TRANSFERT;
QUE DE CES CIRCONSTANCES, LA COUR D'APPEL A PU DEDUIRE QUE LA CAISSE CENTRALE AVAIT CONSERVE SA NATIONALITE FRANCAISE ET PAR CES SEULS MOTIFS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION, ABSTRACTION FAITE DES AUTRES MOTIFS CRITIQUES PAR LE MOYEN QUI SONT SURABONDANTS;
ET SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECIDE QUE LE CONSEIL D'ADMINISTRATION DISSOUS PAR L'AUTORITE ALGERIENNE AVAIT VALABLEMENT CONVOQUE L'ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE DU 3 JUIN 1964, AU MOTIF QUE L'ARRET DE LA COUR SUPREME D'ALGERIE DU 20 JANVIER 1967 AVAIT ANNULE LES DIFFERENTES MESURES PRISES POUR SUBSTITUER AUX ADMINISTRATEURS EN EXERCICE D'AUTRES ORGANES SOCIAUX ET QUE L'ASSEMBLEE GENERALE CONVOQUEE A PARIS ETAIT REGULIERE, ALORS, D'UNE PART, QUE NUL NE PEUT SE FAIRE JUSTICE A SOI-MEME ET QUE TANT QUE LESDITES MESURES N'AVAIENT PAS ETE ANNULEES, LES ANCIENS ADMINISTRATEURS FRANCAIS NE POUVAIENT EXERCER LES POUVOIRS DONT ILS AVAIENT ETE DESSAISIS ET QUE L'ANNULATION DONT S'AGIT NE POUVAIT RETROACTIVEMENT VALIDER LEURS ACTES;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'ASSEMBLEE EXTRAORDINAIRE N'AURAIT PAS ETE REGULIERE, LES CAISSES D'ALGERIE N'AYANT PAS ETE CONVOQUEES AU MEPRIS DES STATUTS;
ALORS ENFIN QU'A SUPPOSER QUE LA REGLE DE L'UNANIMITE NE DUT PAS ETRE RESPECTEE POUR REALISER LE TRANSFERT DU SIEGE SOCIAL, LA COUR AURAIT OMIS DE RECHERCHER SI LA MAJORITE QUALIFIEE PAR L'ARTICLE 45 DES STATUTS AVAIT ETE REUNIE EN L'ESPECE ET QU'EN CONSIDERANT COMME REGULIERE UNE MODIFICATION DES STATUTS INTERVENUE A LA MAJORITE SIMPLE DES MEMBRES PRESENTS, LA COUR D'APPEL AURAIT DENATURE LESDITS STATUTS ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE LA COUR D'APPEL RETIENT JUSTEMENT QU'EN RAISON DE L'ANNULATION PAR LA COUR SUPREME D'ALGER, POUR EXCES DE POUVOIR DES MESURES QUI LES AVAIENT DESTITUES, LES ORGANES STATUAIRES DOIVENT ETRE CONSIDERES COMME ETANT RESTES SEULS QUALIFIES POUR ADMINISTRER LA CAISSE CENTRALE JUSQU'A LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DU 3 JUIN 1964 ET POUR CONVOQUER CELLE-CI;
QUE, D'AUTRE PART, EU EGARD AUX CIRCONSTANCES PARTICULIERES QU'ELLE RELEVE ET QU'ELLE A SOUVERAINEMENT APPRECIEES, LA COUR D'APPEL, A PU TENIR POUR REGULIERE CETTE ASSEMBLEE, NONOBSTANT LA NON-CONVOCATION DES CAISSES REGIONALES D'ALGERIE;
ET ATTENDU QUE LA DEMANDERESSE AU POURVOI N'A POINT SOUTENU, DEVANT LES JUGES DU FOND, QUE LA RESOLUTION PRISE PAR L'ASSEMBLEE GENERALE EXTRAORDINAIRE POUR TRANSFERER LE SIEGE SOCIAL DUT ETRE ACQUISE A UNE MAJORITE QUALIFIEE;
QUE LE MOYEN SUR CE POINT EST DONC NOUVEAU ET, MELANGE DE FAIT ET DE DROIT, IRRECEVABLE;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 17 MAI 1967 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.