Cass. com., 4 avril 1995, n° 93-18.394
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Poullain
Avocat général :
M. Mourier
Avocats :
SCP Delaporte et Briard, SCP Boré et Xavier
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 21 juin 1993), rendu sur renvoi après cassation, qu'au décès de Catherine Y..., épouse commune en biens de Paul A..., l'acte de partage de sa succession et de la communauté conjugale a été établi, le 17 janvier 1979, par le notaire X..., membre de la SCP Lacourte, Bercy, X... et Jourdain ; qu'à la suite de ce partage, les parts sociales de la société en nom collectif "Ancien poste Y..., Paul A... père et fils" ont été réparties entre Camille et Louis A..., leur père, Paul A..., n'en conservant aucune ; que cet acte n'a pas été publié au registre du commerce et des sociétés ; que M. Paul A... a été poursuivi sur ses biens au titre des dettes de la société mise en liquidation des biens par un arrêt relevant que la modification née du partage du 17 janvier 1979, non publiée au registre du commerce, n'était pas opposable aux tiers ; que M. Paul A..., reprochant au notaire une faute professionnelle, l'a poursuivi en responsabilité ;
Attendu que M. Paul A... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte de l'article 72, alinéa 1er, du décret du 23 mars 1967 que le notaire qui rédige un acte est tenu de procéder à la publicité au registre de commerce chaque fois qu'elle est nécessaire ; qu'en outre, aux termes de l'article 21 de la loi du 24 juillet 1966, si la dissolution de la société en nom collectif par le décès de l'associé a été écartée par une clause du contrat, les parts sociales de l'associé défunt sont transmises à ses héritiers, sauf à prévoir que, pour devenir associé, l'héritier devra être agréé par la société ; que, dès lors, le partage consécutif au décès d'un associé en nom, dont l'effet déclaratif remonte au jour dudit décès en vertu de l'article 883 du Code civil, emporte attribution des parts sociales du défunt au copartageant alloti, sans délibération spéciale des associés si les statuts ne comportent pas de clause d'agrément ; qu'en l'espèce, il n'a pas été soutenu que les statuts de la société en nom collectif litigieuse comportaient une clause d'agrément ; qu'en conséquence, en refusant d'imputer à faute au notaire le défaut de publicité au registre du commerce du partage des parts sociales, au motif que cette publicité aurait été inopérante en l'absence de délibération des associés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; alors, d'autre part, qu'en tout état de cause, en vertu de l'article 1147 du Code civil, le notaire doit mettre en garde ses clients contre le risque qu'ils courent en ne procédant pas à certaines formalités ; que, dès lors, en l'espèce, en décidant que le notaire X... n'était pas responsable parce qu'il l'avait informé de ce qu'il fallait une délibération spéciale des associés pour procéder aux formalités de publicité, sans rechercher s'il l'avait mis en garde contre le risque de mise en liquidation de biens personnelle qu'il encourrait à défaut de procéder auxdites formalités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt constate que M. Paul A... a été poursuivi en qualité d'associé ; que la perte de cette qualité impliquant une modification des statuts de la société en nom collectif qui ne pouvait résulter que de la délibération des associés la décidant ou d'un jugement en tenant lieu, la cour d'appel a pu décider que le notaire n'avait pas commis de faute en ne procédant pas à une formalité inopérante ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que le notaire avait avisé M. Paul A... de la nécessité d'une délibération des associés pour permettre la publicité de la nouvelle répartition du capital et que les copartageants avaient conscience de la nécessité de cette régularisation, l'arrêt en a déduit que le notaire avait clairement informé son client de la portée de l'acte de partage et des formalités devant être accomplies pour que la cession des parts soit réalisée et opposable aux tiers ; que, retenant au vu de ces constatations et de cette appréciation que le notaire n'avait commis aucun manquement dommageable, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.