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Décisions

Cass. soc., 8 juillet 2014, n° 13-15.573

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

M. Chauvet

Avocat général :

M. Lalande

Avocats :

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Laugier et Caston, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Pau, du 30 avr. 2012

30 avril 2012

Attendu, selon les arrêts attaqués (Pau, 30 avril 2012 et 7 février 2013), que la société X..., qui a pour activité la fabrication de sièges, a fait l'objet en 2005, d'une restructuration avec la fermeture de son site de Chaumont entraînant la suppression de cent soixante-six emplois ; que le 22 janvier 2008, les titres de la société ont été cédés à la société Sofarec, filiale créée par la société GMS investissements, son actionnaire unique ; que le 4 mai 2009, la société X... a bénéficié d'une procédure de redressement judiciaire et M. Y...a été désigné en qualité de mandataire judiciaire et MM. Z...et A...en qualité d'administrateurs ; que le 19 avril 2010, la société X... a été placée en liquidation judiciaire, M. Y...étant désigné en qualité de liquidateur, et que ce dernier a procédé au licenciement économique de la totalité des salariés le 30 avril 2010, après avoir mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ; que Mme B...et un certain nombre d'autres salariés ont saisi la juridiction prud'homale et la société Sofarec placée en liquidation judiciaire le 5 mars 2013, et M C...étant désigné en qualité de liquidateur ;

Sur la recevabilité du pourvoi dirigé contre l'arrêt du 30 avril 2012, examinée d'office après avis donné aux parties :

Vu l'article 608 du code de procédure civile ;

Attendu que le jugement en dernier ressort qui ne tranche pas une partie du principal ou ne met pas fin à l'instance en statuant sur un incident ne peut, en dehors des cas spécifiés par la loi, être frappé de pourvoi en cassation indépendamment du jugement sur le fond ;

Attendu que, dans un litige opposant Mme B...et un certain nombre d'autres salariés à la société Sofarec, la cour d'appel de Pau a, par un premier arrêt du 30 avril 2012, statué sur des exceptions de procédure ; qu'elle a statué sur le fond par un second arrêt du 7 février 2013 ; que le 5 avril 2013, la société Sofarec a formé un pourvoi contre l'arrêt du 7 février 2013 ;

Attendu que le présent pourvoi, dirigé contre l'arrêt du 30 avril 2012, a été formé le 9 avril 2013 ; qu'il est, dès lors, irrecevable ;

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi dirigé contre l'arrêt du 7 février 2013 :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. C...ès qualités fait grief à l'arrêt de condamner in solidum les sociétés Sofarec et Financière GMS à payer la somme de 3 000 euros à chacun des salariés, alors, selon le moyen :

1°/ que la responsabilité délictuelle de la société mère ne peut être engagée à raison des actes de sa filiale que si elle s'est immiscée dans la gestion de sa filiale de manière à créer l'apparence trompeuse de son propre engagement ; que l'arrêt attaqué, qui ne relève aucune immixtion de la société Sofarec dans la gestion de la société X... de nature à permettre aux salariés de croire légitimement qu'elle était engagée aux côtés de sa filiale mais constate que les décisions prises par les dirigeants de la société X... l'ont été de manière autonome et indépendante, se borne à des critiques des orientations décidées par les propres dirigeants de la société X..., si bien qu'en retenant la responsabilité de l'actionnaire à raison de la gestion de la société par ses propres dirigeants, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1842, 1165 et 1382 du code civil ;

2°/ que le juge ne peut fonder exclusivement sa décision sur une expertise extra judiciaire non contradictoire, si bien qu'en fondant sa décision sur les conclusions de l'expert-comptable mandaté par le comité d'entreprise pour l'assister dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel méconnu le principe d'égalité des armes résultant de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en faisant peser sur l'actionnaire la charge de prouver « la pertinence et l'efficacité » de différents contrats passés par la société X... la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1842 du code civil ;

4°/ que la société Sofarec faisait valoir, dans ses écritures, qu'elle n'était pas partie au contrat portant sur la mission d'accompagnement par la société JCC créations, dont le principe et les conditions avaient été définitivement décidés dans le protocole de conciliation homologué par le tribunal de commerce de Mont-de-Marsan, de sorte qu'aucune faute ne pouvait lui être imputée du fait de ce contrat, si bien qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que l'arrêt constate que l'offre du 29 novembre 2007 d'acquisition de la société X... par la société Financière GMS agissant au nom de la société GMSI prévoyait, notamment, la conclusion d'un contrat d'accompagnement avec une entité devant être créée à cet effet par Jean-Claude et Anne-Marie X... et que ce contrat de prestation de services a été effectivement conclu le 21 janvier 2008 entre la société Financière GMS et la société JCC Créations, si bien qu'en retenant que la décision de conclure ce contrat avait été prise par la société Sofarec pour en déduire qu'il constituait une légèreté blâmable de l'actionnaire, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ qu'il résulte des articles 1289 et 1290 du code civil que la compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi dès lors que deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre ; que la société Sofarec faisait valoir, dans ses écritures, que le contrat de cession de marques, dont le principe avait été arrêté à la fin de l'année 2007, portait sur des marques qui n'étaient pas valorisées à l'actif de la société X..., que la cession avait donc permis à la société X... d'enregistrer un produit exceptionnel sans sortie corrélative d'actif et que la compensation n'avait pas d'incidence sur la situation de la société dont le passif exigible se trouvait diminué d'autant, si bien qu'en retenant que cette cession avait nécessairement participé à l'aggravation de la situation sans s'expliquer sur son incidence sur le passif de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Sofarec, directement ou par l'intermédiaire de la société Financière GMS, avait pris des décisions dommageables pour la société X..., qui avaient aggravé la situation économique difficile de celle-ci, ne répondaient à aucune utilité pour elle et n'étaient profitables qu'à son actionnaire unique, la cour d'appel a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que ces sociétés avaient par leur faute et légèreté blâmable, concouru à la déconfiture de l'employeur et à la disparition des emplois qui en est résulté ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 30 avril 2012 ;

REJETTE le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 7 février 2013.