Cass. 3e civ., 25 octobre 1972, n° 71-10.586
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. De Montera
Rapporteur :
M. Decaudin
Avocat général :
M. Tunc
Avocat :
Me Garaud
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA SOCIETE ANONYME IMMOBILIERE SUCHET-MONTMORENCY A FAIT EDIFIER UN IMPORTANT ENSEMBLE IMMOBILIER BOULEVARD SUCHET A PARIS ET A, PAR DECISION DU 20 AVRIL 1960, CONFIE SA PROPRE GESTION, DANS LES TERMES LES PLUS LARGES, A LA SOCIETE ANONYME DE GERANCE ET DE CONSTRUCTION DITE SAGECO, PAR L'INTERMEDIAIRE DE LAQUELLE X... A, EN 1962, ACQUIS, DE DIFFERENTS ACTIONNAIRES, UN CERTAIN NOMBRE D'ACTIONS DE LA SOCIETE ANONYME IMMOBILIERE SUCHET-MONTMORENCY CORRESPONDANT A LA JOUISSANCE DE PLUSIEURS APPARTEMENTS ET LOCAUX ANNEXES ;
QU'A LA SUITE DE DIFFICULTES SURVENUES ENTRE LES PARTIES, X... A DEMANDE A ETRE DEDOMMAGE DU PREJUDICE QUE LUI OCCASIONNAIT LE RETARD APPORTE A LA LIVRAISON DESDITS APPARTEMENTS ;
QUE LA SAGECO REPROCHE A LA COUR D'APPEL DE L'AVOIR CONDAMNEE, EN QUALITE DE COPROMOTEUR, IN SOLIDUM AVEC D'AUTRES A PAYER A X... DES DOMMAGES-INTERETS POUR CE MOTIF, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE D'UNE PART, DANS DES CONCLUSIONS QUI ONT ETE DENATUREES, LA SOCIETE DE GERANCE, LOIN D'ADMETTRE LA QUALITE DE PROMOTEUR, LA CONTESTAIT EN DEMANDANT AUX JUGES DU SECOND DEGRE DE DIRE QU'ELLE N'ETAIT QUE MANDATAIRE, ET QUE, D'AUTRE PART, L'ARRET " A IMPLICITEMENT MAIS NECESSAIREMENT FAIT UNE APPLICATION DE LA THEORIE DE L'APPARENCE, LAQUELLE EXIGE LA CROYANCE ERRONEE DU TIERS ET QU'IL SOIT CONSTATE PAR LES JUGES DU FOND LES ELEMENTS DE NATURE A AVOIR PROVOQUE CETTE CROYANCE ERRONEE ", CE QUI N'EST PAS CONSTATE PAR LA COUR D'APPEL QUI " NE POUVAIT L'AFFIRMER SANS REFUSER DE TIRER DE SES PROPRES CONSTATATIONS LA CONSEQUENCE QUI EN DECOULAIT, NI LAISSER SANS REPONSE LES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE, LA PARTICIPATION DU CESSIONNAIRE AUX DIFFERENTES ASSEMBLEES GENERALES DE LA SOCIETE PROMOTEUR ETANT UN FAIT CONSTANT ET NON CONTESTE " ;
MAIS ATTENDU QUE LA QUESTION QUI SE POSAIT ETAIT CELLE DE SAVOIR SI LA SAGECO N'ETAIT, COMME ELLE LE SOUTENAIT, QU'UN SIMPLE MANDATAIRE, OU SI, COMME LE SOUTENAIT X..., ELLE DEVAIT ETRE CONSIDEREE COMME COPROMOTEUR DE L'OPERATION IMMOBILIERE ;
QUE LES JUGES DU FOND, QUI NE FONT AUCUNE APPLICATION DE LA THEORIE DE L'APPARENCE, DECLARENT, TANT PAR MOTIFS PROPRES QUE PAR ADOPTION DE CEUX DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE, QUE LA SOCIETE IMMOBILIERE SUCHET-MONTMORENCY ET LA SAGECO AVAIENT " LE MEME SIEGE SOCIAL, LA MEME LIGNE TELEPHONIQUE ET LE MEME PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL ", QUE LA SAGECO N'ETAIT PAS SIMPLE MANDATAIRE ET QUE SES POUVOIRS COMPORTAIENT CELUI " DE FOURNIR AUX NOUVEAUX ACTIONNAIRES TOUS LES ELEMENTS D'APPRECIATION QU'IL SERAIT POSSIBLE, D'ETABLIR LE REGLEMENT DE COPROPRIETE ET LE TABLEAU DE DIVISION, DE CONTROLER LES DECOMPTES DES ENTREPRENEURS ET DES ARCHITECTES, DE VERIFIER L'EXECUTION DES MARCHES SIGNES PAR LE PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, D'ASSURER EN SON TEMPS LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE " ;
QUE LES JUGES AJOUTENT QUE CES POUVOIRS ETENDUS CONSTITUAIENT UNE SORTE DE PARTAGE DES TACHES INCOMBANT AU PROMOTEUR " ET QUE, DANS UNE PUBLICITE PARUE LE 21 JUIN 1962 DANS UN JOURNAL QUOTIDIEN, SOUS LE TITRE " LES CONSTRUCTEURS PROMOTEURS SUIVANTS PRESENTENT LEURS PROGRAMMES ", LA SAGECO ETAIT INDIQUEE COMME CONSTRUCTEUR-PROMOTEUR DE L'IMMEUBLE DU BOULEVARD SUCHET ;
QUE DE CES CONSTATATIONS LES JUGES DU FOND ONT PU DEDUIRE QUE, MALGRE LES TERMES DU CONTRAT PASSE ENTRE ELLE ET LA SOCIETE IMMOBILIERE, LA SAGECO AVAIT JOUE LE ROLE D'UN COPROMOTEUR ;
QU'ABSTRACTION FAITE DU MOTIF CRITIQUE PAR LA PREMIERE BRANCHE DU MOYEN, QUI EST SURABONDANT, L'ARRET, QUI A AINSI REPONDU IMPLICITEMENT MAIS NECESSAIREMENT AUX CONCLUSIONS, EST LEGALEMENT JUSTIFIE ;
QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;
REJETTE LE DEUXIEME MOYEN ;
MAIS SUR LE PREMIER MOYEN : VU L'ARTICLE 1271 DU CODE CIVIL, ATTENDU QUE Y..., Z..., A..., B..., C... ET VEUVE D..., VENDEURS DES ACTIONS ACQUISES PAR X..., ONT ETE CONDAMNES IN SOLIDUM AVEC D'AUTRES A PAYER A CE DERNIER DES DOMMAGES-INTERETS, AUX MOTIFS QU'ILS ETAIENT ASSOCIES D'ORIGINE DE LA SOCIETE SUCHET MONTMORENCY, QUE CETTE SOCIETE AVAIT PRIS L'INITIATIVE DE CONSTRUIRE L'IMMEUBLE, D'EN FAIRE DRESSER LES PLANS, DE CHOISIR LES ENTREPRISES, DE SURVEILLER LES TRAVAUX ET DE PAYER LES MEMOIRES, ET, D'AUTRE PART, QU'ILS ONT TOUS ETE QUALIFIES DE " PROMOTEUR CEDANT ", DANS LES ACTES DE VENTE ET QUE PARTIE DU PRIX PAYE PAR X... A ETE VERSE AU COMPTE QUE CHACUN D'EUX POSSEDAIT DANS LES LIVRES DE LA SOCIETE IMMOBILIERE ;
QU'EN STATUANT PAR CES SEULS MOTIFS, ALORS QU'IL NE RESULTE PAS DE L'ARRET QUE LA SOCIETE IMMOBILIERE SUCHET-MONTMORENCY AIT ETE UNE SIMPLE SOCIETE DE FACADE ET SANS PRECISER LES ACTES DE PROMOTION IMMOBILIERE PERSONNELLEMENT ACCOMPLIS PAR CHACUNE DES PERSONNES CI-DESSUS NOMMEES, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
ET SUR LE QUATRIEME MOYEN : VU L'ARTICLE 1612 DU CODE CIVIL, ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A ACCORDE A X... DES DOMMAGES-INTERETS POUR RETARD DANS LA LIVRAISON DES APPARTEMENTS DONT IL S'ETAIT RENDU ACQUEREUR, SANS RECHERCHER SI LE FAIT QUE X... N'AVAIT PAS PAYE A LA SOCIETE IMMOBILIERE SUCHET-MONTMORENCY LES SOMMES QUI LUI ETAIENT RECLAMEES, NE LUI INTERDISAIT PAS DE SE PREVALOIR D'UN RETARD DANS LA LIVRAISON, AINSI QUE LE FAISAIENT VALOIR, DANS LEURS CONCLUSIONS D'APPEL, LES DEMANDEURS EN CASSATION ;
QU'AINSI, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS, ET SANS AVOIR A STATUER SUR LES TROISIEME ET CINQUIEME MOYENS : CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU LE 9 JANVIER 1971 ENTRE LES PARTIES PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS ;
REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL DE REIMS.