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Décisions

Cass. com., 18 mars 1970, n° 69-10.375

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Aydalot

Rapporteur :

M. Larère

Avocat général :

M. Robin

Avocat :

M. Riché

Reims, du 19 nov. 1968

19 novembre 1968

SUR LE SECOND MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA SOCIETE J GRANTIL A FAIT ASSIGNER LA SOCIETE NOUVELLE DU PAPIER PEINT ET LA SOCIETE CHAMPENOISE DU PAPIER PEINT DEVANT LE TRIBUNAL DE COMMERCE EN PAIEMENT DE DOMMAGES-INTERETS POUR CONCURRENCE DELOYALE ET CONTREFACON DE MODELES DE PAPIER PEINT EN DECLARANT FONDER SON ACTION SUR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL ET DE LA LOI DU 11 MARS 1957 SUR LA PROPRIETE ARTISTIQUE ET LITTERAIRE;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET PARTIELLEMENT INFIRMATIF DEFERE D'AVOIR, POUR ECARTER L'ACTION EN CONCURRENCE DELOYALE, EXAMINE SEPAREMENT CHACUN DES FAITS CONSTITUTIFS DE CETTE CONCURRENCE DELOYALE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LA CONCURRENCE DELOYALE PEUT RESULTER D'UN FAISCEAU D'ELEMENTS DONT CHACUN, PRIS ISOLEMENT, NE SERAIT PAS SUFFISANT ET QUE FAUTE D'AVOIR APPRECIE DANS LEUR ENSEMBLE LES ELEMENTS DE LA CAUSE, L'ARRET N'EST PAS SUR CE POINT SUFFISAMMENT MOTIVE;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, APRES AVOIR EXAMINE CHACUN DES GRIEFS FORMULES PAR LA SOCIETE GRANTIL CONTRE LES DEUX SOCIETES ASSIGNEES EN CONCURRENCE DELOYALE, LES ECARTE TOUS EN DECLARANT, EN DES MOTIFS CIRCONSTANCIES, QUE LA SOCIETE GRANTIL N'A PAS RAPPORTE LA PREUVE QUE LES DEUX SOCIETES NE SERAIENT LIVREES A DES MANOEUVRES DANS LE BUT DE DESORGANISER SON ENTREPRISE, DE DETOURNER SA CLIENTELE OU DE S'APPROPRIER SES SECRETS DE FABRIQUE OU DE COMMERCE, QU'IL EST CONSTANT QUE LES MEMBRES DU PERSONNEL DE LA SOCIETE GRANTIL QUI DEVAIENT ETRE EMBAUCHES PAR CES DEUX SOCIETES ONT RESPECTE LE PREAVIS LEGAL, QU'IL N'EST PAS JUSTIFIE QU'ILS AIENT CEDE A DES OFFRES DE SALAIRES SUPERIEURS, QUE LES ATTESTATIONS PRODUITES ETABLISSENT QUE LES EMBAUCHAGES ONT ETE FAITS REGULIEREMENT ET QU'UNE LETTRE CIRCULAIRE DE LA SOCIETE CHAMPENOISE DU PAPIER PEINT NE PEUT VALABLEMENT ETRE INVOQUEE PAR LA SOCIETE GRANTIL COMME UNE MANOEUVRE A SON EGARD CAR ELLE ETAIT ADRESSEE AUX FOURNISSEURS ET NON A LA CLIENTELE;

QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS ET APPRECIATIONS SOUVERAINES, LA COUR D'APPEL A PU DECLARER MAL FONDEE L'ACTION EN CONCURRENCE DELOYALE;

QUE, DES LORS, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI;

MAIS SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES: VU LES ARTICLES 2 ET 3 DE LA LOI DU 11 MARS 1957;

ATTENDU QUE, SELON CES TEXTES, LES DISPOSITIONS DE LA LOI SUR LA PROPRIETE ARTISTIQUE ET LITTERAIRE PROTEGENT LES DROITS DES AUTEURS SUR TOUTES LES OEUVRES DE L'ESPRIT, QUELS QUE SOIENT LE GENRE, LA FORME D'EXPRESSION, LE MERITE OU LA DESTINATION ET QUE SONT NETTEMENT CONSIDEREES COMME OEUVRES DE L'ESPRIT AU SENS DE LA LOI LES OEUVRES DES ARTS APPLIQUES;

ATTENDU QUE, POUR ECARTER LE GRIEF DE CONTREFACON DES PAPIERS PEINTS FABRIQUES PAR LA SOCIETE GRANTIL, LA COUR D'APPEL, SANS DENIER LA COMPLETE IDENTITE AVEC LES MODELES ANTERIEURS DE LA SOCIETE GRANTIL DE CERTAINES DES FABRICATIONS DE LA SOCIETE NOUVELLE DU PAPIER PEINT ET DE LA SOCIETE CHAMPENOISE DU PAPIER PEINT, DECLARE QUE LES ECHANTILLONS COMMUNIQUES PAR LA SOCIETE GRANTIL CONCERNENT DES PAPIERS PEINTS D'USAGE COURANT, DE PRIX BAS DESTINES A ETRE UTILISES DANS LES LOCAUX DEPENDANT DE "GRANDS ENSEMBLES";

QUE, D'UNE PART, POUR LEUR REFUSER LA QUALITE D'OEUVRES DE L'ESPRIT ENTRANT DANS LA CATEGORIE DES OEUVRES D'ART APPLIQUE, LA COUR D'APPEL ENONCE QU'ILS SONT A L'EVIDENCE LE RESULTAT D'IMPRESSION, PAR APPLICATION MECANIQUE, DE MACHINES IMPRIMANTES A DIFFERENTS COLORIS, DE TRAITS, DE TACHES, VEINULES PLUS OU MOINS ONDULEES;

QUE, D'AUTRE PART, POUR LEUR DENIER TOUTE ORIGINALITE, L'ARRET SE BORNE A DECLARER QUE DES PAPIERS PEINTS SEMBLABLES, TANT PAR LE DESSIN QUE LA COULEUR OU LA CONTEXTURE DU PAPIER, SE RETROUVENT DANS TOUTES LES COLLECTIONS PRESENTEES AUX UTILISATEURS PAR LES FABRICANTS OU COMMERCANTS SPECIALISES ET QU'EN CONSEQUENCE IL S'AGIT D'UN PRODUIT INDUSTRIEL COURANT;

ATTENDU QU'EN FONDANT AINSI SA DECISION, D'UNE PART, EN CE QUI CONCERNE LE CARACTERE D'OEUVRE DE L'ESPRIT, SUR LA DESTINATION A UNE CLIENTELE PARTICULIERE, SUR LES PROCEDES DE FABRICATION, SUR LE CARACTERE ABSTRAIT DES DESSINS OU COMBINAISONS DE LIGNES ET DE COULEURS ET, D'AUTRE PART, EN CE QUI CONCERNE L'ABSENCE D'ORIGINALITE, SUR UNE SIMPLE AFFIRMATION D'ORDRE GENERAL, SANS RECHERCHER SI LES FABRICATIONS CONSIDEREES COMME SIMILAIRES AVAIENT ETE CREEES ET MISES EN VENTE A DES DATES ANTERIEURES AUX FABRICATIONS ET MISES EN VENTE DE LA SOCIETE GRANTIL, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION;

PAR CES MOTIFS: CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT DANS LES LIMITES DU PREMIER MOYEN, L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES, PAR LA COUR D'APPEL DE REIMS, LE 19 NOVEMBRE 1968;

REMET, EN CONSEQUENCE, QUANT A CE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET, ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'ORLEANS.