Cass. crim., 20 octobre 2004, n° 03-82.644
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pibouleau
Rapporteur :
M. Dulin
Avocat général :
M. Davenas
Avocats :
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Defrenois et Levis
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 432-11 du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel a condamné du chef de corruption Gilbert X... à une peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende ;
"aux motifs que les déclarations de Mlle Y... sont particulièrement circonstanciées ; qu'après avoir exposé l'importance des marchés, reconductibles chaque année, passés avec EDF (près de 40% du chiffre d'affaires de l'entreprise), elle explique dans quelles conditions Gilbert X... lui a demandé avec insistance de procéder à des prestations à son domicile, à titre gratuit ou en les facturant sous d'autres formes, pour pouvoir poursuivre son activité avec cet important client ; que le caractère d'antériorité du pacte résulte suffisamment du fait que Gilbert X... a bénéficié d'avantages réitérés qui ont permis à l'entreprise Y... de conserver ses marchés, étant précisé que, pour que le délit soit constitué, il suffit que Gilbert X... ait pu faire croire, à une influence supposée mais qui en tout état de cause apparaissait bien réelle en l'état des éléments figurant au dossier quant à l'importance de ses fonctions ;
"alors, d'une part, que le délit de corruption n'est caractérisé que lorsque des avantages sont agréés ou sollicités pour accomplir un acte de sa fonction ; qu'en conséquence, en condamnant du chef de corruption Gilbert X..., lequel a fait valoir devant la cour d'appel que la signature des contrats entre EDF et la société Y... n'entrait pas dans ses fonctions, pour avoir exercé une influence dans la procédure de passation des marchés entre EDF et la société Y... pour l'entretien des espaces verts du centre et des résidences de fonction, la cour d'appel a violé les textes précités ;
"alors, d'autre part, que l'acte de la fonction ou facilité par la fonction pour lequel l'avantage a été sollicité ou agréé, élément constitutif du délit de corruption, doit être réel et non pas supposé ; que, dès lors, à supposer même que l'influence visée par l'arrêt attaqué recouvre un acte de la fonction ou facilité par la fonction du prévenu, la cour d'appel, en relevant que cette influence pouvait n'être que supposée, a violé les textes précités ;
"alors, enfin, que le délit de trafic d'influence suppose que l'influence réelle ou supposée s'exerce à l'égard d'une autorité ou une administration publique ; que telle n'est pas le cas d'une influence exercée à l'égard d'un établissement public à caractère industriel et commercial qui, à l'instar d'EDF, n'exerce aucune autorité sur les tiers et n'est pas une administration publique ; qu'en conséquence, la condamnation prononcée par l'arrêt attaqué ne saurait être justifiée par une qualification des faits en trafic d'influence" ;
Attendu que Gilbert X..., directeur d'un centre de production Electricité de France (EDF), a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de corruption pour avoir, en exécution d'un accord préalable, sollicité ou agréé sans droit des avantages pour accomplir des actes de sa fonction, en l'espèce l'obtention de marchés dont il avait la signature ;
Attendu que, pour retenir le prévenu dans les liens de la prévention, la cour d'appel énonce qu'il a conclu un pacte avec une entreprise chargée de l'entretien des jardins du centre et des villas de fonction afin qu'elle effectue des travaux dans sa propriété personnelle, et qu'en contrepartie cette entreprise conserverait les marchés avec EDF ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant sur l'influence réelle du prévenu qui ne se rapporte pas au délit de corruption et dès lors qu'il est constant que les avantages en cause ont été obtenus par le prévenu pour accomplir un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa troisième branche en ce qu'il se rapporte à un délit dont le prévenu n'a pas été reconnu coupable, doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.