Cass. 2e civ., 11 juin 1980, n° 78-15.972
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bel
Rapporteur :
M. Billy
Avocat général :
M. Maynier
Avocat :
Me Ancel
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué, que l'Etat ayant été déclaré responsable des dommages causés à un immeuble appartenant à Abchée et condamné à payer des indemnités provisionnelles, Abchée a demandé le paiement d'une indemnité définitive et la condamnation de l'Agent judiciaire du Trésor à effectuer les travaux de réparation nécessaires ; que le tribunal a alloué l'indemnité mais s'est déclaré d'office incompétent pour connaître du surplus de la demande par application du principe de la séparation des autorités judiciaires et administratives ; qu'Abchée a relevé appel ;
Attendu que l'Agent judiciaire du Trésor fait grief à l'arrêt d'avoir écarté ses conclusions tirées du caractère tardif de l'appel en se fondant sur l'absence de signification du jugement par l'intimé ; Mais attendu que l'Agent judiciaire du Trésor n'avait pas soutenu que l'appel fût irrecevable et ne se prévalait de sa tardiveté que pour contester son caractère sérieux ; que, répondant aux conclusions, la Cour d'appel énonce qu'on ne peut reprocher à Abchée d'avoir attendu près de deux ans pour relever appel, l'intimé ne lui ayant pas fait signifier le jugement ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que l'Agent judiciaire du Trésor reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamné à verser une nouvelle provision sans imputation des provisions précédentes, alors qu'il aurait ainsi méconnu que la somme allouée par les premiers juges correspondait à une indemnité allouée à titre définitif à la victime en réparation de divers préjudices distincts de la remise en état de l'immeuble et qu'en conséquence, les différentes provisions déjà versées auraient dû s'imputer sur cette somme ; Mais attendu qu'il ne saurait être reproché à la Cour d'appel d'avoir "méconnu" le jugement qu'elle infirmait ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que, selon le moyen, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision en se fondant sur des circonstances de fait non pertinentes et postérieures à l'expiration d'un délai qu'Abchée s'était engagé à respecter, pour écarter l'argumentation de l'Agent judiciaire tirée de l'inobservation de l'engagement de construire dans les quatre ans pris par Abchée lors de l'acquisition de l'immeuble afin de bénéficier d'un tarif fiscal réduit ; Mais attendu que l'appréciation de la pertinence des faits appartient aux juges du fond qui, les écritures du Trésor ne tirant aucune déduction de l'observation qu'Abchée n'avait pas respecté des engagements pris en matière fiscale, n'étaient pas tenus de répondre à de simples arguments ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que, selon le moyen, la Cour d'appel, saisie d'une contradiction irrémédiable entre la demande en paiement d'une somme définitive à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice distinct de la réfection de l'immeuble formulée dans l'exploit introductif et accueillie par le premier juge dans sa décision dont l'Agent judiciaire demandait la confirmation et, d'autre part, la demande formulée en cause d'appel par Abchée tendant au versement d'une provision sur le montant des travaux, avait l'obligation de rechercher sur quel fondement exactement il lui appartenait de statuer et qu'en ne se livrant pas à cette recherche, elle aurait violé le principe de l'immeutabilité du litige ; Mais attendu qu'il résulte des productions que ce moyen n'a pas été soumis à la Cour d'appel ; qu'il est nouveau et que, mélangé de fait et de droit, il est irrecevable devant la Cour de cassation ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que, selon le moyen, la Cour d'appel, en recevant l'appel d'Abchée, a violé l'article 94 du nouveau Code de procédure civile, selon lequel la voie du contredit est seule ouverte lorsqu'une juridiction statuant en premier ressort se déclare d'office incompétente ; Mais attendu que l'article 99 du même code dispose que la Cour ne peut être saisie que par la voie de l'appel lorsque l'incompétence est relevée d'office, au motif que l'affaire relève de la compétence d'une juridiction administrative ; que tel étant le cas en l'espèce, le moyen n'est plus fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 27 juillet 1978 par la Cour d'appel de Fort-de-France.