Cass. 3e civ., 18 janvier 2006, n° 04-17.888
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 11 mai 2004), qu'afin de permettre la mise en oeuvre d'un chauffage électrique, le Syndicat des copropriétaires de la Résidence La Rocade (le syndicat) a signé avec la société Campoy un marché de travaux relatif à l'isolation de l'immeuble par l'extérieur, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Eco Technic ; que les matériaux ont été fournis par la société PPG Industries France (société PPG) ; qu'après réception des travaux, des fissures étant apparues de façon généralisée, le syndicat a assigné les divers intervenants et leurs assureurs en réparation de son préjudice ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le premier moyen du pourvoi incident, réunis ;
Attendu que la société PPG et la société Campoy font grief à l'arrêt de dire recevable l'action du syndicat des copropriétaires et de condamner la société Campoy in solidum avec la société Eco Technic à payer des sommes à ce syndicat sous garantie de la société PPG, alors, selon le moyen, que les désordres qui relèvent d'une garantie légale ne peuvent donner lieu, contre les personnes tenues à cette garantie, à une action en réparation fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun ; que relèvent de la garantie biennale, prévue à l'article 1792-3 du Code civil, les dommages affectant les éléments d'équipement dissociables d'un bâtiment lorsqu'ils ne portent pas atteinte à la destination dudit bâtiment ou lorsqu'ils ne portent pas atteinte à la propre destination de l'élément d'équipement si ce dernier est, en tant que tel, un ouvrage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le système d'isolation extérieure, fourni par la société PPG Industries France et mis en oeuvre par l'entreprise Campoy était un équipement qui ne pouvait être considéré comme faisant indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature de clos ou de couvert du bâtiment, au sens des dispositions de l'article 1792-2 du Code civil et qu'il ne résultait pas non plus de l'ensemble des éléments du système que la fourniture et la pose de ce revêtement sur des bâtiments pré-existants aient abouti à la réalisation d'un ouvrage, au sens des dispositions de l'article 1792 du même Code ; qu'en énonçant, néanmoins, au motif inopérant que le contrat conclu par le syndicat était un contrat d'entreprise ordinaire, que les désordres litigieux relevaient non pas de la garantie biennale de bon fonctionnement, prévue à l'article 1792-3 du Code civil, mais de la responsabilité contractuelle de droit commun et, partant, que l'action engagée par le syndicat, huit ans après le procès-verbal de levée des réserves était recevable, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 1147, 1134 et 1792-3 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que la mise en place du revêtement, dont le produit employé et la technique de mise en oeuvre n'avaient entraîné aucune atteinte ou modification sur la surface existante, avait été réalisée sur un ouvrage déjà achevé, la cour d'appel en a exactement déduit, que cette installation ne faisait pas l'objet de la garantie de bon fonctionnement d'une durée de deux ans, laquelle ne concerne pas les éléments d'équipement dissociables adjoints à un ouvrage existant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi incident :
Attendu que la société Campoy fait grief à l'arrêt de la condamner à payer des sommes au syndicat, alors, selon le moyen, qu'en condamnant la société Campoy à réparer, sur le fondement de la garantie contractuelle stipulée au marché de travaux, des désordres n'ayant aucun lien de causalité avec son intervention et, provenant de défauts de conception du procédé " Corotherm" et de défauts de fabrication du produit isolant, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la garantie de la société Campoy, qui n'avait pas eu le choix du procédé ou du produit d'isolation employés et qui n'a fait que mettre en oeuvre le système "Corotherm" qui lui a été imposé par la copropriété et le maître d'oeuvre, ne s'appliquait pas, dès lors, qu'à sa main d'oeuvre à l'exclusion de la fourniture, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le marché liant les parties prévoyait que la date de réception des travaux constituait le début de la période de garantie de dix ans durant laquelle l'entreprise devrait remédier à tous les désordres affectant les ouvrages, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision en retenant que la société Campoy devait sa garantie au syndicat des copropriétaires ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société PPG Industries France aux dépens des pourvois, à l'exception de ceux exposés par la société Campoy qui resteront à sa charge ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société PPG Industries France à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence La Rocade la somme de 2 000 euros, à la société Axa Corporate, la somme de 2 000 euros, à la société Ace Europe, la somme de 1 000 euros, à la société Eco Technic et à la Mutuelle l'Auxiliaire, ensemble, la somme de 1 000 euros, rejette la demande de la société Campoy ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille six.