Livv
Décisions

Cass. com., 18 mai 2022, n° 20-22.623

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Henry

Avocat :

SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Toulouse, du 15 oct. 2020

15 octobre 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse,15 octobre 2020), la société Les Ailes a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 24 avril puis 26 juin 2018 par le tribunal de commerce d'Albi, Mme [G] étant désignée liquidateur.

2. Le 15 février 2019, une ordonnance a autorisé la vente aux enchères du matériel et mobilier. Au titre d'une créance de loyers et charges du bail commercial impayés entre les mois de juillet 2018 et de février 2019, M. [V], bailleur du local d'exploitation, a fait pratiquer une saisie-attribution sur le produit de la vente. Le liquidateur en a demandé la mainlevée.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors :

« 1°/ qu'une créance née en exécution d'un contrat en cours après le jugement d'ouverture ne peut bénéficier du traitement préférentiel du paiement à l'échéance que si elle est née avant l'exercice de l'option par l'organe compétent ou après une décision de poursuite de ce contrat prise par l'organe compétent ; qu'en retenant, pour en déduire que M. [V] disposait sur la Sarl Les Ailes d'une créance de loyers et charges née postérieurement au jugement d'ouverture éligible au traitement préférentiel du paiement à l'échéance, que "l'on se trouv(ait) en l'espèce dans la situation de la "continuation d'un contrat de bail en cours régulièrement décidée après l'ouverture de la procédure judiciaire" comme résultant en matière de bail notamment de l'absence d'information par le liquidateur de son intention de ne pas continuer le bail" et que "si le bailleur dispose de la possibilité de mettre en demeure le liquidateur de se prononcer sur le sort du bail, le fait qu'il n'ait pas usé de cette faculté qui n'est instaurée qu'en sa faveur, ne saurait impliquer de facto la résiliation du bail", la cour d'appel a violé les articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce ;

2°/ que l'option de l'organe compétent pour la poursuite d'un contrat en cours ne peut résulter que d'une décision formelle de poursuite ou d'actes manifestant sans équivoque son intention d'exiger la continuation du contrat, ce qui n'est pas le cas de la seule abstention de cet organe à résilier le contrat automatiquement poursuivi ; qu'en jugeant cependant qu'« on se trouv(ait) en l'espèce dans la situation de la "continuation d'un contrat de bail en cours régulièrement décidée après l'ouverture de la procédure judiciaire" comme résultant en matière de bail notamment de l'absence d'information par le liquidateur de son intention de ne pas continuer le bail » et de l'absence de mise en demeure par le bailleur du liquidateur de se prononcer sur le sort du bail, la cour d'appel a violé les articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce ;

3°/ que le cocontractant d'un débiteur en liquidation judiciaire, à qui incombe d'établir que sa créance résulte d'un contrat régulièrement poursuivi au sens de l'article L. 641-13 du code de commerce pour prétendre au traitement préférentiel du paiement à l'échéance, ne peut, faute de prouver la réunion des conditions légales, rattacher sa créance à une autre catégorie de créances postérieures privilégiées prévues par les articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce ; qu'en retenant qu'en toute hypothèse la créance de loyers postérieure au prononcé de la liquidation judiciaire invoquée par M. [V] était utile à la procédure en cours dès lors que le liquidateur avait envisagé de vendre le fonds de commerce avec le droit au bail, la cour d'appel a violé les articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce ;

4°/ que seule est une créance née pour les besoins de la procédure bénéficiant du traitement préférentiel du paiement à l'échéance au sens des articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce celle qui trouve sa cause exclusive dans les opérations de la procédure ; qu'en retenant qu'en toute hypothèse la créance de loyers postérieure au prononcé de la liquidation judiciaire de la Sarl Les Ailes invoquée par M. [V] était utile à la procédure en cours dès lors que le liquidateur avait envisagé de vendre le fonds de commerce avec le droit au bail, quand cette circonstance n'était pas de nature à faire de cette créance, qui était due par le débiteur même s'il ne faisait pas l'objet d'une procédure collective, une créance née pour les besoins de la procédure bénéficiant du traitement préférentiel du paiement à l'échéance, la cour d'appel a violé les articles L. 622-17 et L. 641-13 du code de commerce.

Réponse de la Cour

4. Après avoir constaté que ni le liquidateur ni le bailleur n'avait pris l'initiative de la résiliation du bail, lequel était donc toujours en cours, et que le liquidateur avait obtenu l'autorisation de céder celui-ci, l'arrêt retient que l'utilité de la prestation fournie par le bailleur pour la procédure collective en cours ne saurait être contestée, même en l'absence de poursuite d'activité, dès lors que le droit au bail constituait un élément essentiel du fonds de commerce pouvant être vendu par le liquidateur au titre des opérations de réalisation de l'actif.

5. De ce seul motif, la cour d'appel a pu déduire que la créance litigieuse de loyers était payable à l'échéance en application de l'article L. 641-13 du code de commerce.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.