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Décisions

CA Nancy, 5e ch. com., 4 mai 2022, n° 21/01514

NANCY

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Meunier

Conseillers :

M. Beaudier, M. Firon

Avocats :

Me Driencourt, Me Lordier

T. com. Nancy, du 31 mai 2021, n° 21/000…

31 mai 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

Par ordonnance en date du 03 novembre 2020, le juge-commissaire à la procédure de liquidation judiciaire de M. X, saisi par requête en date du 23 octobre 2020 par la SCP Y ès-qualités, a suspendu le versement des subsides mensuels alloués par ordonnance du 27 novembre 2017 à M. X jusqu'à la régularisation de l'acte de vente d'un 5ème bien immobilier, sur base de l'évaluation à dire d'expert, afin de permettre la clôture par extinction du passif.

Par courrier recommandé avec accusé réception en date du 28 novembre 2020, M. X a formé opposition à ladite ordonnance.

Par jugement contradictoire en date du 31 mai 2021, le Tribunal de Commerce de Nancy a :

- déclaré M. X recevable et bien-fondé en son opposition à l'ordonnance du juge commissaire en date du 3 novembre 2020,

- annulé ladite ordonnance,

Statuant à nouveau,

- déclaré la SCP Y, ès qualité de liquidateur judiciaire de M. X mal fondée en sa demande de suspension du versement des subsides mensuels accordés à M. X,

En conséquence,

- ordonné la reprise sans délai des versements mensuels des subsides accordés à M. X par ordonnance du juge commissaire en date du 27 novembre 2017,

- ordonné l'emploi des dépens du présent jugement en frais de procédure collective.

La SCP Y a interjeté appel du jugement par déclaration électronique transmise au greffe en date du 16 juin 2021 en ce qu'il a déclaré :

- M. X recevable et bien-fondé en son opposition à l'ordonnance du juge-commissaire en date du 03/11/2020,

- annulé ladite ordonnance, statuant à nouveau, déclaré la SCP Y, ès-qualité de liquidateur judiciaire de M. X, mal fondée en sa demande de suspension du versement des subsides mensuels accordés à M. X,

- ordonné la reprise sans délai des versements mensuels des subsides accordés à M. X par ordonnance du juge-commissaire en date du 27/11/2017,

- ordonné l'emploi des dépens du présent jugement en frais de procédure collective.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 janvier 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce en date du 31 mai 2021 en toutes ses dispositions;

Statuant à nouveau,

- confirmer l'ordonnance rendue par Madame le Juge Commissaire en date du 3 Novembre 2020 en ce qu'elle a ordonné la suspension du versement des subsides mensuels à M. X;

- débouter Monsieur X de l'ensemble de ses demandes;

- condamner Monsieur X à payer à la SCP Y es qualité la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile;

- condamner Monsieur X aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

- condamner Monsieur X à payer à la SCP Y es qualités la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner Monsieur X aux dépens de l'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 janvier 2022, Monsieur X demande à la cour de :

Vu le Code de commerce et notamment son article L. 631-11,

Vu les pièces produites,

Sur la procédure:

- dire l'appel de la SCP Y recevable mais mal fondé,

Sur le fond :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

En conséquence :

- déclarer Monsieur X recevable et bien-fondé en son opposition à l'ordonnance du juge commissaire en date du 3.11.2020;

- déclarer la SCP Y, es qualités de liquidateur judiciaire de Monsieur X, mal fondée en sa demande de suspension du versement des subsides mensuels accordés à Monsieur X ;

- annuler ladite ordonnance,

- ordonner la reprise sans délai par la SCP Y des versements mensuels des subsides accordés à Monsieur X par ordonnance du juge-commissaire en date du 27 novembre 2017 ;

- condamner la SCP Y es qualités, à verser l'ensemble des subsides dus à Monsieur X et dire que ceux-ci seront dus jusqu'à l'issue de la procédure de liquidation judiciaire;

- condamner la SCP Y ès qualités à verser 3000 euros à Monsieur X sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

- condamner la SCP Y ès qualités aux dépens de l'appel;

- débouter la SCP Y, ès qualités, de ses demandes plus amples et contraires.

La procédure a été clôturée par ordonnance le 02 mars 2022.

Lors des débats, la SCP Y es qualités a été invitée à communiquer par note en délibéré les éléments suivants : nombre et adresses des biens immobiliers de M. X, le montant des loyers mensuels perçus actuellement et le montant du passif déduction faire des ventes immobilières et des loyers.

Le 1er avril 2022, Me Y a déposé une note en délibéré.

Le 24 avril 2022, M. X a déposé une note en délibéré.

Le 25 avril 2022, Me Y a déposé une note en délibéré en réponse.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L. 631-11 du code de commerce dans sa version applicable au litige, en l'absence de rémunération, le dirigeant d'une personne morale en liquidation judiciaire peut obtenir sur l'actif pour lui et sa famille des subsides fixés par le juge-commissaire. Ces subsides ne peuvent être alloués que dans la mesure où l'actif de la liquidation le permet.

Ces subsides, qui présentent un caractère alimentaire, ont pour objet de répondre aux besoins fondamentaux du bénéficiaire démuni pour faire face aux charges ordinaires de la vie courante, le requérant devant notamment justifier de sa situation personnelle, familiale, économique, patrimoniale ainsi que de ses charges personnelles.

Il sera rappelé en l'espèce que le juge-commissaire a par ordonnance du 27 novembre 2017 accordé à M. X des subsides par prélèvement sur les loyers encaissés sur les biens immobiliers, étant précisé qu' « à défaut d'encaissement des loyers le versement des subsides serait suspendu ».

Il lui a été versé depuis cette date à ce titre la somme de 61.200 euros.

M. X est propriétaire de plusieurs biens immobiliers dont certains ont d'ores et déjà été vendus ; le passif restant s'élevant à la somme de 65.000 euros, somme toutefois contestée par M. X. Il sera également relevé que ce dernier dispose de la jouissance d'un appartement à Pont-à-Mousson et que certains locataires ont refusé de verser les loyers des biens qu'ils occupent au liquidateur. A ce titre, M. A, locataire, indiquait par courrier en date du 9 janvier 2022 verser directement son loyer de 632, 70 euros par mois à M. X. Toutefois, la situation serait selon ce dernier en voie de régularisation, le liquidateur indiquant avoir pour sa part introduit d'autres actions pour recouvrer des loyers impayés.

La procédure collective ne percevant en conséquence à ce jour que le loyer versé par M. C... à hauteur de 558,86 euros, il convient de relever que par application des dispositions de l'ordonnance du juge commissaire précitée devenue définitive le défaut d'encaissement des loyers entraîne la suspension du versement des subsides, ce d'autant que l'actif mobilisable de la liquidation en l'état des problèmes de recouvrement de loyers et du conflit opposant les parties quant au sort de certains locaux ne permet pas le versement des subsides réclamés.

Par ailleurs, M. X fait valoir qu'il ne perçoit aucune ressource. Il produit à cet égard un courrier de la caisse d'allocations familiales lui notifiant que le niveau de ses ressources ne lui permet pas de percevoir le revenu de solidarité active. Pour autant, il ne justifie d'aucune recherche d'emploi alors qu'il est sans emploi depuis plusieurs années et que la procédure collective a été ouverte en 2017.

Il ne justifie pas plus de ses charges évoquant sans autre élément probant que ses propres allégations qu'il dépendrait de ses proches. Selon les courriers produits et le certificat du médecin qui le suit, il se déclare domicilié .... Il ne produit aucune autre pièce sur sa situation financière, ses propres écritures ne constituant pas une telle preuve pas plus que le bilan de son médecin psychiatre et ne rapporte en conséquence pas la preuve de ce qu'il serait dans une situation de besoin justifiant le maintien des subsides en sus du montant de 61.200 euros d'ores et déjà perçus et de l'avantage résultant de la mise à disposition d'un appartement.

Dans ces conditions, le juge commissaire doit être approuvé en ce qu'il a décidé au vu de la requête présentée la suspension du versement des subsides dans l'attente de la vente d'un cinquième bien.

Le jugement sera en conséquence infirmé et l'ordonnance du juge commissaire rendue le 03 novembre 2020 confirmée.

M. X, qui succombe, supportera la charge des dépens. Eu égard aux circonstances du litige, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Infirme le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Nancy le 31 mai 2021 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Confirme l'ordonnance rendue par le juge commissaire près le Tribunal de commerce de Nancy en date du 3 novembre 2020 en ce qu'elle a ordonné la suspension du versement des subsides mensuels à M. X jusqu'à la régularisation de l'acte de vente d'un 5ème bien immobilier sur base de l'évaluation à dire d'expert ;

Condamne M. X aux dépens ;

Déboute les parties de toute autre demande.