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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 7 novembre 2017, n° 15/12767

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Jean M. Conseil (SARL)

Défendeur :

EMJ (Selarl) (ès qual.), MJA (Selafa) (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Peyron

Conseillers :

Mme Douillet, M. Thomas

TGI Paris, du 12 févr. 2015, n° 13/06579

12 février 2015

EXPOSÉ DU LITIGE

M. Jean M., professeur affilié à l'Ecole Supérieure de Commerce de Paris, se présente comme l'auteur du livre 'Le marketing du désir' ayant fait l'objet d`un dépôt légal en octobre 1999 et publié, sous format papier, pour la première fois en novembre 1999 aux Editions de l'Organisation, puis réédité en 2000 et en 2013. Cet ouvrage décrit une théorie, que M. M. explique avoir développée dès 1995 sous la terminologie de 'Double InterAction du Désir' (DIAD), qui propose un rapport de l'entreprise à ses produits et à sa clientèle, communément appelé marketing, selon une approche nouvelle prenant en compte les rapports internes avec les salariés et les associés de l'entreprise. M. M. explique qu''il ne s'agit donc pas d'un ouvrage qui se concentre uniquement sur le marketing, mais sur une nouvelle approche stratégique de l'analyse du désir au sens le plus large dans les murs et hors les murs de l'entreprise'.

La société JEAN M. CONSEIL, immatriculée au RCS de Paris sous le n° 750 183 113, est spécialisée dans les services de conseil en management, communication, image, relation client et négociation. Le 7 février 2012, M. M. a apporté les droits d'auteur qu'il détenait sur l'oeuvre 'Le marketing du désir' à la société JEAN M. CONSEIL, dans le cadre d'un apport en nature effectué lors de sa constitution.

Le 24 août 2012, la société JEAN M. CONSEIL a déposé la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR' enregistrée sous le n° 12 3 941 830 en désignant les services suivants :

  • en classe 35 : 'Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; services d'abonnement à des journaux (pour des tiers) ; services d'abonnement à des services de télécommunication pour les tiers ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ; conseils en organisation et direction des affaires ; comptabilité ; reproduction de documents ; bureaux de placement ; gestion de fichiers informatiques ; organisation d'expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; locations d'espaces publicitaires ; diffusion d'annonces publicitaires ; relations publiques',
  • en classe 41 : 'Education ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; informations en matière de divertissement ou d'éducation ; recyclage professionnel ; mise à disposition d'installations de loisirs ,publication de livres ;prêts de livres ; production de films sur bandes vidéo ; location de films cinématographiques ; location d'enregistrements sonores ; location de magnétoscopes ou de postes de radio et de télévision ; location de décors de spectacles ; montage de bandes vidéo ; services de photographie ; organisation de concours (éducation ou divertissement) ; organisation et conduite de colloques, conférences ou congrès ; organisation d'expositions à buts culturels ou éducatifs ; réservation de places de spectacles ; services de jeu proposés en ligne à partir d'un réseau informatique ; service de jeux d'argent ;publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; microédition',
  • en classe 42 : 'Evaluations, estimations et recherches dans les domaines scientifique et technologiques rendues par des ingénieurs ; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels ; recherche et développement de nouveaux produits pour des tiers ; étude de projets techniques ; architecture ; décoration intérieure ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation pour ordinateur; analyse de systèmes informatiques ; conception de systèmes informatiques ; consultation en matière d'ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique ; conversion de données ou de documents d'un support physique vers un support électronique ; contrôle technique de véhicules automobiles ; services de dessinateurs d'arts graphiques; stylisme (esthétique industrielle) ; authentification d'œuvres d'art'.

Le 29 mai 2013, la société JEAN M. CONSEIL a réservé le nom du domaine http://www.lemarketingdu desir.com.

M. Gabriel S. se présente comme un expert en marketing et un professeur de communication affilié aux grandes écoles de commerce, dont l'ESSEC et HEC. Il est le directeur général de la société SAPHIR, immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 310 968 532, qui exerçait une activité d'agence de publicité et de conseil en communication et marketing pour laquelle il intervenait en qualité de consultant en communication.

M. S. explique qu'en 1999, il a créé et développé une théorie intitulée 'Le Marketing de la Permission et du Désir' qui a vocation à allier deux notions clés et fondamentales en marketing, celle de recherche du 'désir' et celle de la 'permission' d'une cible marketing considérée, pour décrire une approche innovante de la communication et de l'e-communication et, plus particulièrement, du comportement d'achat des consommateurs sur tous les médias. Il précise que le titre de sa théorie 'Le Marketing de la Permission et du Désir' est devenu le nom commercial et le slogan permanent de la société SAPHIR.

Indiquant avoir constaté une atteinte à leurs droits de propriété intellectuelle sur le site internet et le blog de la société SAPHIR, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL ont, par courriers des 28 août 2012, 10 janvier 2013 et 22 janvier 2013, mis en demeure cette dernière et M. S. de cesser toute utilisation de la dénomination 'Le marketing du désir'.

La société SAPHIR et M. S. ayant opposé l'antériorité d'usage de cette expression par ce dernier et par d'autres auteurs, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL les ont assignés, par exploit d'huissier des 8 et 22 avril 2013, devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon de droits d'auteur et de marque.

Par jugement du 12 février 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :

  • déclaré 'irrecevables' les demandes de M. M. et de la société JEAN M. CONSEIL au titre des droits moral et patrimoniaux d'auteur sur le titre 'Le marketing du désir',
  • prononcé la nullité pour défaut de distinctivité de l'enregistrement n°12 3 941 830 de la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR' déposée le 24 août 2012 par la société JEAN M. CONSEIL,
  • ordonné la communication de la décision, une fois celle-ci devenue définitive, à l'INPI, par la partie la plus diligente, pour inscription sur ses registres,
  • déclaré irrecevable l'action en contrefaçon de marque présentée par la société JEAN M. CONSEIL,
  • rejeté les demandes de M. S. et de la société SAPHIR au titre du dépôt frauduleux,
  • rejeté les demandes de M. S. et de la société SAPHIR au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,
  • condamné in solidum M. M. et la société JEAN M. CONSEIL aux dépens et au paiement à M. S. et à la société SAPHIR de la somme de 4 000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile,
  • dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire de la décision.

Le 16 juin 2015, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL ont interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 29 juin 2016, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société SAPHIR et la SELAFA MJA, en la personne de Me L.-T., et la SELARL EMJ, en la personne de Me C., ont été désignées en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 14 septembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société SAPHIR et désigné en qualité de liquidateurs la SELAFA MJA, en la personne de Me L.-T., et la SELARL EMJ, en la personne de Me C..

La SELAFA MJA a été assignée en intervention forcée et la SELARL EMJ est intervenue volontairement à la procédure.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 4 transmises le 20 juin 2017, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL demandent à la cour :

  • de constater la tardiveté des conclusions prises par M. S. les 23 décembre 2016 et 2 juin 2017 et en conséquence, déclarer irrecevables ces conclusions,
  • d'infirmer le jugement en ce qu'il a :
  • déclaré irrecevables leurs demandes au titre des droits moraux et patrimoniaux d'auteur sur le titre 'Le Marketing du Désir',
  • prononcé la nullité pour défaut de distinctivité de l'enregistrement n°12 3 941 830 de la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR',
  • les a condamnés in solidum à payer à M. S. et à la société SAPHIR la somme de 4 000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile,

à titre principal :

  • de juger que le titre 'Le Marketing du Désir' est original et partant éligible à la protection au titre du droit d'auteur,
  • de juger que la réalisation de conférences et colloques sous les titres 'Le Marketing du Désir' et 'Le Marketing de la Permission et du Désir' effectués par M. S. et organisés en collaboration avec la société SAPHIR porte atteinte aux droits patrimoniaux de la société JEAN M. CONSEIL et au droit à la paternité de M. M. et constituent de ce fait des actes de contrefaçon,
  • de juger que la réalisation de prestations de conseils aux entreprises par la remise de supports de formation portant le titre'Le Marketing de la Permission et du Désir' effectués par M. S. en collaboration avec la société SAPHIR porte atteinte aux droits patrimoniaux de la société JEAN M. CONSEIL et au droit à la paternité de M. M., et constitue de ce fait des actes de contrefaçon,
  • de juger que la société JEAN M. CONSEIL oppose uniquement la marque 'LE MARKETING DU DESIR' pour les activités de'conseil en organisation et direction des affaires' (en classe 35) et pour les services d''organisation et conduite de colloques, conférences ou congrès' (en classe 41),
  • de juger que M. S. et la société SAPHIR, représentée par ses liquidateurs, sont irrecevables en leurs demandes reconventionnelles en nullité de la marque française 'LE MARKETING DU DÉSIR' pour les services suivants :
  • en classe 35 : 'Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; diffusion de matériel publicitaire (tracts, prospectus, imprimés, échantillons) ; services d'abonnement à des journaux (pour des tiers) ; services d'abonnement à des services de télécommunication pour les tiers ; présentation de produits sur tout moyen de communication pour la vente au détail ; comptabilité ; reproduction de documents ; bureaux de placement ; gestion de fichiers informatiques ;organisation d'expositions à buts commerciaux ou de publicité ; publicité en ligne sur un réseau informatique ; location de temps publicitaire sur tout moyen de communication ; publication de textes publicitaires ; locations d'espaces publicitaires ; diffusion d'annonces publicitaires ; relations publiques',
  • en classe 41 : 'Education ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; informations en matière de divertissement ou d'éducation ; recyclage professionnel ; mise à disposition d'installations de loisirs, publication de livres ;prêts de livres ; production de films sur bandes vidéo ; location de films cinématographiques ; location d'enregistrements sonores ; location de magnétoscopes ou de postes de radio et de télévision ; location de décors de spectacles ; montage de bandes vidéo ; services de photographie ; organisation de concours (éducation ou divertissement) ; organisation d'expositions à buts culturels ou éducatifs ; réservation de places de spectacles ; services de jeu proposés en ligne à partir d'un réseau informatique ; service de jeux d'argent ;publication électronique de livres et de périodiques en ligne ; microédition',
  • en classe 42 :'Evaluations, estimations et recherches dans les domaines scientifique et technologiques rendues par des ingénieurs ; conception et développement d'ordinateurs et de logiciels ; recherche et développement de nouveaux produits pour des tiers ; étude de projets techniques ; architecture ; décoration intérieure ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation pour ordinateur; analyse de systèmes informatiques ; conception de systèmes informatiques ; consultation en matière d'ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique ; conversion de données ou de documents d'un support physique vers un support électronique ; contrôle technique de véhicules automobiles ; services de dessinateurs d'arts graphiques; stylisme (esthétique industrielle) ; authentification d'oeuvres d'art',

- de juger que la marque 'LE MARKETING DU DESIR' n°123941830 présente un caractère distinctif pour les services de 'conseil en organisation et direction, des affaires' (classe 35) et pour les services de 'organisation et conduite de colloques, conférences ou congrès' (classe 41),

- de constater que les liquidateurs de la société SAPHIR sont dépourvus d'intérêt à agir en nullité de la marque pour dépôt frauduleux,

- de juger que l'organisation de conférences et la réalisation de services de conseils en gestion à destination d'entreprises par la société SAPHIR sous le signe 'Le marketing de la Permission et du Désir' caractérisent des actes de contrefaçon par imitation de la marque 'LE MARKETING DU DESIR' n°123 941 830,

à titre subsidiaire :

  • de juger que l'organisation par M. S. et la société SAPHIR de conférences sous le titre de 'Le Marketing du Désir' et l'exercice d'une activité de formation et de conseil sous ce même titre est source de confusion dans l'esprit du public,

en conséquence et en tout état de cause :

  • d'interdire à la société SAPHIR et à M. S. :
  • l'organisation de conférences, colloques ou formation usant de la dénomination 'Le Marketing

du Désir' ou 'Le Marketing de la Permission et du Désir', sous astreinte de 1 000 € par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

  • l'association du signe LE MARKETING DE LA PERMISSION ET DU DESIR avec son logotype et sa dénomination sociale dans l'exercice de ses activités de conseil aux entreprises, sous astreinte de 1 000 € par infraction constatée à compter de l'arrêt à intervenir ;
  • d'ordonner à la société SAPHIR et à M. S. de supprimer tout usage du titre 'Le Marketing du Désir' et du signe 'Le Marketing de la Permission et du Désir' de l'ensemble de leurs supports de communication, et en particulier du site internet hébergé à l'adresse http://www.bleusaphir.com/ et du blog de la société SAPHIR hébergé à l'adresse www.blue-blog.fr, et ce sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
  • d'ordonner la publication de l'arrêt à intervenir en haut de la page d'accueil du site internet http://www.bleusaphir.com/ et du blog de l'agence SAPHIR hébergé à l'adresse www.blue-blog.fr, et ce, pendant une durée d'un mois sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir,
  • dire que ces mesures d'interdiction, de suppression et de publication seront opposables à la SELAFA MJA, ès qualités, sauf si, pour ce qui concerne la publication, les sites et médias sociaux associés à la société SAPHIR devaient ne plus être mis en ligne,
  • de condamner M. S. à verser à la société JEAN M. CONSEIL la somme de 30 000 € en réparation du préjudice commercial subi du fait de l'atteinte au titre 'Le Marketing du Désir', à la marque 'LE MARKETING DU DÉSIR', et subsidiairement, du fait du risque de confusion dans l'esprit du public,
  • de fixer la créance indemnitaire de la société JEAN M. CONSEIL à hauteur de 30 000 € au passif de la liquidation de la société SAPHIR compte tenu du préjudice patrimonial subi du fait de l'atteinte au titre et de l'atteinte à la marque éponyme,
  • de condamner in solidum la société SAPHIR et M. S. à verser à M. M. la somme de 5 000 € en réparation du préjudice subi du fait de l'atteinte à son droit moral,
  • de fixer la créance indemnitaire de M. M. à hauteur de 5 000 € au passif de la liquidation de la société SAPHIR compte tenu du préjudice subi du fait de l'atteinte au droit moral,
  • de condamner M. S. à verser à la société JEAN M. CONSEIL et à M. M. la somme de 15 000 € à chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile,
  • de fixer la créance de la société JEAN M. CONSEIL et de M. M. à hauteur de 15 000 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions numérotées 2 transmises le 2 juin 2017, M. S. demande à la cour :

  • de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il n'a pas retenu le caractère frauduleux de la marque verbale 'LE MARKETING DU DESIR',

- sur les demandes de M. M. et de la société JEAN M. CONSEIL fondées sur le droit d'auteur :

à titre principal :

  • de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. M. et la société JEAN M. CONSEIL irrecevables à agir au motif du défaut d'originalité du titre de l'ouvrage 'Le marketing du désir' et, en conséquence, de les débouter de leurs demandes,

à titre subsidiaire :

  • de dire que la demande formée par M. M. et la société JEAN M. CONSEIL sur le fondement de l'article 'L.114-2 alinéa 2" [lire L. 112-4 alinéa 2] est une demande nouvelle en cause d'appel et en conséquence irrecevable et de débouter les appelants de leurs demandes,

à titre infiniment subsidiaire :

  • de juger que les actes de contrefaçon au titre du droit d'auteur ne sont pas constitués et, en conséquence, de débouter les appelants de leurs demandes,

- sur les demandes de la société JEAN M. CONSEIL fondée sur le droit des marques :

à titre principal :

  • de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité de la marque pour défaut de distinctivité,
  • d'infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas retenu le caractère frauduleux de la marque verbale 'LE MARKETING DU DESIR' et, statuant à nouveau, de juger que M. M. et la société JEAN M. CONSEIL ont effectué le dépôt de la marque verbale dans un dessein frauduleux afin de nuire à leurs droits et intérêts,
  • en conséquence, de dire la société JEAN M. CONSEIL irrecevable à agir et de la débouter de l'ensemble de ses demandes,
  • à titre subsidiaire : de juger que la contrefaçon par imitation n'est pas constituée et de débouter la société JEAN M. CONSEIL de l'ensemble de ses demandes,
  • de condamner solidairement la société JEAN M. CONSEIL et M. M. à lui verser la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions numérotées 2 transmises le 2 juin 2017, la SELAFA MJA, prise en la personne de Me L.-T., et la SELARL EMJ, prise en la personne de Me C., ès qualités de liquidateurs de la société SAPHIR, demandent à la cour de :

  • de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il n'a pas retenu le caractère frauduleux de la marque verbale 'LE MARKETING DU DESIR',

- sur les demandes de M. M. et de la société JEAN M. CONSEIL fondées sur le droit d'auteur :

à titre principal :

  • de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. M. et la société JEAN M. CONSEIL irrecevables à agir au motif du défaut d'originalité du titre de l'ouvrage 'Le marketing du désir' et, en conséquence, de les débouter de leurs demandes,

à titre subsidiaire :

  • de dire que la demande formée par M. M. et la société JEAN M. CONSEIL sur le fondement de l'article 'L.114-2 alinéa 2" [L. 112-4 alinéa 2] est une demande nouvelle en cause d'appel et en conséquence irrecevable et de débouter les appelants de leurs demandes,

à titre infiniment subsidiaire :

  • de juger que les actes de contrefaçon au titre du droit d'auteur ne sont pas constitués et, en conséquence, de débouter les appelants de leurs demandes,

- sur les demandes de la société JEAN M. CONSEIL fondée sur le droit des marques :

à titre principal :

  • de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité de la marque pour défaut de distinctivité,
  • d'infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas retenu le caractère frauduleux de la marque verbale 'LE MARKETING DU DESIR' et, statuant à nouveau, de juger que M. M. et la société JEAN M. CONSEIL ont effectué le dépôt de la marque verbale dans un dessein frauduleux afin de nuire à leurs droits et intérêts,
  • en conséquence, de dire la société JEAN M. CONSEIL irrecevable à agir et de la débouter de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire :

  • de juger que la contrefaçon par imitation n'est pas constituée et de débouter la société JEAN M. CONSEIL de l'ensemble de ses demandes,
  • de condamner solidairement la société JEAN M. CONSEIL et M. M. à leur verser à chacune la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 juillet 2017.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées ;

Sur le chef du jugement non critiqué

Considérant que le jugement déféré n'est pas contesté en ce qu'il a rejeté les demandes de M. S. et de la société SAPHIR au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;

Que le jugement déféré sera, par conséquent, confirmé de ce chef ;

Sur la recevabilité des conclusions de M. S. transmises les 23 décembre 2016 et 2 juin 2017

Considérant qu'aux terme de l'article 909 du code de procédure civile, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant prévues à l'article 908 pour conclure et former, le cas échéant, appel incident ;

Que l'article 914 alinéa 1 du même code dispose que le conseiller de la mise en état est, lorsqu'il est désigné et jusqu'à son dessaisissement, seul compétent pour prononcer la caducité de l'appel, pour déclarer l'appel irrecevable et trancher à cette occasion toute question ayant trait à la recevabilité de l'appel ou pour déclarer les conclusions irrecevables en application des articles 909 et 910 et que les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité ou l'irrecevabilité après son dessaisissement, à moins que leur cause ne survienne ou ne soit révélée postérieurement ;

Qu'en l'espèce, les premières conclusions des appelants ont été signifiées à M. S. le 18 septembre 2015 ; que les conclusions transmises par M. S. le 23 décembre 2016 l'ont donc été après l'expiration du délai prescrit par l'article 909 du code de procédure civile ;

Que cependant, en application de l'article 914 alinéa 1 du code de procédure civile, la cause de l'irrecevabilité des conclusions de M. S. n'étant pas survenue ni n'ayant été révélée postérieurement au dessaisissement du conseiller de la mise en état, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL seront déclarés irrecevables en leur fin de non-recevoir présentée devant la cour ;

Que nonobstant l'irrecevabilité des parties à invoquer l'irrecevabilité des conclusions devant la cour sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile, cette dernière conserve la possibilité de relever d'office cette irrecevabilité, possibilité qu'elle a fait inscrire au plumitif de l'audience ;

Qu'en l'espèce toutefois, eu égard au fait que les appelants ne justifient d'aucune circonstance qui les aurait empêchés de saisir le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à faire déclarer les conclusions de M. S. irrecevables, la cour n'estime pas devoir relever d'office l'irrecevabilité de ces conclusions ;

Que les conclusions de M. S. transmises les 23 décembre 2016 et 2 juin 2017 seront par conséquent jugées recevables ;

Sur la protection du titre 'Le marketing du désir'

Considérant qu'aux termes de l'article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle :

'Le titre d'une oeuvre de l'esprit, dès lors qu'il présente un caractère original, est protégé comme l'oeuvre elle-même.

Nul ne peut, même si l'oeuvre n'est plus protégée dans les termes des articles L. 123-1 à L. 123-3, utiliser ce titre pour individualiser une oeuvre du même genre, dans des conditions susceptibles de provoquer une confusion' ;

Considérant que M. M. et la société JEAN M. CONSEIL forment des demandes en contrefaçon du titre sur le fondement de l'alinéa 1 de l'article L. 112-4 et, subsidiairement, en responsabilité délictuelle, sur le terrain de la concurrence déloyale, sur le fondement de l'alinéa 2 du même article ;

Sur la contrefaçon du titre 'Le marketing du désir'

Considérant que les appelants soutiennent que si le titre revendiqué est constitué de mots du langage courant, leur association dans la construction du titre confère à ce titre son originalité dans la mesure où les termes 'marketing' et 'désir' présentent des caractéristiques évocatrices très éloignées, raison pour laquelle M. M. a choisi de les associer ; qu'ils ajoutent que le titre n'est pas descriptif du contenu de l'ouvrage puisque le marketing a pour vocation d'étudier la relation aux produits et services dans le cadre de relations externes avec les tiers, notamment les clients, alors que le sujet central de l'ouvrage est la théorie 'Double InterAction du Désir' (DIAD), qui suppose une prise en compte des rapports internes de l'entreprise avec ses salariés et associés ; qu'ils rappellent que l'originalité doit être appréciée au jour de la divulgation du titre, soit en l'espèce au mois d'octobre 1999, jour du dépôt légal de l'ouvrage ;

Que M. S. et les organes de la liquidation judiciaire de la société SAPHIR plaident que le titre invoqué ne présente aucune originalité dès lors qu'à la date de publication de l'ouvrage de M. M., il avait déjà fait l'objet 'd'utilisations antérieures, 'non' seulement' par' M. S., mais encore par des tiers, et qu'il est constitué de termes génériques et descriptifs qui ne sauraient lui conférer une quelconque originalité ;

Considérant qu'il incombe à celui qui entend se prévaloir des droits de l'auteur de caractériser l'originalité de l'oeuvre revendiquée, c'est à dire de justifier de ce que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l'empreinte de la personnalité de son auteur ; que la combinaison d'éléments qui en eux-mêmes ne présentent pas d'originalité ne peut manifester un effort créatif que si elle confère au produit concerné une physionomie propre qui le distingue des autres modèles appartenant au même genre et si elle traduit un parti pris esthétique du créateur, révélant l'empreinte de sa personnalité ;

Considérant, en l'espèce, que c'est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal a estimé que le titre 'Le marketing du désir' était dénué d'originalité, retenant que l'expression qui le constitue est à la fois descriptive de la théorie dont elle est le nom, développée par M. M. dans son ouvrage, et de la matière concernée - le marketing-, la notion de désir étant consubstantielle à la notion de marketing ;

Qu'en outre, les intimé et intervenants justifient que l'expression 'marketing du désir' était utilisée dans le domaine du marketing avant la divulgation du titre de M. M., à la fin de l'année 1999 ; que sont, en effet, produits aux débats :

  • la page de couverture du numéro 40 de Marketing Magazine de mai 1999 annonçant une interview de M. Christian S., directeur de la stratégie grand public de FRANCE TELECOM, avec le titre 'France Télécom - Le marketing du désir' et le commentaire : 'Stimulé par la concurrence, France Télécom adopte un marketing centré sur le client, seul capable de provoquer le désir. Les bénéfices de ce virage expliqués par Christian S. (...)', et l'article correspondant dans lequel M. S. expose la nouvelle stratégie de l'entreprise ;
  • un extrait du site www.e-marketing.fr relatif à un article intitulé 'Vers un marketing du désir de la situation' lui-même extrait du numéro 40 de Marketing Magazine précité ;
  • l'attestation de Mme B., auteur de l'ouvrage 'L'espace du désir' publié en décembre 1999, qui indique que 'les concepts' qu'elle a développés dans son livre ont été inspirés de deux auteurs américains (Ernst D. auteur de 'La stratégie du désir. Une philosophie de la vente' publiée aux Etats Unis en 1960 et John M., auteur de 'Creating desire' publié en 1996) et qu'elle même a basé toute l'approche résumée dans son livre, sur le 'marketing issu du désir et non des besoins' ;

Considérant qu'il y a lieu, dans ces conditions, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le titre 'Le marketing du désir' n'est pas protégeable au titre du droit d'auteur, étant précisé que, contrairement à ce que retient le tribunal, l'originalité étant une condition de fond et non de recevabilité de l'action en contrefaçon, les demandes de M. M. et la société JEAN M. CONSEIL ne sont pas irrecevables mais non fondées ;

Sur la demande subsidiaire en concurrence déloyale fondée sur l'alinéa 2 de l'article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle

Considérant que M. S. et les organes de la liquidation de la société SAPHIR, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, concluent à l'irrecevabilité de la demande fondée sur l'alinéa 2 de l'article L. 112-4 au motif que cette demande est nouvelle en cause d'appel ;

Que M. M. et la société JEAN M. CONSEIL opposent les dispositions de l'article 565 du même code pour soutenir que leur demande subsidiaire, fondée sur le même article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle que celui invoqué en première instance, tend aux même fins que leurs premières demandes, à savoir la reconnaissance de l'atteinte au titre 'Le marketing du désir' ;

Considérant que selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; que l'article 565 du même code précise que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent ;

Considérant que les demandes de M. M. et de la société JEAN M. CONSEIL en première instance était présentées sur le seul fondement de la contrefaçon (article L. 112-4 alinéa 1) ;

Qu'une action en contrefaçon et une action en concurrence déloyale ne constituent pas l'exercice d'un même droit et ne tendent pas aux mêmes fins, la première ayant pour fondement l'atteinte à un droit privatif tandis que la seconde sanctionne une faute commise à l'encontre d'une personne qui ne peut justifier d'un droit privatif ou qui peut justifier d'une faute distincte de l'atteinte portée à un tel droit ;

Qu'en conséquence, nonobstant l'invocation par les appelants de l'article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle en première instance, la demande présentée pour la première fois en cause d'appel, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'alinéa 2 de l'article L. 112-4 du code de la propriété intellectuelle sera déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile ;

Sur le caractère frauduleux du dépôt de la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR' n° 12 3 941 830

Considérant que M. S. et les organes de la liquidation de la société SAPHIR soutiennent que la société JEAN M. CONSEIL a effectué le dépôt de la marque de manière frauduleuse dans le seul dessein de la leur opposer et de tenter ainsi de les évincer du marché dans lequel ils sont en concurrence directe ; qu'ils demandent en conséquence à la cour de prononcer la nullité de la marque ;

Qu'en réponse, la société JEAN M. CONSEIL soulève l'irrecevabilité de cette demande, faisant valoir que les conclusions de M. S. sont irrecevables comme tardives et que les liquidateurs de la société SAPHIR n'ont pas d'intérêt à agir à ce titre, la société liquidée n'ayant plus d'activité commerciale ; que sur le fond, ils soutiennent que c'est légitimement que dans les premiers mois de son activité, elle a déposé à titre de marque le signe dont son fondateur, qui a apporté les droits d'exploitation de l'ouvrage 'Le marketing du désir' lors de sa constitution, faisait un usage à titre professionnel depuis plus de douze ans ; qu'elle ajoute que la lettre de mise en demeure du 28 août 2012 invoquée par les intimés n'est fondée que sur le droit d'auteur et l'atteinte au titre de l'ouvrage et non sur le droit des marques ;

Sur la recevabilité de la demande relative au caractère frauduleux du dépôt de la marque

Considérant que les conclusions de M. S. ayant été jugées recevables, ce dernier a un intérêt à demander l'infirmation du jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à voir reconnaître le caractère frauduleux du dépôt de la marque qui lui est opposée ;

Que les liquidateurs de la société SAPHIR, quand bien même celle-ci n'a plus d'activité commerciale, ont également intérêt, ès qualités, à voir reconnaître le caractère frauduleux du dépôt de la marque qui leur est opposée ;

Que la fin de non-recevoir sera, en conséquence, écartée et les liquidateurs de la société SAPHIR, comme M. S., seront déclarés recevables à agir ;

Sur le bien fondé de la demande

Considérant que l'article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle prévoit que 'Si un enregistrement a été demandé soit en fraude des droits d'un tiers, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice. A moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l'action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la publication de la demande d'enregistrement' ;

Que par ailleurs, en application du principe fraus omnia corrumpit, un dépôt de marque est frauduleux lorsqu'il est effectué dans l'intention de priver autrui d'un signe nécessaire à son activité présente ou ultérieure ; que la fraude est caractérisée dès lors que le dépôt a été opéré pour détourner le droit des marques de sa finalité, non pour distinguer des produits et services en identifiant leur origine mais pour priver des concurrents du déposant ou tous les opérateurs d'un même secteur d'un signe nécessaire à leur activité ; que le caractère frauduleux du dépôt s'apprécie au jour du dépôt et ne se présume pas, la charge de la preuve de la fraude pesant sur celui qui l'allègue ;

Considérant qu'en l'espèce, est produit aux débats un courrier en date du 28 août 2012 de la société JEAN M. CONSEIL à 'M. Gabriel S. Agence SAPHIR' pour lui indiquer : 'Le marketing du désir est le titre d'un livre publié par Jean M. en 1999 et 2000 aux Editions d'Organisation, dont la société Jean M. Conseil a acquis les droits et qui va paraître dans une nouvelle édition sous peu. Selon le code de la propriété intellectuelle, 'Le titre d'une oeuvre de l'esprit, dès lors qu'il présente un caractère original, est protégé comme l'oeuvre elle-même'. Nous avons également déposé à l'INPI un dossier d'enregistrement de la marque 'Le marketing du désir'. Vous faites donc un usage répété tant sur votre site que dans le cadre de votre activité de notre propriété intellectuelle. Vous avez notamment donné une conférence le 10 juillet 2012 en Avignon et pour le compte du Crédit Mutuel ARKEA, intitulée 'le marketing du désir'. Nous vous remercions de bien vouloir prendre sous quinzaine toutes les dispositions permettant : 1. De publier sur votre site et sur votre blog un communiqué rétablissant notre propriété intellectuelle ; 2. De ne plus y porter atteinte, en évitant désormais toute utilisation de cet intitulé ainsi que des déclinaisons ou extensions qui pourraient en être faites, telles que 'Le Marketing de la Permission et du Désir'';

Que la teneur de ce courrier de mise en demeure, qui a été suivi de deux autres adressés par le conseil de la société, en date des 10 et 22 janvier 2013, aux fins de 'cessation d'utilisation', montre sans ambiguïté que la société JEAN M. CONSEIL avait une parfaite connaissance, à la date du dépôt de sa marque le 24 août 2012, soit 4 jours seulement avant l'envoi dudit courrier, de l'usage antérieur par M. S. et la société SAPHIR de l'expression 'le marketing de la permission et du désir' et ce, tant à titre de dénomination sur un site internet que dans le cadre de l'activité de conférencier de M. S. ;

Que la société JEAN M. CONSEIL a néanmoins déposé sa marque et a immédiatement adressé une première lettre de mise en demeure à M. S. et la société SAPHIR pour faire état de ce dépôt et leur interdire l'usage d'un signe dont elle savait qu'il était nécessaire à leurs activités respectives ;

Qu'il n'est pas contesté que les parties au litige sont concurrentes, MM. M. et S. étant tous deux enseignants en marketing auprès de grandes école de commerce et également formateurs et conférenciers sur le thème commun du marketing, chacun utilisant l'expression 'marketing du désir', au demeurant générique, non distinctive, pour les raisons qui ont été exposées supra s'agissant du défaut d'originalité du titre revendiqué ; que les sociétés JEAN M. CONSEIL et SAPHIR avaient pareillement pour activité le conseil aux entreprises dans le domaine du marketing et de la communication ;

Qu'il apparaît ainsi que le dépôt de la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR' n° 12 3 941 830 a été effectué par la société JEAN M. CONSEIL, dont M. M. est le co-fondateur, dans le dessein de s'approprier l'usage d'une expression générique nécessaire à l'activité de M. S. et de la société SAPHIR et d'en priver ainsi ces concurrents, en s'arrogeant un monopole d'exploitation sur cette expression ;

Que le caractère frauduleux du dépôt est ainsi caractérisé ;

Considérant que le jugement doit par conséquent être infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de M. S. et de la société SAPHIR au titre du dépôt frauduleux ;

Considérant que la reconnaissance du caractère frauduleux du dépôt de la marque entraîne la nullité de l'enregistrement de cette marque pour l'intégralité des services des classes 35, 41 et 42 visés à l'enregistrement , sans qu'il soit besoin d'examiner l'argumentation des parties relative à la nullité de l'enregistrement de ladite marque pour défaut de distinctivité ;

Que le jugement sera donc confirmé de ce chef, sauf à préciser que la nullité est prononcée à raison du caractère frauduleux du dépôt de la marque et non de son défaut de distinctivité ;

Que la société JEAN M. CONSEIL, faute de qualité à agir, doit, en conséquence, être déclarée irrecevable en ses demandes en contrefaçon de marque ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Considérant que M. M. et la société JEAN M. CONSEIL seront condamnés aux dépens d'appel et garderont à leur charge les frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées ;

Qu'en application de l'article 700 du code de procédure civile, M. M. et la société JEAN M. CONSEIL seront solidairement condamnés à payer à M. S. la somme de 4 000 € et à la SELAFA MJA, prise en la personne de Me L.-T., et la SELARL EMJ, prise en la personne de Me C., ès qualités de liquidateurs de la société SAPHIR, celle de 2 000 € à chacune ;

PAR CES MOTIFS ,

LA COUR,

Rejette la fin de non-recevoir présentée par M. M. et la société JEAN M. CONSEIL et déclare les conclusions de M. S. transmises les 23 décembre 2016 et 2 juin 2017 recevables,

Infirme partiellement le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de M. S. et de la société SAPHIR au titre du dépôt frauduleux,

Statuant à nouveau de ce chef,

Rejette la fin de non-recevoir de la société JEAN M. CONSEIL et déclare les liquidateurs de la société SAPHIR, comme M. S., recevables à agir au titre du dépôt frauduleux,

Déclare frauduleux le dépôt de la marque française verbale 'LE MARKETING DU DESIR' n° 12 3 941 830 déposée le 24 août 2012 par la société JEAN M. CONSEIL,

Confirme le jugement pour le surplus, et notamment en ce qu'il a prononcé la nullité de l'enregistrement de ladite marque, sauf à préciser que la nullité est prononcée à raison du caractère frauduleux du dépôt de la marque et non de son défaut de distinctivité,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de M. M. et la société JEAN M. CONSEIL fondée sur l'article L. 112-4 alinéa 2 du code de la propriété intellectuelle,

Condamne solidairement M. M. et la société JEAN M. CONSEIL aux dépens d'appel, ainsi qu'au paiement, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

  • à M. S., de la somme de 4 000 €,
  • à la SELAFA MJA, prise en la personne de Me L.-T., et à la SELARL EMJ, prise en la personne de Me C., ès qualités de liquidateurs de la société SAPHIR, de la somme de 2 000 € à chacune.