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Décisions

Cass. crim., 30 janvier 2019, n° 17-85.304

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soulard

Rapporteur :

M. Ascensi

Avocat général :

M. Salomon

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Balat, SCP Leduc et Vigand

Reims, du 28 juin 2017

28 juin 2017

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires en demande et en défense, et les observations complémentaires produits ;

Attendu que la société Cynoprotect, devenue Urban Protect, son gérant, M. Laurent X..., et la responsable administrative et financière de la société, Mme Angélique X..., ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel notamment des chefs susvisés ; que le tribunal correctionnel les a reconnus coupables de ces délits ; que les prévenus ont relevé appel de la décision ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 75, 75-1, 76, 77, 171, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

Sur le premier moyen de cassation proposé pour la société Urban Protect, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 75, 75-1, 76, 77, 171, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

Sur le troisième moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-5, L. 8222-1, L. 8222-2, L. 8224-1, L. 8224-2, L. 8224-3 du code du travail, 121-1, 121-3 du code pénal, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

Sur le second moyen de cassation proposé pour la société Urban Protect, pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-5, L. 8222-1, L. 8222-2, L. 8224-1, L. 8224-2, L. 8224-3 du code du travail, 121-1, 121-3 du code pénal, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

Sur le sixième moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause devenu 1240 du code civil, 2, 3, 464, 480-1, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale :

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être admis ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 76, 551, 591 et 593 du code de procédure pénale :

Attendu que pour rejeter le moyen pris de la nullité de la perquisition et des saisies qui auraient été effectuées dans le bureau personnel de M. X..., tiré de ce que ces opérations auraient été mises en oeuvre sans son assentiment et en son absence, l'arrêt relève que rien n'établit que des pièces ont été saisies dans ce bureau, en sorte que l'assentiment exprès de l'intéressé ne s'imposait pas ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que, d'une part, il n'y a pas lieu à annulation de la perquisition réalisée sans assentiment lorsque celle-ci n'a donné lieu à aucune investigation et constatation de nature à fonder les poursuites, d'autre part, la Cour de cassation, qui, en cas de rejet d'une exception de nullité par la cour d'appel, peut s'assurer, par le contrôle des pièces utiles de la procédure, de la régularité de l'acte contesté, est en mesure de constater que les photocopies de factures jointes au procès-verbal de perquisition n'ont pas été saisies dans le bureau personnel de M. X..., mais l'ont été dans le grenier des locaux de la société où sont archivés les documents sociaux, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles L. 241-3, L. 241-9, L. 242-6 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motifs, manque de base légale :

Sur le moyen pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches ;

Vu l'article 567-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que les griefs ne sont pas de nature à être admis ;

Sur le moyen pris en sa première branche ;

Attendu que, pour confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré M. X... coupable du délit d'abus de biens sociaux, l'arrêt relève notamment que les quatre-vingt-huit achats de bouteilles de champagne pour une somme totale de 131 989 euros, soit entre 8 000 et 9 000 bouteilles sur la période de prévention, ne sauraient être considérés comme des cadeaux à la clientèle, les clients contactés par les enquêteurs ayant déclaré n'avoir jamais bénéficié de tels présents et la défense échouant à rapporter la preuve contraire ; que les juges ajoutent que la consommation de bouteilles de champagne au sein de la société ou leur utilisation comme cadeaux à des salariés ne peut être considérée que comme marginale au vu de l'objet social de la société et des documents produits ; qu'ils en déduisent que ces achats effectués par le gérant de la société avec des fonds de cette dernière doivent être considérés comme ayant été faits non pas dans l'intérêt de la société mais à des fins personnelles ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'en l'absence de justification de leur caractère social, les dépenses de réception et de cadeaux d'affaire engagées en l'espèce par le gérant de la société Cynoprotect, au moyen de fonds sociaux, l'ont nécessairement été dans son intérêt personnel, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour M. et Mme X..., pris de la violation des articles 121-1 et 121-3 du code pénal, et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mme X... coupable de recel d'abus de biens sociaux et l'a condamnée solidairement avec M. X... à payer à la SCP Trimant Raulet et à la SCP Crozat Barault Maigrot la somme de 172 515,87 euros au titre du préjudice matériel ;

"aux motifs qu'il résulte des développements qui précèdent et des éléments de l'enquête que Mme X..., a été bénéficiaire, au moins en partie, des achats effectués en matières de séjours, champagne, vêtements ; que l'épouse de M. X... mais également associée de la société Cynoprotect (désormais dénommé Urban Protect), était surtout responsable administratif et financier de ladite société ; que dès lors elle ne saurait utilement prétendre qu'elle n'a pas eu connaissance de ce que les achats susmentionnés, considérés comme constitutifs d'abus de biens sociaux, étaient passés dans la comptabilité de la société ;

"1°) alors que le juge répressif doit constater l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction dont le prévenu est reconnu coupable ; que le délit de recel est une infraction intentionnelle qui suppose que son auteur ait bénéficié en connaissance de cause du produit d'un crime ou d'un délit ; que pour déclarer Mme X... coupable de recel d'abus de biens sociaux, l'arrêt attaqué se borne à relever qu'elle ne pouvait utilement prétendre, en sa qualité de responsable administratif et financier de la société Urban Protect, qu'elle n'avait pas eu connaissance que les achats de séjours, champagne et vêtements effectués par son époux étaient passés dans la comptabilité de la société ; qu'en instaurant ainsi une présomption de culpabilité fondée sur le seul intitulé du poste occupé par Mme X... au sein de la société, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

"2°) alors que dans ses conclusions d'appel régulièrement déposées, Mme X... a expliqué qu'elle n'avait pas accès aux moyens de paiement et à la comptabilité de la société, confiée au cabinet comptable FCN, qu'elle n'était en charge, à l'époque de la prévention, que de la facturation de la société, des relances clients et de l'affacturage et qu'elle et son mari avaient des comptes bancaires séparés ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces éléments de nature à démontrer que Mme X... ne pouvait savoir que les achats reprochés à son époux avaient été effectués avec des fonds de la société, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3°) alors que le délit de recel implique que son auteur ait bénéficié du produit d'un crime ou d'un délit ; qu'il ne résulte d'aucune constatation matérielle que Mme X... ait bénéficié, d'une façon ou d'une autre, du champagne ou de la totalité des vêtements qu'il est reproché à M. X... d'avoir achetés avec les fonds de la société ; qu'en déclarant néanmoins coupable Mme X... de recel pour la totalité des dépenses retenues au titre du délit d'abus de biens sociaux dont son époux a été déclaré coupable, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que pour confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré Mme X... coupable du délit de recel pour la totalité des dépenses retenues au titre du délit d'abus de biens sociaux, l'arrêt retient qu'il résulte des éléments de l'enquête que cette dernière a été bénéficiaire, au moins en partie, des achats effectués par M. X... en matière de séjours, champagne et vêtements ; que les juges ajoutent que cette dernière, qui n'est pas seulement l'épouse de M. X... et associée de la société Cynoprotect, est surtout responsable administratif et financier de cette société, en sorte qu'elle ne saurait utilement prétendre qu'elle n'a pas eu connaissance de ce que les achats constitutifs d'abus de biens sociaux étaient passés dans la comptabilité de la société ;

Attendu qu'en prononçant par ces motifs, dont il résulte que Mme X... a bénéficié, en connaissance de cause, du train de vie de son époux permis par les faits d'abus de biens sociaux dont ce dernier a été reconnu coupable, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.