Livv
Décisions

CA Poitiers, ch. civ. 1, 15 novembre 2013, n° 12/01937

POITIERS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

S. M.A. B.T. P. BORDEAUX, SOCIÉTÉ INDUSTRIELLE DE CONSTRUCTION (SAS)

Défendeur :

J-C P., D. R. épouse P.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur Roland POTEE

Conseillers :

Madame Isabelle CHASSARD, Monsieur Jean Paul FUNCK BRENTANO

Poitiers, du 06 Nov. 2009

6 novembre 2009

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 22 septembre 1986, Monsieur et Madame P. ont conclu avec la Société Industrielle de Construction (SIC) un contrat de construction de maison individuelle.

L'ouvrage a été réceptionné le 23 janvier 1988.

Différents désordres ont donné lieu à des travaux de reprise en 1991 et 1995.

Monsieur et Madame P. ont subi un sinistre en 1997.

La SMABTP, assureur de la société SIC, a fait réaliser une expertise amiable par Monsieur C., lequel a préconisé une étude des sols, réalisée par le CEBTP.

Des travaux de reprises ont été préconisés en sous oeuvre et sous les murs périphériques, pour un montant de 29.425,71 €, selon devis de la société Sud Fondations.

Assignés en référé le 09/01/1998, la société SIC et la SMABTP ( assureur dommage ouvrage) ont

donné leur accord pour effectuer les travaux de reprise en sous oeuvre et les travaux de reprise des embellissements, de sorte que l'expertise sollicitée n'a pas été ordonnée . (ordonnance de référé du 17/02/1998).

Les travaux ont été réalisés en 1998 par la société Sud Fondations, devenue par la suite société Confor' .

La stabilité de l'immeuble n'étant toujours pas assurée et de nouveaux désordres se produisant, les époux P. ont fait une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la SMABTP, laquelle a mandaté à nouveau son expert, Monsieur C., qui a préconisé de nouveaux travaux, lesquels n'ont pas été entrepris.

Les désordres persistant, les époux P. ont sollicité en référé une mesure d'expertise judiciaire, laquelle a été ordonnée le 12 novembre 2002, et confiée à Monsieur C., une provision de 2.250 € étant allouée aux demandeurs.

M C. a déposé son rapport le 12 novembre 2004.

C'est dans ces conditions que par actes des 19 et 20 septembre 2005, les époux P. ont fait assigner au fond la société SIC et son assureur, la SMABTP, et la société Confor' aux fins d'obtenir réparation de leur préjudice.

La SMABTP a appelé en la cause Monsieur G., sous traitant de la société SIC et son assureur, la compagnie Axa.

Devant le Tribunal de Grande Instance de SAINTES, la SMABTP, la Société Industrielle de Construction et la SA CONFOR' soulèvent la prescription de l'action au motif que les désordres affectant le dallage sont apparus postérieurement à l'expiration de la garantie décennale qui expirait le 23 janvier 1998.

La Société AXA FRANCE, assureur décennal de Monsieur G., appelée en cause par la SMABTP, concluait également à sa mise hors de cause, la garantie décennale étant expirée pour ce qui concerne le dallage.

Sur ce point, M et Mme P. ont soutenu que leur assignation délivrée le 9 janvier 1998 a interrompu le délai de prescription décennale, et qu'il s'agit d'un désordre évolutif qui se rattache à l'absence de fondations dénoncée en 1998.

La société SIC et la SMABTP répliquaient que les désordres concernant le dallage n' étaient pas dénoncés dans l'assignation de 1998.

Le Tribunal de Grande Instance de SAINTES , par décision du 03/07/2007, a statué comme suit :

PRONONCE la mise hors de cause de Monsieur Christian G. et de la Société AXA FRANCE

CONDAMNE solidairement la SA CONFOR' et la SMABTP à verser aux époux P. la somme de DIX MILLE CINQ CENT DIXSEPT EUROS VINGT SEPT CENTIMES (10 517,27 €) indexée sur la variation de l'indice BTO 1 du mois de novembre 2004

CONDAMNE solidairement la Société Industrielle de Construction et la SMABTP à verser aux époux P. la somme de VINGT MILLE HUIT CENT QUATRE VINGT DEUX EUROS NEUF CENTIMES (20 882,09 €) indexée sur la variation de l'indice BTO1 du mois de novembre 2004

CONDAMNE in solidum la SA CONFOR' et la Société Industrielle de Construction solidairement avec la SMABTP à verser aux époux P. la somme de QUINZE MILLE EUROS (15 000 €) ainsi que TROIS MILLE EUROS (3 000 €) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les entiers dépens

DONNE acte aux époux P. de leurs réserves quant à l'aggravation éventuelle de leur préjudice après l'exécution des travaux de confortement de leur immeuble

DÉBOUTE les parties du surplus de leur demande

ORDONNE l'exécution provisoire du jugement

Dans le cadre de la procédure d'appel formé par les sociétés SIC et la SMABTP, celles ci ont de nouveau demandé à la cour , par conclusions du 8 janvier 2008, de dire que les demandes des époux P. concernant la reprise des dallages sont prescrites, les désordres affectant le dallage étant apparus postérieurement à l'expiration de la garantie décennale.

Par arrêt en date du 06/11/2009, sur appel de la décision susvisée, la cour d'appel de POITIERS a statué comme suit :

Infirme le jugement entrepris sur le montant des travaux de reprise du dallage.

Et statuant à nouveau,

Condamne la société SIC et la SMABTP à payer aux époux P. la somme de 15.927,21 € TTC au titre des travaux de reprise du dallage, avec indexation sur la variation de l'indice BTO1 du mois de novembre 2004.

Confirme les autres dispositions non contraires du jugement entrepris.

Condamne in solidum les sociétés Confor' et SIC ainsi que la SMABTP à verser aux époux P. une indemnité complémentaire de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Déboute la compagnie Axa de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum la société SIC et la SMABTP aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise, et dit que les dépens de la procédure d'appel pourront être recouvrés directement en application de l'article 699 du Code de procédure civile.

Par arrêt en date du 14/12/2010, la cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel susvisé en statuant comme suit au visa de l'article 2244 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu il rejette la demande de fin de non recevoir de l'action en réparation des désordres affectant le dallage formée par la SMABTP et la société SIC et condamne la SMABTP et la société SIC à payer aux époux P. la somme de 15 927,21 euros au titre des travaux de reprise du dallage avec indexation sur la variation de l'indice BTO1 du mois de novembre 2004, l'arrêt rendu le 6 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée

;

Condamne les époux P. aux dépens sauf ceux afférents à la mise en cause de la société Axa France lard qui seront à la charge de la SMABTP et de la société SIC, ensemble ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SMABTP et la société SIC, ensemble, à payer la somme de 2 400 euros à la société Axa France lard ; rejette les autres demandes

aux motifs suivants :

Attendu que pour écarter l exception d irrecevabilité de l action engagée par les époux P. en réparation des désordres affectant le carrelage de leur habitation, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés,

- que l'assignation en référé du 9 janvier 1998 par laquelle les époux P. sollicitaient une mesure d'expertise judiciaire en vue notamment "d'indiquer le coût des travaux nécessaires pour y remédier tant au niveau des fondations qu'au niveau des murs extérieurs et intérieurs", faisait état des désordres examinés par l'expert C., mandaté en 1997 par la SMABTP,

- qu'il résultait d'un rapport du CEBTP adressé à cet expert que les fissures "en partie haute et basse du dallage" étaient visées pour la cuisine et le séjour

- et que le désordre affectant le carrelage était donc visé par cette assignation ;

Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que l'assignation ne visait expressément que les désordres touchant les fondations et les murs intérieurs et extérieurs et sans préciser les désordres examinés par l'expert C. dans son rapport, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision

LA COUR :

Vu la déclaration de saisine après cassation formée par la SMABTP et la SOCIETE INDUSTRIELLE DE CONSTRUCTION en date du 06/06/2011 au contradictoire des époux P., de M. G., de la société Confor et de la société Axa ;

Vu les dernières conclusions du 22/08/2013 de la société SIC et de la société SMABTP présentant les prétentions suivantes :

Vu l Arrêt de la Cour de Cassation en date du 14 Décembre 2010 ;

Statuant sur les chefs de demandes dont la Cour reste saisie suite à l'Arrêt de la Cour de Cassation en date du 14 Décembre 2010,

- Dire et juger qu'il ne résulte pas des pièces de procédure versées aux débats, que la procédure engagée antérieurement à la fin du délai de prescription décennale, c'est à dire le 23 Janvier 1998, visait l'affaissement du dallage ;

- Constater que cette réclamation est survenue postérieurement, soit après la fin de l'expiration du délai de garantie décennale et qu'il s'agissait d'un nouveau désordre jamais évoqué antérieurement ;

En conséquence,

- Déclarer irrecevable, sans examen au fond comme étant prescrite, la demande de Monsieur Jean Claude P. et de Madame Danielle R. épouse P. visant à obtenir la réfection du dallage ;

En conséquence,

- Condamner solidairement Monsieur Jean Claude P. et Madame Danielle R. épouse P. à restituer aux concluantes la somme de 15.927,21 € au titre de la reprise du dallage, réglée par les concluantes en exécution du Jugement en date du 3 Juillet 2007, ladite somme étant assortie des intérêts légaux courant depuis le Jugement prononcé ;

- Déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées les prétentions complémentaires présentées par les époux P. au terme de leurs conclusions signifiées par RPVA le 21 Septembre 2012 ;

- Condamner solidairement Monsieur Jean Claude P. et Madame Danielle R. épouse P. à verser aux concluantes la somme de 2.000,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Condamner les mêmes, solidairement, aux entiers dépens de la procédure devant la Cour ;

Vu les dernières conclusions du 21/09/2012 de M et Mme P. présentant les prétentions suivantes :

Déclarer SMABTP et SIC mal fondées en leur appel du jugement du TGI de Saintes en date du 3/7/2007 ; les en débouter ;

Confirmer le jugement du TGI de Saintes en ce qu'il a condamné solidairement SMABTP et SIC à verser à Mr. et Mme. P. la somme de 20.882,09 € indexée sur la variation de l'indice BTO1 du mois de novembre 2004 ;

Ordonner une expertise judiciaire complémentaire, et désigner, pour ce faire, Mr. C., expert judiciaire avec pour mission de :

vérifier l'état général de l'immeuble,

vérifier l'état de la dalle flottante sous le salon/séjour,

vérifier l'état du dallage dans le salon/séjour,

dire si les désordres déjà constatés ont évolués et, dans l'affirmative,

déterminer les travaux nécessaires pour y remédier,

évaluer le préjudice de jouissance subi par monsieur et madame P..

Donner acte à Mr. et Mme. P. de ce qu'ils se réservent de solliciter une indemnisation complémentaire pour aggravation des désordres, après le dépôt par l'Expert de son nouveau rapport ;

Condamner solidairement SMABTP et SIC à payer à Mr. et Mme. P. la somme de 5000,00 € en application de l'article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE,

Condamner solidairement SMABTP et SIC aux entiers dépens d'instance, d'expertise et d'appel et autoriser la SCP F. MUSEREAU B. MAZAUDON S. PROVOST CUIF, Avocats associés, à recouvrer directement contre la/les partie ( s) perdante ( s) ceux de ses dépens exposés devant la Cour dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

L'affaire a fait l'objet d'une radiation le 07/03/2012 puis d'une réinscription au rôle le 18/05/2012

(sous le numéro RG : 12/01937).

Le conseiller de la mise en état a constaté le désistement partiel de la Smabtp et de la Cic à l'encontre de la société Confor le 29/05/2012.

Par conclusions en date du 18/10/2011, la société Axa avait présenté les demandes suivantes :

- constater que l'arrêt précédemment rendu le 6 novembre 2009 par la cour de Poitiers n'a pas été cassé en ce qu'il avait confirmé le jugement dont appel qui avait mis hors de cause la compagnie Axa ;

- débouter la SMABTP et la CIC de leur demande en ce qu'elle concerne la compagnie Axa ;

- condamner in solidum la SMABTP et la CIC à payer à AXA la somme de 3000 € en application de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel ;

- autoriser la Scp Tapon Michot à les poursuivre directement pour ceux dont elle aura fait l'avance sans avoir perçu provision

M. G. régulièrement assigné n'a pas constitué avocat.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 10/09/2013

SUR CE

Sur la recevabilité des demandes de M et Mme P. au titre de l'affaissement de la dalle flottante, en tant que désordre survenu avant le 23/01/1998 et déclaré dans l'assignation en référé du 09/01/1998

A) sur la date de survenance du désordre (tassement du dallage)

Pour pouvoir invoquer l'application de la garantie décennale, il appartient en premier lieu à M et Mme P. de démontrer que le désordre relatif au dallage soit apparu avant l'expiration de la garantie décennale (date d'expiration : 23/01/1998)

Pour ce faire, M et Mme P. invoquent :

- la note technique de la société SUD FONDATIONS en date du 25/08/1997 incluse en annexe du rapport de l'expert amiable, M C. désigné par la SMABTP indiquant que « Le dallage à l'intérieur de l'habitation ne présente pas de déformation significative d'un mouvement nécessitant une reprise. » considérant que la phrase précitée impliquait qu il y avait une « déformation » dudit dallage, certes faible, mais une déformation visible ; Que l'expert C. ne chercha pas à mesurer ladite déformation, ni à en comprendre la cause

- le rapport du 18 juin 1997 adressé par la CEBTP au Cabinet C. précisant que les fissures en partie haute et basse du dallage étaient visées pour la cuisine et le séjour

- le fait que M C. dans son rapport en 2004 (page 26) ait indiqué que l'ensemble devait se tasser d'une manière sensiblement identique en 1997, et que le dallage avait continué à s'affaisser après la pose des micropieux.

Il sera observé que M C. a précisément écrit page 26 suite à un dire de la société SMABTP et de la société SIC : Nous ne pouvons pas nous prononcer sur l état du dallage en 1997 avant l'exécution des micro pieux.

Mais l'on peut affirmer que l'ensemble devait se tasser d'une manière sensiblement identique. Après le blocage par micro pieux des façades et refends, les fondations étaient stables (sauf l'angle du séjour) le dallage a continué à s'affaisser.

Dès lors, il ne peut être considéré que M C., en 2004 ait affirmé que le dallage ait subi un tassement visible en 1997 .

En outre, la note technique du 25/08/1997 de la société SUD FONDATION n'indique pas comme le suggèrent M et Mme P. que le dallage à l intérieur de l habitation ne présente pas de déformation significative' permettant de conclure qu'il présentait une déformation mais peu importante puisque cette étude indique que le dallage ne présente pas de déformation significative d'un mouvement nécessitant une reprise' - le terme significative étant à rattacher à la fin de la phrase et non analysé comme un adjectif qualifiant le mot déformation.

Il ne peut donc en être déduit que la note de SUD FONDATIONS du 25/08/1997 ait constaté une déformation du dallage même minime.

En effet, cette phrase est à rapprocher du principe de la reprise proposée par la société SUD FONDATIONS qui consiste en la stabilisation des seuls murs porteurs par micro pieux HEB100 avec un espacement moyen des pieux de 2ml conformément au plan annexé et dès lors sans qu'il y ait lieu selon cette étude à l'installation de micro pieux sous le dallage lui même.

Dès lors, il résulte de l'ensemble de cette note qu'au contraire, il n'est pas justifié qu'en 1997, un tassement du dallage était visible et que ce désordre allégué était survenu avant le 23/01/1998.

L'étude du CEBTP en date du 18/06/1997 ne fait pas plus état d'un tassement du dallage puisqu'elle décrit la typologie des désordres en précisant que ceux ci sont intervenus sous forme de fissures ( extérieures horizontales et intérieures) et ce sans que soit évoquée à aucun moment l'existence d'une quelconque tassement du dallage.

En conséquence, M et Mme P. ne justifient pas que le désordre affectant le dallage (tassement de celui ci ) soit intervenu avant le 23/01/1998.

B) sur l'assimilation du désordre déclaré au titre des fondations avec le désordre relatif au tassement du dallage

M et Mme P. prétendent que le fait d'avoir déclaré un désordre relatif aux fondations avant le 23/01/1998 suffit à inclure le désordre relatif à la dalle en estimant que celle ci fait partie des fondations puisqu'elle y est étroitement imbriquée ou liée.

L'assignation en référé du 09/01/1998 produite aux débats n'énonce ni dans les motifs ni dans le dispositif un désordre relatif au tassement du dallage.

Il résulte des motifs qui précèdent que ni le rapport de M C. ni ses annexes citées par ladite assignation ne caractérisent l'existence de ce désordre ni même évoquent la probabilité de la survenance d'un tel désordre.

Dans le cadre des motifs de ladite assignation, les seuls désordres évoqués sont ceux relatifs aux fondations et aux fissures extérieures et intérieures.

La proposition de mission d'expertise sollicitée par M et Mme P. vise les fondations et murs extérieurs et intérieurs' .

Il ne résulte pas plus des motifs de l'ordonnance rendue à la suite de ladite assignation le moindre

élément relatif à l'existence d'un tassement du dallage.

Nonobstant les précisions techniques conséquentes apportées par M et Mme P., il ne peut être considéré que le désordre relatif à l'affaissement de la dalle soit inclus dans le désordre allégué alors au titre des fondations dans la mesure où tout désordre de stabilité d'un immeuble consécutif à des problèmes de fondations ou de mouvements différentiels de terrain n'implique pas nécessairement un affaissement de dalle.

En conséquence, ce moyen assimilant un désordre concernant la dalle à un désordre concernant les fondations sera rejeté.

Sur la recevabilité des demandes au titre des désordres évolutifs

M et Mme P. soutiennent enfin que l'affaissement est consécutif aux désordres relatifs aux fondations et aux travaux de reprise mis en oeuvre en 1998 sur la base des préconisations de M C. .

Cependant, pour pouvoir invoquer l'application de la garantie décennale à cet égard, M et Mme P. doivent justifier de la réunion des conditions exigées en la matière .

L'indemnisation des désordres évolutifs peut être ordonnée sur le fondement de l'article 1792 du code civil lorsque :

> il s agit d un désordre avéré apparu postérieurement à l expiration du délai de 10 ans.

Il résulte des motifs qui précèdent que le désordre relatif à l'affaissement de la dalle n'est pas apparu avant le 23/01/1998 et qu'il n'a pas non plus été visé dans l'assignation du 09/01/1998.

Le premier document technique produit évoquant l'existence d'un affaissement de la dalle est le rapport de M C. du 10/03/2000 organisé à la demande de la SMABTP suite à la déclaration de sinistre de M et Mme P. du 24/11/1999.

M C. indique dans ce document sous le titre désordre nouveau :

Dans le séjour, léger fléchissement du dallage en partie centrale. Le mouvement est perceptible sur le soubassement de la cheminée à foyer ouvert qui présente une fissure dans un joint de pierre ouvert de 10/20ème à la base et de 0 en tête

Il est donc établi que le désordre relatif à l'affaissement du dallage est apparu postérieurement au 23/01/1998.

>Le désordre nouveau allégué remplit les conditions du désordre évolutif à savoir :

a) que les désordres d'origine / initiaux aient été dénoncés dans le délai de la garantie décennale

Sur ce point, il n'est pas contesté que le désordre d'origine allégué relatif aux fondations a été dénoncé dans le délai de la garantie décennale.

b) que les désordres d'origine / initiaux aient déjà revêtu le caractère de gravité de ceux relevant de l'application de l'article 1792 du Code Civil

Il n'est pas contestable ni contesté que le désordre relatif aux fondations dénoncé dans le délai de la garantie décennale ait présenté le caractère de gravité exigé par l'article 1792 du code civil.

Ce point est d'ailleurs définitivement jugé à l'égard de la SIC et de son assureur la SMABTP.

c) que les désordres apparus postérieurement à l'expiration du délai décennal (tassement du dallage) , constituent bien l'aggravation des désordres d'origine ou initiaux et non pas des désordres nouveaux sans lien de causalité avec les précédents.

Il convient donc de rechercher si le dommage survenu hors délai ( affaissement du dallage) est bien l'aggravation du désordre originaire ( fondations)

Dans son rapport amiable du 10/03/2000, M C. indique que :

- la cause de cet affaissement du dallage résulte d' une libération de contrainte dans le carrelage neuf, suite à un léger tassement du remblai sous dallage' ajoutant : le remblai a 13 ans, il n y a pas de raison d'une évolution importante dans les dizaines d'années à venir sauf cause extérieure

- la vérification des micropieux et de leurs ancrages ne fait apparaître aucun dysfonctionnement de ce côté

- le désordre en question affecte le dallage et non la structure. C est donc un nouveau désordre qui sort du champ d'application de la garantie décennale'.

Cependant, ce point de vue est contredit par le rapport de M C. expert judiciaire, qui indique : - les désordres sont de deux types : affaissement du dallage dans séjour et cuisine entraînant des fissurations importantes et affaissement semelle entre micropieux 27-26 et entraînant la fissuration visible aux portes fenêtres du séjour

- le tassement du dallage (séjour et cuisine) est imputable à l'entreprise G., sous traitant de la société SIC qui porte une part de responsabilité importante pour défaut d'exécution ( insuffisance de compactage et défaut de purge, fondation en partie non réalisée ainsi qu'à la société SIC pour défaut de surveillance et non conformité contractuelle ( page 19 du rapport d'expertise)

M C. précise également que :

- « le plan fait apparaître une fondation se prolongeant jusqu'au pignon sensiblement au droit du conduit de fumée. Or, cette fondation n'a pas été réalisée. Il s'agit d'une zone très sensible où nous avons constaté l'affaissement du dallage le plus important. »,

- « il s'agit d'une non conformité aux règles de l'art ayant pour origine une exécution défectueuse et une non conformité aux documents contractuels (absence de fondation sur refend).»,

Il est donc établi que l'affaissement du dallage constitue bien l'aggravation des désordres d'origine et non pas des désordres nouveaux sans lien de causalité avec les précédents et qu'en outre il concerne les mêmes parties ( M et Mme P. d'une part et la société SIC d'autre part).

En conséquence, nonobstant le fait que le désordre en litige ( affaissement du dallage) n'ait pas été déclaré avant le 23/01/1998 puisque par hypothèse, il est établi qu'il n'était pas visible à cette date, la garantie décennale de la société SIC est engagée à l'égard de M et Mme P. au titre des désordres évolutifs invoqués par ces derniers.

La fin de non recevoir opposée par la société SIC et son assureur la SMABTP sera donc rejetée.

Sur la demande de confirmation de la condamnation prononcée par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de SAINTES le 03/07/2007

La décision susvisée a condamné solidairement la société SIC et la société SMABTP à verser à M et Mme P. la somme de 20882,09 € indexée sur la variation de l'indice BT01 du mois de novembre 2004.

Ce faisant le premier juge a considéré qu'il était nécessaire de procéder à une reprise totale du dallage et non comme l'avait suggéré l'expertise une reprise limitée à la zone jour pour la somme de 15927,21 €, retenue ensuite par l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS.

M et Mme P. sollicitent la confirmation du jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES susvisée .

Les sociétés SIC et SMABTP sollicitent de déclarer irrecevables et en tout cas mal fondées les prétentions complémentaires présentées par les époux P. au terme de leurs conclusions signifiées par RPVA le 21 Septembre 2012".

> sur la recevabilité devant la cour de renvoi de la demande de M et Mme P. tendant à se voir accorder la somme de 20588,09 € au titre de la reprise totale du dallage au lieu et place de la somme de 15927,21 €

En l'espèce, la cassation est intervenue :

- uniquement sur le fondement de la fin de non recevoir liée à l'expiration du délai de garantie décennale sans que soit évoqué l'appréciation faite par l'arrêt cassé sur ce point du montant du préjudice

- et pour la seule demande relative au dallage.

Il résulte de l'article 625 du code de procédure civile que sur les points qu elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé'.

En conséquence, la cassation intervenue du seul chef de la fin de non recevoir pour prescription de l'action, replace les parties devant la cour de renvoi dans l'état où elles se trouvaient avant l'arrêt cassé tant sur la fin de non recevoir concernant la demande indemnitaire présentée que sur l'appréciation du montant des dommages et intérêts alloués sur la base de cette demande ( ref: Civ 2ème 26/10/2006- bull Civ II n°291).

M et Mme P. peuvent donc présenter toute demande d'indemnisation relative au dallage qui soit l'accessoire, la conséquence ou le complément des dispositions ayant fait l'objet de la cassation même si à l'occasion de ce pourvoi, M et Mme P. n'avaient pas présenté de moyens de cassation à ce sujet.

Dès lors, ils sont recevables à solliciter de nouveau leur indemnisation sur la base de ce qui leur avait été accordé par le jugement du TGI SAINTES du 03/07/2007 ( reprise totale du dallage pour un montant de 20822,09 € ).

> Sur le montant de l indemnisation au titre du dallage

Il sera constaté que les sociétés SIC et SMABTP ne présentent sur ce point aucun moyen de contestation de fond puisqu'elles indiquent, sans plus de précisions, en page 10 de leurs conclusions :

Attendu que cette demande apparaît aussi irrecevable que mal fondée pour les raisons qui précèdent ; Il sera au surplus rappelé qu'au titre de l'exécution provisoire, l'intégralité des sommes revenant aux époux P. ont été réglées et qu'il appartenait à ceux ci d'utiliser les fonds pour réaliser les travaux' étant observé que dans le cadre desdites observations, les société SIC et

SMABTP ne formulent pas d'observations de fond sur le différentiel entre les deux sommes en litige.

M et Mme P. justifient par la production du constat d'huissier du 11/10/2011 que la zone d'affaissement affecte également la zone de nuit ( chambre 2 en limite de la cloison avec la chambre 3 ) ce qui n'avait pas été constaté en 2004 par M C..

En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision du tribunal de grande instance de SAINTES en ce qu'il avait condamné les sociétés SIC et SMABTP, assureur dommages ouvrage à régler la somme correspondante à hauteur de 20 822,09 € actualisée sur la base de l'indice BT01 référence novembre 2004.

Sur la demande d'expertise complémentaire présentée par M et Mme P.

M et Mme P. sollicitent une nouvelle expertise en invoquant plus particulièrement des aggravations concernant les murs et l'apparition de fissures conséquentes et en indiquant également que leur maison présente désormais un danger pour la sécurité des personnes.

Cependant, nonobstant les photos alarmantes produites qui justifieraient effectivement une nouvelle mesure d'expertise, la cour de renvoi ne peut l'ordonner.

En effet :

L'arrêt de cassation en date du 14/12/2010 est expressément un arrêt de cassation partiel limité à la question du dallage et dès lors définitif sur la condamnation prononcée au titre des travaux de reprise de la structure.

Dès lors que l'indemnisation concernant l'aggravation des mouvements et de la structure ne fait pas partie des dispositions cassées et que les aggravations alléguées ne peuvent être considérées comme consécutives aux désordres affectant le dallage, M et Mme P. ne peuvent saisir la cour de renvoi de demandes nouvelles dissociables de l'objet du renvoi limité au dallage ni en conséquence invoquer les dispositions de l'article 144 du code de procédure civile .

M et Mme P. seront déboutés de leur demande d'expertise, en tant que présentée dans le cadre de la présente instance.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il est équitable de condamner in solidum la société SIC et la société SMABTP à payer à M et Mme P. l'indemnité pour frais irrépétibles fixée au dispositif de la présente décision sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

S'agissant de la demande de la société Axa tendant à la condamnation de la SMABTP et de la SIC à lui payer la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile , il y a lieu de relever qu'ainsi qu'elle le soulève à juste titre, l'arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 6 novembre 2009 n'a pas été cassé en ce qui concerne les dispositions la concernant en ce compris le débouté de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

La SMABTP et la SIC qui avaient initialement appelé la société Axa en garantie, n'a pas formulé dans ses dernières conclusions du 22/08/2013, de nouveau, une demande d'appel en garantie à l'encontre de la société Axa après l'arrêt de cassation intervenu.

Dès lors, il est équitable de laisser à la charge de la société Axa les frais irrépétibles exposés par elle devant la Cour de renvoi.

Les dépens de la procédure d'appel seront à la charge in solidum de la société SIC et de la SMABTP.

PAR CES MOTIFS

Dit recevables les demandes de M et Mme P. au titre du dallage

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de SAINTES en ce qu'il a condamné solidairement la Société Industrielle de Construction et la SMABTP à verser aux époux P. la somme de VINGT MILLE HUIT CENT QUATRE VINGT DEUX EUROS NEUF CENTIMES (20 882,09 €) indexée sur la variation de l'indice BTO1 du mois de novembre 2004

Y ajoutant :

Déboute M et Mme P. de leur demande d'expertise

Déboute la société AXA de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne in solidum la société SIC et la société SMABTP à payer à M et Mme P. la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne in solidum la société SIC et la société SMABTP à payer à M et Mme P. aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .