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Décisions

Cass. 3e civ., 17 février 2010, n° 09-10.474

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Philippot

Rapporteur :

M. Philippot

Avocat général :

M. Bruntz

Avocat :

Me Balat

Pau, du 13 nov. 2008

13 novembre 2008

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 13 novembre 2008) que le 21 septembre 2004, M. Alain X... et Mme X... (consorts X...), se sont engagés à vendre à MM. Jean-Pierre et Raymond Y..., cinq parcelles de terres agricoles, sous réserve du droit de préemption de la SAFER ou de M. Dominique Z..., fermier exploitant les terres depuis 1989 ; que le 29 novembre 2004, le notaire instrumentaire a informé M. Jean-Pierre Y... de l'intention de M. Dominique Z... d'exercer son droit de préemption et de subroger dans ses droits son fils M. Julien Z... ; que par acte authentique du 18 mars 2005, les consorts X... ont vendu les parcelles en cause à M. Julien Z... ; que MM. Jean-Pierre et Raymond Y..., ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en annulation de cette vente et en réparation du préjudice subi ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni des écritures des parties, ni de l'arrêt que MM. Y... aient soutenu que la déclaration de préemption du preneur devait être faite au bailleur, et non au notaire chargé d'instrumenter ; que le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions inopérantes, a retenu à bon droit que l'article L. 412-8 du code rural ne faisait pas obligation au notaire chargé d'instrumenter d'aviser la personne qui se proposait d'acquérir de l'exercice du droit de préemption du preneur ;

D'où il suit que pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 412-5 du code rural ;

Attendu que bénéficie du droit de préemption le preneur ayant exercé, au moins pendant trois ans, la profession agricole et exploitant par lui-même ou par sa famille le fonds mis en vente ; qu'il peut exercer personnellement ce droit, soit pour exploiter lui-même, soit pour faire assurer l'exploitation du fonds par son conjoint participant à l'exploitation ou par un descendant si ce conjoint ou descendant a exercé la profession agricole pendant trois ans au moins ou est titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole ; qu'il peut aussi subroger dans l'exercice de ce droit son conjoint participant à l'exploitation ou un descendant majeur ou mineur émancipé qui remplissent les conditions prévues à l'alinéa précédent ;

Attendu que pour rejeter la demande en annulation de la vente, l'arrêt, après avoir constaté que M. Julien Z... n'établissait pas qu'il remplissait les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle visées aux articles L. 331-2 et L. 331-5, qu'il versait aux débats les appels de cotisations qui lui avaient été adressés par la Mutualité sociale agricole des Hautes-Pyrénées en 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005, que ces pièces ne suffisaient pas à établir sa qualité d'exploitant agricole, retient que cette situation ne permet pas, en l'absence de texte applicable, de prononcer la nullité de la vente intervenue entre les consorts X... et M. Julien Z..., qu'en effet, l'action en nullité ne peut être intentée, sauf en cas de collusion entre preneur et vendeur, ce qui n'est pas soutenu en l'espèce, que par le preneur, au cas où le droit de préemption n'aurait pu être exercé par suite de la non exécution des obligations dont le bailleur est tenu ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'est nulle la vente conclue au bénéfice de celui qui a exercé un droit de préemption dont il n'était pas titulaire et que l'action en nullité peut être exercée par l'acquéreur évincé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée.