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Décisions

Cass. 3e civ., 24 novembre 2021, n° 19-25.251

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Avocats :

SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Melka-Prigent-Drusch

Lyon, du 12 sept. 2019

12 septembre 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 septembre 2019), le syndicat mixte des Monts du Jura (le syndicat), après avoir donné en location gérance à [R] [U] [N] un fonds de commerce de café restaurant dans des locaux situés au sommet d'une station de ski, a conclu successivement avec ce dernier trois « contrats d'occupation de locaux appartenant au domaine public du syndicat mixte du Jura gessin » d'une durée successive de neuf ans, trois ans et trois ans, le dernier ayant été conclu le 10 octobre 2007.

2. Aux termes d'une procédure d'appel d'offres initiée en mai 2010 pour la reprise de l'exploitation du fonds de commerce, le syndicat n'a pas retenu la candidature d'[R] [U] [N].

3. Le 30 décembre 2013, [R] [U] [N] a assigné le syndicat en requalification en bail commercial des conventions d'occupation et en paiement d'une indemnité d'éviction.

4. Mme [U] [N] a repris l'instance en sa qualité d'ayant-droit de [R] [U] [N], décédé le 5 septembre 2014.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le syndicat fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir de [R] [U] [N], alors « que le preneur qui agit en requalification d'un contrat en bail commercial doit être immatriculé à la date de l'assignation ; qu'après avoir pourtant constaté que l'intéressé n'était plus immatriculé depuis le 7 décembre 2010 et qu'il n'avait agi, devant le tribunal administratif, qu'en 2011, et devant le tribunal de grande instance, qu'en 2013, la cour d'appel a écarté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité et d'intérêt à agir de M. [U] [N] à la date de l'assignation, en se fondant sur les circonstances inopérantes tirées de ce que le contrat n'aurait pas été renouvelé en fraude de ses droits de sorte qu'il aurait été prétendument contraint à la radiation du RCS et qu'il avait par ailleurs été longtemps inscrit à ce registre ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 145-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 145-1, I, du code de commerce :

7. Selon cet article, les dispositions du chapitre V du titre IV du livre premier du code de commerce s'appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d'une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce.

8. Il en résulte que le preneur qui revendique le statut des baux commerciaux doit justifier d'une immatriculation à la date de sa demande en justice.

9. Pour rejeter la fin de non-recevoir soulevée par le syndicat, la cour d'appel énonce qu'[R] [U] [N] a été immatriculé au registre du commerce et des sociétés du 3 mai 1993 au 7 décembre 2010, et que son défaut d'immatriculation lors de la délivrance de l'assignation ne peut lui être opposé après l'expiration d'une troisième convention d'occupation précaire, selon la qualification qu'il a contestée dès sa lettre de candidature, expiration consacrant un non-renouvellement de l'entreprise de ce dernier, en fraude de ses droits, de sorte que sa radiation du registre du commerce et des sociétés, à laquelle il a été contraint, ne peut lui être reprochée.

10. En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'elle avait constaté qu'[R] [U] [N] n'était pas immatriculé au registre du commerce et des sociétés à la date de l'assignation par laquelle il revendiquait le bénéfice du statut des baux commerciaux, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquence légales de ses constatations, a violé l'article susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;