Cass. com., 4 mai 1999, n° 97-10.313
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Métivet
Avocat général :
M. Jobard
Avocats :
Me Hémery, SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 10 octobre 1996), que M. A... et M. Y... ont constitué par acte du 15 février 1988, une société en nom collectif, Jacques Z... et compagnie (la société), immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 2 juin 1988 ; que M. Y... a cédé ses parts sociales à son associé dès le 15 février 1988, la cession étant publiée au registre du commerce et des sociétés le 4 juillet 1988 ; que, le 13 avril 1988, M. C... a prêté une certaine somme à M. A... pour "être mise en compte courant de tiers non associé de la SNC Jacques Z..., remboursable avant le 31 décembre 1988" ; qu'après son immatriculation, la société n'a pas repris cet engagement ; que la société et M. A... ayant été mis en redressement judiciaire, M. C... a fait admettre sa créance au passif de la société ; qu'il a ensuite demandé judiciairement à M. Y..., pris en qualité d'associé, le remboursement de cette créance ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que M. C... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'admission définitive d'une créance au passif d'une société commerciale en redressement judiciaire lui confère irrévocablement le caractère d'une dette sociale, et ce depuis son origine, quand bien même la dette serait née avant que la société n'ait acquis la personnalité morale par son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; qu'en décidant que la société n'a été tenue par l'engagement contracté le 13 avril 1988 à son égard qu'à compter du jour, postérieur, où elle a acquis la personnalité morale, la cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée qui s'attachait à l'ordonnance du 24 novembre 1989 par laquelle le juge-commissaire a définitivement admis sa créance, en ce que cette dette sociale devait être réputée telle dès sa naissance et a ainsi violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 ; alors, d'autre part, que la cession de ses parts sociales par un associé d'une société en nom collectif n'est opposable aux tiers qu'à compter de la publicité qui doit en être faite au registre du commerce et des sociétés, sans pouvoir rétroagir à une date antérieure ; qu'en considérant pour décharger les consorts Y... de toute obligation, que leur auteur avait cédé ses parts dans la société à effet du 1er juin 1988, tout en constatant que cette modification n'avait été publiée que le 4 juillet 1988, la cour d'appel a conféré un effet rétroactif à l'opposabilité de la cession aux tiers en violation de l'article 20 de la loi du 24 juillet 1966 ; et alors, enfin, que les associés d'une société en nom collectif répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales ; qu'il en est ainsi des membres fondateurs au regard des engagements souscrits dès l'origine de la constitution de la société que ceux-ci aient été repris ou non par la société ; qu'en ne recherchant pas, comme il l'y avait invitée, si la qualité d'associé de M. Y..., au moment des faits, soit le 13 avril 1988, qu'elle constatait par ailleurs, n'était pas suffisante pour engager sa responsabilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et violé l'article 10 de la loi
du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu que c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que si l'autorité de la chose jugée était attachée à l'ordonnance du juge-commissaire admettant définitivement une créance au passif d'une société, elle est, s'agissant d'une créance résultant d'un engagement souscrit pendant la période de formation de la société en nom collectif, par l'un des associés, sans incidence dans les relations entre le créancier et l'autre associé qui n'a pas pris part à cet engagement, non repris par la société après son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, et qui avait cédé ses parts sociales au cours de la période de formation ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.