Cass. com., 5 mai 2004, n° 01-17.244
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 septembre 2001), que la société Département autonome service (la société DAS) a cédé, le 6 juin 1997, à la société Trading et compensation (la société TEC), la créance qu'elle détenait sur la société CPI ; que l'acte de cession stipulait que le prix de cession serait réglé par le cessionnaire en "échange marchandises" ; que par jugement du 10 mars 1998, la société DAS a été mise en liquidation judiciaire, la date de cessation des paiements étant fixée au 16 décembre 1996 et Mme X... étant désignée liquidateur ; que celle-ci a assigné la société TEC en paiement du prix de cession ; que le tribunal a accueilli la demande en prononçant une condamnation en espèces ; que la société TEC a fait appel de la décision ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la somme due par la société TEC à la société DAS pourrait être payée en "échange marchandises" et que le règlement de la TVA n'incombait pas à la société TEC et d'avoir, en conséquence, condamné le liquidateur à restituer les sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement, alors, selon le moyen, que le contrat d'échange marchandises s'analyse en une dation en paiement prohibée lorsqu'il a été conclu après la date de cessation des paiements du débiteur, en période suspecte ; qu'en l'espèce, il était constant que par acte du 6 juin 1997, la société TEC avait racheté à la société DAS une créance de 268 285 francs payable en échange marchandises ; qu'il était également constant que par jugement du 10 mars 1998, le tribunal de commerce avait fixé la date de cessation des paiements de la société DAS au 16 décembre 1996 ; que comme le soutenait Mme X..., ès qualités, un tel contrat, conclu après la date de cessation des paiements de la débitrice, caractérisait une dation en paiement et, par conséquent, était nul comme instaurant un mode de paiement anormal ; qu'en décidant au contraire que le contrat litigieux ne constituait pas une dation en paiement, la cour d'appel a violé l'article L. 621-107, 4 , du Code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient exactement que la stipulation relative aux modalités de paiement du prix de cession de la créance à la société DAS par la société cessionnaire ne constitue pas une dation en paiement prohibée par l'article L. 621-107, 4 , du Code de commerce ;
que la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur les autres branches du moyen :
Attendu que le liquidateur fait encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1 / que si le liquidateur n'use pas de la faculté de poursuivre le contrat en cours au jour du jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, le cocontractant doit restituer les sommes versées en excédent par le débiteur en exécution dudit contrat ; qu'en l'espèce, Mme X..., ès qualités, soutenait sans être démentie sur ce point que le contrat, alors en cours, de cession de créance par échange marchandises conclu le 6 juin 1997 entre la société TEC et la société DAS n'avait pas été poursuivi après le jugement d'ouverture de la procédure collective de celle-ci ; qu'il était en outre établi que la société DAS détenait une créance de 174 450,80 francs HT sur la société TEC au titre dudit contrat d'échange marchandises ; qu'invoquant les dispositions d'ordre public susvisées, le liquidateur sollicitait la condamnation de la société TEC à lui restituer la somme de 174 450,80 francs versée en excès par la société DAS ; que dès lors en se bornant à affirmer, pour refuser de faire droit à cette demande de restitution, qu'aucune disposition de la législation applicable à la liquidation judiciaire n'interdisait à une société en liquidation de recevoir un paiement en marchandises, la modalité de paiement en
marchandises prévue au contrat devait être exécutée, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le contrat en cours litigieux n'ayant pas été poursuivi par le liquidateur judiciaire, les dispositions d'ordre public de l'article L. 621-28 du Code de commerce ne devaient pas prévaloir quelles que fussent les conditions d'exécution du contrat prévues par les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-28 susvisé ;
2 / qu'il résultait de l'acte de cession litigieux, des propres écritures de la société TEC et de l'arrêt lui-même que la TVA avait été directement réglée par la société DAS ; que comme le soutenait Mme X..., ès qualités, dès lors que le contrat n'avait pas été poursuivi, la société TEC devait également restituer le montant de la TVA dont s'était acquittée la société DAS ; qu'en décidant le contraire au motif inopérant que l'acte de cession prévoyait que la TVA était payée par les clients de la société TEC, la cour d'appel a violé l'article L. 621-28 du Code de commerce ;
3 / que le liquidateur avait fait valoir que le contrat d'échange marchandises n'avait pas fait l'objet d'une demande de poursuite d'exécution de la part de Mme X..., ès qualités, et que, de même, la convention d'ouverture de compte courant comme l'accord d'échange marchandises n'ont pas été poursuivis par le liquidateur judiciaire postérieurement au jugement déclaratif ; que dès lors, dans le cas où la Cour de Cassation estimerait qu'il n'était pas constant que le contrat en cours de cession de créance par échange marchandises n'avait pas été poursuivi, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur l'existence d'un contrat en cours non poursuivi postérieurement au jugement déclaratif, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 621-28 du Code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'acte de cession stipule le prix payable en marchandises, hors TVA ; que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder aux recherches inopérantes invoquées à la première et à la troisième branche dès lors qu'elle était saisie de l'action en paiement du prix de cession de la créance, a légalement justifié sa décision ; que le moyen est mal fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.