Cass. com., 28 janvier 2004, n° 01-00.741
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
M. Delmotte
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Boré, Xavier et Boré, Me de Nervo
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 16 novembre 2000), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Moreau extincteurs (la société), M. X..., son administrateur, et M. Y..., représentant des créanciers, agissant sur le fondement de l'article L. 621-108 du Code de commerce, ont assigné les sociétés Extincteurs Andrieu et Société de fabrication et de distribution d'extincteurs (SFDE), principaux fournisseurs de l'entreprise, en procédure collective, en annulation des paiements effectués au profit de ces deux sociétés en période suspecte et en restitution des sommes ainsi perçues ; que le tribunal a accueilli ces demandes ; qu'infirmant ce jugement, la cour d'appel a rejeté la demande en annulation des paiements ;
Attendu que M. X..., désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société et M. Y..., ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 / que seul le paiement d'une lettre de change ayant circulé échappe à la nullité prévue par les articles L. 621-107 et L. 621-108 du Code de commerce, les dispositions de l'article L. 621-109 ayant pour seul objet la protection du porteur d'un titre cambiaire ; qu'en affirmant que la demande d'annulation des paiements effectués par la société au profit des sociétés SA Extincteurs Andrieu et SFDE se heurtait aux dispositions de l'article L. 621-109 du Code de commerce, bien qu'elle ait constaté que ces paiements avaient été effectués à la suite des lettres de change tirées par ces deux sociétés sur la société Moreau extincteurs et qui n'avaient pas circulé, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application, ensemble l'article L. 621-108 du Code de commerce par refus d'application ;
2 / que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; que les représentants de la société demandaient que les sociétés Andrieu et SFDE soient condamnées à restituer les sommes qu'elles avaient reçues alors qu'elles connaissaient dès l'origine l'état de cessation des paiements du solvens ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il ne devait être fait droit à ces demandes par application de l'article L. 621-109, alinéa 2, du Code de commerce, dès lors que l'action en rapport visée par ce texte avait le même objet que les demandes formulées et reposait sur des circonstances expressément invoquées à leur appui, la connaissance par les tireurs de l'état de cessation des paiements du tiré dès sa survenance, la cour d'appel qui a par ailleurs, elle-même relevé l'existence et la date de création des lettres de change, a violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les articles 6 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de l'article L. 621-109, alinéa 1er, du Code de commerce que les dispositions des articles L. 621-107 et L. 621-108 ne portent pas atteinte à la validité du paiement d'une lettre de change, peu important que celle-ci n'ait pas circulé ;
Attendu qu'après avoir relevé que les paiements litigieux avaient été faits par lettres de change tirées par les sociétés Extincteurs Andrieu et SFDE sur la société, l'arrêt en déduit exactement que, pour obtenir la restitution de ces sommes, seule est ouverte aux mandataires de justice l'action en rapport prévue par l'article L. 621-109, alinéa 2, du Code de commerce ;
Attendu, d'autre part, que les mandataires de justice, qui ont été invités par le président d'audience à déposer une note en délibéré sur l'application éventuelle de l'article L. 621-109 du Code de commerce, se sont opposés par cette note à la mise en oeuvre de cette disposition ;
qu'ils ne sont donc pas recevables à soutenir devant la Cour de Cassation un moyen contraire à leurs propres écritures ;
D'où il suit qu'irrecevable en sa seconde branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.