Cass. com., 18 mai 2022, n° 19-25.796
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rémery
Rapporteur :
Mme Vallansan
Avocat général :
Mme Guinamant
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SAS Hannotin Avocats
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 10 octobre 2019) et les productions, M. [G], pharmacien, a été mis en redressement judiciaire par un jugement du 30 juin 1995. La société OCP répartition (la société OCP) a été définitivement admise au passif pour un montant de 2 467 043,33 francs, soit 376 098,28 euros. M. [G] a bénéficié d'un plan de continuation arrêté par un jugement du 21 novembre 1997, lequel déclare la créance de la société OCP hors plan, dit que sa créance sera « réglée à 40 % dès l'arrêté du plan et prend acte de l'accord des parties pour le règlement du solde, à savoir 60 % de la créance productif d'intérêts au taux de 2 % sous condition de bonne exécution du plan au terme de 15 ans ». Après une mise en demeure infructueuse de régler le solde à l'échéance, la société OCP a assigné M. [G] en paiement de la somme de 293 356 euros, en ce compris les intérêts contractuels.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. M. [G] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société OCP la somme de 302 383,06 euros en principal et intérêts arrêtés au 20 novembre 2014, ainsi que les intérêts au taux légal sur la somme de 303 383,06 euros à compter du 21 novembre 2014, et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts par année entière, alors « que les engagements relatifs au règlement des créances nées antérieurement au jugement d'ouverture pris par le débiteur lors de l'examen de son plan de continuation, qui ne valent que sous réserve de l'admission définitive de celles-ci, ne peuvent l'obliger à payer une créance non admise, fût-ce après l'exécution de ce plan ; que M. [G] faisait valoir que la créance de la société [G] avait été admise pour la somme de 376 098,28 euros sans intérêts ; que la cour d'appel a constaté que la créance de la société OCP répartition avait été, par une ordonnance du 16 octobre 1996, admise au passif de M. [G] pour un montant de 2 467 043,44 francs, soit 376 098,28 euros ; que la cour d'appel a également constaté que M. [G] avait réglé la somme de 150 439,43 euros, à la société OCP répartition dès l'arrêté du plan ; qu'il se déduisait de ces constatations que le solde de la créance dont la société OCP répartition pouvait se prévaloir était donc limité à la somme de 225 658,85 euros (somme de 376 098,28 admise – 150 439,43 euros réglés à la date d'arrêté du plan), sans que le créancier puisse revendiquer le paiement d'intérêts, dès lors que la décision d'admission ne comportait pas admission pour des intérêts ; qu'en condamnant M. [G] à payer la somme de 302 383,06 euros, soit 225 659 euros en principal et 76 724,06 euros au titre des intérêts échus au 20 novembre 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 621-79 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble l'article 1351 du code civil, devenu 1355 du même code. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 621-76 et L. 621-79 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005 :
3. Il résulte de la combinaison de ces textes que toutes les créances déclarées à une procédure collective doivent être soumises au plan de continuation de l'entreprise, y compris lorsque les modalités de leur apurement sont spécifiques. En conséquence, un créancier et le débiteur ne peuvent stipuler un intérêt non prévu par la décision admettant la créance au passif.
4. Pour condamner M. [G] à payer à la société OCP un intérêt conventionnel de 2 % sur le montant de la créance restant due à compter de l'arrêté du plan, l'arrêt, après avoir relevé que le jugement arrêtant le plan avait qualifié la créance de la société OCP de créance hors plan, retient que c'est l'accord conclu entre les parties qui prévoit que les sommes restant dues par M. [G] produiront intérêts au taux de 2 %.
5. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations qu'aucun intérêt n'avait été admis au passif, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen.