Cass. com., 3 février 2015, n° 13-28.272
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Copper-Royer, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 22 avril 2010, réitéré le 31 mai 2010, la société Holding X..., ayant M. X... pour gérant, a cédé aux époux Y..., auxquels a été substituée la société Origine, l'intégralité des parts représentant le capital de la société Crest, moyennant le prix provisoire de 575 000 euros ; que le prix définitif a été fixé à la somme de 542 285 euros par un acte du 5 octobre 2010, au vu d'une situation comptable arrêtée au 31 mai 2010, établie le 9 juillet 2010 ; que la société Holding X... a assigné les sociétés Crest et Origine en paiement de la somme de 100 000 euros représentant le montant d'une avance de trésorerie qu'elle avait consentie à la société Crest ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ;
Attendu que pour rejeter la demande de la société Holding X..., l'arrêt, après avoir relevé que cette dernière avait consenti à la société Crest, le 21 avril 2010, une avance de trésorerie de 100 000 euros, retient que la lecture des conventions des 22 avril et 5 octobre 2010 fait apparaître que cette société n'est pas titulaire d'un compte courant d'associé à concurrence d'une somme de 100 000 euros, M. X... précisant à titre indicatif que le solde débiteur de son compte courant s'élève au 31 mars 2010 à la somme de 31 787, 83 euros ; que l'arrêt ajoute qu'il n'existe aucune mention relative à une dette de la société Crest correspondant à cette avance de trésorerie ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le silence des actes relatifs à la cession des parts de la société Holding X... quant à l'existence de la créance de cette dernière née de l'avance accordée le 21 avril 2010 à la société Crest n'était pas de nature à caractériser sa volonté non équivoque de renoncer à s'en prévaloir, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore, par motifs adoptés, que l'acte du 31 mai 2010, rédigé en fonction de la situation réelle de la société Crest, connue des parties, mentionne expressément que « le cédant déclare qu'il ne détient à ce jour aucune créance en compte courant d'actionnaire dans les écritures comptables de la société et renonce à se prévaloir à ce titre de quelque remboursement que ce soit postérieurement à la présente cession » ; qu'il en déduit que l'associé unique de la société Crest a clairement renoncé à émettre toute réclamation à ce titre ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté, par motifs adoptés, que les comptes de la société Crest arrêtés au 31 mai 2010 faisaient mention de la somme de 100 000 euros « dans le compte courant d'associé de la société Holding X... » et que l'application à la créance résultant de l'avance du 21 avril 2010 de la volonté de cette dernière de renoncer à agir aux fins de remboursement était rendue équivoque en ce qu'elle était liée, aux termes de l'acte du 31 mai 2010, à l'affirmation de l'absence de créance en compte courant dans les comptes de la société Crest, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la quatrième branche du moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient, en outre, qu'en page 11 de ses conclusions, la société Holding X... précise que c'est bien sur un prix définitif de 542 285 euros que les parties se sont mises d'accord, en retenant ainsi un montant de 374 246 euros au titre des capitaux propres et « incluant par là-même la dette de 100 000 euros » ; qu'il ajoute que cette explication implique nécessairement que la société Holding X... ne se considère pas comme créancière, outre le prix de cession révisé, d'une somme supplémentaire de 100 000 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions, la société Holding X..., après avoir indiqué qu'elle n'aurait pas consenti à la fixation du prix définitif à ce montant en l'absence d'un engagement de remboursement de la somme de 100 000 euros par la société cessionnaire, soutenait que l'inscription de cette dette au passif de la société Crest valait reconnaissance de celle-ci et engagement de rembourser la somme en cause, qui n'avait pas été prise en compte dans le calcul du prix définitif, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 septembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée.