Cass. com., 24 mai 2017, n° 15-19.430
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Balat, Me Le Prado
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 11 mars 2015), qu'au cours de l'année 2002, la société X..., dont M. X... était le dirigeant, a rencontré des difficultés financières consécutives à un accident industriel qui a affecté l'exécution d'un marché d'ingénierie conclu avec la société de droit iranien HBSA et le recouvrement de sa créance en résultant ; que, par convention du 10 juin 2004, M. Y..., associé minoritaire de la société X..., a fait un apport en compte courant ; qu'ultérieurement la société X... a fait l'objet d'une procédure collective, clôturée, pour insuffisance d'actif, le 17 octobre 2008, sans que M. Y... n'obtînt le remboursement de son compte courant ; que, s'estimant victime de manoeuvres dolosives, de la part de M. X..., destinées à le convaincre d'effectuer son apport, M. Y... l'a assigné en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que manque à son obligation de loyauté le dirigeant qui dissimule aux associés les informations pouvant influer sur leur consentement ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. Y... a consenti en 2004 une avance en compte-courant de 300 000 euros à la société X... dont il n'a jamais été remboursé suite à la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure en redressement ouverte contre la société en 2006 ; qu'il résulte encore de l'arrêt attaqué que la société X... s'est trouvée en difficulté suite à l'incendie, en juillet 2002, du site de l'un de ses principaux clients ; qu'en retenant, pour débouter M. Y... de son action en responsabilité contre le dirigeant de cette société, que même si, au jour de son apport, il ne lui avait communiqué que le bilan de la société pour l'année 2003 qui ne mentionnait pas que, suite à cet incendie, une créance de 1,2 millions d'euros risquait d'être impayée, M. Y... avait pris un risque en consentant cette avance puisqu'il ne pouvait ignorer l'existence de cet accident, les difficultés de trésorerie et la situation d'urgence de la société X..., sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il connaissait l'ampleur des difficultés de cette société et notamment s'il savait que cet accident affectait l'un des principaux clients de la société X... et qu'il menaçait le recouvrement d'une créance de plus de 1,2 millions d'euros essentielle à la survie de cette entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1116 du code civil ;
2°/ que manque à son obligation de loyauté le dirigeant qui dissimule aux associés les informations pouvant influer sur leur consentement ; qu'est fautif le dirigeant qui omet d'informer un associé minoritaire d'un risque d'impayé affectant une créance importante d'un des principaux clients de la société pour l'amener à lui octroyer une avance en compte-courant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. Y... a consenti en 2004 une avance en compte-courant de 300 000 euros à la société X... dont il n'a jamais été remboursé suite à la clôture pour insuffisance d'actif de la procédure en redressement ouverte contre société en 2006 ; qu'il résulte encore de l'arrêt attaqué que la société X... s'est trouvée en difficulté suite à l'incendie, en juillet 2002, du site de l'un de ses principaux clients ; qu'en retenant, pour débouter M. Y... de son action en responsabilité contre le dirigeant de cette société, qu'il n'était pas établi que le bilan pour l'année 2003 qu'il lui avait communiqué aurait dû mentionner une provision pour risque de dépréciation d'une créance de 1,2 millions d'euros, dès lors que, même si cet incendie avait menacé l'exécution du contrat en vertu duquel elle pouvait prétendre à cette somme, ledit contrat avait été poursuivi jusqu'en 2005, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que le bilan pour 2002 et celui pour 2004, tous deux antérieurs à la rupture du contrat avec la société Hmsa, mentionnaient, à la différence de celui de 2003, l'existence d'un risque de non-paiement de cette créance, ne révélait pas la dissimulation par ce dirigeant d'une information déterminante pour M. Y..., constitutive d'un dol, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1116 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que M. Y... était conscient des difficultés de la société X..., à tout le moins de ses difficultés de trésorerie, lorsqu'il procéda à son apport de la somme de 300 000 euros et que selon sa correspondance du 29 juillet 2004, il connaissait l'urgence de la situation ; qu'il retient encore qu'il ne pouvait qu'avoir eu connaissance de l'accident affectant les locaux industriels de la société Repol, l'un des principaux clients de la société X..., survenu le 29 juillet 2002, et qu'ainsi, actionnaire très minoritaire et apporteur en compte courant, il ne pouvait ignorer les risques d'une telle opération pour le cas où son aide se révélerait insuffisante pour surmonter ces difficultés ; qu'il constate ensuite que l'étude des comptes de la société X... ne met pas en évidence de faute imputable à M. X... quant à leur présentation pour l'année 2003, comptes seuls disponibles lors de la signature de la convention d'apport ; qu'il précise encore que le marché conclu avec la société HBSA s'est poursuivi jusqu'en 2005 et qu'il n'est pas établi que la dépréciation de la créance sur cette société eût dû être faite dès 2003 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines excluant toute dissimulation intentionnelle imputable à M. X..., tenant au risque de non-paiement de la créance sur la société HBSA , la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n' est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.