Cass. com., 3 avril 2007, n° 05-20.647
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
M. Sémériva
Avocats :
Me Bertrand, SCP Thomas-Raquin et Bénabent
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que la société Pfizer est titulaire d'un brevet européen désignant la France, délivré le 20 février 1985 sur demande déposée le 22 avril 1985 sous bénéfice de priorité britannique, et couvrant des "agents antifongiques, procédés pour leur préparation et compositions pharmaceutiques les contenant", relatif à une molécule nommée "fluconazole", que cette société met en oeuvre dans des médicaments commercialisés sous la marque "Triflucan", qui ont fait l'objet de deux autorisations de mise sur le marché (AMM), le 8 mars 1988, pour un conditionnement en gélules, et le 9 mars 1990, pour une solution injectable ; qu'ayant obtenu deux certificats complémentaires de protection (CCP), n° 371, correspondant aux revendications de procédé, n° 2 à 5, du brevet, et n° 372, correspondant aux revendications de produit, n° 1 et 6 à 8 de ce brevet, la société Pfizer a, sur le fondement de ce second certificat, agi en contrefaçon à l'encontre de la société Laboratoires G GAM, aux droits de laquelle est la société Sandoz, pour avoir commercialisé sous la dénomination "fluconazole G GAM" des médicaments utilisant ce principe actif ; qu'elle a demandé, dans les formes de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle, qu'il soit fait interdiction provisoire à cette société de poursuivre la commercialisation du produit incriminé ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 613-2, alinéa 2, L. 611-3, L. 613-28, L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle et 93-4 d) du décret du 19 novembre 1991 ;
Attendu que pour recevoir la demande de la société Pfizer, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les deux certificats reposent sur un même brevet, mais sur des revendications distinctes, que si les revendications de procédé conduisent à la réalisation du composé objet de la revendication 1, il demeure qu'elles ont une portée plus restreinte que les revendications 1 et 6 à 8 faisant l'objet du certificat n° 372, que la société Pfizer soutient sans être démentie que le composé considéré peut faire l'objet d'autres procédés d'obtention, que le recoupement des certificats n'est que partiel et n'apparaît pas de nature à affecter la validité de celui portant le n° 372, sur le fondement duquel l'action en contrefaçon a été introduite, que les revendications de procédé 2 à 5 du certificat n° 371 ne protègent que le procédé de préparation, alors que les revendications 1 et 6 à 8 confèrent une protection sur l'exploitation des compositions pharmaceutiques désignées, quel que soit leur procédé d'obtention, et qu'il n'apparaît donc pas que le grief de cumul de protection des deux certificats soit encouru ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les parties de ce brevet protégeaient le même composé chimique, en tant que produit, et au travers de son procédé d'obtention, de sorte que la demande se fondait sur un certificat complémentaire accordant, au sens des textes susvisés, la même protection que celle conférée par un certificat déjà délivré pour le même brevet, la cour d'appel a violé ces textes ;
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 611-2 et L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que l'arrêt retient encore que les deux certificats reposent sur un même brevet, mais sur des AMM distinctes ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la durée de protection conférée par un CCP ne peut excéder dix-sept ans à compter de la délivrance de la première autorisation de mise sur le marché de la spécialité pharmaceutique pour la réalisation de laquelle est utilisé le médicament ou le procédé d'obtention d'un médicament objet du brevet, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que la Cour de cassation peut mettre fin au litige, les faits, tels qu'ils ont été souverainement constatés par les juges du fond, permettant d'appliquer la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 octobre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.