Livv
Décisions

Cass. 1re civ., 29 mai 2013, n° 12-17.172

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charruault

Rapporteur :

Mme Verdun

Avocat général :

M. Legoux

Avocats :

SCP Potier de la Varde et Buk-Lament, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Bordeaux, du 19 janv. 2012

19 janvier 2012

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 19 janvier 2012), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 1ère, 24 septembre 2009, pourvoi n° 08-14. 143), que souhaitant négocier par l'entremise d'un professionnel l'acquisition d'un domaine agricole et viticole appartenant aux consorts X..., que ceux-ci ne proposaient pas à la vente, les époux Y...ont confié à la société Agence Z..., le 28 mars 2002, " un mandat de recherche sans exclusivité d'un bien à acquérir ", à un certain prix tous frais compris, pour une durée de trois mois, renouvelable par tacite reconduction jusqu'au 28 mars 2003 au plus tard, aux termes duquel ils s'interdisaient, pendant le cours du mandat et durant les dix-huit mois suivant son expiration ou sa résiliation, de traiter directement ou indirectement avec un vendeur présenté par le mandataire ; qu'ayant décliné l'offre d'achat des époux Y..., valable deux mois, élaborée avec le concours de l'agence le 4 mars 2002, les consorts X...ont émis une offre de vente à un prix supérieur que l'intermédiaire a notifiée à ses mandants le 7 mai suivant ; qu'informée que la vente avait été conclue directement entre les parties aux conditions de cette offre de vente le 5 décembre 2003, puis réitérée en la forme authentique le 14 janvier 2004, l'agence a assigné ses mandants ainsi que la société qu'ils s'étaient substituée, en paiement de la commission forfaitaire convenue " en cas de réalisation de la vente avec un vendeur présenté par l'agence ", et subsidiairement d'une indemnité compensatrice égale au montant de cette commission ;

Attendu que M. et Mme Y...et la société Domaine des Roches font grief à l'arrêt de les condamner à payer à la société Agence Z... la somme de 42 391 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2004 correspondant au montant de sa commission, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le mandant a donné à un mandataire le mandat non exclusif de rechercher un bien, il n'est tenu de payer une rémunération qu'à l'agent immobilier par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, et cela même si le bien a été effectivement présenté par le mandataire initial ; que la cour d'appel a constaté que la société Agence Z... n'avait pas présenté le bien litigieux aux époux Y...qui connaissaient antérieurement les vendeurs et que la vente avait été faite après l'expiration de mandat donné à l'agence Z... pour un prix plus élevé et en dehors de toute entremise de celle-ci ; qu'en disant que M. et Mme Y...devaient payer à la société Agence Z... une somme correspondant au montant de sa commission au motif inopérant que le mandat portait sur le seul bien susceptible de faire l'objet de la vente pour laquelle les acquéreurs avaient fait appel à l'entremise de l'agent immobilier qui aurait permis la réussite de l'opération en engageant le rapprochement des parties, la cour d'appel a violé l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 ;

2°/ que lorsque le mandant a donné à un mandataire le mandat non exclusif de rechercher un bien, il n'est tenu de payer une rémunération qu'à l'agent immobilier par l'entremise duquel l'opération a été effectivement conclue, au sens de l'article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, et cela même si le bien a été effectivement présenté par le mandataire initial, sauf à ce dernier à prétendre à l'attribution de dommages-intérêts en prouvant une faute du mandant qui, par abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, aurait privé le mandataire de la réalisation de l'opération ; que la cour d'appel a constaté que la société Agence Z... n'avait pas présenté le bien litigieux aux époux Y...qui connaissaient antérieurement les vendeurs et que la vente avait été faite après l'expiration de mandat donné à l'agence Z... pour un prix plus élevé et en dehors de toute entremise de celle-ci ; qu'en disant que M. et Mme Y...devaient payer à la société Agence Z... une somme correspondant au montant de sa commission sans caractériser une quelconque faute ou abus de la part de l'acheteur, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

3°/ que les juges du fond ne sauraient méconnaître les termes clairs et précis des conventions conclues entre les parties ; qu'aux termes du mandat de recherche conclu entre M. et Mme Y...et la société Agence Z... « le mandant s'interdit de traiter directement ou indirectement pendant le cours du présent mandat et de ses renouvellements ainsi que pendant les dix-huit mois suivant l'expiration ou la résiliation de celui-ci avec un vendeur dont le bien lui aurait été présenté par le mandataire » ; qu'en affirmant néanmoins, pour décider que les époux Y...étaient tenus de payer une somme équivalente à la commission à l'agent immobilier, que si le bien ne leur avait pas été présenté par celui-ci, le mandat portait sur le seul bien susceptible de faire l'objet de la vente pour laquelle l'acquéreur avait fait appel à l'entremise de l'agent immobilier et que la recherche de la commune intention des parties permettait d'analyser la mission de l'agence, qui avait permis la réussite de l'opération, en engageant le rapprochement des parties, non pas comme une présentation d'un bien à vendre mais comme la négociation d'une opération immobilière, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du mandat et a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le mandat de recherche portait sur un bien déterminé que les époux Y...convoitaient depuis plusieurs années, qui constituait le seul objet possible de l'acquisition à laquelle l'agence Z... avait reçu mission de s'entremettre, et retenu, hors toute dénaturation des conditions générales de ce mandat, que cette mission recouvrant non pas la présentation d'un bien à vendre mais la négociation de cette opération immobilière, avait été conduite avec succès par l'agence dont l'entremise avait permis le rapprochement des parties, ce dont il résultait que son intervention avait été déterminante, la cour d'appel, a pu en déduire qu'en concluant ultérieurement la vente au mépris de l'interdiction de négociation directe qui les frappaient encore, pour une durée qui n'avait rien d'abusif, les mandants avaient manqué à leurs obligations contractuelles en privant l'intermédiaire de la réalisation de l'acquisition dont ils l'avait chargé, justifiant ainsi légalement sa décision d'accorder à ce dernier une indemnité compensatrice de la commission dont cette faute l'avait privée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.