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Décisions

Cass. 1re civ., 1 décembre 2011, n° 09-72.850

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charruault

Avocats :

SCP Baraduc et Duhamel, SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Douai, du 27 oct. 2009

27 octobre 2009

Attendu, selon l'arrêt attaqué ((Douai, 27 octobre 2009), qu'à la fin des années 1980, la société anonyme d'économie mixte Euralille (ci-après SAEM) s'est vue concéder l'opération d'aménagement de la ZAC Euralille, le projet, dénommé " Triangle des gares ", devant comporter un centre commercial et de loisirs ainsi que cinq tours ; que l'élaboration du plan d'aménagement d'ensemble a été confiée à Kem Z..., urbaniste, la conception et la volumétrie de l'ensemble à la société JNEC (Jean X..., Emmanuel Y... et associés) et à la société Paindavoine, désignées sous le terme " architecte en chef " ; que pour procéder à la réalisation des différents ouvrages du projet, la SAEM a cédé les " droits à construire " à différents promoteurs, que les sociétés SOFAP et Marignan, agissant au nom et pour le compte de la société Lille 93, en cours de constitution, se sont vues confier, le 26 juillet 1991, la réalisation des cinq tours ; qu'agissant en qualité de maître d'ouvrage, ces sociétés ont conclu, le 5 décembre 1991, un contrat de maîtrise d'œ uvre avec la société d'architecture traitement de l'espace (devenue société d'architecture B...- A..., puis société d'architecture A... et associés), laquelle a été chargée de la définition des façades extérieures des tours et du suivi architectural des travaux, le rôle et l'intervention de l'architecte en chef dans la définition du projet d'ensemble étant expressément rappelés ; qu'aux termes de l'article 13-3 de ce contrat, la société d'architecture s'est engagée, en cas de résiliation, à remettre les documents susceptibles de permettre au maître de l'ouvrage de faire poursuivre, le cas échéant, par un autre maître d'œ uvre, la réalisation des missions, objet du contrat, ainsi que le maître de l'ouvrage s'en réservait expressément le droit ; que le projet ayant été suspendu, en raison de la crise immobilière, après la construction des trois premières tours, le contrat du 26 juillet 1991 a été résilié, et les études remises à la SOFAP en contrepartie d'une somme de 58 720 euros en sus des honoraires d'architecte ; que ces études ont été cédées par la SOFAP à la SAEM ; que constatant la reprise du projet en 2001 et le dépôt d'un permis de construire par la société Eiffage puis son transfert à Euralille Métropole Europe, MM. B... et A... et la société d'architecture ont, par actes du 18 novembre 2004, assigné les sociétés susnommées en dommages-intérêts pour atteinte à leurs droits d'auteur, prétendant que ceux-ci n'avaient pas été cédés ;

Sur la première branche du moyen du pourvoi de la société Euralille et les première et deuxième branches du moyen du pourvoi de la société Eiffage telles qu'elles figurent dans les mémoires respectifs en demande de ces parties et sont reproduites en annexe de la présente décision :

Attendu que les sociétés Euralille et Eiffage font grief à l'arrêt d'écarter la qualification d'oeuvre collective alors qu'il résulte de ses propres constatations que les architectes des superstructures avaient agi selon les directives de l'architecte en chef et fait évoluer leurs travaux au fur et à mesure des observations formulées par celui-ci et par le maître de l'ouvrage ;

Mais attendu que l'arrêt attaqué, après avoir souligné l'ampleur des projets du triangle des gares, relève que si l'architecte en chef avait pour mission d'en assurer la cohérence générale, et si M. Jean X... avait eu pour objectif de créer une certaine harmonie pour des programmes très diversifiés (centre commercial, parking, ensemble immobilier …) le conduisant à définir les règles générales d'ensemble de ce qui a été construit, il n'en demeure pas moins que les superstructures ont bien existé en tant que telles, qu'elles ne se sont pas fondues dans une conception uniforme mais ont fait l'objet de contrat de maîtrise d'œ uvre particulière, pour la conception et la réalisation des immeubles de la rue Claude Rivière, confiées à la société traitement de l'espace, que les indications données par l'architecte en chef n'ont constitué qu'un concept qui a pris forme grâce au travail de cette société et de MM. B... et A..., architectes, que les consignes données, mêmes si elles ont été suivies de modifications, n'ont pas dépassé le stade de simples directives et n'ont en rien entravé la liberté des architectes particuliers ; que la cour d'appel a exactement déduit de ces constatations souveraines que l'œ uvre en cause ne constituait pas une œ uvre collective mais l'œ uvre des architectes, lesquels étaient bien fondés à solliciter le bénéfice du droit d'auteur et ainsi, répondant aux conclusions des parties, légalement fondé sa décision ; que les griefs ne peuvent être accueillis ;

Sur la deuxième branche du moyen du pourvoi de la société Euralille telle qu'elle figure dans le mémoire en demande de cette partie et est reproduit en annexe de la présente décision :

Attendu que ce grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen du pourvoi de la société Euralille, et les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen du pourvoi de la société Eiffage telles qu'elles figurent dans le mémoire respectif en demande de ces parties et sont reproduites ci-après en annexe de la présente décision :

Attendu que les société Euralille et Eiffage font grief à l'arrêt d'avoir dénaturé les termes du contrat du 5 décembre 1991 prévoyant la cession des droits d'auteur pour permettre le cas échéant, après la résiliation du contrat, la poursuite de la réalisation des tours par le maître de l'ouvrage ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel, interprétant les termes de l'article 13-3 du contrat du 5 décembre 1991 que leur ambiguïté rendait nécessaire, a estimé que cette clause consacrée à la résiliation, qui n'évoquait pas les droits d'auteur ni leur cession, concernait tout au plus le transfert de la propriété des plans et non celle des droits d'auteur ; que les griefs des moyens qui tendent en réalité à remettre en discussion devant la Cour de cassation cette interprétation souveraine, ne peuvent être accueillis ;

Sur la sixième branche du moyen du pourvoi de la société Euralille telle qu'elle figure dans le mémoire en demande de cette partie et est reproduite en annexe de la présente décision :

Attendu qu'aucune demande de nullité de la clause litigieuse n'ayant été formulée par les architectes, la cour d'appel n'avait pas à répondre au moyen formulé par la société Euralille dans ses écritures, tiré de la prescription d'une telle action ; que le moyen inopérant ne peut être accueilli ;

Sur les septième et huitième branches du moyen du pourvoi de la société Euralille et la sixième branche du moyen du pourvoi de la société Eiffage telles qu'elles figurent dans le mémoire respectif en demande de ces parties et sont reproduites en annexe de la présente décision :

Attendu que sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi ces griefs ne tendent en réalité qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation le pouvoir souverain des juges du fond qui appréciant la portée des pièces soumises à leur examen ont estimé que MM. B... et A... étaient bien les personnes physiques conceptrices des plans en cause ; que les griefs ne peuvent être accueillis ;

Et sur la neuvième branche du moyen du pourvoi de la société Euralille telle qu'elle figure dans le mémoire en demande de cette partie et est reproduite en annexe de la présente décision :

Attendu enfin qu'ayant relevé, par des constatations souveraines des éléments de preuve soumis à son appréciation, que la société Euralille avait participé étroitement aux faits dénoncés par les architectes pour la construction de la Tour IV, la cour d'appel en a justement déduit qu'elle avait engagé sa responsabilité à l'égard de ces derniers ; que le grief ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.