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Décisions

CA Paris, 16e ch. B, 6 avril 2006, n° 05/14979

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Caldi

Défendeur :

Lebourg (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Zavaro

Conseillers :

M. Lannuzel, M. Bouly de Lesdain

Avoués :

Me Cordeau, SCP Patricia Hardouin

Avocats :

Me Grandpierre-Hostein, Me Saada

TGI Paris, 18e ch. sect. 1, du 16 nov. 2…

16 novembre 2004

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé, en date du 10 mai 1995, M. Michel CALDI a consenti à M. Gilles LEBOURG et Mme Annie MALLET, son épouse, un bail en renouvellement pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 1994, portant sur des locaux à usage commercial avec habitation personnelle, destinés au commerce de 'sandwiches, boulangerie, pâtisserie, glaces, salon de thé, cafétéria, snack-grill room', sis à [...].

Les époux LEBOURG ont vendu leur fonds de commerce à la SARL BOULANGERIE DE L'ARBRE SEC suivant acte sous seing privé, en date des 4 et 7 mars 2002.

Par ordonnance rendue le 18 novembre 2002, le juge des référés du tribunal de grande instance de PARIS, saisi par M. CALDI, a constaté l'acquisition de la clause résolutoire, a ordonné l'expulsion des lieux loués de la SARL BOULANGERIE DE L'ARBRE SEC et l'a condamnée à payer à M. CALDI la somme de 17.455,22 euros à titre de provision sur les loyers impayés augmentés de la somme de 1.745,22 euros au titre de la clause pénale, en outre la somme de 9.936,75 euros au titre du terme échu le 1er octobre 2002.

Le 4 mars 2003, M. CALDI a déclaré au titre de cette ordonnance de référé sa créance au passif de la SARL BOULANGERIE DE L'ARBRE SEC, mise en liquidation judiciaire par jugement du 11 février 2003, et par assignation du 1er octobre 2003 a saisi le tribunal de grande instance de PARIS d'une demande en paiement contre les époux LEBOURG pris en qualité de garants du paiement de la dette due par la société cessionnaire du bail.

Par jugement contradictoire rendu le 16 novembre 2004, le tribunal a débouté M. CALDI de sa demande, l'a condamné aux dépens et au paiement de la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

M. CALDI a formé appel de ce jugement le 27 janvier 2005.

Dans le dernier état de ses écritures du 9 février 2006, il conclut à l'infirmation du jugement et à la condamnation des époux LEBOURG à lui verser la somme de 39.073, 58 euros au titre d'arriéré de loyers et charges augmentés de la clause pénale avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Il sollicite, en outre, la capitalisation des intérêts et la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par écritures du 13 février 2006, les époux LEBOURG ont conclu à la confirmation du jugement et à la condamnation de M. CALDI au paiement des sommes de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif et de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

A titre subsidiaire, ils ont conclu au sursis à statuer jusqu'à la décision à intervenir sur l'admission de la créance déclarée par M. CALDI au passif de la société BOULANGERIE DE L'ARBRE SEC.

M. CALDI soutient qu'en souscrivant l'acte de cession de leur fonds de commerce qui reprend la clause de garantie insérée au bail, les époux LEBOURG ont fait novation en renonçant au bénéfice d'un précédent accord avec le bailleur, formalisé suivant lettre du 10 mai 1995, par lequel ce dernier a relevé les époux LEBOURG de leur obligation de garantir, en cas de cession du bail, le paiement jusqu'à l'expiration du bail, des loyers et charges dus par le cessionnaire.

Les époux LEBOURG font valoir que les rédacteurs de l'acte de cession du fonds de commerce ont repris les énonciations du bail et la clause de garantie litigieuse dans l'ignorance de l'accord intervenu entre eux et M. CALDI le 10 mai 1995. Ils contestent une prétendue novation à cet accord et avoir renoncé au bénéfice de la dérogation qui leur a été consentie par M. CALDI à l'obligation de garantie solidaire du cédant envers le bailleur.

MOTIFS

Considérant que le bail précité conclu en renouvellement par M. CALDI et les époux LEBOURG, suivant acte sous seing privé, en date du 10 mai 1995, stipule au titre des obligations du preneur (15°) que celui-ci ne peut céder son droit au présent bail si ce n'est à son successeur dans le fonds de commerce et en restant solidairement responsable avec son cessionnaire tant du paiement du loyer que de l'exécution de toutes les clauses et conditions du présent bail ;

Qu'aux termes de l'acte de vente, en date des 4 et 7 mars 2002, de leur fonds de commerce à la SARL BOULANGERIE DE L'ARBRE SEC, incluant notamment le droit au bail, les époux LEBOURG déclarent expressément, conformément à la clause contenue dans le bail, se porter garants solidaires de leur cessionnaire pour le paiement des loyers et l'entière exécution des charges et conditions du bail pendant toute sa durée ;

Considérant que la lettre, en date du 5 mai 1995, adressée aux époux LEBOURG par M. CALDI et sur laquelle celui-ci a fait précéder sa signature de la mention manuscrite 'fait à PARIS le 10/05/95", a été établie dans les termes suivants :

'Votre bail vous oblige à rester solidairement responsable avec votre cessionnaire tant du paiement du loyer que de l'exécution de toutes les clauses et conditions.

J'accepte qu'exceptionnellement vous ne soyez pas tenus responsables solidaires de votre cessionnaire.

Cet avantage vous est donné à titre personnel, n'est pas transmissible et ne pourra en aucun cas être étendu à vos successeurs'.

Que les termes clairs et non équivoques de cette lettre ont manifestement pour objet, en cas de cession du bail et par dérogation à la clause de garantie solidaire prévue au bail, d'exonérer les époux LEBOURG de leur obligation envers le bailleur de garantir l'exécution des obligations du cessionnaire ;

Qu'à cet égard, les époux LEBOURG ont rappelé que cette exonération concomitante au renouvellement du bail leur avait été consentie en contrepartie d'une augmentation substantielle du loyer du bail renouvelé ;

Considérant que la renonciation à un droit ou la novation ne se présument pas ;

Que M. CALDI ayant formellement renoncé à la garantie solidaire des époux LEBOURG en cas de cession du bail, il est mal fondé à interpréter l'acte de cession du fonds de commerce, auquel il n'a d'ailleurs pas été partie même si cet acte doit lui être signifié en sa qualité de bailleur, comme valant renonciation par les époux LEBOURG à l'exonération qu'il leur a ainsi consentie, alors que non seulement les rédacteurs de l'acte de cession ont pu ignorer l'accord dérogatoire intervenu entre M. CALDI et les époux LEBOURG, mais en tout état de cause, le rappel dans l'acte de cession du fonds de commerce d'une clause du bail et de ses effets n'implique nullement la résolution de l'accord y dérogeant intervenu par acte séparé entre le cédant et le bailleur ;

Considérant qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement ;

Considérant que les époux LEBOURG n'ont pas caractérisé, et en tout cas, prouvé une faute imputable à M. CALDI et de nature à faire dégénérer en abus l'exercice d'une voie de recours ;

Qu'ils seront déboutés de leur demande en dommages-intérêts pour appel abusif ;

Qu'il est néanmoins équitable de leur allouer la somme de 1.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant :

Déboute les époux LEBOURG de leur demande en dommages-intérêts pour appel abusif ;

Condamne M. CALDI à payer aux époux LEBOURG la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne M. CALDI aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.