CA Versailles, 1re ch. sect. 1, 19 janvier 2018, n° 17/01051
VERSAILLES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
B. S., P. R.
Défendeur :
SA LA FRANCAISE DES JEUX, SAS GREY PARIS
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Monsieur Alain PALAU
Conseillers :
Madame Anne LELIEVRE, Madame Nathalie LAUER
Avocats :
Me Franck L., Me Bertrand R. , Me Martine D.
Vule jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 3 avril2014 qui a statué ainsi :
- déboute M. Philippe R. et M. Bernard S. de leurs demandes,
- déboute M. Pierre C. et la société Grey Paris de leurs demandes reconventionnelles en dommages et intérêts,
- rejette toutes autres demandes des parties,
- condamne in solidum M. R. et M. S. à payer la somme de 3 000 euros à chacun des défendeurs : la SA La Française des Jeux, la SAS Grey Paris, la société Wanda Productions et M. Pierre C., en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par les avocats de la cause, chacun pour ce qui le concerne, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu la déclaration d'appel de MM. S. et R. en date du 23 avril 2014.
Vu l'ordonnance du 19 mars2015 du conseiller de la mise en état déclarant irrecevable l'appel provoqué formé par la société La Française des Jeux à l'encontre de la société Wanda Productions et, par voie de conséquence, l'appel provoqué formé par la société Wanda Productions à l'encontre de M. C..
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 2 juillet2015 qui a confirmé cette ordonnance.
Vu l'ordonnance du 3 mars2016 ordonnant la radiation de la procédure dans l'attente de l'issue du pourvoi en cassation interjeté contre cet arrêt par la société Française des Jeux.
Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 13 octobre2016 ayant déclaré irrecevable le pourvoi.
Vu les dernières conclusions en date du 4 septembre 2017 de MM. S. et R. qui demandent à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- constater la qualité d'auteurs ou à tout le moins de co-auteurs, de MM S. et R. sur les personnages « le Cochon Dédé » et « Brandon et Brenda »,
- condamner solidairement la société Grey Paris et la société Française des Jeux à leur payer les sommes suivantes :
* 1 500 000 euros chacun à titre d'indemnité pour l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux pour l'exploitation du personnage "le cochon Dédé",
* 500 000 euros chacun à titre d'indemnité pour l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux pour l'exploitation des personnages "Brandon et Brenda",
- subsidiairement, nommer tel expert avec mission de :
* se rendre dans les locaux de la société Française des Jeux,
* se voir remettre tous documents utiles à sa mission,
* déterminer le chiffre d'affaires et la marge brute totale réalisée par la société Française des Jeux sur les jeux Dédé et Vegas-Brandon et Vegas-Brenda,
* donner tous éléments comptables liés à ces jeux,
* donner son avis sur la rémunération pouvant revenir aux défendeurs sur ses jeux au titre de leur droit d'auteur,
- condamner solidairement la société Française des jeux et l'Agence Grey Paris à leur payer la somme de 50'000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la société Grey Paris et la société Française des Jeux de leurs demandes reconventionnelles,
- condamner solidairement la société Grey Paris et la société Française des jeux aux dépens dont distraction au profit de Maître L., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions en date du 6 septembre 2017 de la SA La Française des Jeux qui demande à la cour de :
A titre principal,
- constater que La Française des Jeux a acquis l'ensemble des droits nécessaires à l'exploitation des personnages « Dédé » et « Brandon & Brenda » auprès des sociétés Grey Paris et Wanda Production,
En conséquence,
- mettre hors de cause La Française des Jeux de la présente instance,
A titre subsidiaire,
- constater que les personnages « Dédé » et « Brandon & Brenda » n'ont pas été divulgués ni exploités sous les noms de MM R. et S.,
- dire et juger que MM R. et S. ne rapportent pas la preuve de leur qualité d'auteur des personnages « Dédé » et « Brandon & Brenda »,
En conséquence,
- confirmer le jugement attaqué dans l'ensemble de ses dispositions,
- débouter MM R. et S. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre plus subsidiaire,
- dire et juger que les personnages « Dédé » et « Brandon & Brenda » constituent des œuvres collectives et non des œuvres de collaboration,
- dire et juger qu'en tout état de cause, MM R. et S. ont nécessairement cédé leurs droits d'auteur à leur employeur, Grey Paris, en leur qualité de salariés,
En conséquence,
- dire et juger que MM R. et S. ne disposent pas du moindre droit d'auteur sur les personnages « Dédé » et « Brandon & Brenda »,
- débouter MM R. et S. de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre infiniment subsidiaire,
- dire et juger que MM R. et S. ne justifient pas de leur prétendu préjudice et des mesures tendant à le réparer,
- dire et juger que la demande d'expertise de MM R. et S. vise à pallier leur carence dans l'administration de la preuve,
En conséquence,
- débouter MM R. et S. de l'ensemble de leurs demandes visant à la réparation de leur prétendu préjudice,
- débouter MM R. et S. de leur demande d'expertise judiciaire,
A titre très infiniment subsidiaire,
- constater qu'en application des clauses de garanties valablement stipulées aux différents contrats conclus entre Grey Paris et la Française des Jeux, Grey Paris doit garantir La Française des Jeux contre toute réclamation ou action relative aux personnages « Dédé » et « Brandon et Brenda »,
En conséquence,
- condamner Grey Paris à indemniser intégralement La Française des Jeux contre tout préjudice, direct ou indirect, qu'elle subirait du fait du présent litige engagé à son encontre, en ce compris contre toute condamnation éventuellement prononcée à son encontre ainsi que tous les frais d'avocats et conseils engagés pour les besoins du présent litige,
- débouter la société Grey Paris de ses prétentions destinées à échapper à sa garantie à l'égard de La Française des Jeux,
En tout état de cause,
- condamner MM R. et S. à verser à La Française des Jeux la somme de 20 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner MM R. et S. aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ceux le concernant, au profit de Maître R., avocat au Barreau de Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières écritures en date du 6 octobre 2017 de la SAS Grey Paris qui demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté la société Grey Paris en ses demandes reconventionnelles pour procédure abusive,
- infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande reconventionnelle de la société Grey Paris,
En conséquence,
- dire et juger que MM S. et R. ont fait preuve d'une mauvaise foi caractérisée en attendant dix années pour introduire la présente action et ont introduit la présente procédure de manière abusive,
- condamner MM S. et R. solidairement à verser à la société Grey Paris la somme de 200 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait infirmer les termes du jugement du 3 avril 2014 et dire MM S. et R. recevables en leur demandes, - dire et juger que MM S. et R. ont tacitement cédé à Grey Paris l'ensemble des droits d'auteur attachés aux éventuelles œuvres créées par eux dans le cadre de leurs contrats de travail, et plus précisément des éventuels droits d'auteur qu'ils détenaient sur les personnages du cochon « Dédé », de « Brandon » et de « Brenda »,
En conséquence,
- débouter MM S. et R. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
A titre très subsidiaire, si la cour devait considérer que MM S. et R. sont bien les auteurs des personnages « Dédé », « Brandon », et « Brenda »,
- dire et juger que l'action de MM S. et R. est partiellement prescrite pour les faits commis antérieurement au 18 octobre 2005 et les déclarer, dès lors, irrecevables à agir sur cette période, en application des articles 2270 du code civilet 122 du code de procédure civile,
- dire et juger MM.R. et S. mal fondés en leurs demandes indemnitaires postérieures au 18 octobre 2005, ou à défaut, sur l'ensemble de leurs demandes, ne justifiant pas du préjudice qu'ils allèguent,
En conséquence,
- débouter MM. R. et S. de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,
A titre infiniment subsidiaire, si la cour devait considérer que MM. R. et S. sont bien les auteurs des personnages « Dédé », « Brandon », et « Brenda », et reconnaître le principe même de leur indemnisation :
- constater que Grey Paris n'a perçu aucun droit afférent à l'exploitation du cochon « Dédé » sur les tickets de grattage,
En conséquence,
- débouter MM. R. et S. de leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Grey Paris, au titre de la contrefaçon de droit d'auteur sur le personnage du cochon « Dédé » sur les tickets de grattage,
A titre très infiniment subsidiaire, sur l'appel en garantie formulé par La Française des Jeux dirigé à l'encontre de Grey Paris :
- constater que le contrat conclu le 6 juin 2002 entre Grey Paris et La Française des Jeux ne porte pas sur le personnage « Dédé » mais sur l'environnement des personnages,
En conséquence,
- débouter La Française des Jeux de son appel en garantie concernant le ticket de grattage du jeu « Dédé »,
En tout état de cause :
- condamner MM R. et S. solidairement à verser à la société Grey Paris la somme 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner MM R. et S. aux entiers dépens d'instance et d'action dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Paris Versailles, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 12 octobre 2017.
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FAITS ET MOYENS
MM Philippe R. et Bernard S. ont occupé, au sein de la SAS Grey Paris, agence de publicité, les postes respectivement de directeur artistique et concepteur rédacteur du 7 juin 1994 jusqu'au mois de décembre 2006, date à laquelle ils ont été licenciés, un protocole d'accord ayant mis fin au contentieux en résultant.
A l'occasion de cette activité consistant à imaginer et créer des campagnes de publicité, ils ont participé à la conception, notamment, de films publicitaires pour des jeux de grattage organisés par la société Française des Jeux, en 2000 et en 2002, mettant en scène un cochon dénommé par la suite "Dédé", d'une part et, d'autre part, deux personnages originaux appelés "Brandon et Brenda".
Soutenant que ces personnages ont été exploités par la société FDJ pour de nouveaux jeux à partir de l'année 2008 au mépris de leurs droits d'auteur, MM R. et S., après avoir vainement adressé une réclamation à cette société, le 30 août 2010, et à la société Grey Paris le 20 septembre 2010, ont fait assigner ces deux sociétés, par actes du 3 novembre2010, afin d'obtenir réparation de l'atteinte ainsi portée à leurs droits patrimoniaux d'auteur devant le tribunal de grande instance de Nanterre.
Par acte en date du 5 décembre2011, la société FDJ a fait assigner en intervention forcée la société Wanda Productions, productrice du film publicitaire du "Jeu de l'Oie".
Par acte du 28 juin2012, la société Wanda Productions a appelé en intervention forcée M. Pierre C..
Ces procédures ont été jointes et le tribunal a prononcé le jugement déféré.
Aux termes de leurs écritures précitées, MM R. et S. rappellent la convention collective qui définit leurs fonctions'et déclarent que leur site mentionne qu'ils sont les auteurs de plus de 250 films publicitaires d'importants annonceurs.
Ils exposent qu'en octobre 2000 ils ont été chargés d'une campagne de publicité pour la création d'un jeu de grattage pour la Française des Jeux intitulé « le jeu de l'Oie'» et qu'ils ont alors créé et imaginé un personnage particulier, un cochon, dont le nom devait devenir par la suite, «'Dédé'», devenu un personnage culte.
Ils indiquent que, deux ans plus tard, la société Française des Jeux a repris ce personnage pour en faire le héros d'un autre jeu de grattage intitulé «'Dédé'» qui a été commercialisé avec grand succès pendant dix ans.
Ils exposent, en outre, que, pour le même client, ils ont conçu et imaginé une autre campagne publicitaire pour un autre jeu de grattage intitulé «'Vegas'» pour lequel ils ont créé deux personnages originaux appelés «'Brandon'» et «'Brenda'» reproduits dans la campagne.
Ils indiquent que, depuis 2008, la société Française des Jeux a lancé de nouveaux jeux qui en sont directement inspirés, intitulés «'Vegas - Brandon'» et «'Vegas - Brenda'», qui ont également connu un très grand succès.
A titre liminaire, ils contestent que la présente affaire soit liée à la propriété intellectuelle d'une création publicitaire.
Ils affirment qu'elle concerne des droits d'auteur sur des personnages créés dans le cadre d'une campagne publicitaire mais qui sont devenus des produits commerciaux sous forme de jeux de grattage commercialisés par la société Française des Jeux soit le cochon «'Dédé'» et son univers, issu de la publicité «'Jeu de l'Oie'», et les personnages «'Brandon'» et «'Brenda'» et leur univers, issus de la publicité «'Vegas'».
Ils estiment donc que trois questions se posent': ces personnages constituent-ils des œuvres'' Si oui, en sont-ils les auteurs ou co- auteurs'' Si oui, ont-ils cédé leurs droits''
Ils soutiennent que le « cochon Dédé » et « Brandon et Brenda » constituent des œuvres au sens du code de la propriété intellectuelle.
Ils rappellent l'article L 112-1 du code de la propriété intellectuelle et la jurisprudence qui considère qu'une œuvre est originale si elle est empreinte de la personnalité et de la sensibilité de son auteur, l'originalité reposant donc moins sur sa "nouveauté" que sur l'apport intellectuel de son auteur.
Ils considèrent que le cochon «'Dédé'» tel qu'il apparaît sur les tickets de la Française des Jeux avec son univers propre est une œuvre indépendante et différente de la création publicitaire, dès lors qu'il présente à l'évidence un caractère d'originalité.
Ils estiment que « le cochon Dédé » et « Brandon et Brenda » font ressortir l'empreinte de leurs auteurs qui ont su non seulement créer l'aspect illustré de leurs personnages mais également leur univers et leurs noms.
Ils contestent qu'il s'agisse de la simple représentation d'un cochon.
Ils exposent qu'il est une création artistique, née de leur imagination puis de l'illustration en 3D réalisée par Monsieur C., immédiatement identifiable et qui ne ressemble à aucune autre.
Ils invoquent sa morphologie figurant dans les croquis de M. R. - et non de Mme D. - qui démontre qu'il n'est nullement un cochon réaliste compte tenu de ses rondeurs, son regard légèrement exorbité, sa gestuelle et sa façon de se déplacer et de se tenir debout.
Ils invoquent également ses dialogues et sa façon particulière de s'exprimer. Ils soulignent à cet égard la confusion créee par homophonie entre «'Dédé'» (diminutif d'André) et «'des dés'» (pièces du jeu).
Ils déclarent que, pour la première fois, on voyait un cochon simplet, en 3D, en décors réels.
Ils ajoutent que, contrairement à l'usage, les films sont très dialogués.
Ils se prévalent d'un article de la revue spécialisée du cinéma "Synopsis".
Ils soulignent que, dans la forme, ils ont fait le choix d'animation d'utiliser des personnages en 3D mais dans des décors réels comme ils l'avaient déjà fait et de tourner caméra à l'épaule, sur la suggestion de M. C., style "camescope", pour donner un côté amateur à l'ensemble.
Ils invoquent la réponse - dont ils sont les auteurs - faite aux oies qui essaient patiemment de lui expliquer la règle : « Mais c'est qui Dédé ' Pourquoi j'irais gratter Dédé ' » et déclarent qu'apparemment simpliste, ce gag est une mécanique de précision à l'efficacité imparable utilisé pour la première fois dans une œuvre audiovisuelle.
Ils estiment que cette réplique, devenue culte, son apparence physique, sa bonhommie font de «'Dédé'» une œuvre.
Ils soulignent que les contrats signés entre les sociétés défenderesses montrent qu'il s'agit d'une œuvre constituée d'un cochon et de son nom puisque les tickets portent bien le nom «'Dédé'».
Ils en infèrent qu'elles ont admis explicitement que le cochon «'Dédé'» est une œuvre susceptible de générer des droits d'auteur.
Ils en concluent qu'il ne peut être contesté que les personnages « Dédé'» et «'Brandon'» et «'Brenda » constituent bien des œuvres artistiques.
Ils soutiennent qu'ils sont les co-auteurs des personnages.
Ils déclarent qu'ils ont imaginé et créé les personnages et leur univers et contestent que «'Dédé'» soit la seule création de M. C., le réalisateur du film.
Ils relèvent que la société Wanda Productions reconnait qu'il n'est pas l'auteur du dessin mais simplement l'auteur de la transformation de ce dessin en un personnage 3 D et déclarent que personne ne prétend que M. C. a imaginé le personnage du cochon, sa personnalité et son nom et encore moins qu'il a réalisé la reproduction du cochon figurant sur tous les bulletins de jeu de la FDJ.
Ils affirment ne pas contester l'apport de M. C. ni sa qualité d'auteur mais déclarent être co-auteurs.
Ils font valoir qu'ils ont imaginé l'idée de créer un cochon, donné à ce cochon le nom de «'Dédé'», dessiné ce cochon de façon originale avec de multiples images et jeux de mots notamment pour les tickets de la FDJ, donné à ce cochon une personnalité et un caractère particulier que l'on retrouve sur les différents tickets de jeu, écrit les scénarii de tous les films, dessiné et imaginer les multiples représentations du cochon et les jeux de mot sur les tickets.
Ils font également valoir que son originalité est liée à son physique, en ce compris son adaptation en 3D due à M. C., mais surtout à son caractère « débonnaire et idiot », ainsi qu'au jeu de mots réalisé sur son nom.
Ils déclarent qu'il en est de même pour «'Brandon'» et «'Brenda'» pour lesquels M. C. n'est pas intervenu.
Ils excipent également des contrats signés entre l'agence et la société Française des Jeux les 6 juin 2002 et 8 avril 2003 destinés notamment à régler les problèmes de cession des droits sur le cochon «'Dédé'», démontrant ainsi que les parties avaient non seulement conscience qu'il s'agissait d'une œuvre mais également que des droits étaient dus sur cette œuvre.
Ils ajoutent que M. C. n'est intervenu que pour réaliser le premier ticket.
Ils soutiennent qu'ils n'ont pas participé à une œuvre collective.
Ils rappellent la définition de celle-ci donnée par l'article L 113-2 du code de la propriété intellectuelle et des arrêts intervenus dans le domaine de la publicité.
Ils considèrent que l'œuvre est collective si elle n'a pas été créée sur l'initiative d'une personne morale qui l'édite, ce qui est effectivement le cas, si la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble, ce qui n'est pas le cas, et si cette élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle a été conçue, ce qui n'est pas non plus le cas.
Ils font état d'un apport unique et exclusif.
Ils rappellent que, dans la convention collective susvisée, seuls les directeurs artistiques et les rédacteurs concepteurs ont une compétence de création.
Ils déclarent que dès lors qu'une équipe créative (le directeur-artistique et le rédacteur concepteur) se voit attribuer la responsabilité de la campagne d'un annonceur, ceux-ci sont les seuls auteurs de la création au sein de l'agence de publicité.
Ils excipent d'attestations, non contestées, et des relevés des heures comptabilisées par l'agence.
Ils soulignent que M. B., co-fondateur de l'agence et directeur de création de l'agence à l'époque, confirme leur qualité d'auteurs.
Ils ajoutent que la paternité de ces personnages a été reconnue par l'ensemble de la profession et de la presse spécialisée sans que l'Agence Grey ne le conteste.
Ils font état de l'utilisation non publicitaire de l'oeuvre.
Ils affirment que leur oeuvre ne se fond pas dans l'ensemble en vue duquel elle a été conçue.
Ils déclarent qu'elle "a été conçue" dès le moment où la société Française des Jeux et l'Agence C.-B., désormais Grey Paris, ont signé le contrat dont l'objet est la création d'une campagne publicitaire pour le lancement du Jeu de l'Oie et indiquent qu'il n'y est nullement question de créer un nouveau jeu de grattage, avec un nouveau nom et un nouvel univers visuel.
Ils en infèrent que le ticket "Dédé" et ses versions saisonnières ne peuvent pas faire partie de l'œuvre collective "Jeu de l'Oie".
Ils estiment qu'il ne fait pas partie non plus de l'œuvre collective "Dédé" formalisée par le deuxième contrat signé entre ces deux sociétés car ce contrat ne concerne pas la création d'un nouveau jeu de grattage dont l'agence de publicité devrait trouver le nom ou l'univers visuel mais la création d'une campagne publicitaire pour un nouveau jeu de grattage dont l'univers visuel et le nom existe déjà : "Dédé".
Ils rappellent que les jeux et les tickets de la société Française des Jeux ne sont pas des produits dérivés des campagnes publicitaires mais des produits commerciaux totalement indépendants utilisant les personnages créés par eux.
Ils en concluent qu'ils doivent être considérés comme les réels auteurs des œuvres qui ne sont donc pas le résultat d'une œuvre collective de l'Agence Grey.
Ils soutiennent qu'ils ont participé à une œuvre de collaboration avec M. C. qui est, selon l'article L 113-3 du code de la propriété intellectuelle, «'la propriété commune des coauteurs ».
Ils exposent qu'ils ont eu pour mission de trouver et mettre en pratique une idée de campagne publicitaire pour un nouveau jeu intitulé alors « Jeu de l'oie » que "L'idée" a été de mettre en scène un univers rural, avec des personnages animaliers, sur un ton humoristique, qu'elle a été matérialisée par eux par l'écriture de scénarii de films, par des dessins illustrant les personnages, les lieux et le découpage cinématographique des films, ce découpage étant appelé "story-board".
Ils exposent également que les premiers documents qui ont alors été établis sont les croquis du «'story-board'» réalisés par eux qui ont été télécopiés le 6 décembre 2000 au "roughwoman" (Mme D.) chargé de le dessiner en couleurs, afin de les présenter à la FDJ ce que confirme celle qui a envoyé la télécopie, Mme B..
Ils précisent que le rôle du'«'roughman'» ou «'roughwoman'» est, selon un site internet spécialisé, de « croquer des esquisses et dessins pour concrétiser l'idée du directeur artistique ou le concept développé par les créatifs lors d'une campagne publicitaire ».
Ils en concluent que le «'roughman'» ne peut revendiquer aucun droit et n'a qu'un rôle d'intermédiaire.
Ils se prévalent des contenus des télécopies envoyées et déclarent que "la création" est déjà très détaillée par eux, le jeu de mot qui a donné son nom au futur jeu à gratter "Des dés // Dédé" étant déjà présent, de même que le cochon simplet.
Ils dressent un comparatif des croquis du «'story-board'» réalisé par eux, du «'story- board'» couleur (de Mme Suzy D.) et du film TV et font valoir que tous les plans (sauf un), tous les cadrages et la mise en scène sont déjà présents et très clairement définis dans les croquis.
Ils soulignent que c'est sur la seule base de ces dessins et de ces écrits que la société Française des Jeux a acheté le personnage et que ce n'est qu'après l'achat de cette création par elle qu'ils ont consulté différents réalisateurs et des maisons de production susceptibles de pouvoir fabriquer cette création.
Ils indiquent qu'ils ont choisi M. C., qui travaillait avec la société de production Wanda, qui n'était pas connu à l'époque mais dont le talent résidait dans la capacité à transformer des images en 3D, technique qui était alors en développement.
Ils ajoutent qu'ils sont intervenus du début à la fin de la réalisation et de la production et de la post production du film.
Ils affirment qu'aucune pièce n'est produite aux débats pour montrer le prétendu travail que M. C. aurait effectué dans la création et l'imagination du cochon et de son univers.
Ils déclarent qu'au contraire, la forme des joues, des oreilles, du groin, les yeux en forme de billes sont déjà dans leurs croquis et, en ce qui concerne les yeux en forme de billes et exorbités, façon "cartoon" décrits par M. C., se prévalent de leurs créations en 1990, en tant que créatifs avec les studios Pixar pour la VW Polo.
Ils ajoutent que, si M. C. a bien réalisé le film publicitaire, il n'est pas intervenu pour la création et la réalisation des supports commerciaux, à savoir les bulletins de jeu de la FDJ.
Ils affirment que, concernant "Brandon et Brenda", le processus de matérialisation de l'idée a été identique même s'il ne s'agit pas de personnages animés en 3D mais de vrais acteurs.
Ils en concluent que ces personnages précités constituent bien des œuvres dont ils sont co-auteurs.
Ils soutiennent qu'ils n'ont jamais cédé leurs droits.
Ils rappellent que leurs contrats de travail ne comprennent aucune cession de leurs droits d'auteur et qu'ils n'ont jamais perçu la moindre rémunération à cet égard.
Ils rappellent également, en ce qui concerne la transaction qu'ils ont signée lors de leur licenciement, qu'une transaction est limitée aux clauses et conditions qui y sont expressément inscrites et qui ont été acceptées entre les parties et relèvent que la transaction signée par eux ne mentionne à aucun moment leurs droits d'auteur.
Ils en concluent que ceux-ci sont exclus de la transaction.
Ils ajoutent à titre superfétatoire que l'utilisation des personnages a perduré après la signature de la transaction.
Ils réclament donc le paiement de leurs droits d'auteur.
Ils considèrent que les deux intimées sont solidairement responsables de ces droits.
Ils font valoir que la société Française des Jeux a exploité pendant plus de dix ans le jeu «'Dédé'» ainsi que, pendant au moins trois ans, les jeux «'Brandon'» et «'Brenda'» sans avoir versé le moindre droit d'auteur à ses créateurs.
Ils indiquent que, selon le magazine Stratégies, le chiffre d'affaires du cochon «'Dédé'» pour la première année a été de l'ordre de 90 millions d'euros.
Ils retirent le pourcentage redistribué aux joueurs (de 60 % pour «'Dédé'») et les frais divers et en concluent à un bénéfice net annuel de la société Française des Jeux, pour ce seul jeu, à au moins 20 millions d'euros, ce qui représente, sur 10 ans, au moins 200 millions d'euros.
Ils estiment que les bénéfices ont été les mêmes pour les jeux «'Brandon'» et «'Brenda'».
Ils réclament donc le paiement à chacun des sommes de 1 500 000 euros et de 500 000 euros à titre d'indemnité due pour l'atteinte portée à leurs droits patrimoniaux et affirment que cette somme représente à peine 1 % du bénéfice réalisé par la société sur les jeux concernés.
A titre subsidiaire, ils sollicitent le prononcé d'une expertise.
Ils contestent toute procédure abusive.
Aux termes de ses écritures précitées, la société Française des Jeux expose qu'au cours de l'année 2001, elle a mis sur le marché un nouveau jeu de grattage intitulé le « Jeu de l'Oie », que le film publicitaire réalisé pour la promotion de ce jeu a mis notamment en scène un cochon, prénommé « Dédé », qu'elle a lancé au cours de l'année 2002, le jeu de grattage « Dédé » sur le ticket duquel apparaît le personnage du cochon qui figurait initialement dans le film publicitaire du « Jeu de l'Oie'» , qu'en 2002, elle a également lancé un nouveau jeu de grattage intitulé « Vegas », que le film publicitaire réalisé pour ce jeu mettait en scène deux personnages : « Brandon » et « Brenda » et qu'au cours de l'année 2008, elle a lancé une série limitée du jeu « Vegas » intitulée « Vegas Brandon/Vegas Brenda » et donnant lieu à deux tickets différents.
Elle expose également qu'elle a confié à la société Grey Paris la réalisation des campagnes publicitaires du « Jeu de l'Oie », du jeu « Dédé », ainsi que du jeu « Vegas ».
Elle excipe de contrats conclus avec la société Grey Paris et avec la société de production Wanda Productions lui permettant également d'acquérir les droits sur les personnages.
Elle en conclut qu'elle a acquis l'ensemble des droits nécessaires à l'exploitation des personnages en cause.
Elle déclare qu'elle n'a jamais contesté que les personnages «'Dédé'», «'Brandon'» et «'Brenda'» constituaient des œuvres originales.
Elle demande sa mise hors de cause au motif qu'elle a acquis les droits nécessaires à l'exploitation de ces personnages et déclare être un tiers acquéreur de bonne foi.
En ce qui concerne «'Dédé'», elle se prévaut du contrat conclu le 14 février 2001 avec la société Grey Paris aux termes duquel elle a acquis l'ensemble des droits de propriété intellectuelle afférents à la campagne publicitaire du «'Jeu de l'Oie'» conçue par Grey Paris et, notamment, le «'story board'» élaboré par elle en vue de la réalisation du film publicitaire.
Elle se prévaut également du contrat du 6 juin 2002 aux termes duquel elle a acquis auprès de la société Grey Paris les droits d'auteur relatifs au ticket du jeu «'Dédé'» et les éléments verbaux et graphiques le composant.
Elle se prévaut enfin du contrat du 20 décembre 2002 aux termes duquel elle a acquis auprès de la société Wanda Productions, en présence de M. C., les droits portant sur les personnages et les visuels créées pour la campagne publicitaire du «'Jeu de l'Oie'» et du jeu «'Dédé'» en ce compris les droits d'exploitation du personnage «'Dédé'» dont la représentation graphique a été créée par M. C..
Elle précise qu'en application de ce contrat, elle verse à la société Wanda Productions une rémunération annuelle pour toute exploitation du personnage «'Dédé'».
Elle souligne que cette société a reconnu, en première instance, qu'elle lui avait cédé «'tous les droits de propriété incorporelle sur les représentations graphiques (deux oies, un cochon, une vache) créés pour les besoins des films publicitaires et dont les visuels étaient annexés au contrat » et ce, afin de « permettre sa reproduction sur des supports commerciaux, en particulier des tickets de grattage réalisés et commercialisés'».
Elle en conclut qu'elle dispose de l'ensemble des autorisations nécessaires afin d'exploiter le personnage « Dédé », de sorte qu'aucune faute ne saurait lui être reprochée.
En ce qui concerne « Brandon et Brenda », elle se prévaut du contrat du 11 mai 2003 par lequel elle a acquis l'ensemble des droits attachés aux campagnes publicitaires du jeu « Vegas » réalisées par la société Grey Paris.
Elle se prévaut également du contrat du 13 août 2008 par lequel elle a acquis auprès d'elle les droits attachés aux prénoms « Brandon » et « Brenda », ainsi qu'aux éléments graphiques et sonores de décor et de stylisme issus des films publicitaires et ce, afin de pouvoir les exploiter librement dans le cadre de la série limitée du jeu « Vegas » intitulée « Vegas Brandon/Vegas Brenda ».
Elle se prévaut enfin du contrat du 12 février 2009 par lequel elle a acquis auprès d'elle l'ensemble des droits lui permettant d'exploiter librement le concept et la signature publicitaires « Brandon » et « Brenda ».
Elle en conclut qu'elle dispose de l'ensemble des autorisations nécessaires afin d'exploiter les personnages « Brandon » et « Brenda'» de sorte qu'aucune faute ne saurait lui être reprochée.
Elle conclut donc au rejet des demandes.
Subsidiairement, elle les estime mal fondées.
Elle soutient que MM. R. et S. n'ont pas la qualité d'auteurs des personnages « Dédé » et « Brandon et Brenda ».
En ce qui concerne «'Dédé'», elle s'associe aux écritures de la société Grey Paris corroborant le fait qu'ils ne démontrent pas avoir été les auteurs du personnage « Dédé ».
Elle rappelle l'article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle et affirme que les appelants ne versent aucune preuve de nature à établir leur supposée qualité d'auteur du personnage « Dédé ».
Elle relève que les tickets de jeux «'Dédé'» ne mentionnent à aucun endroit le nom des appelants et ne comportent aucune signature ou élément permettant de les identifier comme auteurs.
Elle estime inopérantes les pièces concernant d'autres projets publicitaires.
Elle relève que les articles de presse invoqués mentionnent que le personnage « Dédé » aurait précisément été créé par l'agence Grey Paris et M. C. mais ne contient aucune référence à eux.
Elle souligne que l'œuvre du personnage « Dédé » a été exclusivement divulguée sous le nom de l'agence Grey Paris.
Elle indique que les «'story boards'» relatifs aux publicités pour les jeux « Jeu de l'Oie » et « Dédé » ne font pas apparaître le nom des appelants et que leur signature n'y est pas apposée.
Elle en infère qu'aucun élément ne permet de savoir si ces «'story boards'» émanent d'eux.
Elle souligne qu'apparait au contraire la mention « De C. B. » et qu'ils comportent 3 écritures différentes ce qui implique nécessairement un travail collectif de plusieurs personnes.
Elle ajoute que le «'story-board'» intitulé « Le Puit 30' » est une simple copie, très simplifiée, du «'story board'» adressé par la société Wanda Productions et M. C. à la société C. B. Grey le 15 décembre 2000.
Elle critique chacune des attestations, de pure complaisance ou inopérantes.
Elle s'étonne de celle de M. B. qui représentait la société Grey Paris lors de la signature du contrat du 6 juin 2002 indiquant, en préambule, que le personnage de « Dédé » avait originellement été « dessiné par M. C.'».
Elle réfute également le témoignage de Mme B. qui travaille désormais pour les appelants et dont l'attestation comporte des annexes ni datées, ni signées de sorte qu'il est impossible de déterminer de qui elles émanent.
Elle en conclut que les appelants ne démontrent pas leur qualité d'auteur.
Elle soutient que le personnage «'Dédé'» a été créé par M. C. comme celui-ci et la société Wanda Productions l'ont conclu en première instance.
Elle déclare qu'il a réalisé les premières esquisses du personnage « Dédé » en 2000, alors qu'elle n'a mandaté la société Grey Paris, au sein de laquelle étaient employés les appelants pour la réalisation du ticket de jeu « Jeu de l'Oie », que le 8 janvier 2001.
Elle se prévaut de courriers de sa part, d'une attestation, d'articles de presse et d'un «'Shooting Brief'» adressé le 8 janvier 2001 aux équipes de la société Grey Paris.
Elle indique qu'en sa qualité de créateur du personnage Dédé, il a cédé les droits d'auteur qu'il détenait à la société Wanda Productions par un contrat de mai 2002 et que celle-ci les lui a cédés le 20 décembre 2002.
Elle cite ces contrats.
Elle en conclut que M. C. a la qualité d'auteur sur le personnage « Dédé » et que MM R. et S. n'en sont pas les créateurs.
En ce qui concerne «'Brandon'» et «'Brenda'», elle affirme que les appelants ne tentent pas de démontrer leur qualité de co-auteurs, se contentant d'indiquer que «'ce serait la même chose'».
Elle relève qu'ils ne produisent aucun croquis, aucun «'story board'», aucun dessin manuscrit qui aurait été imaginé, dessiné ou signé par eux.
Elle observe que les tickets de jeu « Vegas », un article de presse relatif à ce jeu ou encore des captures d'écrans de la publicité relative à ce jeu ne comportent ni le nom des appelants, ni leur signature.
Subsidiairement, elle soutient qu'ils ne disposent d'aucun droit individuel sur ces œuvres.
Elle affirme que la création des personnages litigieux constitue une œuvre collective et indique qu'ils ne le contestaient pas en première instance.
Elle souligne qu'il résulte du contrat du 20 décembre 2002 que le personnage «'Dédé'» a fait l'objet d'un contrat signé par elle.
Elle rappelle la définition de l'œuvre collective donnée par l'article L113-2 du code de la propriété intellectuelle et en conclut qu'une œuvre collective se caractérise par 3 éléments distincts et cumulatifs soit l'initiative d'une personne physique ou morale, une œuvre plurale dans laquelle les contributeurs se fondent dans l'ensemble en vue duquel elles ont été réalisées et une divulgation sous le nom de l'initiateur.
Elle cite des jugements et arrêts.
En ce qui concerne le personnage «'Dédé'», elle déclare qu'il est un élément faisant partie intégrante d'œuvres publicitaires conçues par la société Grey Paris pour la promotion des jeux « Jeu de l'Oie » et « Dédé ».
Elle rappelle qu'elle a expressément commandé la création d'un tel personnage à l'agence et qu'aux termes du contrat, elle assurait le contrôle et la validation des créations proposées par elle.
Elle souligne que, lorsqu'elle a «'commandé'» à la société Wanda Productions le film publicitaire pour le « Jeu de l'Oie », il était expressément précisé que « le ou les films réalisés constituent une œuvre collective réalisée à l'initiative de l'annonceur qui, à ce titre, est titulaire des droits incorporels ».
Elle en conclut que son rôle d'initiative ne fait aucun doute.
Elle estime que le caractère plural de l'œuvre ne souffre également d'aucune difficulté.
Elle fait valoir que, dès la signature du contrat du 14 février 2001, l'agence Grey Paris a indiqué que, pour exécuter sa mission, elle s'entourerait « d'une équipe commerciale responsable de l'étude, de la réalisation, du contrôle et de la bonne fin des opérations publicitaires qui lui sont confiées, d'une équipe responsable de la création et de la conception, d'une équipe responsable de la stratégie média, d'une équipe responsable de la production artistique, graphique et audiovisuelle'».
Elle considère donc que MM. R. et S. ont participé à la stylisation du personnage « Dédé » au sein d'un groupe de création, de telle manière qu'il est impossible de déterminer la part de chacun sur ledit dessin.
Elle excipe du «'shooting brief'» du 8 janvier 2001d'où il résulte que la création du personnage a nécessité l'intervention d'un chef de groupe, d'un chef de produit, d'un directeur artistique (M. R.), d'un rédacteur (M. S.) et d'un «'T.V. Producer'» étant précisé que le chef de groupe et le chef de produit ne sont pas des collaborateurs de l'agence de publicité mais des collaborateurs de la société FDJ.
Elle affirme en outre que le lancement du film publicitaire « Jeu de l'Oie » est le fruit du travail de l'agence C. B. et de plusieurs salariés de celle-ci.
Elle en conclut à un travail d'équipe à partir duquel il est impossible de distinguer les apports de chacun des contributeurs, en particulier de MM. R. et S..
Elle affirme également que la création du personnage « Dédé » n'apparaît dans aucun des relevés d'heures communiqués, ceux-ci portant sur « tous produits confondus » et « toutes campagnes confondues'».
Elle soutient qu'il ressort de la convention collective qu'ils n'étaient pas les seuls à disposer d'une compétence créative et cite l'assistant chef de publicité, l'assistant directeur artistique, le chef de fabrication et le chef de publicité.
Elle ajoute que, selon cette convention, le directeur artistique est entièrement dépendant et soumis au contrôle d'un directeur de création, lequel ne peut réaliser qu'un travail créatif.
Elle conteste donc que les appelants aient été les « seuls auteurs de la création ».
Elle en infère que la création du personnage « Dédé » constitue une « œuvre plurale dans laquelle les contributions individuelles se fondent dans l'ensemble en vue duquel elles sont réalisées ».
Elle fait enfin valoir que l'œuvre « Dédé » n'a toujours été divulguée que sous le nom de l'agence Grey Paris en qualité de « créateur » et de Française des Jeux, en qualité d'annonceur, et que la presse elle-même attribue la paternité de ce personnage, non pas à MM R. et S., mais à l'agence C. B. devenue Grey Paris.
Elle en conclut que la création du personnage « Dédé » constitue une œuvre collective.
En ce qui concerne les personnages « Brandon'» et «'Brenda » , elle déclare qu'ils constituent également des œuvres collectives créées à l'initiative et divulguées sous la direction de la société Grey Paris.
Elle indique que ces personnages sont des éléments faisant partie intégrante des œuvres publicitaires conçues par Grey Paris pour la promotion du jeu « Vegas » ayant d'ailleurs été divulguées sous le nom de cette agence.
Elle fait valoir que le film publicitaire « Vegas : Lendemain de fête » est répertorié par l'Institut National de l'Audiovisuel comme une publicité de l'agence pour le compte de l'annonceur Française des Jeux et excipe d'articles de presse attribuant la création des personnages « Brandon et Brenda » du Jeu Vegas, à l'agence.
Elle en infère que ces personnages « Brandon'» et «'Brenda » ont été mis en forme sous la direction de l'agence.
Elle ajoute qu'ils ont été créés grâce à la participation de onze personnes au sein de l'agence Grey Paris et se réfère aux temps de travail mentionnés.
Elle conclut que la création des personnages « Brandon'» et «'Brenda » constitue une œuvre collective.
Elle affirme que la création des personnages litigieux ne constitue pas une œuvre de collaboration dont elle rappelle la définition donnée par l'article L.113-2 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle.
Elle se prévaut de la définition d'une telle œuvre donnée par un auteur et d'un jugement du tribunal de grande instance de Paris du 28 janvier2003.
Elle fait valoir que ces oeuvres ont été élaborées à la suite d'une demande de sa part, que leur réalisation a fait intervenir un grand nombre de contributeurs au sein de l'agence et que les travaux réalisés par MM R. et S. étaient soumis au contrôle de leurs supérieurs hiérarchiques.
Elle ajoute qu'une fois validés en interne, ils étaient soumis à son contrôle conformément au contrat du 14 février 2001.
Elle en infère que les appelants ont simplement exécuté leur contrat de travail sous la supervision de leur employeur et le contrôle du client.
Elle en conclut que ces personnages ne sont pas des œuvres de collaboration mais des œuvres collectives et, donc, que MM. R. et S. ne détiennent pas de droit d'auteur sur ces créations.
Elle estime donc qu'elle n'avait pas à recueillir leur autorisation pour exploiter ces personnages.
A titre très subsidiaire, elle considère qu'ils ont cédé leurs droits en leur qualité de salariés.
Elle fait valoir que l'article L 131-3 du CPI ne s'applique qu'à certains contrats limitativement énumérés, en dehors desquels une cession tacite des droits d'auteurs sur une création salariée est admise.
Elle se prévaut d'un arrêt de la cour d'appel de Paris du 16 février2005 confirmé parla Cour de cassation dans un arrêt du 21 novembre2006.
Elle soutient que seule la cession de l'exploitation de créations réalisées dans le cadre de contrats de représentation, d'édition ou de production audiovisuelle, est soumise au formalisme de l'article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle.
Elle estime que la création d'une œuvre publicitaire ne rentre pas dans cette catégorie et, donc, citant l'arrêt du 21 novembre 2006, que la preuve de la cession est, de ce fait, soumise au droit commun.
Elle considère non transposables les arrêts invoqués par les appelants car la cession de l'exploitation de leurs créations publicitaires n'était pas soumise à l'article L.131-3 du code de la propriété intellectuelle.
Elle en conclut qu'elle peut donc être tacite et se prévaut d'arrêts concernant des salariés.
Elle estime sans incidence l'absence de cession, dans les contrats de travail, des droits d'auteur dans la mesure où la cession de l'exploitation de leurs créations à leur employeur était tacite.
Elle soutient que la nature même du poste qu'ils occupaient milite en faveur de cette cession automatique étant «'spécieux'» que des salariés dédiés à la fonction de création, et donc rémunérés en conséquence, puissent revendiquer des droits d'auteur à l'encontre de leur ancien employeur.
Elle conteste tout préjudice subi par eux dès lors qu'ils ne sont pas les auteurs des créations.
Subsidiairement, elle affirme qu'ils ne justifient pas d'un préjudice et des sommes réclamées, aucun élément probant permettant de corroborer leurs calculs.
Elle estime qu'ils devraient démontrer que les sommes demandées correspondent au niveau de revenus qu'ils perçoivent généralement en contrepartie de leurs créations.
Elle ajoute qu'ils ne visent pas d'exploitation en particulier.
Elle s'oppose à la demande d'expertise, celle-ci ne pouvant suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve et une partie de la mission proposée demandant à l'expert de se prononcer sur un aspect purement juridique.
Très subsidiairement, elle demande la garantie de la société Grey Paris.
Elle affirme que, dans les contrats conclus, celle-ci lui a expressément garanti être le titulaire effectif de l'ensemble des droits visés par ces contrats et avoir ainsi le pouvoir de les lui céder.
Elle indique que cette garantie est stipulée dans les contrats.
Elle reproche à la société Grey Paris de s'opposer en cause d'appel à cette garantie.
Elle soutient que la société s'est engagée à la garantir de toute action en contrefaçon qui viserait la « création » et que la «'création'» est définie au préambule des contrats comme «'le ticket de jeu dénommé « Dédé » ainsi que sur chacun des éléments verbaux et graphiques le composant (ci-après, la « Création ») soit notamment le personnage de «'Dédé'».
Elle se prévaut également des clauses des contrats portant sur «'Brenda'» et «'Brandon'».
Aux termes de ses dernières écritures précitées, la société Grey Paris relate la conception des campagnes publicitaires mettant en scène les personnages litigieux.
Elle soutient que les demandes de MM. R. et S. sont irrecevables.
Elle fait valoir qu'ils ne justifient pas de leur qualité à agir au motif qu'ils ne rapportent pas la preuve qu'ils sont les auteurs des œuvres alléguées de contrefaçon.
Elle relève que les œuvres publicitaires dans lesquelles figurent ces personnages n'ont pas été divulguées sous leur nom ce dont il résulte qu'ils ne bénéficient pas de la présomption figurant à l'article L 113-1 du CPI.
Elle affirme qu'ils ne démontrent pas être les auteurs de ces personnages.
En ce qui concerne «'Dédé'», elle considère qu'aucune des attestations produites par eux ne démontre que la représentation du cochon en 3 D telle qu'exploitée par la société Française des Jeux émane de l'un d'eux.
Elle déclare, au contraire, justifier que cette représentation a été conçue par M. C., seul auteur.
Elle se prévaut d' articles de presse indiquant expressément qu'elle était en charge de la campagne publicitaire et que les films mettant en scène le cochon « Dédé » ont été réalisés par M. C., des photocopies des tickets du jeu « Dédé » qui ne comportent aucune date ou nom des auteurs et de relevés d'heures qui ne détaillent pas les créations sur lesquelles MM. R. et S. auraient pu travailler de sorte qu'il est impossible de démontrer, à partir de ces relevés, que MM. R. et S. sont les auteurs de ce personnage.
Elle ajoute que MM. R. et S., en leur qualité de responsables créatifs, devaient rassembler plus d'heures de travail de création que les autres créatifs de l'agence, ce qui ne démontre en aucun cas que le travail sur le cochon « Dédé » ou sur les personnages de « Brandon » et « Brenda » n'a pas été un travail collectif.
Elle excipe également de pièces communiquées en première instance par la société Wanda Productions qui démontrent que M. C. a créé et réalisé le personnage du cochon « Dédé » tel qu'il a été exploité par La Française des Jeux dans le cadre des jeux de grattage du « Jeu de l'oie » et « Dédé ».
En ce qui concerne « Brandon » et « Brenda » issus de la campagne publicitaire sur le jeu « Vegas », elle estime qu'ils ne rapportent pas davantage la preuve de leur qualité d'auteurs de ces personnages créés pour la campagne publicitaire réalisée par Grey Paris pour promouvoir le jeu de grattage « Vegas » de La Française des Jeux.
Elle déclare que les rares documents fournis par eux ne sont ni datés, ni signés et ne comportent aucun élément permettant de les identifier comme auteurs.
Elle réfute les attestations établies par ses anciens salariés qui n'établissent pas le rôle joué par MM. R. et S. dans la conception des personnages de « Brandon » et « Brenda'», relève que les photocopies des tickets du jeu « Vegas » ne comportent aucune date ou nom des auteurs, observe que la pièce invoquée indique sans autre précision quant aux auteurs : « Création de Brandon et Brenda pour Vegas FDJ (20012011) » et estime que les articles de presse n'apportent rien car ils mentionnent simplement les noms de MM. R. et S. en tant que directeur artistique et concepteur rédacteur mais indiquent expressément que les « deux nouveaux films sont signés par l'agence'».
Elle en infère qu'ils ne produisent aucune pièce qui pourrait démontrer qu'ils ont participé de près ou de loin à la conception de ces personnages de « Brandon » et « Brenda ».
Elle déclare qu'aucun croquis, aucune esquisse, aucun dessin, aucun «'story board'», datés ou signés ne sont versés aux débats.
Elle soutient, en outre, qu'ils ne peuvent revendiquer la qualité d'auteurs uniques ou de co-auteurs des œuvres alléguées de contrefaçon, au sens du code de la propriété intellectuelle.
S'agissant du cochon « Dédé », elle affirme que M. C. a créé et réalisé ce personnage à partir de l'ébauche des personnages ordinaires contenue dans le «'story board'» de la campagne du « Jeu de l'oie » transmis par elle à la société Wanda Productions, Wanda Productions étant à l'origine seule titulaire des droits d'auteur attachés au cochon « Dédé » conformément à la cession des droits patrimoniaux de M. C. à son profit.
Elle fait valoir que, sur la base des ébauches, c'est-à-dire des premiers «'story boards'» communiqués par Grey Paris à Wanda Productions et Pierre C. fin 2000 qui mettaient en scène des animaux de la ferme, soit deux oies, une vache et un cochon, dont les traits n'étaient ni stylisés ni personnifiés, M. C. a dessiné et produit les premières esquisses du cochon « Dédé » tel qu'exploité par La Française des Jeux à partir d'une note d'intention datée du 20 décembre 2000 qui décrit les premiers traits caractéristiques du cochon « Dédé » et des deux oies, tels qu'exploités par la suite sur le ticket de grattage « Dédé ».
Elle considère que ces traits n'ont rien à voir avec les dessins des «'story boards'» transmis par elle.
Elle invoque également le document récapitulatif intitulé « Shooting Brief Marketing / Agence » en date du 8 janvier 2001 qui fait clairement référence à M. C. en tant que réalisateur des films et créateur des personnages des oies, du cochon et de la vache figurant dans les films.
Elle indique que cette participation de M. C., représenté par Wanda Productions, dans la création des personnages des oies, de la vache et du cochon « Dédé » et dans la réalisation des films publicitaires du « Jeu de l'oie », a été formalisée dans le contrat en date du 23 janvier 2001.
Elle déclare qu'il a ensuite continué de travailler en étroite collaboration avec la société Wanda Productions pour produire de nouveaux «'story boards'» personnalisés ainsi que les premiers designs des personnages des oies, du cochon et de la vache pour aboutir au personnage du cochon « Dédé » le 25 janvier 2001.
Elle estime que celui-ci a la condition d'originalité et porte l'empreinte de la personnalité de M. C..
Elle relève que ce n'est que le 14 février 2001, soit près d'un mois plus tard, que La Française des Jeux a officiellement mandaté la société Grey Paris en vertu d'un contrat, pour la réalisation de la campagne de publicité du produit « Jeu de l'oie ».
Elle fait grief aux appelants de fabriquer des pièces, non datées, mélangeant des dessins et images prises de différentes époques.
Elle expose qu'à la suite du succès rencontré par les premiers films publicitaires, la société Française des Jeux a décidé de lancer un nouveau jeu de grattage centré sur le personnage du cochon prénommé « Dédé » créé par M. C. figurant dans les deux premiers films produits par Wanda Productions et qu'elle s'est alors rapprochée à nouveau de la société Wanda Productions et de M. C. afin que ces derniers lui cèdent les droits patrimoniaux attachés aux quatre personnages créés par M. C., dont le cochon « Dédé », pour pouvoir les exploiter en dehors de la campagne publicitaire ce qui a donné lieu à l'accord de cession signé le 20 décembre 2002 étant précisé que M. C. avait cédé ses droits à la société Wanda Productions en mai 2002.
Elle estime que ces cessions n'auraient pas été nécessaires si M. C. n'avait pas intégralement créé et réalisé le personnage.
Elle indique que la société Française des Jeux a conclu le 6 juin 2002 un nouveau contrat avec elle pour qu'elle réalise le ticket du jeu de grattage « Dédé », reprenant le personnage du cochon figurant dans les films publicitaires qui avaient été produits par Wanda Productions et réalisés par M. C. pour la campagne publicitaire du « Jeu de l'oie ».
Elle observe que ce contrat formalise également les conditions de la cession des droits attachés aux créations graphiques relatives au ticket de jeu et rappelle que la Française des Jeux a pris contact avec M. C. pour obtenir son autorisation de réutiliser le personnage du cochon « Dédé » sur les tickets de jeu « Dédé ».
Elle estime que cette démarche n'aurait pas été nécessaire si MM R. et S. avaient été les auteurs du personnage.
Elle excipe enfin d'attestations de personnes ayant travaillé avec M. C. à l'époque de la création du personnage du cochon « Dédé » et des campagnes publicitaires du « Jeu de l'oie » et de « Dédé'» et d'articles de presse.
Elle précise que le développement des campagnes publicitaires du "Jeu de l'Oie" et de "Dédé" a connu deux phases, elle proposant dans un premier temps un argument publicitaire constitué de deux saynètes mettant en jeux des animaux de la ferme ordinaires : deux oies, une vache et un cochon - ce «'story-board'» étant en lui-même une œuvre collective dont elle est le seul propriétaire des droits ce qui n'est pas contesté - et, dans un deuxième temps, l'intervention créatrice de M. C., générant des droits d'auteur exclusifs à son profit sur les personnages des oies et du cochon "Dédé" qu'il a cédés à Wanda Productions, qui les a ensuite cédés à La Française des Jeux.
Elle en infère que la représentation graphique du cochon de Grey Paris ne revêt aucun caractère original et n'a finalement rien à voir avec celui créé par M. C..
Elle compare les deux dessins et considère que celui établi par elle est une représentation commune enfantine alors que celui de M. C. est atypique, facilement attribuable et empreint de la personnalité de son auteur.
Elle fait valoir que c'est en raison de cette originalité que le dessin de M. C. a été utilisé par La Française des Jeux sur les tickets de grattage.
Elle en conclut que M. C. est le seul et unique auteur du personnage du cochon « Dédé » tel qu'exploité par La Française des Jeux et issu des «'story boards'» de la campagne du « Jeu de l'oie » élaborés par Grey Paris.
S'agissant des campagnes publicitaires du « Jeu de l'oie » et de « Dédé » dans lesquelles figure le cochon « Dédé », ainsi que celles mettant en scène les personnages de « Brandon » et « Brenda », réalisées par Grey Paris, elle soutient qu'il s'agit d'œuvres collectives dont l'ensemble des droits appartient à l'agence publicitaire Grey Paris qui est, par la loi, investie des droits de l'auteur.
Elle rappelle la définition de l'œuvre collective, cite un auteur et se prévaut d'un arrêt de la Cour de cassation du 19 octobre2010.
Elle prétend que les campagnes publicitaires du « Jeu de l'oie » et de « Dédé » dans lesquelles figure le personnage du cochon « Dédé » créé par M. C. répondent à cette définition d'œuvres collectives.
Elle fait valoir que le personnage du cochon « Dédé » fait partie intégrante de ces publicités qui ont été élaborées et conçues sur l'initiative et sous la direction de Grey Paris et que c'est sous le nom de Grey Paris et de Wanda Productions que ces campagnes ont été divulguées et non sous le nom de MM. R. et S. comme le démontre le répertoire de l'INA.
Elle considère que si MM. R. et S. ont pu participer à l'élaboration des campagnes publicitaires du « Jeu de l'oie » et de « Dédé », leur contribution au sein du groupe de création n'est pas clairement identifiable et il est impossible d'isoler la part de chacun.
Elle invoque le relevé d'heures travaillées, le « Shooting Brief Marketing/Agence » sur les films « Le Puits » et « Des dés à gratter » pour la campagne du « Jeu de l'oie », qui mentionne 6 personnes, une attestation de Mme B. et les articles de presse attribuant la paternité des campagnes publicitaires à Grey Paris et M. C. et non pas à MM R. et S..
Elle affirme que l'utilisation faite du cochon sur les tickets de grattage, invoquée par les appelants, ne ressemble en rien à la représentation graphique qu'ils en faisaient sous une forme enfantine.
Elle indique qu'ils ne sont pas intervenus à l'occasion de la mission confiée à Grey Paris par La Française des Jeux, relative au ticket de jeu « Dédé », aux termes du contrat du 6 juin 2002.
Elle soutient que ce sont les personnages du cochon « Dédé » et de « Brandon et Brenda » qui constituent une œuvre collective.
Elle conclut que les campagnes publicitaires du « Jeu de l'oie » et de « Dédé » dans lesquelles figure le cochon « Dédé » sont des œuvres collectives dont l'ensemble des droits appartient à la société Grey Paris.
S'agissant des campagnes publicitaires du jeu « Vegas » dans laquelle figure les personnages de « Brandon » et « Brenda », elle soutient qu'il s'agit également d'œuvres collectives créées sur l'initiative et divulguées sous le contrôle et sous le nom de Grey Paris.
Elle affirme que les personnages de « Brandon » et « Brenda » font parties intégrantes des œuvres publicitaires développées par elle pour promouvoir le jeu « Vegas » de La Française des Jeux.
Elle se prévaut du site internet de l'INA, de l'absence d'identification de la contribution des appelants au sein du groupe de création et de l'impossibilité d'isoler la part de chacun.
Elle déclare qu'il résulte des décomptes d'heures qu'ils ont travaillé au sein d'une équipe composée de 11 personnes dont certaines ont travaillé presque autant d'heures qu'eux et que la création des personnages de « Brandon » et « Brenda » n'est pas mentionnée indépendamment dans ces relevés.
Elle fait donc état d'un travail collectif et de l'impossibilité pour les appelants de revendiquer un droit, à titre individuel, sur ces œuvres.
Elle estime qu'aucune pièce versée par eux ne permet de démontrer leur qualité d'uniques auteurs de ces personnages et se prévaut, au contraire, des articles de presse attribuent la création des œuvres publicitaires destinées à promouvoir le jeu « Vegas » de La Française des Jeux à l'agence Grey Paris.
A titre subsidiaire, elle soutient que les droits invoqués lui ont nécessairement été cédés.
Elle relève l'importance de leur rémunération et fait valoir que les articles L. 131-2 et 131-3 du code de la propriété intellectuelle exigeant un écrit pour une cession de droits d'auteur ne s'appliquent pas.
Elle considère donc que la cession des droits d'auteur de MM R. et S. à son profit sur l'ensemble des œuvres réalisées dans le cadre de leurs contrats de travail et commandées par les clients de Grey Paris ne devait pas nécessairement être consignée dans un écrit et, se prévalant d'arrêts, que le contrat de travail entraîne la cession des droits patrimoniaux.
Elle estime que les contrats de travail seraient sans cause si l'employeur ne pouvait disposer pour les besoins de son entreprise des œuvres de ses salariés et invoque la nature même des postes de créatifs occupés par eux et des missions créatives qui leur ont été confiées.
Elle invoque, au surplus, le protocole d'accord transactionnel conclu par eux fin mars 2017 et fait état d'une renonciation très générale qui leur interdit de lui réclamer des sommes au titre de droits d'auteur. Elle estime qu'il résulte d'arrêts récent qu'une formule générale permet d'englober toutes les actions portant sur un droit dont le salarié avait connaissance au moment de la signature de la transaction soit, en l'espèce, des droits d'auteur générés par leur activité.
A titre très subsidiaire, elle affirme que l'action est partiellement prescrite car ils ne peuvent demander réparation du prétendu préjudice subi pour les 10 ans d'exploitation dans la mesure où leur action en contrefaçon de droits d'auteur est prescrite pour les faits commis antérieurement au 18 octobre 2005, soit plus de 5 ans avant la date de leur assignation, en application des articles 2270 et suivants du code civil.
Elle affirme qu'ils ne justifient pas de leur préjudice prétendu, aucun élément tangible ne corroborant leurs estimations.
Elle ajoute qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée pour suppléer leur carence.
A titre infiniment subsidiaire, elle précise qu'elle n'a perçu aucun revenu afférent à l'exploitation du cochon « Dédé » sur les tickets de grattage et rappelle les termes des contrats conclus entre les sociétés Française des Jeux et Wanda Productions.
A titre très infiniment subsidiaire, elle conteste l'appel en garantie formé par la Française des Jeux au titre de l'exploitation du personnage « Dédé », le contrat ne portant pas sur le personnage « Dédé » mais sur l'environnement des personnages, comme indiqué dans le Préambule du Contrat.
Elle invoque, pour les motifs ci-dessus, une procédure abusive intentée au surplus près de 10 ans après la première exploitation des personnages.
*****************************
Sur la demande de mise hors de cause de la société Française des Jeux
Considérant que la société a acquis les droits d'exploitation des personnages «'Dédé'», «'Brandon'» et «'Brenda'» auprès des sociétés Grey Paris et Wanda Productions';
Considérant, toutefois, que la régularité de ces cessions est subordonnée à la détention par ces sociétés de ces droits';
Considérant que MM. R. et S. font valoir qu'ils sont titulaires de ceux-ci ;
Considérant qu'il est donc nécessaire d'examiner le mérite de leur demande';
Considérant que la société Française des Jeux ne peut, dès lors, être mise hors de cause';
Sur la qualité d'auteurs ou de co-auteurs de MM. R. et S.
Considérant que les'personnages «'Dédé'», «'Brandon'» et «'Brenda'» ont été créés dans le cadre de campagnes publicitaires commandées par la société Française des Jeux à la société Grey Paris'; qu'ils ont, ensuite, été exploités par la société Française des Jeux indépendamment de ces campagnes sous forme de jeux de grattage intitulés «'Dédé'» et «'Brandon'» et «'Brenda'»';
Considérant que n'est donc pas en cause la propriété intellectuelle de la création publicitaire mais celle de ces'personnages'eux-mêmes';
Considérant qu'il appartient aux appelants de démontrer qu'ils sont auteurs ou co-auteurs des personnages «'Dédé'», «'Brandon'» et «'Brenda'»';
Considérant que cette qualité peut résulter de leur participation à une oeuvre de collaboration mais pas à une oeuvre collective';
Considérant qu'est une oeuvre collective, selon l'article L 113-2 du code de la propriété intellectuelle, « l'œuvre créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui l'édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé » ;
Considérant qu'aux termes de l'article L 113-1 du code de la propriété intellectuelle, «'la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l'œuvre a été divulguée'»';
Considérant qu'aucune des œuvres dans lesquelles figurent les personnages concernés n'a été divulguée sous le nom de MM. R. et S.';
Considérant que ceux-ci ne bénéficient donc pas de la présomption instaurée par cet article';
Considérant qu'il leur appartient donc de justifier de leur qualité d'auteur ou de co-auteur';
Considérant que MM. R. et S. étaient, lors des faits, employés de la société Grey Paris en qualité respectivement de directeur artistique et de concepteur rédacteur';
Considérant qu'aux termes de la convention collective applicable à leur secteur d'activité, le directeur artistique «'conçoit, à partir d'un exposé (brief) remis par le département commercial ou le directeur de création, toute création publicitaire en collaboration avec un concepteur rédacteur avec qui il partage la responsabilité de la qualité créative et de la réalisation des campagnes publicitaires'» et le concepteur rédacteur «'conçoit et rédige tous les textes des messages publicitaires, coordonne avec le directeur artistique la réalisation de la campagne et en contrôle en particulier l'exécution sonore ou graphique »';
Considérant, toutefois, que cette même convention décrit les fonctions d'autres intervenants et précise que le directeur artistique exerce sa fonction «'sous la responsabilité d'un directeur de création'» auquel «'il soumet ses recommandations et ses idées de création'» ;
Considérant qu'il ne résulte donc pas de cette description de leurs fonctions qu'ils sont les auteurs, ou les co-auteurs, des personnages';
Considérant qu'ils doivent donc rapporter la preuve de cette qualité par les diligences qu'ils ont accomplies dans la création de chacun de ces personnages';
Sur le personnage «'Dédé'»
Considérant que les tickets du jeu ne comportent pas le nom de MM. S. et R.';
Considérant que les articles de presse produits mentionnent leurs noms en qualité de directeur artistique et de concepteur rédacteur mais précisent que la société Grey Paris était en charge de la campagne publicitaire et que le film a été réalisé par M. C.'; qu'il n'en résulte donc pas qu'ils sont auteurs ou co-auteurs du personnage';
Considérant que, dans leurs attestations, Mmes et MM. A., L., S., Q., D., P., B.-M., C. et P.-S. ne déclarent pas que MM. R. et S. ont créé le personnage tel qu'exploité ou n'indiquent pas avoir été témoins des faits qu'ils relatent étant observé au surplus que deux d'entre eux font référence à une autre campagne et que Mmes P. et S. déclarent avoir été engagées par la société en 2011 soit après l'envoi du «'story-board'» invoqué';
Considérant que Mme B. a attesté qu'ils étaient les «'concepteurs'» des campagnes de publicité et que «'les story boards'joints'» avaient été conçus par eux'; que, toutefois, les «'story boards'» n'étaient pas joints'; que cette attestation était donc insuffisante';
Considérant qu'elle a rédigé une nouvelle attestation, peu avant la clôture de l'instruction devant la cour d'appel, aux termes de laquelle elle indique que les appelants sont les «'seuls auteurs'» des personnages, scenarii et dialogues'et de la première mise en forme du «'story board'» du 6 décembre 2000';
Considérant que Mme B. travaille désormais comme partenaire de MM. R. et S.'ainsi qu'il résulte de leur site internet ; qu'elle a donc un lien économique avec eux';
Considérant que cette attestation est tardive et contredite, comme celle de Mme P., par les conclusions des appelants qui invoquent une œuvre de collaboration avec M. C. et, donc, reconnaissent ne pas être les «'seuls'» auteurs du personnage'et par un article du journal CB News produit par eux qui cite les personnes ayant participé au film ;
Considérant que M. B. atteste que MM R. et S. ont «'eux seuls'», mais sous son autorité, avant sa réalisation par M. C., créé le personnage de «'Dédé'»';
Mais considérant que M. B. représentait la société Grey Paris dans le contrat conclu avec la Française des Jeux le 6 juin 2012'; que le préambule de ce contrat mentionne que le cochon «'a été dessiné par Monsieur Pierre C.'»';
Considérant que l'attestation de M. B. est donc contredite par sa déclaration antérieure';
Considérant que les attestations produites ne permettent, en conséquence, pas d'établir la qualité d'auteur ou de co-auteur des appelants';
Considérant que les relevés d'heures facturés à la société Française des Jeux par la société Grey Paris «'tous produits confondus'» et «'toutes campagnes confondues'» démontrent que de nombreuses personnes ont travaillé sur le projet'même si MM. R. et S. y ont consacré le plus de temps'; que le temps consacré à la création du personnage n'est pas spécifiquement mentionné';
Considérant qu'il ne peut résulter de ce document que MM. R. et S. ont la qualité d'auteur ou de co-auteur de «'Dédé'»';
Considérant que MM R. et S. ont adressé le 6 décembre 2000, par télécopie, des croquis du «'story-board'» réalisés par eux afin que ces croquis soient colorisés avant leur présentation à la société Française des Jeux et des textes';
Mais considérant que, comme l'a retenu le tribunal, le graphisme du cochon est classique et plutôt réaliste et d'une forme éloignée de celle créée par M. C.';
Considérant qu'il résulte de la comparaison de ces dessins avec l'œuvre finale émanant de M. C. que ces croquis se distinguent nettement de celle-ci qui est atypique et empreinte de la personnalité de M. C. ;
Considérant que le document récapitulatif intitulé «'Shooting Brief Marketing'» en date du 8 janvier 2001 mentionne, en conséquence, que le cochon a été créé par M. C.';
Considérant que les croquis ne peuvent donc caractériser leur qualité de co-auteur du personnage';
Considérant que les textes eux-mêmes portent la trace de trois écritures différentes'; qu'ils ne permettent donc pas de considérer que MM. R. et S. en sont les auteurs';
Considérant que, s'ils justifient avoir contribué, dans le cadre de leur activité dans la société Grey Paris, à l'élaboration du personnage de «'Dédé'», MM. R. et S. ne rapportent donc la preuve ni que leur contribution personnelle ne se fond pas avec celle d'autres employés de l'agence ni qu'ils en sont des co-auteurs avec M. C.';
Considérant que les appelants ne rapportent ainsi pas la preuve qu'ils sont les auteurs ou co-auteurs du personnage';
Considérant que leurs demandes fondées sur cette qualité seront donc rejetées';
Sur les personnages de «'Brandon'» et «'Brenda'»
Considérant que M. C. n'est pas intervenu dans la création de ces personnages';
Considérant que ni les tickets de jeu ni les articles de presse ne mentionnent le nom de MM. R. et S. comme auteurs';
Considérant que les attestations de Mmes et MM. A., S., P., D., B. et Q., qui témoignent du rôle joué par eux dans la création de ces personnages sont insuffisantes, compte tenu des termes employés, à démontrer que leur contribution ne s'est pas fondue dans l'ensemble de celle des collaborateurs de l'agence';
Considérant que le tableau des heures alors facturées démontre qu'ils ont travaillé au sein d'une équipe de 11 personnes, dont certaines ont travaillé presqu'autant qu'eux'; que ce tableau ne mentionne pas spécifiquement la création de ces personnages';
Considérant qu'ils ne versent ni croquis ni esquisse ni «'story board'» datés à l'appui de leurs prétentions';
Considérant qu'ils ne rapportent donc pas la preuve de leur qualité d'auteur, voire de co-auteur, de ces personnages';
Considérant que leurs demandes fondées sur cette qualité seront donc rejetées';
Sur les conséquences
Considérant que MM. R. et S. seront donc déboutés de leurs demandes';
Considérant que la procédure, mal fondée, ne revêt pas un caractère abusif';
Considérant que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions';
Considérant que les appelants devront payer la somme de 5 000 euros à chacune des intimées au titre des frais irrépétibles exposés par elles en cause d'appel'; que leur demande aux mêmes fins sera, compte tenu du sens du présent arrêt, rejetée';
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant':
Condamne in solidum MM. R. et S. à payer à la SAS Grey Paris la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum MM. R. et S. à payer à la SA La Française des Jeux la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne in solidum MM. R. et S. aux dépens,
Autorise la Selarl Lexavoué Paris Versailles et Maître R. à recouvrer directement à leur encontre les dépens qu'ils ont exposés sans avoir reçu provision.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévuesau deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Monsieur Alain PALAU, président, et par Madame Sabine MARÉVILLE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.