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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-2, 13 octobre 2022, n° 21/10817

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

[C] [T]

Défendeur :

[J] [Z] épouse [S]

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gilles PACAUD

Conseiller :

Mme Sylvie PEREZ

Avocats :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, Me Ludmilla HEUVIN

Grasse, du 24 juin 2021

24 juin 2021

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé en date du 25 juin 2020 à effet au 1er juillet 2020, Mme [J] [S] née [Z] a consenti à Mme [C] [T] un bail commercial portant sur un local d'une superficie de 100 m2 environ et un parking situés [Adresse 1], pour une durée de neuf années, moyennant un loyer mensuel de 800 euros, outre 200 euros de contribution aux taxes, payable d'avance le premier de chaque mois pour une activité de vente et compositions florales, événementiel floral et décoration.

Le 10 mars 2021, Mme [S] née [Z] a fait délivrer à Mme [T] un commandement d'avoir à payer la somme principale de 3 750 euros en visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail.

Par acte d'huissier en date du 28 avril 2021, Mme [S] née [Z] a assigné Mme [T] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Grasse aux fins notamment de constatation d'acquisition de la clause résolutoire, de résiliation du bail, d'expulsion et de condamnation à diverses sommes.

Par ordonnance contradictoire en date du 24 juin 2021, ce magistrat, estimant que l'action en référé par acte d'huissier en date du 28 avril 2021 est antérieure à la désignation d'un juge de la mise en état dans le cadre de la procédure au fond initiée par Mme [T] par acte d'huissier en date du 9 avril 2021, que les troubles de jouissance allégués par Mme [T] tenant à des problèmes de stationnement de véhicules et d'électricité ne constituent pas des contestations sérieuses à son obligation d'avoir à régler ses loyers, qu'il y a lieu de déduire de la provision sollicitée la somme de 1 500 euros sérieurement contestable correspondant à 6 semaines liées au 2ème confinement et à la fermeture administrative des locaux et que Mme [T] n'apporte pas la preuve de perspectives d'apurement de la dette, a :

- rejeté le moyen d'incompétence ;

- rejeté la demande de suspension de la clause résolutoire et de demande de suppression des loyers dus au mois de novembre 2020 jusqu'à la réalisation des travaux de remise aux normes électriques et interdiction de stationner des véhicules devant la vitrine ;

- constaté la résiliation de plein droit du bail commercial liant les parties résultant du contrat du 25 juin 2020 par le jeu de la clause résolutoire rappelée dans le commandement délivré par acte d'huissier du 10 mars 2021 à compter du 11 avril 2021 ;

- ordonné, à défaut de libération volontaire, l'expulsion de Mme [T] des locaux commerciaux ainsi que de tous occupants et biens de son chef, avec au besoin le concours de la force publique et d'un serrurier, dans le mois de la signification de l'ordonnance ;

- dit n'y avoir lieu à astreinte ;

- autorisé Mme [S] née [Z] à faire transporter et entreposer les meubles et objets mobiliers garnissant les lieux loués dans tous garde-meubles de son choix aux risques et périls de Mme [T] ;

- fixé le montant de l'indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle à la somme de 1 000 euros, à compter du 11 avril 2021, et jusqu'au départ effectif de Mme [T] ;

- condamné Mme [T] à payer à Mme [S] née [Z] cette indemnité d'occupation ;

- condamné Mme [T] à payer à Mme [S] née [Z] la somme provisionnelle de 3 401,57 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges au 28 avril 2021, avec intérêts au taux légal sur la somme de 2 000 euros à compter du 10 mars 2021 ;

- condamné Mme [T] à payer à Mme [S] née [Z] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [T] aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 10 mars 2021 ;

- rejeté toutes autres demandes.

Selon déclaration reçue au greffe le 19 juillet 2021, Mme [T] a interjeté appel de cette décision, l'appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises.

Par dernières conclusions transmises le 19 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [T] sollicite de la cour qu'elle :

à titre principal,

- infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- prononce l'incompétence du juge des référés en l'état de la saisine de la juridiction du fond ;

- condamne Mme [S] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

à titre subsidiaire,

- infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- suspende les effets de la clause résolutoire ;

- ordonne la suppression des loyers dus du mois de novembre 2020 jusqu'à complète réalisation des travaux de remise aux normes électriques du local et interdiction de stationner des véhicules devant la vitrine du local ;

- condamne Mme [S] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

à titre infiniment subsidiaire,

- infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- suspende les effets de la clause résolutoire ;

- lui accorde un délai de 24 mois pour régulariser le montant des arriérés dus au titre des loyers au jours de l'audience de plaidoirie.

Au soutien de l'exception d'incompétence soulevée en application de l'article 789 du code de procédure civile, elle expose que le juge de la mise en état a bien était désigné le 16 avril 2021 à la suite d'une instance au fond initiée par ses soins en opposition au commandement de payer délivré à son encontre par acte d'huissier en date du 9 avril 2021 avec une première audience de mise en état fixée au 19 mai 2021 à 9 heures, soit avant même la saisine du juge des référés le 28 avril 2021.

Au soutien de l'exception d'inexécution pour justifier le non-paiement de ses loyers à compter du mois de novembre 2020, elle se prévaut du 2ème confinement et des difficultés rencontrées pour exploiter les locaux en raison de dysfonctionnements électriques dénoncés au propriétaire le 25 janvier 2021 et du fait que la bailleresse loue d'autres locaux à proximité à un loueur de véhicules et de camions qui les stationne devant sa vitrine à l'origine d'une perte de vue pour sa clientèle.

A défaut de suppression des loyers depuis le mois de novembre 2020, elle sollicite des délais de paiement.

Bien qu'ayant constitué avocat le 8 septembre 2021, Mme [S] née [Z] n'a pas notifié de conclusions.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 28 juin 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'exception d'incompétence

Il résulte de l'article 789 du code de procédure civile que lorsque le juge de la mise en état est saisi, il est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal pour accorder une provision, ordonner des mesures provisoires ou conservatoires. Sa désignation obère donc toute perspective de saisine du juge des référés.

En l'espèce, il résulte des pièces de la procédure, qu'avant la saisine du juge des référés par Mme [Z] épouse [S], suivant acte d'huissier en date du 28 avril 2021, Mme [T] a, par acte d'huissier en date du 9 avril 2021, formé opposition au commandement de payer délivré le 10 mars 2021 devant le tribunal judiciaire de Grasse.

Elle justifie uniquement avoir été convoquée, par courrier en date du 16 avril 2021, à la conférence présidentielle du 19 mai 2021 à 9 heures.

Or, le président de la chambre à laquelle l'affaire a été distribuée ne renvoie au juge de la mise en état que les affaires qui ne sont pas en état d'être jugées et pour lesquelles les avocats n'ont pas souhaité signer une convention de procédure participative de mise en état.

La preuve n'est donc pas rapportée de la désignation, avant la saisine de la juridiction des référés, d'un juge de la mise en état à la suite de la saisine de la juridiction du fond tenant aux mêmes fins et opposant les mêmes parties.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Mme [T].

Sur la constatation de la résiliation du bail

Il résulte de l'article 834 du code de procédure civile que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Aux termes de l'article L 145-41 alinéa 1 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en 'uvre régulièrement.

En l'espèce, le contrat de bail commercial signé par les parties à effet au 1er juillet 2020 stipule (en page 5) qu'à défaut de paiement à son échéance d'un seul terme de loyer, et un mois après un simple commandement de payer, contenant mention de la présente clause et mentionnant ce délai, resté sans effet, le bail sera résilié de plein droit si bon semble au bailleur.

Le commandement de payer visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail délivré le 10 mars 2021 porte sur la somme principale de 3 750 euros correspondant aux loyers des mois de novembre, décembre 2020, février et mars 2021.

Mme [T], qui reconnaît ne pas avoir réglé les causes du commandement de payer avant l'expiration du délai d'un mois qui lui était imparti, soit avant le 11 avril 2021, se prévaut de circonstances justifiant le non-paiement de ses loyers réclamés dans cet acte.

Il convient de rappeler que les dispositions dérogatoires résultant de la crise sanitaire liée à la pandémie de la Covid-19 n'ont pas dispensé Mme [T] de son obligation première résultant du contrat de bail, à savoir le paiement des loyers et charges, seul le report de la mise en 'uvre des clauses résolutoires ayant été prévue, pas plus qu'ils n'ont fait interdiction à Mme [S] née [Z] de délivrer un commandement de payer et/ou une assignation en justice, et ce, même au cours d'une période juridiquement protégée.

En effet, la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire prévoit, notamment, en son article 14, applicable à compter du 17 octobre 2020, que le défaut de paiement des loyers et charges ne sera pas immédiatement sanctionnable pour les entreprises éligibles au dispositif qu'elle prévoit lorsque celles-ci ont subi des fermetures administratives ou ont été particulièrement affectées par les restrictions sanitaires mises en 'uvre.

C'est ainsi que l'article 14, dans sa version applicable en l'espèce, énonce, en son deuxième paragraphe, que jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d'être affectée par une mesure de police mentionnée au I, les personnes mentionnées au même I ne peuvent encourir d'intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d'exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée. Pendant cette même période, les sûretés réelles et personnelles garantissant le paiement des loyers et charges locatives concernés ne peuvent être mises en 'uvre et le bailleur ne peut pas pratiquer de mesures conservatoires. Toute stipulation contraire, notamment toute clause résolutoire ou prévoyant une déchéance en raison du non-paiement ou retard de paiement de loyers ou charges, est réputée non écrite.

Sont concernés par ces dispositions, les loyers et charges locatives dus pour la période au cours de laquelle l'activité de l'entreprise est affectée par une mesure de police administrative prise en application de l'article 1er de la loi du 9 juillet 2020 et de l'article L 3131-15 du code de la santé publique (réglementation de l'ouverture au public d'établissements recevant du public et des lieux de réunion, d'une part, fermeture provisoire de ces mêmes établissements et lieux, d'autre part).

Pour être éligible aux mesures prévues par l'article 14 susvisé, le preneur à bail commercial doit d'une part, faire l'objet d'une mesure de fermeture du commerce exploité dans les lieux loués ou de réglementation de l'accès du public et, d'autre part, remplir des critères précisés par le décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020, lequel détermine, en son article 1er, des seuils d'effectifs (moins de 250 salariés), de chiffre d'affaires réalisé (moins de 50 millions d'euros au cours du dernier exercice clos ou moins de 4,17 millions d'euros par mois pour les activités n'ayant pas d'exercice clos) et de perte de chiffre d'affaires (au moins 50 % durant la période comprise entre le 1er et le 30 novembre 2020 par rapport à la même période de l'exercice précédent ou la moyenne mensuelle de cet exercice).

Il s'ensuit que ces dispositions n'effacent pas les loyers échus, ni n'interdisent au bailleur de faire délivrer à son locataire un commandement de payer voire une assignation pendant la période juridiquement protégée, mais suspendent uniquement les effets de clause résolutoire insérée dans le contrat de bail jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de laquelle l'activité des preneurs à bail commercial remplissant les conditions requises cesse d'être affectée par une mesure de police.

Dans ces conditions, la régularité du commandement de payer délivré le 10 mars 2021 ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

Il reste que Mme [T] affirme que son commerce a été affecté par les mesures de confinement en raison de sa fermeture, de sorte que la somme réclamée n'est pas due comme couvrant les périodes de restrictions sanitaires.

Aux termes de l'article 1722 du code civil, applicable aux baux commerciaux, si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n'est détruite qu'en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement.

Or, Mme [T] n'apporte aucun élément démontrant son impossibilité de régler ses loyers et charges par suite de la fermeture de son établissement imposée par les mesures prises pour lutter contre l'épidémie liée à la Covid-19.

En effet, elle ne produit aucun élément comptable permettant de determinerl'éventuelle perte de son chiffre d'affaires résultant des mesures qui ont été prises au cours de la période considérée.

En tout état de cause, en application de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19, l'état d'urgence sanitaire a été déclaré sur l'ensemble du territoire national.

En application de l'article 3, I, 2 , du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 et du décret n° 2020-423 du 14 avril 2020 le complétant, jusqu'au 11 mai 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile a été interdit à l'exception des déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle et des achats de première nécessité.

Edictée pour limiter la propagation du virus par une restriction des rapports interpersonnels, l'interdiction de recevoir du public, sur la période du 17 mars au 10 mai 2020, prévue par les arrêtés des 14 et 16 mars 2020 du ministre des solidarités et de la santé, ainsi que par les décrets précités, résulte du caractère non indispensable à la vie de la Nation et à l'absence de première nécessité des biens ou des services fournis.

Il en est de même du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant de nouvelles mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire qui, dans son article 41, I, 2, a interdit aux résidences de tourisme d'accueillir du public, sauf lorsqu'ils constituent pour les personnes qui y vivent un domicile régulier.

Par suite, cette interdiction a été décidée, selon les catégories d'établissement recevant du public, aux seules fins de garantir la santé publique.

L'effet de cette mesure générale et temporaire, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut donc être assimilé à la perte de la chose.

En l'état de ces éléments, Mme [T] ne peut se prévaloir de la perte partielle de la chose louée pour soutenir que les sommes visées par le commandement de payer ne sont pas dues.

Enfin, elle fait état d'une exception d'inexécution tirée du manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance.

L'article 1719 du code civil dispose que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière :

1° De délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant ;

2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;

3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail.

Par ailleurs, il résulte de l'article 1728 du même code que le preneur est tenu de deux obligations principales, comprenant celle de payer le prix du bail aux termes convenus.

Ainsi, même si le bailleur n'exécute pas ses obligations, le locataire ne peut se prévaloir d'une exception d'inexécution tirée de l'article 1219 du code civil, qui énonce qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave, pour suspendre le paiement des loyers, à moins qu'il apporte la preuve de ce que l'inertie de ce dernier a pour effet d'empêcher totalement un usage des lieux suivant la destination qui lui a été donnée par le bail.

L'article 1220 du même code poursuit en indiquant qu'une partie peut suspendre l'exécution de son obligation dès lors qu'il est manifeste que son cocontractant ne s'exécutera pas à l'échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais.

Concernant le grief tenant au stationnement des véhicules devant le local loué, Mme [T] justifie s'être plainte, dans un courrier en date du 25 janvier 2021, de l'absence de visibilité de son magasin en raison du nombre de véhicules, et en particulier des camions, stationnés sur le parking que la bailleresse loue à la société Truche dans son intégralité, y compris aux abords de la route, excepté deux places réservées à l'enseigne du magasin.

Mme [B], cliente, atteste qu'il est de plus en plus difficile voire impossible de se garer pour aller à la boutique, qui n'est plus visible, à cause des camions garés devant.

L'attestation de Mme [V] ne peut être prise en compte comme ne répondant pas auformalisme requis par le code de procédure civile en l'absence, notamment, de document officiel justifiant de son identité.

En l'état d'une seule attestation rédigée en des termes généraux, le manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance tenant aux véhicules stationnés devant le magasin loué n'est pas établi avec l'évidence en référé.

Concernant le grief tenant aux problèmes électriques, si l'encadré réservé à l'électricité dans l'état des lieux d'entrée n'apporte aucune précision sur le nombre et l'état des prises de courant, téléphonie, télévision, luminaires et convecteurs, Mme [T] justifie avoir demandé à la bailleresse, par courriers en date des 26 décembre 2020 et 25 janvier 2021, de lui remettre les documents concernant l'état des risques naturels ainsi que le diagnostic de performance énergétique réalisé par un professionnel qualifié comme indiqué dans le bail.

Par ailleurs, dans son courrier du 25 janvier 2021, elle se plaint de problèmes électriques affectant le local depuis la signature du bail, et en particulier que, depuis l'installation d'un nouveau câble électrique dans les lieux par l'époux de la bailleresse, les prises situées à gauche et à droite de l'entrée ne fonctionnent plus et, qu'à chaque pluie un peu forte, il n'y a plus de fluide dans les deux tiers du magasin.

Ces dysfonctionnements électriques résultent du constat huissier dressé le 3 mars 2021 aux termes duquel il apparaît, qu'alors même que le local est composé de trois pièces, d'une cuisine avec fenêtre sur l'arrière et d'une pièce à usage de WC avec lave-mains, les éclairages du plafond et les appliques murales fonctionnent dans toutes les pièces, excepté dans la pièce attenante à la grande pièce située à l'entrée du local où les éclairages et prises électriques ne fonctionnent pas.

En effet, alors même que l'huissier de justice relève, dans cette pièce, plusieurs points lumineux en deux endroits du plafond et en un endroit fixé sur la poutre, il constate que ces derniers sont éteints, et ce, même en positionnant sur on les interrupteurs électriques situés à droite en entrant dans la pièce. Il constate, par ailleurs, que la petite lampe posée sur une table, bien que raccordée à l'aide une rallonge à une prise életrique située à l'entrée de la pièce, ne s'allume pas.

De plus, il indique que la petite chaine stéréo posée à même le sol dans la pièce principale, ne s'allume pas, bien que branchée à une prise électrique. Il constate également qu'en positionnant le disjoncteur du tableau électrique situé à droite sur on, toute la lumière de la pièce principale s'éteint, excepté un petit spot mural qui reste allumé. Il indique que, pour faire fonctionner la lumière, il faut mettre le disjoncteur en position off et remonter un autre disjoncteur, à l'aide d'un manche à balai, se trouvant à l'extérieur du local dans un atelier appartenant à la bailleresse auquel le locataire a accès.

Enfin, Mme [B] atteste, en tant que cliente, avoir constaté à plusieurs reprises que le magasin présentait d'importants problèmes électriques, notamment les jours de pluie, en précisant qu'il fallait se rendre à l'extérieur pour remettre en route l'électricité.

Ces éléments caractérisent, de toute évidence, la réalité de dysfonctionnements électriques affectant le local à compter, au moins, du début de l'année 2021.

Il reste que Mme [T] n'allègue ni ne démontre que ces désordres l'ont empêchée d'exploiter le bien, suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, justifiant qu'elle suspende le paiement de ses loyers à compter du mois de novembre 2020, et ce, en se faisant justice à elle-même, sans engager la moindre action judiciaire pour faire reconnaître la responsabilité de sa bailleresse dans les désordres affectant la chose louée.

Dans ces conditions, Mme [T] ne peut, incontestablement, se prévaloir d'une exception d'inexécution liée au manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance pour justifier le non-paiement de ses loyers à compter du mois de novembre 2020 et établir, dès lors, que le commandement de payer, qui a été dilivré, portait sur des sommes qui ne sont pas dues.

En conséquence, les conditions d'acquisition de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail étaient bien réunies à la date du 10 avril 2021.

L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté la résiliation du bail commercial liant les parties par suite de l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 11 avril 2021.

Sur la provision au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas oul'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Enfin c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.

En l'espèce, pour s'opposer au paiement des loyers échus depuis le mois de novembre 2020, Mme [T] fait valoir les mêmes contestations que celles qui ont été examinées ci-dessus.

Or, dès lors que le bail a pris fin le 10 avril 2021 par suite de l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail, Mme [T], qui occupe sans droit ni titre, les biens loués, ne peut sérieusement se prévaloir de la perte de la chose louée et du manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance pour ne pas régler l'indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle due à compter du 11 avril 2021.

Concernant les loyers et charges échus entre le mois de novembre 2020 et le 10 avril 2021, il résulte de ce qui précède que Mme [T] ne peut, de toute évidence, se prévaloir de la perte de la chose louée, pas plus que d'une exception d'inexécution liée au manquement de la bailleresse à son obligation de délivrance, pour justifier leur non-paiement.

Il s'ensuit que l'obligation de Mme [T] de payer ses loyers à compter du mois de novembre 2020 n'est pas sérieusement contestable, pas plus que celle de régler une indemnité d'occupation à compter de la résiliation du bail.

S'agissant du montant non sérieusement contestable, ce dernier n'est pas discuté en l'absence d'appel incident formé sur ce point.

Il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné Mme [T] à payer à Mme [S] née [Z] la somme provisionnelle de 3 401,57 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges arrêté au 28 avril 2021, avec intérêts au taux légal sur la somme de 2 000 euros à compter du 10 mars 2021, outre une indemnité provisionnelle d'occupation mensuelle fixée à la somme de 1 000 euros à compter du 11 avril 2021, et jusqu'au départ effectif de Mme [T].

Sur les délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire

L'alinéa 2 de l'article L 145-41 du code de commerce dispose que les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil, peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation des effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant l'autorité de chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

En l'espèce, en l'absence de tout élément portant sur les capacités financières de Mme [T] d'apurer sa dette en plusieurs mensualités, sachant qu'elle n'allègue ni ne démontre avoir réglé le moindre loyer et/ou indemnité d'occupation depuis le mois de novembre 2020, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté Mme [T] de sa demande de délais de paiement et de suspension delaclause résolutoire insérée dans le bail et, dès lors, en ce qu'elle a ordonné son expulsion des lieux.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Dès lors que Mme [T] n'obtient pas gain de cause en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a condamnée à payer à Mme [S] née [Z] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer du 10 mars 2021.

Mme [T] sera également tenue aux dépens de la procédure d'appel.

En tant que partie perdante, elle sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Déboute Mme [C] [T] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel non compris dans les dépens ;

Condamne Mme [C] [T] aux dépens de la procédure d'appel.