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Décisions

CA Paris, 4e ch. B, 11 janvier 1990, n° 87- 008654

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

La Securite Familiale des Petites 2T (Sté)

Défendeur :

M. Escoffpe (és qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bonnefont

Conseillers :

M. Gouge, Me Poullain

Avoués :

SCP Gauzere Lagourque, Me Kieffer-Joly

Avocats :

Me Géliot, Me Filid

T. com. Paris, du 23 déc. 1986

23 décembre 1986

Dans des circonstances reletées par les premiers juges la SECURITE FAMILIALE DES PETITES ET DOYENNES ENTREPRISES (SEFAPME) organisme à caractère social avait attrait le 15 avril 1985 M. ESCOFFRE devant la Tribunal da commerce de PARIS à fin de voir prononcer la liquidation de biens, subsidiairement le règlement judiciaire de celui-ci an raison d’un impayé de cotisations et majorations ayant donné lieu à I'émission de quatre contraintes non frappées de recours. Après avoir fait procéder à une enquête, la Chambre des vacations du Tribunal de commerce, par son jugement du 23 décembre 1986, estimant que SEFAPME ne prouvait pas qu'elle poursuivait M. ESCOFFRE pour son activité réelle de commerçant ni qu'elle aurait respecté 1'article 10 de la loi du 24 juillet 196 (fait 1966) a déclaré SEFAPME irrecevable et I'a condamné à payer au défendeur une indemnité de 5.000 francs et une somme de 3.500 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens. SEFAPME a relevé appel par déclaration du 28 avril 1987 et saisi la cour le 27 mai 1987.

M. ESCOFFRE a d’abord banalement conclu à la nullité, l’irrecevabilité ou au mal fondé de l’appel. SEFAPME, après avoir conclu à l’infirmation et au paiement par M. ESCOFFRE d'une somme de 157.763,50 francs et d'une somme de 18,898 francs en principal, outre les intérêts et frais d'exécution, d'une indemnité de 7.000 francs pour résistance abusive, d'une somme de 6.000 frs au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et des dépens de première instance et d'appel a ensuite demandé que soit constatée la cessation de paiements et que soit prononcée la liquidation judiciaire per application da la "loi de 1985".

M. ESCOFFRE a conclu au contraire à l’irrecevabilité en particulier de la demande nouvelle en paiement et au debouté et à la condamnation da SEFAPME à payer une indemnité de 10.000 francs pour procédure abusive et d'une somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. SEFAPME a alors renoncé à ses demandes en paiement. L'argumentation des parties peut être résumée comme suit :

SEFAPME allègue qu'elle gère un régime obligatoire d'assurance maladie des travailleurs non-salariés et que M. ESCOFFRE est particulièrement affilié à ce régime en sa qualité d'associé en nom collectif de la société Etablissements ESCOFFRE et LERMINIAUX. L’affiliation da M. ESCOFFRE résulterait de l'application des articles L. 624-3 et L. 615-1 du Code de la sécurité sociale et D. 612-12 du même code. Il aurait personnellement signé les déclarations annuelles de bénéfices réels. SEFAPME aurait obtenu contre M. ESCOFFRE, pour non-paiement des cotisations dues, quatre titres exécutoires. M. ESCOFFRE soutient au contraire que Ia demande en paiement est irrecevable comme nouvelle, qu'il est associé non gérant, n'a eu aucune activité au sein de Ia société, et qu'il n'est pas justifié que Ia dette ait été contractée à I'occasion d'une activité commerciale ou artisanale ni qu'elle suit un rapport avec Ia société et qu'en toute hypothèse Ia société n'a pas été mise en cause sans résultat.

SUR CE LA COUR, qui pour un plus ample exposé se réfère au jugement et aux écritures d'appel.

CONSIDERANT qu'aux termes de l’article 1er alinéa 2 de Ia loi du 24 juillet 1966, sont commerciales à raison de leur forme et quelque soit leur objet les sociétés en nom collectif ; que selon I'article 10 de la même loi, les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant ; que l’article 65 du décret du 30 mai 1984, qui reprend le texte de l’article 42 du décret du 23 mars 1967 modifié, sur le registre du commerce, stipule qu'une personne qui doit être immatriculé ne peut se prévaloir du défaut d'inscription pour se soustraire aux responsabilités et obligations inhérentes à la qualité de commerçant ;

Que l’article L. 613-1 du Code de la Sécurité Sociale précise que sont obligatoirement affiliés au régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs non-salariés, des professions non agricoles, les travailleurs non-salariés relevant des groupes de professions mentionnés aux 1°, 2°, 3° de I'article L. 621-3, lequel institue une organisation autonome d'assurance vieillesse pour "2° professions industrielles et commerciales" ; que I'article D. 632-1 du même code stipule que sont obligatoirement affiliées aux caisses d'allocation vieillesse des professions industrielles et commerciales , en ce qui concerne les sociétés dont l'activité est industrielle et commerciale, les personnes physiques énumérés ci-après :

"1° les associés des sociétés en nom collectif…" ; que les assujettis sont tenus de se déclarer à la caisse dont ils relèvent ;

CONSIDERANT qu'il résulte de l'extrait K BIS de la société Etablissements ESCOFFRE et LEMINIAUX que cette société en nom collectif qui fait le commerce du bois a pour associés non-gérants notamment M. Gérard ESCOFFRE ; que celui-ci est donc commerçant en raison de sa seule qualité d'associé et sans même qu'il ait à exercer une activité professionnelle au sein de la société ou qu'il effectue habituellement des actes da commerce ; que M. ESCOFFRE ne peut exciper de son défaut d'inscription au registre du commerce pour échapper aux obligations découlant de la qualité de commerçant, en particulier celle découlant des textes précités du Code de la Sécurité Sociale et qui consiste à se faire immatriculer à une caisse des professions industrielles et commerciales couvrant les risques maladie, maternité, vieillesse ; que c'est au demeurant ce qu'il a fait auprès de la SEFAPME à laquelle il a adressé régulièrement des déclarations de 1979 à 1984 ;

CONSIDERANT que la lecture des contraintes rendues exécutoires à la demande de SEFAPME révèle que les dettes' sont bien afférentes à l'assurance maladie et maternité des travailleurs non-salariés des professions non agricoles et donc à une obligation contractée par M. ESCOFFRE personnellement (et non pas au nom de la société) en sa qualité de commerçant par l'effet de la loi ; que l'article 10 de la loi du 24 juillet 1966 et l’article 15 du décret du 23 mars 1967 textes qui ont trait eux dettes sociales, ne sont donc pas applicables ;

CONSIDERANT que la loi du 25 janvier 1985 doit recevoir application en I'espèce la date à prendre en considération n'étant pas celle de l‘assignation mais, selon l'article 240 de cette loi, celle de l'ouverture de la procédure qui ne peut résulter que d'une décision de justice ;

CONSIDERANT qu'il résulte® de I'article 148 alinéa 1er de la loi qu'un créancier ne peut demander d’amblée que soit prononcé la liquidation judiciaire, le représentant des créanciers, qui sera nommé liquidateur, n'ayant pu être designé qu'au cours de la procédure de redressement judiciaire ;

CONSIDERANT que la procédure de redressement judiciaire ne peut être ouverte que si le commerçant est dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible ;

CONSIDERANT qu’en l'espèce si SEFAPME, qui a la charge de prouver la cessation des paiements, démontre qu'elle est titulaire d'une créance exigible résultant de titres exécutoires, créance contre un commerçant et tenant à cette qualité de commerçant attribuée par la loi à M. ESCOFFRE, en revanche elle ne prouve pas que I'actif disponible du débiteur ne permette pas de faire face au passif ;

CONSIDERANT en effet que le procès-verbal dit de « carence » du 23 mars 1995 a tout au plus prouvé que M. ESCOFFRE et sa mère étaient absents le jour où l'huissier s'est présenté pour tenter une saisie-exécution ;

Qu'il convient donx de débouter SEFAPME de sa demande principale ;

CONSIDERANT qu’en raison de la gravité des mesures prises en cas de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire une demande présentée par un créancier qui ne s’est pas assuré de ce que son débiteur était en cessation de paiement présente un caractère fautif ; que les premiers juges ont apprécié comme il convenait le préjudice en relation directe de cause à effet avec cette faute et ce que I'équité commandait d'allouer au défendeur au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; qu’il est équitable d'ajouter à ces réparations une nouvelle somme pour les frais non taxables exposés devant la Cour ;

Qu’en revanche SEFAPME qui succombe ne caractérise aucune résistance abusive et conservera ses frais non taxables ;

PAR CES MOTIFS :

Constate que la SECURITE FAMILIALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES renonce à sa demande en paiement de créances présentées pour la première fois devant le Cour ;

Réformant en tant que le Tribunal a dit la demanderesse irrecevable, dit celle-ci mal fondée en ses prétentions et en son appel ;

L'en déboute ;

Confirme les condamnations prononcées par le Tribunal ;

Ajoutant au jugement, condamne la SECURITE FAMILIALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES à payer à M. ESCOFFRE ;

- une somme supplémentaire de 5.000 francs au titre-de l'article 700 du nouveau code de procédure civile devant la Cour ;

- les dépens d'appel ;

Admet Me KIEFFER JOLY, avoué, au bénéfice de l’article 699 du nouveau code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs autres demandes.