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Décisions

Cass. crim., 24 octobre 2018, n° 17-84.818

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soulard

Avocat :

SCP Lyon-Caen et Thiriez

Versailles, du 30 juin 2017

30 juin 2017

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. Philippe Pemezec, conseiller général du canton du Plessis-Robinson, maire de cette localité, et vice-président du conseil général des Hauts-de-Seine, a signalé au procureur de la République, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale, qu'en avril 2010, M. Mohamed A..., alors conseiller municipal de la ville de Clamart, lui a fait visionner un film vidéo que ce dernier avait réalisé au printemps 2010, au moyen d'une caméra dissimulée et qui comportait des séquences au cours desquelles M. X..., maire de Clamart, était visible en compagnie de M. A... négociant auprès de lui, contre argent, l'attribution d'un logement social à l'une de ses connaissances ; que le film révèle, confirmé par ses extraits parus sur les sites You Tube et Daily Motion, que M. A... s'est d'abord défait d'une somme de 5 000 euros en espèces entre les mains de M. X..., qui l'a comptée, pour en vérifier le montant, sous son bureau en se cachant et que, lors d'une seconde entrevue, M. A... a encore remis à ce dernier, qui l'a rangée dans son portefeuille, une autre somme de 1 000 euros en billets ; que le logement social a effectivement été attribué, dans le mois de la demande, à la personne recommandée par M. A... ; qu'à l'issue de l'information judiciaire ouverte, M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir, étant investi d'un mandat électif public comme maire de Clamart, perçu des fonds de M. A... pour accomplir un acte de sa fonction ou facilité par sa fonction en échange de son intervention afin de permettre l'affectation d'un logement à une personne soutenue par ce dernier dans sa recherche d'appartement ; que M. X... a été déclaré coupable de corruption passive ; qu'il a interjeté appel du jugement, de même que le ministère public ;

En cet état ;


Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et du citoyen, préliminaire, 463, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, confirmatif, a condamné M. Philippe X..., pour corruption passive, à un emprisonnement de deux ans dont un an assorti du sursis, à une amende de 20 000 euros et a prononcé l'interdiction des droits civiques, de vote et d'éligibilité, pendant cinq ans, après avoir précisé dans la présentation de la procédure « « Maître B..., en ses explications, concernant la demande de contre-expertise » ;

"aux motifs que l'infraction reprochée est suffisamment caractérisée ; qu'il ressort en effet de la procédure :
- que M. Mohamed A..., malgré les risques judiciaires encourus, a été constant dans ses déclarations mettant en cause M. X... ; qu'il n'a pas fait appel de la décision du tribunal le condamnant lui-même pour corruption active ;
- que l'expert judiciaire a conclu que les deux vidéos «X...-corruption1 » et « X...-corruption2 » étaient issues des mêmes enregistrements d'origine et qu'aucune manipulation, tant de l'image que du son, n'avait altéré leur intégrité ; que la qualité sonore était conforme à celle que l'on pouvait attendre de la caméra espion utilisée ; que les vidéos présentaient un enregistrement parfaitement continu, un seul « plan séquence » sans rupture, révélant une captation unique ; que les dispersions temporelles éventuelles étaient compatibles avec les modifications induites par les mises en ligne sur les sites d'hébergement ; que le texte et l'image étaient parfaitement synchronisés ; qu'aucun évènement acoustique ne révélait une tentative de montage ;
- que M. X... n'a pas demandé de contre-expertise, dans le délai légal d'un mois qui lui était imparti ; qu'il a fait valoir qu'il ne l'avait pas fait car il pensait, n'ayant pas été mis en examen à la suite du dépôt du rapport de M. C..., que le dossier serait rapidement clôturé par un non-lieu ; qu'il ressort cependant de la procédure que le magistrat instructeur l'a entendu dans un premier temps comme témoin assisté car il n'avait pas été auditionné auparavant (01357) ; qu'il était cependant manifeste que, compte tenu des conclusions du rapport, une mise en examen interviendrait rapidement ;
- que le prévenu n'a pas justifié du prêt de 1 500 euros qu'il aurait accordé à M. A... ; qu'il n'a pas produit notamment de reconnaissance de dette ;
- que M. H... E... , qui avait indiqué dans une attestation que M. X..., qui détenait une liasse de billets sur son bureau, lui avait fait part de fonds qu'il prêtait à M. A..., n'a curieusement pas été cité à l'audience du tribunal ; qu'il n'a pas non plus comparu à l'audience de la cour ;
- que l'hypothèse d'un montage audio global, plaqué sur l'enregistrement vidéo préalable, évoquée par le technicien entendu à l'audience de la cour, si elle est théoriquement possible, ne peut être retenue ; qu'elle n'a pas été présentée d'emblée par M. X... mais seulement trois jours avant l'audience de la cour ; que le prévenu, dans ses premières déclarations, n'a pas contesté une grande partie des propos échangés ; qu'il a notamment admis le dialogue portant sur le logement du nommé [...] (01204) ; qu'il n'a pas expliqué pour quelle raison, dans l'hypothèse du remboursement d'un prêt, il s'était dissimulé sous son bureau pour compter les billets qui lui étaient remis ; qu'une des deux mini vidéos produites à l'audience de la cour rapportent des dialogues intervenus à distance sur la place de la mairie, sous la pâle lumière de réverbères, rendant impossible l'appréciation d'une concordance entre les propos échangés et l'expression des visages ;
- que l'hypothèse d'un complot, qui est également possible, ne fait pas disparaître la matérialité d'un pacte de corruption ;
- que M. I... F... a obtenu de la société Efidis un logement le 16 juin 2010, soit un mois seulement après en avoir fait la demande, le 18 mai 2010 ; que seul son dossier a été présenté à la commission alors qu'il était d'usage d'en présenter trois ; que l'urgence de sa situation n'a pas été explicitée ; qu'il y a lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement déféré sur la culpabilité ; que sur la sanction, M. X... n'a pas été condamné au cours des cinq années précédant les faits pour un crime ou un délit de droit commun aux peines prévues par les articles 132-30, 132-31 et 132-33 du code pénal ; qu'il peut bénéficier d'une peine d'emprisonnement assortie du sursis simple dans les conditions prévues par les articles 132-29 à 132-34 de ce même code ; que la gravité des faits qui lui sont reprochés, cependant, ainsi que sa personnalité, telle qu'elle ressort de ces mêmes faits même si les investigations n'ont pas établi qu'il ait été un corrompu d'habitude justifient une peine d'emprisonnement au moins en partie ferme ; que toute autre sanction, insuffisamment dissuasive et exemplaire, serait inadaptée ;

"1°) alors que la forclusion éditée par l'article 167 du code de procédure pénale, portant sur les demandes de contre-expertise ne fait pas obstacle à ce qu'en application des articles 463 et 512 du même code, les parties puissent saisir la juridiction de jugement de demandes tendant à l'accomplissement d'un supplément d'information ; que M. X..., maire de la commune de Clamart, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, pour corruption en vue de l'attribution d'un logement social, dont l'élément de preuve essentiel était constitué de l'enregistrement de deux films lors des prétendues négociations à cette fin ; que, pendant l'instruction, M. C..., expert, a conclu que ces enregistrements n'avaient fait l'objet d'aucun montage, le précédent expert, M. D... estimant quant à lui qu'il n'existait aucune certitude sur ce point ; qu'ayant interjeté appel de sa condamnation par le tribunal correctionnel, M. X... a sollicité l'audition de M. C..., afin de discuter ses conclusions, a sollicité une contre-expertise, après avoir émis l'hypothèse que les enregistrements avaient pu être manipulés en plaquant sur les images filmées dans son bureau, une bande son sans rapport avec elles, produisant une attestation en expliquant la possibilité, étayée par deux montages qu'il avait réalisés, et proposant l'audition d'un témoin pour s'en expliquer devant la cour ; que, pour refuser de faire droit à la demande de contre-expertise, tout en acceptant d'entendre le témoin cité par la défense et de visionner les deux montages réalisés, la cour d'appel a estimé qu'une telle demande avait déjà été rejetée par la chambre de l'instruction, du fait de sa tardiveté ; qu'en cet état, la cour d'appel a violé les articles 463 et 512 du code de procédure pénale ;

"2°) alors qu'à tout le moins, saisis d'une demande de supplément d'information, les juges doivent se prononcer au regard de sa seule utilité pour les besoins de la manifestation de la vérité ; que dès lors qu'elle admettait qu'il était techniquement possible de réaliser la manipulation de vidéos invoquée par la défense, la cour d'appel qui n'a pas envisagé l'utilité de l'expertise demandée par la défense, n'a pas justifié sa décision au regard des articles 463 et 512 du code de procédure pénale ;

"3°) alors qu'en outre, les droits de la défense dont le droit de faire entendre un témoin sont méconnus, lorsque les juges, après avoir entendu un témoin, dont ils reconnaissent la pertinence de l'exposé, estiment devoir écarter son témoignage, au regard de sa tardiveté ; qu'en l'espèce, la défense ayant constaté, que malgré deux renvois, l'expert judiciaire ne s'était pas présenté à l'audience, a produit une attestation d'un ingénieur du son faisant état de la possibilité d'une manipulation des enregistrements que l'expert judiciaire, M. C..., n'avait pas envisagée, cet ingénieur ayant réalisé deux vidéos comportant une telle manipulation et sollicité l'audition d'un second ingénieur du son afin qu'il apporte « un éclairage technique sur la question de l'authenticité des enregistrements présents au dossier ; que la cour d'appel a fait droit à ces deux demandes ; que pour déclarer le prévenu coupable, elle a estimé que si, au vu des explications du témoin de la défense, la manipulation de la bande son était techniquement possible, ce témoignage était trop tardif pour pouvoir être retenu ; qu'en cet état, en refusant de prendre en compte ce témoignage établissant un doute sur la culpabilité du prévenu en considération de sa seule tardiveté, la cour d'appel a violé tant l'article préliminaire du code de procédure pénale que l'article 6, paragraphe 1 et paragraphe 3, d) de la Convention européenne des droits de l'homme ;

"4°) alors que, dès lors qu'elle constatait qu'une manipulation de la bande son d'une vidéo était possible, au vu du témoignage susvisé, la cour d'appel qui, en l'état d'un doute sur les insuffisances de l'expertise judiciaire concluant au défaut de manipulation des enregistrements présents au dossier, n'a pas ordonné une nouvelle expertise dans le cadre d'un supplément d'information, n'a pas justifié sa décision au regard des articles 463 du code de procédure pénale et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme" ;

Attendu que pour refuser d'ordonner le complément d'expertise sollicité par la défense, l'arrêt énonce notamment que, selon l'expert judiciaire, les deux vidéos publiées sur des sites Internet sont issues du même enregistrement d'origine, continu, avec captation unique, et aucune manipulation, tant de l'image, du texte, que du son, n'a altéré leur intégrité, nul événement acoustique n'ayant révélé une tentative de maquillage ; que les juges ajoutent, après avoir entendu un témoin cité par l'avocat de M. X..., que, si elle est théoriquement possible, l'hypothèse d'un montage audio global plaqué sur l'enregistrement préalable ne peut être retenue relevant qu'elle n'a été formulée que trois jours avant l'audience de la cour d'appel, et que le prévenu, qui n'a pas demandé une contre-expertise dans les délais au cours de l'information judiciaire, n'a pas contesté, lors de ses premières auditions, la teneur des propos échangés dans le film entre lui et M. A... ayant notamment admis la réalité de leur dialogue au sujet de l'attribution d'un logement à une personne déterminée ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine et dont il résulte que la cour d'appel, après en avoir examiné l'opportunité et l'utilité alléguées, n'a pas ordonné le supplément d'information sollicité dont elle a écarté la nécessité par des motifs pertinents et suffisants, la cour d'appel, qui n'a méconnu, ni les droits de la défense, ni les textes visés au moyen, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § , 1 et 3 d) de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-11 et 432-17 du code pénal, 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué confirmatif a condamné M. X... à :

- aux motifs que l'infraction reprochée est suffisamment caractérisée ; qu'il ressort en effet de la procédure :
- que M. A..., malgré les risques judiciaires encourus, a été constant dans ses déclarations mettant en cause M. X... ; qu'il n'a pas fait appel de la décision du tribunal le condamnant lui-même pour corruption active ;
- que l'expert judiciaire a conclu que les deux vidéos «X...-corruption1 » et « X...-corruption2 » étaient issues des mêmes enregistrements d'origine et qu'aucune manipulation, tant de l'image que du son, n'avait altéré leur intégrité ; que la qualité sonore était conforme à celle que l'on pouvait attendre de la caméra espion utilisée ; que les vidéos présentaient un enregistrement parfaitement continu, un seul « plan séquence » sans rupture, révélant une captation unique ; que les dispersions temporelles éventuelles étaient compatibles avec les modifications induites par les mises en ligne sur les sites d'hébergement ; que le texte et l'image étaient parfaitement synchronisés ; qu'aucun évènement acoustique ne révélait une tentative de montage ;
- que M. X... n'a pas demandé de contre-expertise, dans le délai légal d'un mois qui lui était imparti ; qu'il a fait valoir qu'il ne l'avait pas fait car il pensait, n'ayant pas été mis en examen à la suite du dépôt du rapport de M. C..., que le dossier serait rapidement clôturé par un non-lieu ; qu'il ressort cependant de la procédure que le magistrat instructeur l'a entendu dans un premier temps comme témoin assisté car il n'avait pas été auditionné auparavant (01357) ; qu'il était cependant manifeste que, compte tenu des conclusions du rapport, une mise en examen interviendrait rapidement ;
- que le prévenu n'a pas justifié du prêt de 1 500 euros qu'il aurait accordé à M. A... ; qu'il n'a pas produit notamment de reconnaissance de dette ;
- que M. E..., qui avait indiqué dans une attestation que M. X..., qui détenait une liasse de billets sur son bureau, lui avait fait part de fonds qu'il prêtait à M. A..., n'a curieusement pas été cité à l'audience du tribunal ; qu'il n'a pas non plus comparu à l'audience de la cour ;
-que l'hypothèse d'un montage audio global, plaqué sur l'enregistrement vidéo préalable, évoquée par le technicien entendu à l'audience de la cour, si elle est théoriquement possible, ne peut être retenue ; qu'elle n'a pas été présentée d'emblée par M. X... mais seulement trois jours avant l'audience de la cour ; que le prévenu, dans ses premières déclarations, n'a pas contesté une grande partie des propos échangés ; qu'il a notamment admis le dialogue portant sur le logement du nommé [...] (01204) ; qu'il n'a pas expliqué pour quelle raison, dans l'hypothèse du remboursement d'un prêt, il s'était dissimulé sous son bureau pour compter les billets qui lui étaient remis ; qu'une des deux mini vidéos produites à l'audience de la cour rapportent des dialogues intervenus à distance sur la place de la mairie, sous la pâle lumière de réverbères, rendant impossible l'appréciation d'une concordance entre les propos échangés et l'expression des visages ;
- que l'hypothèse d'un complot, qui est également possible, ne fait pas disparaître la matérialité d'un pacte de corruption ;
- que M. I... F... a obtenu de la société Efidis un logement le 16 juin 2010, soit un mois seulement après en avoir fait la demande, le 18 mai 2010 ; que seul son dossier a été présenté à la commission alors qu'il était d'usage d'en présenter trois ; que l'urgence de sa situation n'a pas été explicitée ; qu'il y a lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement déféré sur la culpabilité ;

"1°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs ; que, dans les conclusions déposées au nom de M. X..., il était soutenu que les enregistrements réalisés par son adjoint étaient ambiguës, ne permettant pas d'établir qu'il avait accepté une somme d'argent, en deux temps, en vue de l'attribution d'un logement social ; que la cour d'appel n'a pas constaté l'existence d'une remise d'argent au prévenu en vue de la réalisation d'un acte de sa fonction, ne se prononçant aucunement sur le contenu même des enregistrements qu'elle avait pourtant décidé de visionner et qui étaient censés en apporter la preuve, selon l'ordonnance de renvoi ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale ;

"2°) alors que l'irrégularité d'un acte ne suffit pas à caractériser le pacte de corruption en vue de sa réalisation ; qu'en relevant que le prévenu était intervenu dans l'attribution irrégulière d'un logement à M. F..., la cour d'appel n'a pas caractérisé le pacte de corruption, soit l'accord portant sur la remise de fonds en échange de l'exercice de ses fonctions dans la sélection des attributaires de logement sociaux ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale ;

"3°) alors que dans ses conclusions, le prévenu rappelait qu'il résultait du dossier que M. F... avait formulé une demande de logement le 9 octobre 2010, ce qui établissait que la demande directement formulée auprès de la société Effidis n'avait pas à être prise en compte et que la procédure n'était pas irrégulière du fait de la proposition d'un seul nom de candidat à l'attribution d'un logement par la société Hlm Effidis qui avait accepté la proposition de louer l'un de ses appartements à M. F... alors qu'elle avait refusé celle d'une précédente candidate proposée ; qu'en cet état, en ne répondant pas aux conclusions tendant à établir la régularité du processus par lequel la demande d'attribution d'un logement à M. F... avait été présentée et acceptée, ce qui était de nature à exclure toute corruption, la cour d'appel n'a pas justifié la décision ;

"4°) alors qu'en refusant de prendre en compte l'attestation de M. G..., faisant état du prêt, aux motifs qu'il n'avait pas été cité en première instance et qu'il ne s'était pas présenté devant la cour, quand il résulte des notes d'audience qu'il était présent à l'audience du 21 octobre 2016, le renvoi ayant été ordonné contradictoirement à son égard et qu'il avait écrit vraisemblablement pour expliquer son absence à l'audience de renvoi, elle ne pouvait sans méconnaitre le droit à un procès équitable, tel que garanti par l'article 6, paragraphe 1 et 3 d) de la Convention européenne des droits de l'homme, refusé de recevoir son témoignage écrit" ;

Attendu que, pour confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré M. X... coupable de corruption, l'arrêt énonce notamment, par motifs propres et adoptés, que M. A... a été constant dans ses déclarations mettant en cause ce dernier, que les vidéos, fiables au plan technique dans leur contenu, démontraient, tant par les dialogues que par l'image, la réalité des remises d'argent, opérées en deux fois, consenties à M. X... par M. A... en vue de l'attribution d'un logement social à une personne qu'il soutenait ; que le tribunal rappelle, en page 6 du jugement, la teneur d'une conversation entre les deux hommes, postérieure à la première remise d'argent, dont il ressort que la recherche d'un logement est momentanément restée infructueuse, M. X... assurant toutefois qu'il demeure mobilisé dans cette quête ;

Que les juges ajoutent que, d'une part, les scènes filmées sont confortées par les autres éléments recueillis tenant à la rapidité inhabituelle d'obtention de cet appartement à l'issue d'une procédure dans laquelle M. X... est personnellement intervenu, et que nulle reconnaissance de dettes, ni autre pièce, n'a été produite de nature à justifier du prêt d'argent que M. X... a prétendu avoir accordé à M. A... qui, dans le film, n'aurait fait que lui rembourser les sommes empruntées, l'attestation écrite d'un témoin n'étant pas apparu probante à cet égard ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent l'existence d'un pacte conclu entre le corrupteur et le corrompu investi d'un mandat électif public, qui a précédé l'acte de sa fonction, ou facilité par sa fonction, qu'il avait pour objet de rémunérer, tendant à l'attribution ultérieure, moyennant des fonds dont les juges ont constaté qu'ils ont été effectivement remis par le premier au second, d'un logement social, la cour d'appel, qui a répondu à tous les chefs péremptoires de conclusions et caractérisé, en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par la cour d'appel, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 130-1, 130-2, 132-19 et 132-24, 132-25 à 132-28, 132-48 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à une peine de deux ans d'emprisonnement, dont un an assorti du sursis ;

"aux motifs que, sur la sanction, que M. X... n'a pas été condamné au cours des cinq années précédant les faits pour un crime ou un délit de droit commun aux peines prévues par les articles 132-30, 132-31 et 132-33 du code pénal ; qu'il peut bénéficier d'une peine d'emprisonnement assortie du sursis simple dans les conditions prévues par les articles 132-29 à 132-34 de ce même code ; que la gravité des faits qui lui sont reprochés, cependant, ainsi que sa personnalité, telle qu'elle ressort de ces mêmes faits même si les investigations n'ont pas établi qu'il ait été un corrompu d'habitude justifient une peine d'emprisonnement au moins en partie ferme ; que toute autre sanction, insuffisamment dissuasive et exemplaire, serait inadaptée ; que les premiers juges, en prononçant à son encontre une peine de deux ans d'emprisonnement dont un an assorti du sursis, une amende de 20 000 euros et une privation des droits de vote et d'éligibilité pendant cinq ans, ont fait une exacte appréciation de la sanction susceptible de lui être infligée ; que ces peines ne sont pas incompatibles avec sa situation matérielle, familiale et sociale ; que l'amende de 20 000 euros n'est nullement excessive au regard de ses ressources et de ses charges, telles qu'elles ressortent du dossier et des débats à l'audience ; que la privation des droits civiques de vote et d'éligibilité apparaît naturelle au regard de la nature des faits ; que la cour ne dispose pas d'éléments suffisants pour aménager « ab initio » la partie ferme de la peine d'emprisonnement ;

"alors que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction ; que, si la peine prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l'aménager, doit, en outre, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ; que la cour d'appel qui ne pouvait considérer que la personnalité du prévenu justifiait le prononcé d'une peine en partie ferme, tout en relevant qu'il n'existait aucune preuve d'autres faits de corruption, sans s'expliquer sur les éléments de sa personnalité, distincts de la gravité de l'infraction, qui justifiaient le prononcé d'une peine d'emprisonnement en partie ferme, a méconnu l'article 132-19 du code pénal" ;

Vu l'article 132-19 du code pénal ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge qui prononce une peine d' emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, dans le cas où la peine n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, s'il décide de ne pas l'aménager, doit en outre motiver spécialement cette décision, soit en établissant que la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ne permettent pas un tel aménagement, soit en constatant une impossibilité matérielle ;

Attendu que, pour condamner le prévenu à une peine de deux ans d'emprisonnement dont un avec sursis, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans apprécier les éléments du dossier sur la personnalité du prévenu qui ne peut se confondre avec les faits reprochés et sa seule qualité d'élu, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles en date du 30 juin 2017 mais en ses seules dispositions relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.