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Décisions

Cass. com., 14 janvier 1974, n° 72-14.054

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Monguilan

Rapporteur :

M. Larere

Avocat général :

M. Robin

Avocat :

Me Talamon

Paris, 4e ch., du 22 juin 1972

22 juin 1972

SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QUE SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 22 JUIN 1972), LE SYNDICAT DES IMPORTATEURS DE VINS ET SPIRITUEUX ET L'INSTITUT DU VIN DE PORTO ONT FAIT ASSIGNER LA SOCIETE D'APPROVISIONNEMENT VINICOLES (SAPVIN) DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE EN PAIEMENT DE DOMMAGES ET INTERETS POUR CONCURRENCE DELOYALE ET PUBLICITE MENSONGERE, POUR AVOIR MIS EN VENTE UN PRODUIT " BARTISSOL " DANS UNE BOUTEILLE UTILISANT LES DENOMINATIONS " X... TAWNY " ET " VINTAGE " RESERVEES HABITUELLEMENT AU VIN DE PORTO;

ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET DEFERE D'AVOIR FAIT DROIT A CETTE DEMANDE ET DECLARE LE SYNDICAT DES IMPORTATEURS DE VINS ET SPIRITUEUX RECEVABLE EN SON ACTION ALORS, SELON LE POURVOI, QU'AINSI QUE LA SAPVIN L'AVAIT FAIT VALOIR DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL DEMEUREES SANS REPONSE SUFFISANTE, D'UNE PART, LE SYNDICAT N'ETAIT PAS REPRESENTATIF DES INTERETS DE LA PROFESSION EN RAISON DES REGLES DE SON RECRUTEMENT QUI N'ADMETTENT LES NOUVEAUX MEMBRES QU'EN VERTU D'UNE COOPTATION, D'AUTRE PART, L'ACTION SYNDICALE N'EST RECEVABLE QUE S'IL S'AGIT DE LA PROTECTION DE L'INTERET COLLECTIF CONCERNANT L'ENSEMBLE DE LA PROFESSION ET QU'EN L'ESPECE, IL NE POURRAIT S'AGIR, A LE SUPPOSER FONDE, QUE D'UN PREJUDICE PARTICULIER AUX IMPORTATEURS DES VINS DE PORTO, DONT IL N'EST MEME PAS ETABLI QU'ILS SOIENT MEMBRES DU SYNDICAT;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A, D'UNE PART, CONSIDERE QUE LE MODE DE RECRUTEMENT DES MEMBRES DU SYNDICAT N'ETAIT PAS, EN L'ESPECE, DE NATURE A INTERDIRE A CELUI-CI D'AGIR EN JUSTICE DANS L'INTERET DE LA PROFESSION ET A, D'AUTRE PART, DECLARE QUE L'OBJET DU SYNDICAT ETANT LA DEFENSE DES INTERETS DE LA PROFESSION D'IMPORTATEUR DE VIN, IL ETAIT BIEN DE L'INTERET DE L'ENSEMBLE DE LA PROFESSION DE VOIR CESSER DES PROCEDES QUI TENDAIENT A CREER UNE CONFUSION ENTRE UN VIN D'ORIGINE FRANCAISE ET UN VIN D'ORIGINE ETRANGERE;

QU'ELLE A AINSI REPONDU AUX CONCLUSIONS INVOQUEES ET QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE;

SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE L'INSTITUT DU VIN DE PORTO RECEVABLE EN SON ACTION, ALORS, SELON LE POURVOI, QU'AINSI QUE LA SOCIETE SAPVIN L'AVAIT FAIT VALOIR DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL DEMEUREES SANS REPONSE SUFFISANTE, IL RESULTAIT DES ARTICLES 17 ET 18 DE L'ACCORD FRANCO-PORTUGAIS QU'IL APPARTENAIT A L'INSTITUT DU VIN DE PORTO DE S'EN REFERER A L'AUTRE " HAUTE PARTIE CONTRACTANTE ", C'EST-A-DIRE AUX AUTORITES ET AUX ORGANISMES FRANCAIS QUI VEILLENT A LA PROTECTION DE L'APPELLATION " PORTO ", AFIN DE DEMANDER, LE CAS ECHEANT, DES POURSUITES CONTRE LA SOCIETE SAPVIN MAIS QU'IL N'ETAIT PAS RECEVABLE A ENGAGER PERSONNELLEMENT UNE PROCEDURE N'AYANT PAS POUR OBJET LA PROTECTION DE L'APPELLATION " PORTO ";

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, REPONDANT AUX CONCLUSIONS DE LA SAPVIN, RELEVE QUE L'ARTICLE 17 DE L'ACCORD FRANCO-PORTUGAIS DU 13 MARS 1934, INVOQUE PAR CETTE SOCIETE, NE RESERVE PAS L'APPLICATION DES MESURES DE PROTECTION DES APPELLATIONS D'ORIGINE AUX DILIGENCES DE L'ADMINISTRATION ET A LA REQUETE DU MINISTERE PUBLIC, CE TEXTE PREVOYANT EGALEMENT L'INITIATIVE D'UNE PARTIE INTERESSEE PERSONNE PRIVEE SYNDICAT OU ASSOCIATION RESSORTISSANT DE L'UNE DES HAUTES PARTIES CONTRACTANTES;

QUE L'ARRET AJOUTE QUE L'INSTITUT DU VIN DE PORTO, ORGANISME OFFICIEL PORTUGAIS, DOTE DE LA PERSONNALITE JURIDIQUE, A PARMI SES ATTRIBUTIONS CELLE DE DEFENDRE LE BON RENOM ET LA JUSTE VALEUR DU VIN DE PORTO SUR LE MARCHE DE LA CONSOMMATION EN LUTTANT CONTRE TOUTES LES FORMES DE FRAUDE OU D'IRREGULARITE ET QUE LEDIT ARTICLE 17 INTERDIT L'EMPLOI DE TOUTE COMBINAISON GRAPHIQUE OU DE TOUTE PRESENTATION SUSCEPTIBLE DE CREER UNE CONFUSION DANS L'ESPRIT DE L'ACHETEUR;

QUE LA COUR D'APPEL, QUI DECLARE QUE L'INSTITUT DU VIN DE PORTO EST UNE " PARTIE INTERESSEE ", A PU, EN CONSEQUENCE, L'ESTIMER RECEVABLE A AGIR;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI;

SUR LE TROISIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR CONDAMNE LA SAPVIN POUR CONCURRENCE DELOYALE ET PUBLICITE MENSONGERE, ALORS, SELON LE POURVOI, QU'AINSI QUE LA SOCIETE SAPVIN L'AVAIT JUSTEMENT FAIT VALOIR DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL LAISSEES SANS REPONSE SUFFISANTE, LES TERMES " X... TAWNY " ET " VINTAGE " CONSTITUENT DES DENOMINATIONS DESCRIPTIVES NON PROTEGEABLES;

QUE LA MARQUE BARTISSOL, PORTEE EN GRANDES LETTRES SUR L'ETIQUETTE DE LA BOUTEILLE, EST UNE MARQUE D'APERITIF NOTOIRE, LARGEMENT DIFFUSEE EN FRANCE;

QUE LA COMPARAISON DES ETIQUETTES PORTO ET BARTISSOL NE PRESENTE PAS UNE RESSEMBLANCE TELLE QUE LA CONFUSION ENTRE LES VINS DE PORTO, PRODUITS PORTUGAIS, ET LE VDN BARTISSOL, PRODUIT FRANCAIS, PUISSE ETRE PRODUITE DANS L'ESPRIT DE L'ACHETEUR MOYEN MEME NON AVERTI;

QUE L'HABILLAGE INCRIMINE, TANT SUR LA BOUTEILLE ORDINAIRE QUE SUR LA BOUTEILLE DE LUXE, NE FAIT APPARAITRE EN QUOI QUE CE SOIT LES MOTS " PORT " OU " PORTO ", DONT LA PROTECTION EST ASSUREE EN VERTU DE LA CONVENTION FRANCO-PORTUGAISE;

QU'AINSI, LA SOCIETE SAPVIN NE S'EST RENDUE COUPABLE D'AUCUNE FAUTE CARACTERISEE ET CONSTITUTIVE DE CONCURRENCE DELOYALE;

MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL RELEVE QUE LA SAPVIN PRESENTE AUSSI LE VIN " BARTISSOL " DANS UN COFFRET QUI REPRODUIT L'IMAGE DE LA BOUTEILLE AVEC COMME SEULES MENTIONS " X... TAWNY " ET " VINTAGE 1965 ";

QU'ELLE AJOUTE QU'IL EST ETABLI QUE, DANS L'USAGE COURANT, CES TERMES SONT UTILISES POUR CARACTERISER CERTAINS VINS DE PORTO ET SONT LIES A LA DEFINITION ET A LA PRESENTATION DES VINS DE PORTO ET QUE LA COMMISSION MIXTE DES ETIQUETTES S'EST FONDEE SUR CETTE CONSIDERATION POUR REFUSER D'HOMOLOGUER L'ETIQUETTE LITIGIEUSE PRESENTEE PAR LA SAPVIN EN DECLARANT NOTAMMENT QUE LA PRESENTATION GENERALE DE L'ETIQUETTE RENFORCAIT L'EQUIVOQUE;

QUE LA COUR D'APPEL PRECISE QU'EN DEPIT DE L'ABSENCE DES MOTS " PORTO " OU " PPORT " SUR L'ETIQUETTE, L'EMPLOI D'EXPRESSIONS LIEES A LA PRESENTATION HABITUELLE DU VIN DE PORTO N'EN CONSTITUE PAS MOINS UNE MANIERE INDIRECTE D'APPELER L'ATTENTION DE L'ACHETEUR VERS CE QU'IL POURRA ETRE TENTE, DE PRIME ABORD, DE PRENDRE POUR UNE BOUTEILLE DE PORTO ET FINALEMENT DE LE DETOURNER DE L'ACHAT DE VIN DE CETTE ORIGINE AU PROFIT DU BARTISSOL;

QUE L'ARRET, QUI A REPONDU AUX CONCLUSIONS INVOQUEES A PU, APRES AVOIR AINSI CONSTATE LA RECHERCHE DE CONFUSION, ADMETTRE QU'ELLE CONSTITUAIT UN ACTE DE CONCURRENCE DELOYALE;

D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE;

PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 22 JUIN 1972 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.