Cass. com., 13 mai 1965, n° 63-12.486
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guillot
Rapporteur :
M. Giocabbi
Avocat général :
M. Robin
Avocats :
Me Jolly, Me Tetreau
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SES TROIS BRANCHES :
ATTENDU QUE SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS 28 MARS 1963) LA VILLE DE PARIS AYANT DONNE CONGE A LA SOCIETE ALIMENTAIRE DE PARIS D'UN LOCAL A USAGE COMMERCIAL SIS A PARIS 31-33 RUE QUINCAMPOIX, EN LUI REFUSANT LE RENOUVELLEMENT, AU MOTIF QU'ELLE AVAIT CONSENTI DE SOUS-LOCATIONS INTERDITES PAR LE BAIL, L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LA SOCIETE PRENEUSE BIEN FONDEE EN SA DEMANDE DE PAYEMENT D'UNE INDEMNITE D'EVICTION ;
ATTENDU QUE LE POURVOI FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'EN AVOIR AINSI DECIDE AU PROFIT D'UN LOCATAIRE DONT ELLE CONSTATE 1° QUE LE FONDS ETAIT EN GERANCE LIBRE, PAR LE MOTIF QUE LA GERANCE LIBRE NE VIOLE PAS L'INTERDICTION DE SOUS-LOCATION, 2° QU'IL TRAVAILLAIT AVEC DES REPRESENTANTS VENDEURS, PAR LE MOTIF QUE CES REPRESENTANTS N'ETAIENT PAS DES SOUS-LOCATAIRES, ALORS, D'UNE PART, QUE LE TRAVAIL PAR L'ENTREMISE DE GERANTS LIBRES ET DE REPRESENTANTS VENDEURS S'ANALYSE JURIDIQUEMENT EN UNE SERIE DE SOUS-LOCATIONS TOTALES OU PARTIELLES, ALORS, D'AUTRES PART, QUE L'ARRET EST MUET SUR L'ARGUMENT TIRE PAR LE PROPRIETAIRE DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 INTERDISANT AU LIEU CONSIDERE L'EXERCICE DE L'ACTIVITE DE REPRESENTANT VENDEUR, ALORS ENFIN QUE L'ARRET EST MUET EGALEMENT SUR L'UNE DES SOUS-LOCATIONS INVOQUEES ETABLIE PAR L'INSCRIPTION DU SOUS-LOCATAIRE, EN CETTE QUALITE, SUR LE ROLE DES CONTRIBUTIONS ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QU'APRES AVOIR CONSTATE L'EXISTENCE DE DEUX CONTRATS DE GERANCE LIBRE, LA COUR D'APPEL A RETENU A BON DROIT QUE LA MISE EN LOCATION D'UN FONDS NE CONSTITUE PAS UNE LOCATION D'IMMEUBLES, ET QU'ELLE N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR SOUVERAIN EN DECIDANT QU'EN L'ESPECE, LA VILLE DE PARIS N'A PAS FAIT LA PREUVE QUE CES LOCATIONS GERANCES DISSIMULENT DES SOUS-LOCATIONS INTERDITES ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE LA VILLE DE PARIS N'A NULLEMENT SOUTENU DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL REGULIEREMENT PRODUITES QUE L'EXERCICE DE LA PROFESSION DE REPRESENTANT VENDEUR, OU DE GERANT DE FONDS DE COMMERCE FUT INTERDITE DANS LES LIEUX PAR LE DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 PORTANT REGLEMENTATION DES HALLES ;
QU'A CET EGARD LE MOYEN EST NOUVEAU, ET IRRECEVABLE ;
ATTENDU ENFIN QUE LA COUR D'APPEL S'EST LONGUEMENT EXPLIQUEE SUR LA SOUS-LOCATION INVOQUEE PAR LA VILLE DE PARIS ET A AINSI REPONDU AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE SUR CE POINT ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
MAIS SUR LE DEUXIEME MOYEN :
VU L'ARTICLE 11 DE LA LOI DU 20 MARS 1956 ET L'ARTICLE 4 DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953 ;
ATTENDU QUE D'APRES CES TEXTES, LE DROIT DE RENOUVELLEMENT NE PEUT ETRE INVOQUE PAR LE LOCATAIRE QUE S'IL JUSTIFIE D'UNE EXPLOITATION PERSONNELLE DE DEUX ANS EN CAS DE BAUX ECRITS SUCCESSIFS ET DE QUATRE ANS EN CAS DE BAUX VERBAUX ;
QUE D'AUTRE PART SI LE LOCATAIRE A DONNE SON FONDS EN GERANCE, IL PEUT ETRE DECHU DE SON DROIT AU RENOUVELLEMENT SI LE CONTRAT DE LOCATION GERANCE N'A PAS ETE CONCLU DANS LES CONDITIONS EXIGEES PAR LA LOI ;
ATTENDU QUE, DANS SES CONCLUSIONS D'APPEL, LA VILLE DE PARIS AVAIT SOUTENU, PAR DES MOTIFS QUI ETAIENT LE SOUTIEN NECESSAIRE DE LEUR DISPOSITIF ET QUI FORMULAIENT UN VERITABLE MOYEN : QUE LE BAILLEUR D'UN FONDS DE COMMERCE NE PEUT METTRE CELUI-CI EN GERANCE LIBRE QU'A LA DOUBLE CONDITION D'AVOIR EXERCE UNE ACTIVITE COMMERCIALE DE MEME SPECIALISATION DEPUIS SEPT ANS ET D'AVOIR EXPLOITE PERSONNELLEMENT LUI-MEME PENDANT DEUX ANS ;
ATTENDU QUE LA COUR A REJETE CE MOYEN AU MOTIF QU'IL IMPORTE PEU QUE LES GERANTS N'AIENT PAS SCRUPULEUSEMENT OBSERVE LE DECRET DU 9 AOUT 1953 ET LA LOI DU 20 MARS 1956 SUR LES GERANCES LIBRES, QU'UNE TELLE INOBSERVATION DU REGLEMENT PEUT AVOIR DES EFFETS VIS-A-VIS DES TIERS - MAIS DEMEURE SANS INCIDENCE SUR LES RAPPORTS DU LOCATAIRE ET DU PROPRIETAIRE DE L'IMMEUBLE - QUE POUR LE SURPLUS LA VIOLATION DES REGLES DE LA GERANCE LIBRE EST ENTIEREMENT DIFFERENTE DES MOTIFS INVOQUES PAR LE PROPRIETAIRE POUR REFUSER LE RENOUVELLEMENT ET NE PEUT DONC ETRE INVOQUEE ;
ATTENDU QU'EN STATUANT AINSI, ALORS, D'UNE PART, QUE LE BAILLEUR EST FONDE A INVOQUER A SON PROFIT LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 11 DE LA LOI DU 20 MARS 1956, ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'IL N'EST NULLEMENT INTERDIT AU PROPRIETAIRE DE SOUTENIR POUR SA DEFENSE, ET MEME EN COURS D'INSTANCE, QUE LA LOCATION LITIGIEUSE N'ENTRE PAS DANS LE CHAMP D'APPLICATION DE LA LEGISLATION DES BAUX COMMERCIAUX, L'ARRET ATTAQUE A VIOLE LES TEXTES CI-DESSUS VISES ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU ENTRE LES PARTIES PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS LE 28 MARS 1963 ;
REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'ORLEANS.