CA Paris, 3e ch. B, 18 décembre 2008, n° 07/09442
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Guez (ès qual.), Selafa MJA (ès qual.), BGCL (SNC)
Défendeur :
Chombart de Lauwe
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Monin-Hersant
Conseillers :
Mme Jourdier, M. Loos
Avoués :
SCP Narrat-Peytavi, Me Huyghe, SCP Petit-Lesénéchal
Avocats :
Me Fourgeot, Me Sauvage, Me Sérézo
Vu le jugement du tribunal de commerce de PARIS, rendu le 22 mai 2007, qui a :
- constat[é] la réalité des actes de cession signés le 7 juin 2000 par Monsieur Bruno GUEZ, la société LE BOURGUIGNON et les consorts CORBE au profit de Monsieur Éric CHOMBART de LAUWE,
- déclar[é] les demandes de nullité de l'assemblée Générale des associés de la SNC BGCL du 7 juin 2000 présentées par Monsieur Bruno GUEZ et la société LE BOURGUIGNON irrecevables,
- débout[é] Monsieur Bruno GUEZ et la société LE BOURGUIGNON de leurs demandes de nullité de l'Assemblée Générale des associés de là la SNC BGCL du 7 juin 2000,
- débout[é] la société LE BOURGUIGNON de sa demande de nullité de la cession de 20 parts de la SNC BGCL par l'indivision CORBE au bénéfice de Monsieur Éric CHOMBART de LAUWE en date du 7 juin 2000,
- dit cette cession opposable à la société BGCL,
- dit les actes de cession de parts de la SNC BGCL datés du 7 juin 2000 de Monsieur Bruno GUEZ et de la société LE BOURGUIGNON au profit de Monsieur CHOMBART de LAUWE non opposables à la société BGCL,
- dit que la société LE BOURGUIGNON est seule gérante de la société BGCL jusqu'au 20 janvier 2006,
- dit que Monsieur Éric CHOMBART de LAUWE est seul gérant de la SNC BGCL à compter du 20 janvier 2006,
- prononc[é] la nullité de l'Assemblée Générale des associés de la SNC BGCL du 6 février 2006,
- dit que le représentant légal procédera aux formalités de transcription dudit jugement auprès du Greffe du Tribunal de commerce de PARIS,'
Vu l'appel de ce jugement interjeté le 31 mai 2007 par M. Bruno GUEZ, la SARL LE BOURGUIGNON et la SNC BGCL,
Vu les dernières conclusions déposées le 16 octobre 2008 par M. GUEZ, appelant, la SELAFA MJA prise en la personne de Me PIERREL, ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL LE BOURGUIGNON, 'intervenante en reprise d'instance et comme telle appelante',
Vu les conclusions déposées le 14 octobre 2008 par la SELAFA MJA en la personne de Me PIERREL, ès qualités de mandataire ad hoc de la SNC BGCL, 'intervenante volontaire' et comme telle appelante,
Vu les dernières conclusions déposées le 7 avril 2008 par M. Éric CHOMBART de LAUWE, intimé et appelant incidemment,
SUR QUOI,
Considérant que M. GUEZ et la SARL LE BOURGUIGNON ont, le 27 mars 2006, assigné M CHOMBART de LAUWE et la SNC BGCL devant le tribunal de commerce de PARIS; que les demandeurs exposaient qu'ils avaient été associés avec M. CHOMBART de LAUWE et d'autres personnes physiques au sein de la SNC BGCL dès sa constitution le 23 juillet 1991 , que, par suite de diverses cessions et tel que cela résultait des statuts mis à jour et déposés au greffe le 25 novembre 2002, le capital social de la SNC était réparti entre la SARL LE BOURGUIGNON, 50 parts, M. GUEZ, 30 parts, et M. CHOMBART de LAUWE, 20 parts, que ce dernier avait, le 20 janvier 2006, déposé au greffe du tribunal de commerce, la 'copie certifiée conforme' de deux cessions de parts à son profit en date du 7 juin 2000 et enregistrées le 9 janvier 2006 à la recette des impôts, la première étant la cession des 50 parts de la SARL LE BOURGUIGNON et la seconde de 29 parts de M. GUEZ; que les demandeurs demandaient au tribunal de prononcer la nullité des 2 actes de cession du 7 juin 2000 en l'absence d'assemblée générale des associés les ayant préalablement autorisées et de dire le jugement opposable à la SNC BGCL; que cette dernière assignait à son tour M. CHOMBART de LAUWE le 9 mai 2006 et demandait au tribunal de 'constater la nullité de l'Assemblée Générale Extraordinaire du 7 juin 2000 ayant autorisé préalablement la cession entre l'indivision CORBE et Monsieur Éric CHOMBART DE LAUWE [et de] prononcer la nullité de l'acte de cession du 7 juin 2000 intervenu entre l'indivision CORBE et M. CHOMBART de LAUWE'; que ce dernier non seulement concluait au débouté des demandeurs mais demandait reconventionnellement au tribunal de prononcer la nullité d'une assemblée générale extraordinaire en date du 6 février 2006, assemblée au cours de laquelle il avait été décidé, d'une part, d'annuler les dispositions du procès-verbal d'assemblée générale du 26 septembre 2000, dispositions procédant à la démission de M. BETTON, gérant, et à la nomination de M. CHOMBART de LAUWE en qualité de nouveau gérant 'compte tenu du fait que M. André Betton n'exerçait pas, à cette date, les fonctions de gérant, qui était assurée (sic) à cette date par la SARL LE BOURGUIGNON', d'autre part, le maintien de la SARL LE BOUGUIGNON, elle-même représentée par M. GUEZ, en qualité de gérant, la précédente nomination 'à tort' de M. CHOMBART de LAUWE en remplacement de M. BETTON étant annulée; que M. CHOMBART de LAUWE demandait encore au tribunal de dire qu'il était le seul gérant de la SNC BGCL;
Considérant que le tribunal, par un premier jugement du 13 février 2007, a joint les causes, pris acte du désistement de M. GUEZ et de la SARL LE BOURGUIGNON dans l'instance initialement introduite à l'encontre de la SNC BGCL et a ordonné l'audition de M. BETTON en qualité de témoin; que l'audition de ce dernier, le 20 mars 2007, a peu apporté, M. BETTON, âgé de 80 ans et décédé depuis, n'ayant le souvenir ni d'avoir signé le procès-verbal de l'assemblée générale des associés de la société BGCL du 7 juin 2000 ni d'avoir signé , gérant de la SARL LE BOURGUIGNON, l'acte de cession par cette société au profit de M. CHOMBART de LAUWE de ses 50 parts de la société BGCL; que M. BETTON, qui estimait son départ de la gérance de la SARL LE BOURGUIGNON 'vers l'an 2000", n'avait 'pas de souvenir exact' du jour de la démission de la SARL LE BOURGUIGNON de sa gérance de la SNC et n'avait pas le souvenir de la nomination de M. CHOMBART de LAUWE en qualité de gérant de la SNC BGCL aux lieu et place de la SARL LE BOUGUIGNON à l'occasion d'une assemblée générale tenue le 29 septembre 2000 (en réalité le 26);
Considérant que depuis le jugement frappé d'appel, dont le dispositif a été précédemment reproduit, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de la SARL LE BOURGUIGNON par un jugement rendu le 29 janvier 2008, qui a désigné la SELAFA MJA en la personne de Me PIERREL en qualité de liquidateur; que M. GUEZ, qui soutient que la SARL LE BOURGUIGNON n'a jamais cessé d'être le gérant de la SNC BGCL, a, dans la mesure où les statuts de la SNC BGCL prévoyaient la démission d'office du gérant mis en liquidation judiciaire, obtenu la désignation le 27 mars 2008 de la SELAFA MJA en la personne de Me PIERREL en qualité de mandataire ad hoc de la SNC BGCL avec pour mission notamment de représenter la société dans la présente instance; qu'il n'est pas sans intérêt de relever que les parties au présent litige, dans une autre affaire, s'opposent ensemble au liquidateur d'une banque allemande ayant, le 16 novembre 1994, accordé un prêt de 20 millions de francs à la SNC BGCL, qu'une ordonnance de référé en date du 10 janvier 2007 a condamné M. GUEZ à payer à M. CHOMBART de LAUWE 838.470 € avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2005 et que la cession des actifs immobiliers de la SNC BGCL fait l'objet d'un contentieux en cours;
Considérant que les appelants soutiennent vainement la nullité, voire l'inexistence de l'assemblée générale du 7 juin 2000; que la prescription triennale de l'article 1844-14 du code civil est en effet acquise; qu'il ne peut être soutenu que la prescription n'a commencé à courir que le 20 janvier 2006, date du dépôt au greffe du procès-verbal, alors que M. GUEZ a signé ledit procès-verbal et que M. BETTON, gérant de la SARL LE BOURGUIGNON, elle-même gérante de la SNC, l'a signé aussi ; que le rapport d'expertise non contradictoire versé aux débats par les appelants qui prétendent que la signature de M. BETTON est un faux n'emporte pas la conviction de la Cour comme il n'avait pas emporté celle des premiers juges, Mme MARGANNE n'ayant comparé que des signatures apposées sur des documents dont les originaux ne lui avaient pas été remis; que l'exception de nullité, laquelle est perpétuelle, ne peut être accueillie puisque la nullité de l'assemblée générale du 7 juin 2000 n'est pas alléguée par les appelants par voie d'exception mais à titre principal; que c'est dès lors à bon droit que le tribunal, s'agissant de la demande en annulation de l'assemblée générale du 7 juin 2000, a retenu la fin de non-recevoir tirée de la prescription;
Considérant que l'assemblée générale extraordinaire du 7 juin 2000 a autorisé la cession au profit de M. CHOMBART de LAUWE, agréé en qualité de nouvel associé, des parts de la SARL LE BOURGUIGNON, de M. M. GUEZ et de l'indivision CORBE, le même procès-verbal précisant que le capital de la SNC BGCL, compte tenu des cessions intervenues le même jour, était réparti entre M. CHOMBART de LAUWE (99 parts) et M. GUEZ (1 part); que les trois actes de cession de parts sociales, signés le 7 juin 2000 au profit de M. CHOMBART de LAUWE, les 20 parts appartenant à l'indivision CORBE, les 50 parts appartenant à la SARL LE BOURGUIGNON et les 29 parts sur 30 appartenant à M. GUEZ, ne peuvent sérieusement être qualifiés de projets;
Considérant que les statuts de la SNC BGCL, mis à jour le 21 octobre 2002 et signés par M. GUEZ, devenu gérant de la SARL LE BOURGUIGNON, ont été déposés au greffe le 25 novembre 2002; qu'ils mentionnent que M. CHOMBART de LAUWE est titulaire de 20 parts, lesquelles sont celles qui lui avaient été cédées par l'indivision CORBE,; que la SNC BGCL ne peut dès lors se prévaloir du non-respect des formalités édictées par l'article L. 221-14, alinéa 1er pour soutenir que cette cession ne lui serait pas opposable;
Considérant en revanche que l'enregistrement le 9 janvier 2006 à la recette des impôts, leur publicité le 11 janvier 2006 et leur dépôt au greffe le 20 janvier 2006 des cessions à M. CHOMBART de LAUWE des 29 parts de M. GUEZ et des 50 parts de la SARL LE BOURGUIGNON sont insuffisantes pour rendre opposables ces cessions à la SNC BGCL faute de signification dans les formes de l'article 1690 du code civil ou de preuve du dépôt des originaux de l'acte de cession au siège social contre remise par le gérant d'une attestation de ce dépôt;
Considérant que le jugement sera encore confirmé lorsqu'il a dit qu'était seule opposable à la SNC BGCL la cession à M. CHOMBART de LAUWE des parts de l'indivision CORBE ;
Considérant, s'agissant de la gérance de la SNC BGCL, que le procès-verbal de l'assemblée générale du 26 septembre 2000, assemblée au cours de laquelle les deux associés, M. CHOMBART de LAUWE (99 parts) et M. GUEZ (1 part), ont pris acte de la démission de M. BETTON de ses fonctions de gérant et ont décidé de nommer comme nouveau gérant M. CHOMBART de LAUWE, n'a été déposé par ce dernier au greffe du tribunal de commerce que le 20 janvier 2006; que les premiers juges ont considéré que c'est donc à compter de cette dernière date, opposable à la société et aux tiers, que M. CHOMBART de LAUWE est devenu le gérant de la SNC BGCL; que M. CHOMBART de LAUWE demande la confirmation du jugement de ce chef; que les appelants soutiennent pour leur part que la SNC LE BOURGUIGNON n'a jamais cessé d'être le gérant de la SNC BGCL;
Considérant que les premiers juges n'ont pas manqué de relever, s'agissant de la gérance de SNC BGCL, que M. GUEZ, qui conteste aujourd'hui la désignation de M. CHOMBART de LAUWE en tant que gérant par l'assemblée générale du 26 septembre 2006, a signé une attestation valant reconnaissance de la gérance de M. CHOMBART de LAUWE à compter du 26 septembre 2000, et que ce dernier, pour sa part, n'avait pas hésité à écrire en 2004, dans le cadre d'une autre procédure qu'il n'avait jamais été le gérant de la SNC BGCL; qu'ils ont encore relevé que les procès-verbaux de deux assemblées générales des 31 mars et 29 mars 2005, contresignés par M. CHOMBART de LAUWE indiquent tous deux que le gérant de la SNC BGCL est la société LE BOURGUIGNON; qu'il en ressort que la vie sociale était occulte ou publique au gré des intérêts de ses associés qui se gardent bien de verser aux débats l'historique des dépôts au greffe du tribunal de commerce des actes concernant non seulement la SNC BGCL mais aussi la SARL LE BOURGUIGNON; que rien ne permet d'annuler l'assemblée générale du 26 septembre 2000; que le tribunal, qui a relevé que la nomination de M. CHOMBART de LAUWE n'avait fait l'objet d'une inscription au registre du commerce que le 20 janvier 2006, a justement estimé que c'est à cette dernière date que vis à vis de la société et des tiers il était le gérant de la SNC BGCL;
Considérant que le jugement sera enfin confirmé en ce qu'il a annulé l'assemblée générale extraordinaire du 6 février 2006 ; que les premiers juges ont justement relevé l'absence de convocation et de feuille de présence ; que le procès-verbal est l'oeuvre du seul M. GUEZ ;
Considérant que tant les appelants que les intimés seront déboutés de leurs demandes croisées de dommages et intérêts au demeurant non motivées ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure ;
Considérant que les dépens d'appel, comme ceux de première instance, seront partagés ;
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement frappé d'appel dans toutes ses dispositions ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ;
Dit que les dépens d'appel seront partagés pour moitié entre les appelants et l'intimé et admet les avoués de la cause au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile dans la limite de leurs droits respectifs.