Cass. com., 18 décembre 2007, n° 06-20.111
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
M. Salomon
Avocat général :
M. Jobard
Avocats :
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Piwnica et Molinié, SCP Vincent et Ohl
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 août 2007), que, par acte du 22 août 2001, les époux X... ont consenti à la société Larriet et à son gérant, M. Y..., une promesse synallagmatique de cession portant sur les cent parts composant le capital de la SCI La Chalosse (la SCI), sous la condition suspensive de l'obtention par les cessionnaires d'un prêt avant le 30 décembre 2001 ; que, le 26 décembre 2001, les époux X... ont consenti une donation portant sur soixante de ces parts à Mme Christelle X... et ont fait apport de trente-huit autres à la SCI La Croisette ; que, le 10 janvier 2002, Mme Christelle X... et, le 11 janvier 2002, les époux X... ainsi que la SCI La Croisette ont cédé leurs parts à la société Depra, devenue ainsi seule propriétaire de l'ensemble des parts de la SCI ; que la société Gerflo, venant aux droits de la société Larriet, et M. Y... ont fait assigner les époux X..., la SCI La Croisette, Mme Christelle X..., la société Depra et la SCI La Chalosse devant le tribunal afin de voir prononcer la cession au profit de la société Gerflo de l'ensemble des parts sociales de la SCI ;
Attendu que la société Gerflo et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir jugé que l'acte de cession du 26 décembre 2001 et les actes de cession ultérieurs au profit de la société Depra leur avaient été régulièrement notifiés et leur étaient opposables, alors, selon le moyen :
1°/ que la cession de parts sociales n'est opposable aux tiers que par le dépôt en annexe au registre du commerce et des sociétés de deux copies authentiques de l'acte de cession, s'il est notarié, ou de deux originaux, s'il est sous seing privé ; qu'à défaut de preuve de l'accomplissement de ces formalités par la production du récépissé original, les affirmations personnelles du greffier authentificateur font seules foi ; qu'en l'espèce, l'arrêt relève que, par lettre du 27 mars 2003, le greffier du tribunal de commerce a attesté que "l'acte de donation de parts sociales SCI de La Chalosse par les époux X... à leur fille Christèle, joint à votre courrier, n'a fait l'objet d'aucun dépôt au greffe du tribunal de commerce de Mont-de-Marsan à ce jour" ; que cette attestation du greffier, officier public et ministériel, ne pouvait être combattue par la production d'une fiche Infogreffe, simple document informatique non revêtu du sceau du greffe et de la signature du greffier ; qu'en estimant néanmoins que les mentions du récépissé initial dont l'arrêt constate qu'il ne faisait pas mention du dépôt de l'expédition de l'acte notarié de donation du 26 décembre 2001, complétée par une fiche Infogreffe, suffisaient à établir la réalité de la publication des cessions effectuées avant l'assemblée du 9 janvier 2002, la cour d'appel a violé les articles 1865, alinéa 2, du code civil, 52 du décret du 3 juillet 1978, ensemble les articles L. 821-1 et R. 821-2 du code de l'organisation judiciaire ;
2°/ que, dans leurs conclusions d'appel récapitulatives du 4 mai 2006, la société Gerflo et M. Y... faisaient valoir que lorsque Mme Christelle X... avait elle-même demandé au greffe du tribunal de commerce l'expédition de l'acte notarié du 26 décembre 2001, celui-ci ne lui avait pas été adressé par le greffe, ce qui établissait qu'il n'avait jamais fait l'objet d'un dépôt ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
3°/ que, selon l'article 52 du décret du 3 juillet 1978, dans ses dispositions applicables aux sociétés civiles, "la publicité de la cession de parts est accomplie par dépôt, en annexe au registre du commerce et des sociétés, de deux copies authentiques de l'acte de cession, s'il est notarié, ou de deux originaux, s'il est sous seing privé" ; qu'en considérant que la publication du procès-verbal d'assemblée générale faisant état de l'acte de cession suffisait à rendre celle-ci opposable aux tiers, la cour d'appel a violé l'article 52 du décret susvisé, ensemble les textes précédemment visés ;
4°/ que le défaut de dépôt en annexe au registre du commerce et des sociétés de deux copies authentiques de l'acte de cession, s'il est notarié, ou de deux originaux, s'il est sous seing privé, ne peut être substitué par le dépôt d'une autre pièce faisant simplement référence à l'acte dont la publicité est requise à peine d'inopposabilité, ou encore par la connaissance que pourrait en avoir le tiers ; qu'en se déterminant dès lors sur la base de la connaissance acquise par les tiers de la donation des parts sociales par la publication du procès-verbal d'assemblée générale du 9 janvier 2002 la constatant, la cour d'appel a violé les articles 1865, alinéa 2, du code civil, et 52 du décret du 3 juillet 1978 ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que si seul le duplicata du récépissé du greffe du tribunal de commerce faisait état du dépôt de l'expédition de l'acte notarié constatant, au 15 janvier 2002, la cession, le 26 décembre 2001, des parts sociales de la SCI, les mentions du récépissé initial, complétées par celles de la fiche Infogreffe indiquant le dépôt de l'acte notarié au 15 janvier 2002, suffisaient à établir la réalité de la publication de l'ensemble des cessions réalisées, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre la société Gerflo et M. Y... dans le détail de leur argumentation, en a souverainement déduit que ces dernières leur étaient opposables ;
Et attendu, en second lieu, qu'une cession de parts sociales est opposable aux tiers, même si l'acte de cession n'a pas été déposé au greffe du tribunal de commerce, dès lors qu'ont été publiés les statuts mis à jour constatant cette cession ; qu'ayant relevé que la cession des parts sociales par les époux X... à Mme Christelle X... avait été portée à la connaissance des tiers par la publication non contestée du procès-verbal d'assemblée générale du 9 janvier 2002, la cour d'appel a pu retenir que cette cession était régulièrement opposable à la société Gerflo et à M. Y... ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.