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Décisions

Cass. com., 5 janvier 2022, n° 19-22.030

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme MOUILLARD

Paris, du 2 juill. 2019

2 juillet 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juillet 2019), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 31 janvier 2018, pourvoi n° 16-13.262), M. [O] a été recruté en 2005 en qualité de responsable de projets par la société Icare développement, dont le dirigeant, avait déposé, le 2 septembre 2004, une demande de brevet français, publiée le 3 mars 2006 sous le numéro FR 2 847 727 et intitulée « dispositif portable de détection, d'alerte et de transmission d'informations relatives à une personne physique ». Il a été licencié, le 15 novembre 2006, pour motif économique, et a été embauché par la société Télécom Design, le 4 février 2008, en qualité d'ingénieur développement.

2. Parallèlement à cette embauche et selon autorisation du 16 avril 2008, les éléments incorporels de l'actif de la liquidation judiciaire de la société Icare développement, comprenant le brevet susvisé dont cette société était devenue propriétaire, ont été cédés de gré à gré à la société Info Networks Systems (la société INS), holding de la société Télécom Design, qui souhaitait investir dans le développement du dispositif de détection des chutes et d'alerte.

3. La société INS a, le 12 janvier 2009, déposé un brevet français intitulé « procédé de détection de chute », désignant M. [O] comme co-inventeur, qui a été publié le 16 juillet 2010 sous le numéro FR 09 50127.

4. Le brevet européen désignant la France, intitulé « procédé et dispositif de détection de chute », qui avait été déposé par la société INS le 11 janvier 2010 sous priorité du brevet français FR 09 50127 et avait été délivré et publié le 19 octobre 2011 sous le numéro EP 2 207 154, s'est substitué à ce brevet français le 19 juillet 2012.

5. Le 9 novembre 2012, la société INS a cédé ses droits sur les brevets français FR 09 50127 et européen EP 2 207 154 à la société Télécom Design.

6. Prétendant que le brevet français FR 09 50127 reprenait les revendications issues de travaux effectués avec ses propres moyens et contenues dans l'enveloppe Soleau qu'il avait déposée le 18 janvier 2008 à l'Institut national de la propriété industrielle, M. [O] a assigné les société INS et Télécom Design pour obtenir, notamment, le transfert à son profit de la propriété de ce brevet et du brevet européen EP 2 207 154 s'y étant substitué.

Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen

8. M. [O] fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en revendication de brevets, de provision et d'expertise, alors « que l'acquisition des éléments incorporels de l'actif d'une société, comprenant un brevet et le résultat de travaux effectués dans la continuité de ce brevet par un salarié investi d'une mission inventive qu'elle avait employé, ne confère pas au cessionnaire la qualité d'ayant droit de l'employeur, en sorte que ce cessionnaire, qui a déposé un brevet à partir de ces éléments, n'est pas fondé à opposer au salarié que l'invention, dont celui-ci est l'auteur et revendique la propriété, est une invention de mission lui appartenant ; qu'ajoutant que la société Télécom Design justifiait d'une chaîne régulière de droits lui conférant les propriétés de la demande de brevet FR 09 50127 et du brevet EP 2 207 154, peu important qu'elle ait ou non la qualité d'ayant droit de l'employeur de M. [O], de sorte qu'elle était fondée à opposer ces droits de propriété à ce dernier pour faire échec à son action en revendication portant sur ces deux brevets, tout en relevant que M. [O] avait réalisé ses travaux à l'occasion de l'exécution de son contrat de travail avec la société Icare développement qui avait déposé un premier brevet, que la société INS avait repris les éléments incorporels de l'actif de la liquidation judiciaire de cette société comprenant ce brevet et en avait déposé un autre dans la continuité du premier, puis avait cédé le second à la société Télécom Design, lequel constituait les brevets FR 09 50127 et EP 2 207 154, la cour d'appel a violé les articles L. 611-6 du code de la propriété intellectuelle et L. 611-7, 1, du même code. »

Réponse de la Cour

9. Il résulte des articles L. 611-6 du code de la propriété intellectuelle et L. 611-7, 1, du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 94-102 du 5 février 1994, que si l'inventeur est un salarié et que l'invention est faite dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, le droit au brevet sur cette invention appartient au seul employeur. Aucune disposition n'empêche celui-ci de céder ce droit à un tiers. Par conséquent, ayant cause du cédant, le cessionnaire qui dépose le brevet peut opposer au salarié inventeur, qui demande le transfert du brevet à son profit, la nature d'invention de mission de l'invention protégée par le brevet, sur laquelle le salarié n'a jamais détenu de droit à un titre de propriété industrielle.

10. Ayant retenu que l'invention développée par M. [O] avait la nature d'invention de mission, que le droit au brevet sur cette invention appartenait donc à la société Icare développement, que l'ensemble des actifs incorporels de cette société avaient été cédés à la société INS, laquelle avait déposé les brevets français FR 09 50127 et européen EP 2 207 154, ensuite cédés à la société Télécom Design, c'est à juste titre que la cour d'appel en a déduit que la société Télécom Design, ayant cause du premier titulaire du droit au brevet sur l'invention, était fondée à opposer son droit de propriété sur ces brevets à M. [O] pour faire échec à son action en revendication desdits brevets.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-deux.